Dictionnaire de théologie catholique/UTRECHT (ÉGLISE D') X. L'Église d'Utrecht jusqu'au rétablissement de la hiérarchie (1853)

Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 444-446).

X. L'Église d’Utrecht jusqu’au rétablissement de la hiérarchie (1853). —

Après la conclusion du concile d’Utrecht, l'Église de Hollande reprit sa vie calme et, jusqu’au rétablissement de la hiérarchie catholique en 1.S53, on ne trouve dans son histoire aucun événement important. L'élection et le sacre des évêques provoquent toujours les mêmes brefs de condamnation et Dupac de Bellegarde, si attentif à signaler les moindres faits, ne parle guère que des élections épiscopales et des » intrigues » des jésuites.

Meindærtz mourut le 31 octobre 1767. Noué, ceci. des 16 et 23 mai 1767, p. 77-84. Pour lui succéder, le chapitre d’Utrecht élut, le 17 novembre 1767, Gauthier-Michel van Nieuwenhuiscn. pasteur à Dordrecht, qui fut sacré, le 7 février 1768, par Stiphout, évêque de Haarlem. Le chapitre et L'évêque élu firent part au pape de l'élection et du sacre ; Clément XI II répondit par le bref du 1 M juin 1768, qui excommuniait l'élu et défendait aux catholiques d’entretenir des relations avec lui. Nieuwenhuiscn publia, le 25 mai 1768, une Lettre pastorale à ses fidèles : il y peint les maux de l'Église et ceux qui affligent en particulier l'Église de I lollande et déplore les conséquences désastreuses du schisme. Il recul, écrit Dupac. p. 134-449, des lettres de félicitations qui vinrent île toul pays cl de personnes de tout état, de France-, d’Allemagne. d’Italie et d’un grand nombre d’ecclésiastiques du second ordre : il cite l’instruction pastorale de Joseph Chinent, éveque de Barcelone, 26 mars 1769, et des témoignages de nombreux évêques d’Espagne. D’autre part, le nouveau pape. Clément XIV, sembla.

quelque temps, favorable à des projets d’union, l.'impératrice, Marie Thérèse, malgré l 'opposition des jésuites et a la demande de la COUT d’Espagne, proposait la canonisation de Jean de Palafox, évêque d’Osma. L’archevêque d’Utrecht et ses deux suffra 2 419

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gants avaient écrit au pape, au sujet de la canonisation de Palafox, le 10 août 1771, pour lui dire que la lettre de Meindærtz où il était dit que Palafox était al lâché aux cinq propositions de Jansénius était absolument fausse, car elle avait été inventée par les jésuites ; en même temps, ils demandaient à être admis, à la communion romaine. Le pape accueillit cette demande et témoigna le désir de recevoir des députés de l'Église d’Utrecht, bien instruits de l’affaire et munis de pleins pouvoirs. Des négociations furent entamées. Des évêques d’Allemagne concertaient les moyens les plus efficaces pour procurer une juste paix à l'Église de Hollande. Dupac pense que le projet aurait réussi, si, après la suppression des jésuites, le 21 juillet 1773, Clément XIV n'était tombé malade d’un malaise qui n'était pas naturel et qui le conduisit au tombeau le 22 septembre 1774. Dupac, p. 474.

Le cardinal Braschi qui lui succéda, le 15 février 1775, sous le nom de Pie VI, était tout différent : « On s’aperçut bientôt, écrit mélancoliquement Dupac, p. 475, qu’on ne pouvait pas se flatter d’obtenir sous ce nouveau pontificat ce qu’on avait eu tout lieu d’attendre de celui de Clément XIV, et les choses rentrèrent dans le même état où elles étaient avant ce dernier pape. »

Stiphout, évêque d’Haarlem, mourut le 16 décembre 1777. Nouv. eccl. du 20 février t779, p. 29-32. Comme le chapitre de Haarlem avait renoncé à ses droits d'élire son évêque, l’archevêque d’Utrecht, avec des prêtres du diocèse, choisit Adrien Brockman, président du séminaire d’Amersfoort, et fit part de ce choix à Pie VI, le 2 mai 1778. Brockman qui fut sacré le 21 juin 1778, écrivit également à Pie VI, le 23 juin. « Des actes aussi solennels d’union et de respect pour le Saint-Siège avaient toujours été suivis par des brefs injurieux adressés aux catholiques de ces Provinces… Aussi des jurisconsultes français avaient montré que les évêques étaient autorisés à s’en tenir à l’ancienne discipline de l'Église et à ne plus s’adresser au pape. » Cependant l’archevêque d’Utrecht et l'évêque de Haarlem voulurent donner des preuves de leur union à Rome, mais Pie VI répondit, le 22 juillet 1778, par un bref « aussi amer et aussi rempli d’impropères, d’injures et d’anathèmes que ceux de ses prédécesseurs ». Dupac, p. 478.

Byeveld de Deventer mourut le 20 janvier 1778. Nouv. eccl. du 3 juin 1779, p. 85-87. Nicolas Nelleman, pasteur à Delf et chanoine d’Utrecht, fut élu pour lui succéder ; il écrivit au pape le 4 septembre 1778 et fut sacré par l’archevêque d’Utrecht, le 28 octobre suivant, Pie VI répondit par un nouveau bref, le 18 janvier 1779, « fête de la chaire de saint Pierre ». C’est ici que Dupac termine l’histoire de cette Église, « opprimée, dit-il, depuis plus de quatre-vingts ans, avec un degré d’injustice dont il n’y a peut être pas d’exemple dans toute l’histoire ecclésiastique ». P. 484. Il se console en parlant du progrès très sensible qui s’est fait depuis le concile d’Utrecht. En fait, le nombre des fidèles diminuait, tandis qu’augmentait le nombre des catholiques attachés à Rome. Un opuscule hollandais, publié par Mgr Stafîord en 1779, dit « que la seule ville d’Utrecht renferme plus d’habitants catholiques qu’il ne se trouve de jansénistes dans toutes les Provinces ensemble ». Il y avait alors 340 paroisses catholiques, alors que le nombre des paroisses dissidentes atteignait le nombre de 36.

L’archevêque d’Utrecht, van Nieuwenhuisen mourut le 14 avril 1797, Nouv. eccl. du 21 mai-18 juin 1797, p. 41-52 ; pour le remplacer, le chapitre élut Jacques Van Rhijn, qui, le 5 juillet 1797, fut sacré par l'évêque de Haarlem, assisté de l'évêque de Deventer. Le nouvel archevêque, à l’occasion de la mort

de Pic VI, écrivit, le 18 octobre 1791), une lettre pastorale pour demander des prières. NûUD. ceci, du 23 octobre 1799, p. X.VN.S. En 1800, il nomma Jean Nieuwenhuisen évêque de Haarlem, et le sacra, le 28 octobre 1X01, assisté de l'évêque de Deventer. Celui-ci étant mort en 1805, Van Rhijn sacra à Utrecht, le 7 novembre 1805, l'évêque élu, Gisberg de.long, avec l’assistance de l'évêque de Haarlem. Comme on le voit, les trois évêques se consacrent les uns les autres.

Au début du xixe siècle, il y eut à Utrecht, après la mort de Van Rhijn (24 juin 1808), et à Haarlem, aînés la mort de Jean Nieuwenhuisen (10 janvier 1810), une vacance qui dura six ans à Utrecht et dix ans à Haarlem. Louis-Bonaparte, qui régnait sur la Hollande, fit écrire aux chapitres de surseoir à l'élection des candidats : le chapitre d’Utrecht se contenta de nommer deux vicaires généraux pour gouverner le diocèse et, comme il demandait l’autorisation d'élire un archevêque. Napoléon fit déclarer que son intention était de nommer lui-même les évêques de Hollande, comme il nommait les évêques de France. Mais il se brouilla avec Pie VII et il ne put réaliser son projet. Après l'échec de l’empereur, le chapitre d’Utrecht élut Willibrord van Os (10 février 1814) et celui-ci fut sacré le 24 avril suivant par l'évêque de Deventer. Van Os sacra le 25 avril 1810, à Amersfoort, Jean Bon, élu évêque de Haarlem ; comme Gisberg de Jong, évêque de Deventer, était mort en 1824, van Os élut pour le remplacer, le 7 octobre 1824, Guillaume de Vet et il se préparait à le sacrer, lorsqu’il mourut lui-même, le 28 février 1825. Guillaume de Vet fut sacré à La Haye, par Jean Bon, évêque de Haarlem, le 12 juin 1825.

Le 14 juin 1825, le chapitre d’Utrecht élut, pour remplacer van Os, Jean van Santen qui fut sacré le 13 novembre 1825 par l'évêque de Haarlem. En 1826, les trois évêques de Hollande écrivirent une lettre collective à l'épiscopat catholique pour justifier leur Église et réfuter les brefs récents du pape Léon XII qu’ils regardaient comme injurieux pour l'Église de Hollande, jugée schismatique. Ami de la religion, 19 août 1825, p. 286-288. En 1842, Jean van Santen désigna comme successeur de Jean Bon à Haarlem, Henri-Jean van Buùl et il le sacra à Amsterdam, le 10 mai 1843 ; en 1853, il désigna aussi le successeur de Guillaume de Vet à Deventer ; ce fut Hermann Heykamp, qu’il sacra le 17 juillet 1853.

Ce fut à cette date que se passa un événement important pour l'Église de Hollande, alors que les trois évêques, Santen, Buùl et Heykamp se regardaient comme les évêques légitimes des Provinces-Unies. Ce fut en cette année 1853 que le pape Pie IX » plus entreprenant et plus hardi que tous ses prédécesseurs, osa nommer des évêques pour les Pays-Bas et il donna à des évêques intrus les titres d’archevêque et d'évêque, par une usurpation sacrilège et contre toutes les règles, du droit… Le gouvernement des Pays-Bas ne s’opposa pas à l’entreprise du pape, mais il déclara que cela ne portait préjudice en rien aux droits de l’ancien clergé qu’il reconnaissait toujours et auquel il conservait les biens dont la loi, depuis longtemps, reconnaissait la possession et que le gouvernement salariait même en partie… Au reste, les fidèles ne se laissèrent pas tromper ; ils restèrent attachés aux pasteurs légitimes. Et leur nombre qui avait tant diminué au xviiie siècle, augmenta, au contraire, peu à peu, et, à la fin du xixe siècle, l’augmentation s'éleva à peu près de 2 000 personnes. » Volet, Notice historique sur l'Église d’Utrecht, 1908, p. 38. En fait, le nombre des dissidents était toujours peu élevé. L’Ami de la religion du 25 janvier 1823, p. 337, écrit : l’archevêché d’Utrecht comprend 24 cures et environ 2 500 per 2 2

sonnes ; l'évêché de Haarlem comprend 24 cures et 2 438 personnes ; l'évêché de Deventer n’a ni prêtre, ni laïc ; l'évêque lui-même réside à Rotterdam.