Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Flaxbinder

Henri Plon (p. 278).
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Flaxbinder. Le professeur Hanov, bibliothécaire à Dantzig, après avoir combattu les apparitions et les erreurs des différents peuples touchant les revenants et les spectres, raconte toutefois le fait suivant :

« Flaxbinder, plus connu sous le nom de Johannes de Curiis, passa les années de sa jeunesse dans l’intempérance et la débauche. Un soir, tandis qu’il se plongeait dans l’ivresse des plus sales plaisirs, sa mère vit un spectre qui ressemblait si fort, par la figure et la contenance, à son fils qu’elle le prit pour lui-même. Ce spectre était assis près d’un bureau couvert de livres, et paraissait profondément occupé à méditer et à lire tour à tour. Persuadée qu’elle voyait son fils, et agréablement surprise, elle se livrait à la joie que lui donnait ce changement inattendu, lorsqu’elle entendit dans la rue la voix de ce même Flaxbinder, qui lui semblait être dans la chambre. Elle fut horriblement effrayée. On le serait à moins. Cependant ayant observé que celui qui jouait le rôle de son fils ne parlait pas, qu’il avait l’air sombre, hagard et taciturne, elle conclut que ce devait être un spectre ; et, cette conséquence redoublant sa terreur, elle se hâta de faire ouvrir la porte au véritable Flaxbinder. Il entre, il approche ; le spectre ne se dérange pas. Flaxbinder, pétrifié à ce spectacle, forme, en tremblant, la résolution de s’éloigner du vice, de renoncer à ses désordres, d’étudier enfin et d’imiter le fantôme. À peine a-t-il conçu ce louable dessein que le spectre sourit d’une manière un peu farouche, comme font les savants, ferme les livres et s’envole… »