Dictionnaire de théologie catholique/VICTOR DE TUNNUNUM

Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 675-676).

VICTOR DE TUNNUNUM, évêque africain du VIe siècle. — Aux environs de 555, l’évêque de Tunnunum, Victor, fut envoyé en exil par ordre de Justinieu, pour avoir refusé de se soumettre aux décisions de l’édit impérial qui, en 543 ou 544, avait condamné les Trois-Chapitres et à celles du concile général qui, en 553, avait confirmé cette condamnation. Jusqu’à son exil, nous ne savons absolument rien de Victor, de ses origines, de son activité, de son rôle épiscopal. Nous ne pouvons même pas fixer avec certitude l’emplacement de la cité dont il était évêque et qui devait appartenir à l’Afrique proconsulaire. Le nom de cette ville est mal assuré : dans son édition de la Chronique de Victor, Mommsen préfère l’orthographe Tonnennensis à Tunnunensis qui est également attestée, et les meilleurs manuscrits de la Chronique de saint Isidore portent Tononensis, plutôt que Tonnonensis. En toute hypothèse, la destinée de Victor fut celle de plusieurs de ses collègues africains. Après le concile, il fut appelé à Constantinople et invité à souscrire la sentence de condamnation des Trois-Chapitres. Sur son refus, il fut expédié en Egypte et y connut plusieurs lieux de déportation. Bappelé à Constantinople, vers 564-565, il persista dans son opinion : on l’enferma alors dans un monastère de la capitale et ce fut là qu’il mourut, sans doute peu après 566. xii cours de son exil, peut-être même seulement après son retour à Constantinople, Victor rédigea une Chronique qui, partant de la création du monde, allait jusqu’à la première année de l’empereur Justin II, c’est-à-dire jusqu’à 566. Isidore de Séville De vir. inlustr., xxxviii. Pour toute la portion de son œuvre qui allait jusqu’à 443, Victor semble avoir suivi de très près la Chronique de Prosper d’Aquitaine, en y introduisant peut-être quelques remaniements. Cependant le témoignage de saint Isidore est trop précis pour que nous puissions refuser à l’évêque de Tunnunum au moins cette revision et cette correction du travail de son devancier. Il ne nous est pourtant pas possible de juger son rôle personnel, car la partie conservée de sa Chronique commence précisément à 443. De cette date jusqu’à 563, Victor compte les années par les noms des consuls ; de 563 à 566, il les compte d’après les années de règne des empereurs, non sans se tromper dans les calculs relatifs à Justinien. Il s’intéresse surtout aux événements religieux et, à mesure qu’il avance dans son récit, il laisse de plus en plus à l’arrière-plan les faits d’ordre politique. Il abandonne également le style terne et incolore de la chronique pour entrer dans de plus longs développements, chaque fois qu’il doit rapporter des incidents qui le frappent et, vers la fin, il s’étend sur sa propre destinée de manière à nous donner un récit assez détaillé de son exil. Il conserve pour l’Afrique natale une prédilection qui ne se dément jamais et qui nous vaut des renseignements plus abondants sur la vie religieuse en ce pays. La Chronique de Victor est utile à bien des titres ; elle complète celle de Prosper et sur les événements du vie siècle, spécialement sur les remous créés par l’affaire des Trois-Chapitres, elle apporte bien des détails intéressants.

La première édition de la Clironique est due à.1. Scaliger, Leyde, 1605. Des réimpressions de ce texte dans Gallandi, Biblioth. vet. pair., t.xii, p. 221-232 ; P. L., t. lxviii, col. 911-962. Une nouvelle édition est due à Th. Mommsen, Chronica minora, t. ii, dans Mon. Germ. hist., Auclor. antiguis., t. xi, Berlin, 1894, p. 163-206.

Mommsen, p. 178, attribue à Victor de Tunnunum le De pœnitentia du pseudo-Ambroise, P. L., t. xvii, col. 9711004. Cet ouvrage appartient plus probablement à Victor de Cartenna (voir ci-dessus, col. 2876).

G. Bardy.