Discours du président de la Grèce, à la clôture du quatrième congrès national


DISCOURS
DU PRÉSIDENT DE LA GRÈCE,
À LA CLÔTURE DU QUATRIÈME CONGRÈS NATIONAL.




Vous avez atteint, à l’aide de Dieu et sous les auspices de la concorde, le grand but que la nation avait signalé à votre patriotisme.

Vous avez honoré de votre suffrage l’opinion que nous avions énoncée sur l’état actuel de la nation ; et en sanctionnant l’administration d’un gouvernement provisoire, vous avez unanimement adopté les principes d’après lesquels il vous appartenait de faire avancer notre patrie vers l’avenir que la Providence lui réserve.

Les pouvoirs dont vous avez revêtu le gouvernement le mettent à même de remplir vos intentions.

C’est à l’équité des puissances alliées qu’il aura inviolablement recours, lorsqu’il sera appelé à prendre part aux transactions qui auront pour objet l’exécution du traité de Londres, et conséquemment le sort de la Grèce.

C’est en consultant l’expérience plus que toute autre autorité, et en ne s’écartant point des bases que vous avez posées, que le gouvernement, avec la coopération du sénat[1], va procéder à la révision des actes constitutionnels existans, et à la confection des lois fondamentales.

Jusqu’au moment où il vous appellera de rechef à juger ses actes et à délibérer sur le projet de loi qu’il vous soumettra, le gouvernement, pénétré de ses devoirs, emploiera ses soins les plus attentifs et les plus soutenus pour préparer la nation à jouir d’une prospérité durable, sous la sauvegarde d’un gouvernement constitutionnel.

Pour obtenir ce résultat, objet de toute sa sollicitude, il s’efforcera de réunir tous les intérêts les plus légitimes et les plus chers de chaque province et de chaque citoyen en un seul et même intérêt : celui de la restauration nationale et politique de la Grèce.

Quelque difficile que puisse paraître cette tâche, et quelque faibles que soient nos moyens personnels, nous ne désespérons pas de la remplir ; car nous comptons sur la coopération du sénat, ainsi que sur celle de tous les citoyens, qui, comme vous, sont profondément pénétrés du sentiment de leurs devoirs.

Si, comme nous aimons à l’espérer, ce sentiment efface dans leur souvenir les germes de discorde que les événemens malheureux pourraient y avoir laissés ; si, conjointement avec les fonctionnaires publics, tous les citoyens travaillent à l’affermissement de l’ordre si indispensable pour la prospérité générale, espérons avec confiance que, dans sa miséricorde, le Seigneur exaucera les vœux de la Grèce.

Ne cessons pas de croire que les puissances alliées feront ce qui dépendra d’elles pour les accomplir, au moment où elles redoublent leurs généreux efforts pour achever le grand œuvre de la pacification du Levant.

Vous rentrez, Messieurs, dans vos foyers, vous devez donc éclairer vos concitoyens sur leur situation actuelle ; vous devez leur expliquer les mesures que vous avez autorisé le gouvernement à prendre pour l’améliorer graduellement, et vous devez enfin les maintenir dans l’espoir qu’ils touchent au terme de leurs longues souffrances.

Nous leur faisons part, dans la proclamation dont le secrétaire d’état va nous donner lecture, des délibérations par lesquelles vous avez fait droit, autant que les circonstances l’ont permis, aux justes désirs dont ils avaient confié l’accomplissement à votre sollicitude.

Je ne vous entretiendrai pas, Messieurs, de ma reconnaissance ; ce n’est point par des paroles que je dois vous l’exprimer : je désire et je dois la prouver par des faits. Mon zèle et mon dévouement, qui continueront d’être sans bornes, me garantissent que j’y parviendrai, en s’efforçant d’accomplir la tâche sacrée que m’impose la confiance dont la nation m’honore par votre organe.

Argos, le 6/18 août 1829.


PROCLAMATION AUX HELLÈNES.


Vos plénipotentiaires rentrent dans leurs foyers. Ils vous apportent, dans la collection des actes du congrès, les témoignages les plus irrécusables du zèle éclairé avec lequel ils ont rempli vos intentions, et justifié complètement la confiance dont vous les avez honorés. Au nombre de ces actes, il en est qui concernent plus particulièrement les intérêts des provinces et ceux de la classe respectable des cultivateurs.

Le gouvernement est chargé de prendre, de concert avec le sénat, les mesures nécessaires pour qu’il soit assigné à chaque province une étendue de terre proportionnée au nombre de cultivateurs qu’elle renferme.

Le gouvernement est aussi chargé de préparer la réforme du réglement des impôts actuellement en vigueur, et de mettre à exécution, dès le commencement de l’année prochaine, les nouvelles mesures qui seront arrêtées.

La triple dîme sera abolie, sans que, pour cela, l’état doive être privé entièrement des ressources qu’il en tire.

Il sera encore fait dans les finances, cette branche si importante de l’administration, d’autres réformes dont l’objet sera d’établir le mode de perception qui paraîtra devoir être le moins onéreux pour les citoyens et le plus productif pour l’état.

Cependant jusqu’à l’année prochaine, nul changement ne pouvant être fait, les réglemens actuels doivent être strictement exécutés, et les employés publics auront à y veiller avec une scrupuleuse attention.

Le congrès a aussi autorisé le gouvernement à procurer à la nation, au moyen d’un emprunt, les ressources pécuniaires dont elle a le plus pressant besoin.

C’est au moyen de ces ressources et de celles qui seront le résultat d’une administration prévoyante et juste, que les provinces obtiendront les secours qui leur sont indispensables pour relever les villes que l’ennemi a laissées en ruines, pour améliorer la culture des terres, ainsi que pour donner une vie nouvelle à l’industrie et au commerce. Enfin l’encouragement des écoles d’enseignement mutuel, l’établissement d’écoles normales, et plus tard celui d’écoles supérieures dans les différentes provinces de l’état, ont motivé un décret que le gouvernement s’empressera de mettre à exécution.

Vous serez donc convaincus que vos besoins, comme votre bonheur, ont été l’objet des délibérations de vos représentans et de la sollicitude du gouvernement.

Pour que leurs soins obtiennent l’efficacité qu’ils promettent, vous vous réunirez, si l’occasion s’en présente, pour repousser les insinuations perfides que des hommes obstinés à méconnaître les véritables intérêts de la patrie s’efforceront de répandre au milieu de vous.

Forts de votre union, vous pourrez, chacun dans la sphère de ses devoirs, contribuer puissamment au grand œuvre de notre restauration nationale et politique.

Par là vous continuerez aussi de vous montrer dignes des bienfaits que la Providence daigne vous accorder, ainsi que du noble et généreux intérêt qu’ont voué à votre cause les puissances alliées et les chrétiens des deux émisphères.

Argos, le 6/18 août 1829.

Le président, J.-A. Capo-D’Istrias ;
Le secrétaire d’état, N. Spiliadis

  1. Espèce de conseil en permanence, auprès du président, et qui remplace le panhellénium (V. la Revue des Deux Mondes, 1re livraison, page 13)