Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure/Philosophie épicurienne - premier cahier

Traduction par Jacques Ponnier.
Texte établi par Jacques Ponnier, Ducros (p. 109-118).


Philosophie épicurienne. Premier cahier.
Berlin 1839. Hiver.

[Extraits de Diog. X 2. 4. 6. 12. 29. 31. 34. 123-146. 148-149.]</nowiki>[1]


[Épicure : sur l’État]


Les passages suivants constituent l’opinion d’Épicure concernant la nature spirituelle, l’État. Le contrat, συνθήκη en est selon lui le fondement ; en conséquence, seul le συμφέρον, le principe d’utilité, en est le but[2].


[Extraits de Diog. X 150-154]


[Épicure comme le philosophe de la représentation]


Fait important, Aristote fait la même remarque dans sa Métaphysique au sujet de la position du langage à l’égard de l’activité philosophique. Étant donné que tous les philosophes antiques, y compris les sceptiques, partent de présuppositions de la conscience, une base solide est nécessaire. Ce sont alors les représentations telles qu’on les trouve dans la conscience commune. Épicure, en tant que le philosophe de la représentation, se montre sur ce point le plus précis et définit de plus près ces conditions du fondement. Il est aussi le plus rigoureux dans ses déductions, et porte, tout autant que de l’autre côté les sceptiques, la philosophie antique à son achèvement[3].


[Extraits de Diog. X 38-56 et 60 ; extraits intercalés d’Arist. Phys. I 4 et III 5, et aussi d’Arist. de gen. et corr. I 3]


[Le transfert de l’idéalité dans les atomes et la dialectique immanente de la philosophie épicurienne]


Voir la fin de la page 44 et le début de la page 45, où en fait le principe atomistique est violé et une nécessité interne introduite dans les atomes eux-mêmes[4]. Comme ils ont une certaine grandeur, il doit y avoir quelque chose de plus petit qu’eux. Ce sont les parties, dont ils sont faits par composition. Mais celles-ci sont nécessairement composées, sous la forme d’une κοινότης ἐνυπάρχουσα[5] [Diog. X 59] L’idéalité est donc transférée dans les atomes eux-mêmes[6]. Le plus petit d’entre eux n’est pas le plus petit de la représentation, mais il a une analogie avec lui, et on ne pense rien de déterminé dans tout cela. La nécessité, l’idéalité qui leur échoit est elle-même purement fictive, fortuite ; extérieure à eux-mêmes. C’est seulement ainsi qu’est exprimé le principe de l’atomistique épicurienne : l’idéel et nécessaire n’est que dans une forme représentée, extérieure à elle-même, dans la forme de l’atome. Voilà donc jusqu’où va la logique d’Epicure. καὶ μὴν καὶ ἰσοταχεῖς ἀναγκαῖον τὰς ἀτόμους εἶναι, ὅταν διὰ τοῦ κενοῦ εἰσφέρωνται μηθενὸς ἀντικόπτοντος[7]. [Diog. X 61]

Nous avons vu que le nécessaire, la connexion, la distinction en eux-mêmes sont transférés dans l’atome ou plutôt l’expression du fait que l’idéalité n’existe ici que dans cette forme extérieure à elle-même ; la même chose arrive en ce qui concerne le mouvement, qui tend nécessairement vers le repos, sitôt que l’on compare le mouvement de l’atome avec le mouvement des corps κατὰ τὰ συγκρίσεις[8] (Diog. X 62), c’est-à-dire du concret. Comparé à ce mouvement, celui des atomes est par principe absolu, c’est-à-dire que toutes les conditions empiriques sont en lui supprimées, qu’il est idéel. Il est essentiel, pour développer la philosophie d’Épicure et la dialectique qui lui est immanente, de retenir ce point : du fait que le principe est un principe représenté, se comportant à l’égard du monde concret dans la forme de l’être, la dialectique, l’essence interne de ces déterminations ontologiques prises comme une forme de l’absolu en elle-même vaine, ne peut prendre son essor que dans la mesure où ces déterminations, comme immédiates, entrent nécessairement en collision avec le monde concret et révèlent, dans leur comportement spécifique envers lui, qu’elles ne sont que la forme fictive, extérieure à elle-même de son idéalité, ou plutôt qu’elles n’existent pas en tant que présupposés, mais seulement en tant qu’idéalité du concret. Les déterminations de ce monde sont donc elles-mêmes en soi fausses, elles se suppriment. Seul le concept du monde est exprimé, si bien que le sol de celui-ci est l’absence de présupposition, le néant[9]. La philosophie épicurienne tire son importance de la naïveté avec laquelle les conséquences sont exprimées, sans la fausse pudeur d’aujourd’hui.


[Extraits de Diog. X 62]


Il faut observer à partir d’où le principe de la certitude sensible est supprimé et quelle représentation abstractive est posée comme son vrai critère. ἡ ψυχὴ σῶμά ἐστι λεπτομερὲς, παρ’ ὅλον τὸ ἄθροισμα (corpus) παρεσπαρμένον (diffusum)[10] p. 47.


[Diog. X 63]

L’intérêt est ici encore la différence spécifique du feu et de l’air vis-à-vis de l’âme, pour prouver l’adéquation de l’âme au corps ; l’analogie y est employée, mais aussi supprimée, ce qui est en général la méthode de la conscience qui forge des fictions[11] ; ainsi s’effondre toute concrète détermination en soi-même et un écho purement monotone prend la place du développement.


[Extraits de Diog. X 63-64]

Nous avons vu que les atomes, pris entre eux abstraitement, ne sont pas autre chose que des êtres représentés comme existant, et que c’est seulement dans leur collision avec le concret qu’ils développent leur idéalité fictive et donc embrouillée dans des contradictions ; ils démontrent de même, en devenant l’un des côtés du rapport, — quand on en vient à des objets qui portent en eux-mêmes le principe et son monde concret (le vivant, l’animé, l’organique) —, que le royaume de la représentation est pensé tantôt comme libre, tantôt comme le phénomène d’une chose idéelle. Cette liberté de la représentation est donc elle aussi une liberté purement pensée, immédiate, fictive, ce qu’est l’atomistique dans sa forme véritable. Les deux déterminations peuvent donc être confondues ; chaque terme, considéré pour lui-même, est le même que l’autre, mais on doit également en les opposant et de quelque côté qu’on les considère, leur attribuer les mêmes déterminations. La solution est donc encore de retomber dans la première détermination, qui est la plus simple : on imagine libre le Moi de la représentation. Du fait que cette rechute s’effectue ici par rapport à une totalité, au représenté, qui possède réellement en lui-même l’idéel et est cet idéel lui-même dans son être, l’atome est ici posé, comme il est en réalité, dans la totalité de ses contradictions ; en même temps ressort le fond de ces contradictions : vouloir concevoir la représentation comme étant aussi l’idéel dans sa liberté, mais toujours dans l’ordre de la représentation. Le principe de l’arbitraire absolu apparaît donc ici avec toutes ses conséquences. Dans sa forme la plus subordonnée, c’est aussi en soi le cas pour l’atome. Comme il y en a un grand nombre, chaque atome possède en soi-même la différence qui le distingue de la multitude ; il est donc en soi une multiplicité. Mais il est en même temps dans la détermination de l’atome, ce qui fait que la multiplicité est en lui, de manière nécessaire et immanente, une unité : il en est ainsi de l’atome parce qu’il est. Mais c’est sans sortir du monde qu’il faudrait expliquer comment, à partir d’un principe unique, celui-ci se déploie librement en une multiplicité. Ce qui doit être résolu se trouve ainsi supposé ; l’atome lui-même est ce qui doit être expliqué. La distinction de l’idéalité n’est introduite alors que par comparaison ; pour soi, les deux côtés sont dans la même détermination, et l’idéalité elle-même est de nouveau posée dans le fait que ces atomes multiples se combinent réellement, qu’ils sont les principes de ces compositions. Le principe de cette composition est donc ce qui est originellement composé sans raison, c’est-à-dire que l’explication est l’expliqué lui-même, que l’on introduit de force dans les mots et le brouillard de l’abstraction productrice de fiction. Comme nous l’avons vu dans sa totalité cela n’intervient que lorsque l’on considère l’organique[12].


[Hasard et possibilité chez Épicure]


Remarquons que, comme l’âme périt et ne doit son existence qu’à une mixture fortuite, on admet du même coup, d’une façon générale, le caractère fortuit de toutes ces représentations (ex. l’âme), qui, de même qu’elles n’ont aucune nécessité dans la conscience commune, chez Épicure également sont substantifiées comme des états fortuits, lesquels, conçus comme donnés dont la nécessité, la nécessité de leur existence, non seulement n’est pas démontrée mais n’est pas démontrable, ne sont connus que comme possibles. Ce qui persiste par contre est le libre être de la représentation, qui, d’une part, est la liberté dans son être en soi, mais qui, d’autre part, en tant que pensée de la liberté du représenté, est un mensonge et une fiction, et donc une chose en elle-même inconséquente, un mirage, une fantasmagorie[13]. Cet être est plutôt l’exigence des déterminations concrètes de l’âme comme pensées immanentes. La grandeur d’Épicure, ce qui persiste de lui, c’est qu’il ne donne aux états aucune priorité sur les représentations et cherche tout aussi peu à sauver celles-ci. Chez Épicure, le principe de la philosophie consiste à démontrer que le monde et la pensée sont pensables, possibles ; la preuve qu’il apporte, le principe d’où cela est tiré et où cela est ramené est encore la possibilité elle-même dans son être pour soi, dont l’expression naturelle est l’atome et l’expression spirituelle le hasard et l’arbitraire. Il faut considérer de plus près la manière dont l’âme et le corps échangent toutes leurs déterminations, comment chacun des termes est le même que l’autre dans le mauvais sens, si bien qu’en somme ni l’un ni l’autre des deux côtés ne sont déterminés selon le concept.


[La supériorité de la rigueur logique d’Épicure
comparée à celle des sceptiques
]


Fin de la page 48 et début de la page 49 : Épicure l’emporte sur les sceptiques en cela que, chez lui, non seulement les états et les représentations sont ramenés à rien, mais le fait d’en prendre conscience, de méditer sur eux et de raisonner sur leur existence, laquelle a un point de départ concret, est quelque chose qui n’est que possible.
[Extraits de Diog. X 67 (MEGA : Marx ajoute à cette citation la remarque suivante : Se reporter à la page 50 et au début de la page 51 : dans ce passage, Épicure parle des déterminations des corps concrets, et le point de vue atomistique paraît renversé, quand il dit… (Marx cite alors des passages de Diog. X 69-71.)]


[L’atome comme forme immédiate du concept :
la déclinaison
]


Que la répulsion[14] soit posée avec la loi de l’atome, la déviation de la ligne droite, Épicure en a la conscience la plus aiguë. Que cela ne soit pas à prendre au sens superficiel, comme si les atomes ne pouvaient s’atteindre qu’à cette condition, Lucrèce au moins le dit. Après avoir déclaré, dans le passage cité plus haut, que « sans ce clinamen atomi », il n’y aurait eu ni « offensus natus nec plaga creata[15] » (Lucrèce II 223), il dit un peu plus loin :

Denique si semper motus connectitur omnis
et vetere exoritur novus ordine certo,
nec declinando faciunt primordia motus
principium quoddam, quod fati foedera rumpat,
ex infinito ne causam causa sequatur :
libera… etc.[16].


Ici est établi un mouvement au cours duquel les atomes peuvent se rencontrer, différent de celui qui est provoqué par le clinamen. Ce mouvement est en outre rigoureux et s’effectue selon le déterminisme absolu ; il est donc la suppression du Soi ; si bien que chaque détermination trouve son être-là (Dasein) dans son être-autre immédiat, son être-supprimé, qui est au regard de l’atome la ligne droite. Ce n’est que du « clinamen » que surgit le mouvement autonome, le rapport qui possède sa déterminité (Bestimmtheit) comme déterminité de son soi, et ne l’a pas dans l’autre être.

Ce développement, Lucrèce peut l’avoir puisé chez Épicure ou l’avoir inventé, cela ne change rien à l’affaire. Ce qui s’est démontré dans le développement de la répulsion (que l’atome, en tant que forme immédiate du concept, ne s’objective que dans l’immédiate inconceptualité), cela vaut aussi pour la conscience philosophique, pour qui cette contrainte est son essence.

Cela me justifie en même temps d’avoir opéré une classification totalement différente de celle d’Épicure.


  1. . La pagination employée par Marx renvoie à l’ouvrage sur Épicure de Gassendi. Pour ce qui est des auteurs grecs, nous conservons les références de l’édition allemande.
  2. . Cette remarque sur la nature politique, sur l’État, est la seule de ces notes. Il ne faut cependant pas croire que la dimension politique est absente de ce texte. C’est que, dans le champ hégélien, il n’y a pas d’autonomie des divers domaines : un même principe régit ces domaines et y est présent, le principe étant l’essentiel, et l’espace philosophique transparent, l’homogénéité des domaines est assurée par leur degré d’expression du principe. La théorie politique propre à l’atomistique n’est donc pas différente de sa théorie physique ou de son éthique : les volontés particulières sont, dans l’ordre politique, ce que sont les atomes dans la physique, et la conscience humaine dans la morale. Hegel a montré la logique du lien de cette pensée politique du contrat avec l’atomistique en général : « Les volontés individuelles sont le principe de l’état. » (Encyclopédie des sciences philosophiques). Pour l’atomistique antique, ce qui réunit les une n’est pas l’attraction (détermination conceptuelle découlant du concept de l’Un), mais la déterminité extérieure du Hasard (du moins chez Épicure). Donc « le général, l’État repose sur la condition extérieure du contrat ». Le contrat est imposé de l’extérieur aux volontés individuelles, c’est donc un lien abstrait qui ne représente pas un dépassement. On sait que cette question du rapport d’opposition entre les volontés particulières et l’État comme universel n’est pas vraiment résolu par Hegel. Dans l’État, la conscience de soi doit être consciente de soi comme de l’universel. Or, la révolution française n’a pas pu supprimer le personnage du Bourgeois, figure de la volonté particulière. La volonté générale de Rousseau compose avec les volontés individuelles par la détermination du contrat. La société civile et bourgeoise s’oppose chez Hegel à la vie politique. Selon lui, l’État moderne, contrairement à la cité antique, est assez puissant « pour laisser le principe de la subjectivité s’accomplir jusqu’à l’extrémité de la particularité personnelle autonome, et en même temps le ramener à l’unité substantielle et ainsi maintenir cette unité dans ce principe lui-même ». (Philosophie du droit, p. 195, cité par J. Hyppolite : Études sur Marx et Hegel, p. 125.) Marx pourra montrer que les médiations établies par Hegel ne sont que des contingences historiques de son temps. La philosophie du contrat propre à Épicure est donc revêtue pour Marx d’une singulière actualité.
  3. . Épicure n’est pas tant un philosophe qui apporte des contenus nouveaux que celui qui achève et révèle la philosophie antérieure. Dans la conception hégélienne, le philosophe est le support du développement de l’idée qui passe par différentes figures. Le texte est donc déjà écrit, et ce qu’il faut, c’est le déchiffrer. C’est pour cela que la vertu principale du philosophe est la rigueur. La rigueur est la faculté qui correspond au développement de l’idée, parce que ce développement est déjà rigoureux. La définition d’Épicure comme philosophe de la représentation renvoie à un double centre d’intérêt.

    — son rapport à la philosophie grecque, puisque le propre de cette philosophie est de « savoir qu’il y a des représentations dans la conscience » sans savoir ce qu’elles sont ;

    — l’élucidation de la représentation comme figure de la conscience, et de ses rapports avec l’idéel.

    La position d’Épicure, achevant la philosophie grecque, est confirmée et développée dans les textes sur le Sage (cf. infra).

  4. . Les atomes ont une grandeur, mais cette grandeur est à la fois déterminée et indéterminée. Ils n’ont pas n’importe quelle grandeur, car dans ce cas il y aurait des atomes grands comme le monde (ce qu’admet Démocrite). Mais ils n’ont pas non plus une grandeur déterminée mesurable, puisque l’atome est au-delà du minimum représentable. Il faut donc comprendre ici : les atomes ont une grandeur déterminée comme pure grandeur différentielle, leur grandeur traduit seulement leur différence de grandeur. (Cf. la différence de poids des atomes.)
  5. . Communauté qui existe entre elles.
  6. . Si l’atome est fait de parties nécessairement agencées, il n’est plus le terme ultime de l’analyse et le principe de l’atomistique. Il n’est plus seul à rendre compte de lui-même, mais comprend en lui « l’idéel et nécessaire ». Or, l’atome incarne dans l’être immédiat et fictif la liberté de la représentation. Y introduire la nécessité ou l’idéel consiste à reconnaître cet idéel comme contenu latent de la représentation, donc à nier l’être-libre de celle-ci. L’idéel conteste l’illusion, le mirage de la représentation.

    La représentation et l’idéel, qui sont, dans leur opposition, deux moments du concept, sont ici réalisés, dans la forme de l’être, dans la figure unique de l’atome. Cette réalisation (abstraite) dans un même étant de deux moments contradictoires fait de l’atome lui-même un étant contradictoire.

  7. . En outre, les atomes possèdent nécessairement la même vitesse si, au cours de leur mouvement dans le vide, ils ne heurtent aucun obstacle.
  8. . Selon les compositions.
  9. . Épicure lui-même est contraint de nuancer cette affirmation : l’atome qui est la base matérielle du monde est l’atome qualifié, complet, et non l’atome selon son concept, l’absence de présupposition. La contradiction qui est ici entre l’atome et le monde se retrouve alors à l’intérieur de l’atome lui-même (cf. Dissertation).

    C’est malgré tout entre le monde concret et l’atome (c’est-à-dire l’atome dans son concept et l’atome qualifié), que réside la forme la plus extrême de la contradiction propre à cette philosophie. D’où l’importance du problème de la création du monde. Comme l’idéel-est donné dans la forme de l’être, il constitue un monde à part dont l’être conteste celui du monde phénoménal. On a ainsi deux mondes à l’image l’un de l’autre, contradictoires tous deux, et la conscience abstraite contradictoire se reconnaît séparément dans chacun de ces deux mondes.

  10. . Que l’âme est un corps composé de parties ténues, répandu sur tout le corps.
  11. . L’analogie est le caractère de la méthode de la philosophie de la représentation :

    — elle procède par images, ressemblances, contiguïtés, symboles (comme la magie et l’herméneutique) ;

    — elle part de la représentation elle-même (sens commun) et non de l’idéel lui-même. L’atomistique est une philosophie de la conscience et non une logique au sens hégélien. Elle définit l’idéel avant tout négativement, comme une radicalisation de la représentation. Son intérêt est donc, moins que son contenu littéral, la contradiction dans laquelle la place cette démarche et qui révèle l’idéel dans le représenté. C’est aussi ce qui explique que l’atomistique donne une telle importance à la conscience individuelle du philosophe (du sage).

    La conscience qui représente est donc la conscience abstraite, coupée du monde concret. Son rapport à l’être a pour caractère cette extériorité de la réflexion que Hegel définit comme le moment de l’essence. Dans l’atome, cette extériorité est inscrite dans l’être.

  12. . C’est la pensée de l’uniformité et de la mesure qui est définie ainsi. Pour la « belle âme », il n’y a que des différences, donc tout est pareil. La dialectique doit commencer par réintroduire la différence masquée. L’identité immédiate, c’est l’identité trompeuse de la représentation et non l’identité concrète des troisièmes termes dialectiques. Marx reprend à ce sujet la critique portée par Hegel contre Schelling.
  13. . La liberté de la représentation est celle de la conscience abstraite qui a son principe dans la possibilité formelle, régie par le seul principe de non-contradiction. La fiction consiste, pour cette conscience, à projeter son être-libre dans l’objet de la représentation (das vorgestellte), à se donner comme la nature. Cette projection crée le monde contradictoire qui ressemble à la conscience abstraite. Épicure ne s’en tient pas à cette projection, il pense également l’idéel, mais sans penser ensemble les deux moments contradictoires.
  14. . La répulsion est posée avec la déclinaison comme la vérité de deux moments de la chute et de la déclinaison. Elle ne saurait être posée avant. La déclinaison n’est pas accidentelle, elle n’est pas une hypothèse explicative, elle est l’expression de l’essence de l’atome (cf. Dissertation).
  15. . Déviation de l’atome… Rencontre ni aucune création de monde.
  16. . « Enfin, si la chaîne du mouvement total sans cesse se boucle / si le nouvel anneau, infailliblement, s’ajoute au précédent / si les atomes ne dévient pas de la verticale et ne produisent pas, à travers cette déclinaison, / ce commencement de mouvement qui brise les chaînes du destin, / et sans lequel celui-ci boucle sans lacune la chaîne infinie des causes, / il s’ensuit que…