Examen critique de la soi-disant réfutation/11

XI


Page 63 : Quand vous reprochez à M. D, de prétendre que l’ultramontanisme enseigne que le Pape est non-seulement infaillible, mais encore impeccable : (ce que personne au monde moins que vous, on vous l’a déjà dit, n’a grâce pour lui reprocher ;) et cela dites-vous, parce qu’on le nomme saint, vous savez répondre avec le sens commun (p. 64), que cette qualification de saint, n’est pas donnée au Pape en considération de sa sainteté personnelle, mais bien à cause de celle que comporte naturellement sa charge. Et vous savez encor très-bien expliquer par le même principe, l’extension que l’on fait parfois, peut-être à Rome ou ailleurs, de la même qualification, à des objets purement matériels ou irraisonnables, lorsqu’ils sont affectés à l’usage exclusif du Saint-Père.

Vous aviez sous la main de bien beaux exemples à présenter, et auxquels évidemment, vous n’avez pas même songé, pour expliquer encor mieux un pareil usage : car enfin, ce n’est pas par un autre principe que l’on s’est accoutumé de tout temps, à appeler de ce nom dans l’Église (toute proportion gardée), des objets purement matériels aussi, mais rendus à jamais vénérables aux yeux des fidèles, par le divin contact de la personne du Fils de Dieu, pendant les jours de sa vie mortelle. La Sainte Crèche, la Sainte Étable, la Sainte Tunique, le Saint Suaire ; voire même ces autres objets si vils en eux-mêmes, et qui furent employés si criminellement sur la personne adorable du Sauveur pendant sa passion, comme instruments de supplice ; la Sainte Lance, les Saints Clous, la Sainte Éponge ; et cette Sainte Couronne enfin, jadis si fort honorée par le grand S. Louis.

Comment se fait-il que vous n’ayez pas songé à tout cela ? Car au lieu de ces pieux rapprochements, oubliant tout à coup, non-seulement le sage principe de solution, par lequel vous aviez commencé, que cette qualification de saint, ne regarde pas proprement la sainteté de la personne, mais sa dignité, et oubliant même ici la dignité d’homme, laquelle après tout, nous est commune à tous, vous prenez plaisir à répéter après votre adversaire, certaines expressions que vous soulignez à dessein, à cause qu’elles sont en effet insolites, comme le Saint Carrosse ou les Saints Chevaux, si toutefois l’usage va jusque là, et vous osez bien demander cyniquement en face du public, en quoi de telles expressions pourraient répugner plus que celle-ci : l’honorable Dessaulles !… Comme si, de par vous, il pouvait être permis de mettre sur le même pied, l’homme et l’animal… Et de quel droit, Monsieur, L. cette insulte à tout le monde ?… Et depuis quand est-il permis de pousser l’insolence jusque là ?.........................

Même Page 64, ligne 30. C’est encore une fois la bêtise qui excusera devant Dieu la doctrine de M. D. — Quelle incroyable prédilection pour ce vilain mot !…

Page 65. Toujours l’exagération : Un auteur dont votre imprimeur a rendu le nom méconnaissable, dit que : Le Pape a droit aux mêmes honneurs que les Saints et les Anges. Sans doute, il doit dire cela avec quelques correctifs. Vous, sans correctif aucun, vous n’y avez trouvé qu’une chose à redire, savoir que ce n’est pas assez : parceque, dites-vous (sans doute comme une nouveauté), par ce que le Pape tient sur la terre, la place du Fils de Dieu, et que le Fils de Dieu est infiniment au-dessus des saints et des anges. Qu’est-ce qui ne sait pas ces vérités ? M. D., que vous poursuivez le sait sans doute, mais il sait aussi que l’état des hommes encore voyageurs sur la terre, n’est pas l’état des saints et des Anges, qui sont dans le terme… et certainement c’est à cause de cette différence, qu’il trouve la proposition un peu forte. — Mais M. L. n’a garde de vouloir paraître supposer que la remarque de M. D., puisse avoir un sens raisonnable et soutenable.

Ibid. Toujours en vue, dites-vous, de discréditer les papes, de les livrer au ridicule. M. D., écrit ce qui suit : une pure sottise… ; mais que voulez vous dire ? que ce ridicule calcul n’a jamais été fait par personne et que c’est M. D., qui l’a inventé ?… dites-le clairement, et bornez-vous là ; il sera amplement réfuté. Ou bien cette niaise opération aurait-elle réellement occupé quelque cerveau détraqué, il y en a dans tout pays et dans tous les temps, au service de toutes les causes ; si c’est le cas, convenez-en et tout sera dit. Mais vous ne voulez pas être battu même à ce jeu de sottise, et vous vous donnez le plaisir de dire quelque chose de beaucoup plus plat encore, surtout de très-malhonnête, et ce qui est le comble… vous le trouvez drôle !

Page 68, ligne 3. Il ne faut pas, dites-vous à M. D., mettre au nombre des obstacles à la grâce, votre volonté bien arrêtée de trouver toujours en défaut les prêtres et l’Église. Et vous ne craignez pas vous, M. L. que votre écrit qui fait profession (p. 6.) du plus souverain mépris pour votre adversaire, et où vous ne démentez pas un moment cette si chrétienne protestation, n’oppose chez lui de grands obstacles à la grâce ? Celui qui voit son frère tombé dans un abîme et qui, au lieu de lui porter une planche comme on ferait, au dire de l’Évangile, pour un bœuf ou pour un âne, lui jetterait tout ce qu’il pourrait sur la tête, encourrait une terrible responsabilité.

Page 69. Souveraineté du Peuple. — Éducation. — Immunités ecclésiastiques.

Vous n’y allez pas de main morte, M. L. Trois légères questions comme celles-là, traitées en deux pages ; certes !… Mais aussi quel coup d’œil !… et que vous jugez de haut !… vous avez raison de dire élégamment, page 70, ligne 6, que : quand on n’est pas toqué, on voit cela par intuition. Eh bien, quels sont donc ces principes lumineux qui vont trancher ces questions ?…

Vous commencez : La souveraineté du peuple est un non sens, une absurdité. (bon ! beau début, aurait dit le Sosie de Molière !…) En effet, si le peuple est souverain il commande. (Vérité digne de La Palice) !… et vous poursuivez en vous rengorgeant à la façon de M. Prud’hommme : Il n’est pas possible qu’il en sois autrement ; (bon !…) Mais ajoutez-vous brièvement pour mieux faire ressortir la puissante portée de votre argumentation, À qui peut-il commander en vertu de sa souveraineté ? Réponse : À lui-mêmec’est évident !… Le voilà donc souverain et sujet de lui-même, ce qui répugne au plus haut degré. — C’est fini ; tout est dit. — Quelques subtils raisonneurs auraient pu dire, il est vrai, qu’ayant radicalement l’autorité dans son sein, lui-même a désigné quelques mandataires, qu’il croit les plus capables d’exercer cette autorité sur le reste de la troupe ; mais c’est là une distinction trop subtile, et vous aimez mieux vous hâter de conclure, p. 70, ligne 17 : Il faut être ignorant comme on l’est à notre époque, pour avoir inventé cette bêtise de la souveraineté du peuple. — C’est bien en effet ! tout est dit… Il n’y a rien de plus clair… Encore la bêtise toutefois : mais quel rôle elle joue dans toute votre brochure, cette bêtise, M. L. ! C’est votre monture à vous !…

Vous avez absolument voulu mettre, dès le début, votre adversaire à cheval ; mais apparemment pour vous battre à armes égales, vous avez voulu y monter aussi, et en vérité (on vous l’a déjà dit), vous n’en descendez pas.

Ibid. lig. 23. (Le paragraphe suivant) : Quelles que soient les paroles flatteuses, etc… De la même force ! et concluant : Donc mensonge et ce de la pire espèce, que ce prétendu principe de la souveraineté du peuple… Magister dixit !…

Page 71. Quant aux établissements d’éducation que le clergé ne contrôle pas, il est dans l’ordre qu’ils disparaissent. Ne vous gênez pas M. L., parti comme vous êtes, vous irez loin… Il est surtout très-prudent et très-politique dans un pays mixte, où nous sommes entourés de protestants, il est très politique de dire qu’il faut que tous ces établissements d’éducation disparaissent ! Et quel est le fruit qu’on attend de cette parole ? Est-ce praticable ? Si ça ne l’est pas, est il prudent de le dire ?

Ibid. Les immunités ecclésiastiques. — On croirait de prime abord, que l’auteur va entrer dans la question. Mais il n’a inséré ce court article, que pour avoir à y glisser encore quelques réflexions pénibles pour son adversaire.

Enfin, je vous laisse votre chapitre sur les Élections, objet sur lequel vous raisonnez à votre guise ; quoique vous sachiez bien, que tous les évêques ne sont pas absolument d’accord sur la manière d’en parler au peuple : j’arrive à la dernière partie de votre pamphlet.