Dictionnaire des proverbes (Quitard)/Allobroge

allobroge. — C’est un Allobroge.

C’est un original, un sot, un rustre. — On dit aussi : Agir, parler, raisonner, écrire comme un Allobroge. Voltaire a dit : De très mauvaises tragédies barbares, écrites dans un style d’Allobroge, ont réussi.

L’emploi de ce mot dans un sens de mépris n’est pas nouveau, car il se trouve dans plusieurs auteurs latins, notamment dans Juvénal, qui nous apprend qu’un certain Rufus, rhéteur gaulois établi à Rome, qualifiait Cicéron de la sorte :

Rufus qui toties Ciceronem allobroga dixit.

(Sat. 7, v. 214.)

Les Allobroges étaient un ancien peuple établi dans la partie des Gaules qu’on appelle aujourd’hui le Dauphiné et la Savoie, pays montagneux, d’où dériva leur nom formé, suivant Boxhornius, des mots celtiques ail, haut, et brog, pays ; c’est-à-dire le haut pays ou la montagne. L’opinion désavantageuse qu’on se fait ordinairement de l’esprit et des manières des montagnards fut sans doute la cause du ridicule attaché au nom des Allobroges, et à celui de leurs descendants, car on dit aussi populairement, en parlant d’un homme grossier : C’est un Savoyard. Mais il y a une autre raison de cette dernière expression : c’est que la plupart des gens qui viennent de Savoie en France pour travailler n’exercent guère que des métiers méprisés, comme celui de ramoneur. Ceci soit dit sans blesser la susceptibilité des bons habitants de cette contrée, qui tiennent à être nommés Savoisiens.