Dictionnaire de théologie catholique/APÔTRES (La Doctrine des douze)

Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.2 : APOLINAIRE - AZZONIp. 92-96).

6. APÔTRES (La Doctrine des douze).
I. Histoire de l’écrit
II. Authenticité de la Didaché de Bryennios.
III. Intégrité.
IV. Caractéristiques de la Didaché.
V. Auteur, date et lieu de composition de la Didaché.
VI. Analyse de la Didaché.
VII. Enseignements doctrinaux.
VIII. Conclusion.

I. Histoire de cet écrit.

Nous trouvons plusieurs fois mentionné danles écrits des premii hens un opuscule intitulé- : Doctrine des dom AifiagTjvûv BûStxoi i*o « TéX » v. Il < -t nommé dans sion d Isaîe (trad. Basset, iii, 21 : i apocryphes par Eusèbe, II. /-.’..ni. 2, ">. /’.(.’.. t. n par saint Mhanase, Êpltre pascale, xxxix » , /’. G col. 137 ; dans la Stichométrie de Ni tria, ligne 68, dans la Synopse dite d’Athanase, P. G., t. xxviii, col. 432. Zonaras au xue siècle, P. G., t.cxxxvin, col. 863, Blastarès, au xive siècle, P. G., t. cxliv, col. 1 142, et Nicéphore Calliste, H. E., ii, 46, P. G., t. cxlv, col. 888, en parlent aussi. En Occident nous le trouvons mentionné par l’auteur du livre De alealoribus, m » siècle, c. iv, P. L., t. iv, col. 830, par Rufin, dans sa traduction latine d’Eusèbe. A partir du xive siècle, la Doctrine des douze apôtres disparait de l’histoire. Elle a été retrouvée en 1883 par M’J r Bryennios, métropolite de Nicomédie, au monastère de Jérusalem du Très-Saint Sépulcre, dans le quartier du Phanar, à Constantinople. Le manuscrit a été, en 1887, transporté à Jérusalem. La première édition en a été donnée par Ma 1’Bryennios à Constantinople, et depuis lors la Didaché a été publiée et étudiée par de nombreux savants. Voir la bibliographie.

II. Authenticité de la Didaché de Bryennios.

La Didaché, publiée par M’J r Bryennios, est certainement l’écrit de ce nom, dont il est parlé dans l’ancienne littérature chrétienne. Pour s’en convaincre il suffit de la comparer, soit avec les documents qui en sont la traduction ou la reproduction plus ou moins fidèle, soit avec les passages d’auteurs chrétiens qui sont presque identiques. — 1° « ) Un fragment latin, extrait par Pez d’un manuscrit, aujourd’hui disparu de la bibliothèque de Melk (Autriche), reproduit les versets, I, 1-3, et il, 2-6 de la Didaché. Une ancienne version latine de la première partie, « des deux voies, » a été trouvée dans un manuscrit de Munich, du xie siècle, et éditée par J. Schlecht, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1900. b) Les chapitres XVIII, xix et xx de l’Épitre de Barnabe coïncident presque textuellement avec des passages des cinq premiers chapitres de la Didaché. c)Les Canons ecclésiastiques des apôtres, iv-xiii, reproduisent des passages de la Didaché, i-iv. d) Le VIP livre des Constitutions apostoliques est une reproduction assez interpolée de toute la Didaché. e) Le Syntagma doclrinse, P. G., t. xxxviii, col. 835, attribué à saint Athanase, en contient des fragments, ainsi que la Fides Nicsena, P. G., t. xxxviii, col. 1639, et la Vie de Schnoudi, Paris, 1889. — 2° On a signalé des rapprochements entre la Didaché de Bryennios et des passages de l’Apologie d’Aristide, de saint Justin, de Tatien, de Théophile d’Antioche, de saint Irénée, des Oracles sibyllins, du Pseudo-Phocylides, de Tertullien, d’Origène, de Dorothée de Palestine ; ils sont assez vagues. Comme plus certains nous citerons les rapprochements entre des passages de la Didaché et les écrivains suivants : Clément Romain, II Cor., iii, 1, P. G., t. i, col. 333 = : Did., iv, 3 ; xvii, 3 = Did., i, 4 ; xx, 5 = Did., IX, 2 ; Hermas, Pasteur, Mand., il, 4-6, P. G., t. ii, col. 915 = Did., iv, 7 ; i, 5 ; Pseudo-Cyprien, De aleatoribus, iv, P. L., t. iv, col. 830 = Did., iv, 4 ; xiv, 2 ; xv, 3 ; Clément d’Alexandrie, Strom., i, 20, P. G., t. viii, col. S I r = Did., ni, 5 ; Quisdives salvus, 29, t. IX, col. 636= Did., ix, 2 ; Pseudo-Ignace, Ad Tral, vi, P. G., t. iii, col. 78 : 5 = Did., xii, "> ; Pseudo-Athanase, De virginitate, P.G., t. XXVIII, col. 266 = Did., ix, 2 ; Lactance, Epit. de div. Inst., ux, /’. /.., t. vi, col. 1085-1086 = Did., Ml. La sentence du chapitre i, : « Que ton aumône transpire d. milis mains, jusqu’à ce que tu saches bien àqui tu donnes, o se trouve dans saint Augustin, Jn Ps., en, 12 ; cxlvi, 17, /’. /.., t. xxxvii, col. 1326, 19J01911 ; Grégoire le Grand, Régula pastoralis, ni, 30, 7’. L.. t. i.xvii, col. 109 ; Cassiodore, Exp. in Ps. XL, P. L., t. i.xx, col.’rJ(i, Pierre Comestor, Hist. tchol., liber D uteronomii, c. v, /’. /… t. cxcviii, col. 1251 ; l’iers Plowman, B. vii, 73. De cel ensemble de témoignage il résulte que la Didaché a été surtout répandue pendant les premiers siècles de l’Église, qu’elle était con nue en Syrie, en Asie Mineure, mais surtout à Alexandrie. Elle se répandit jusqu’en Occident et paraît y avoir subsisté assez longtemps, tandis qu’en Orient elle di parait, remplacée par d’autres manuels, qui en sont un remaniement, adapté aux siècles qui les a vus naître. Il résulte aussi que la Doctrine des douze apôtres, qu’ont connue les premiers siècles, est bien celle qu’a publiée Mar Bryennios.

III. Intégrité. — « A part quelques passages du premier chapitre, dit Harnack, Die Apostellehre, p. 7, qui peuvent trahir une addition postérieure, nous devons affirmer l’intégrité de la Didaché. En fait, du IIe chapitre à la fin, on ne peut rien citer qui ne cadre avec l’ensemble du travail ; rien non plus ne paraît s’être perdu. Trois passages seulement offrent de véritables diflicultés d’interprétation (i, 6 ; xi, 2 ; xvi, 5). » Quant aux versets du chapitre i, 3 à ii, 2, ils ont en leur faveur la Didaché de Bryennios, les Constitutions apostoliques, Hermas, Clément d’Alexandrie, saint Jean Climaque et contre eux l’Epitre de Barnabe, les Canons ecclésiastiques, les fragments de version latine, le Syntagma doctrinse, qui omettent ces versets. Au point de vue interne, ces versets interrompent le cours logique des sentences et expriment des préceptes, qui trouveront ailleurs leur place naturelle. Qu’il suffise cependant d’observer que la Didaché, étant une collection de préceptes détachés, on ne doit pas s’attendre à voir ceux-ci rangés dans un ordre très rigoureux. Il reste donc probable que ces versets ont été dans notre document, dès qu’il a été constitué en dehors de la tradition orale.

IV. Caractéristiques de la Didaché.

Pour donnera ce document toute sa valeur dogmatique, il faut en déterminer la date de composition, afin de le replacer dans son milieu historique. C’est par l’étude de la langue et des sources de l’écrit, qu’on arrivera à ce résultat. — 1. Langue de la Didac/ié. Le vocabulaire et le style sont, à très peu de différences près, ceux du Nouveau Testament. Il y a en tout 2190 mots, dont 552 seulement sont différents, 501 se retrouvent dans le Nouveau Testament, 479 dans les Septante, et 497 dans le grec classique. Un seul mot, 7rpo<TsEojj.oXoysu>, confesser, xiv, 1, est particulier à la Didaché. La langue est le grec hébraïsant ; les mots sont grecs, mais le style et la pensée sont hébraïques. Les phrases sont courtes, sentencieuses, unies par une simple copule et sans développements incidents. Les hébraïsmes y sont nombreux et le parallélisme des sentences est assez souvent observé. — 2. Sources de la Didaché. Elle reproduit plus ou moins textuellement 10 passages de l’Exode, 8 du Lévitique, 3 des Nombres, 15 du Deutéronome, 3 de Néhémie, 4 de Tobie, 8 des Psaumes, 16 des Proverbes, 7 de la Sagesse, Il de l’Ecclésiastique, 4 d’Isaïe, et 9 des autres prophètes. Il aurait été fait au Nouveau Testament plus de deux cents emprunts, plus ou moins littéraux. Nous préciserons plus loin le nombre et l’exactitude de ces emprunts. On relèvera aussi dans la Didaché quelques passages qui rappellent d’assez près des sentences rabbiniques. En résumé, les sources de la Didaché sont juives et chrétiennes. En devons-nous conclure qu’elle est un document juif, auquel on a ajouté des préceptes chrétiens ? C’est l’opinion de Harnack, Realencyclopâdie fur protest. Théologie, t. i, p. 7 -J’» . Les Juifs avaient, dit-il, au I er siècle, ou peut-être avant, une instruction pour les prosélytes sous ce titre : -/.es deux voies : elle renfermait les passages t, I, 3 ; ti, 2-v, 2, et peut-être le chapitre vi de la Didaché. Les chrétiens se servirent de celle instruction comme manuel préparatoire au baptême. Un chrétien inconnu y ajouta le fragment i, 3-n, I, et quelques autres courts passages, de façon à modifier entièrement l’esprit de cet « ’cri t. Par l’adjonction des chapitres vii-xvi, le document devint spécifiquement chrétien. Il est possible qu’il ait existé au ie siècle de I ère chrétienne un recueil de sentences, prescrivant ce que l’homme devait faire et ce qu’il devait éviter et qu’il ait été établi d’abord par des Juifs ; mais la Didai hé, en utilisant ce recueil peut-être encore oral, l’a profondément modifié en le christianisant et en’! "’** » spécîflqiiement juif.

V. Auteur, date et lieu de composition de la Didaché Le nom de l’auteur est inconnu ; c’était a rtainement un chrétien, converti du judaïsme ; tout le , rou nnaissance de i Ancien Testament et des procéda de raisonnement des rabbins, ses fréqui allusions aux usages juift ntion ll lû ""’P° lé " mique contre les Juifs. En outre, c’était un compagnon des apôtres, un de leurs auditeurs ; il vivait dans l’entourage ou mé l’intimité de saint Jacques le Mineur ; car. soit par le choix des matériaux, soit par l’esprit qui l’anime, son travail rappelle en plus d’un endroit ll’.piire de cet apôtre. Pour lui. le christianisme est une doctrine surtout morale, toute de charité et de fraternité. Il a du exercer des fonctions sacrées, car il connaît bien 1 » formules liturgiques et les règlements de discipline. Enfin, l’esprit de conciliation, la prudence et la sérénité qui régnent dans l’œuvre entière font penser à un vieillard, ou tout au moins à un homme instruit par une longue expérience. L’époque de composition ne peut être fixée qu’approximativement. A s’en rapporter à la majorité des critiques, la Didaché aurait été écrite entre 80 et 120 après Jésus-Christ. Cependant, si l’on tient compte des enseignements, qui y sont contenus, par exemple sur les derniers jours, sur les observances légales et surtout de l’organisation du ministère sacré, qui tient le milieu « nlre celui du Nouveau Testament et celui des écrits post-apostoliques, il semble qu’on peut placer la composition de la Didaché- vers "0-80. — Sa patrie d’origine serait probablement la Palestine et peutètre Jérusalem. D’autres pays ont été indiqués, surtout la Syrie et Antiorhe, l’Egypte, etc.

VI. Analyse de la Didaché.

Les enseignements et les prescriptions sont arrangés d’après un plan très simple et très logique : 1° préceptes moraux, i-vi ; 2° règlements liturgiques, vu-x ; 3° ordonnances disciplinaires, xi-xv ; i « Qns dernières, xvi. — 1° La catéchèse morale, l-vi. est divisée en deux parties, l’une traitant de la voie de la vie. et l’autre de la voie de la mort, I, 1. L’auteur décrit d’abord la voie de la vie, i-iv ; il émet les deux principes fondamentaux de cette voie, l’amour de Dieu et l’amour du prochain, dont il donne la règle générale : « Tout ce que tu ne voudrais pas que l’on te fit. ne le fais pas à autrui, » I, 2. De cette règle il donne deux développements : l’un fondé sur le principe positif, émis par Notre-Seigneur dans l’Évangile de saint Matthieu, vu, 12 : Tout ce que vous voudriez que vous fissent les hommes, faites-le leur aussi, i, 3-6 ; et l’autre sur le précepte négatif qu’il vient d’énoncer, ii-in. 7. Dans le premier développement, i, 3-6, les préceptes, mélangés aux conseils, règlent ce que l’on doit faire à l’égard du prochain, et en particulier à l’égard des ennemis ; presque tous positifs, ils rappellent de très près les prél et les conseils évangéliques. Un seul précepte, le dernier, paraîtra, à première vue, peu en harmonie avec le reste, i, 6. Dans le second développement, ii-ni, 7. les préceptes sont négatifs. L’auteur défend d’ahord en gé.1 tout ce qui peut porter préjudice au prochain, il. 2-3 ; puis il revient sur ces défenses, d’ahord en les détaillant, en les précisant par des exemples, ii, 3-7. puis en défendant les causes de ces péchés, ni. 1-7. La forme. ici, on l’a déjà remarqué, est toute particulière et offre plusieurs exemples de parallélisme hébraïque. Une première cause de péché est d’ahord émise, puis on m relève encore deux, trois ou quatre. Des | envers hprochain et aussi envers soi-même, ui l’auteur passe aux devoirs envers soi-même, m. 7-10, envers nos supérieurs et nos frères, iv, 1-4, envers les pauvres, iv, 5-8, envers la famille, enfants et serviteurs, iv. ; i-ll, aux devoirs des serviteurs envers leurs maîtres, iv, ll, enfin il fut quel. pieexhortations générales, iv, 15-14, L-’exposée ensuite la voie de la nuit par deux l une de ;

dont hauteur i.

souhait.’l.tre délivn qui viennent de lui être donn do >.-ign.iir, autant du il hpoir s’abstenir des viandes immolées aux idole la cal’ur’giques, vii-x ; il décrit les cérémonies du baptême, vu. 2-3. et en donne la matière et la form. ibid. : il fixi jours de jeûne, VIII, 1, et ordonne de réciter tro jour l’oraison dominicale, vin. 2-3. II parle de l’eucharistie, dont il donne les prii’la communion. IX. pour la coup.-, ix.’2. et pour la fraction du pain. IX. 3 hprières d’après la communion, x. 1-6. — sième partie, xi-xv, sontcodifiées les ordonnances disciplinaires sur le principe général d’après lequel on jugera ceux qui viennent enseigner, xi. 1-’2. sur i et la conduite qu’ils doivent tenir. XI, 3-6. sur les règles pour éprouver les prophètes, xi, 7-12. sur 1 hospitalité envers les frères, xii. 1-5, sur l’entretien des ministres sacrés, xin. 1-7. sur la clébration du dimanche, xiv. sur le choix des h, correction fraternelle, xv, 3 -’r hntin ri . qui donne leiu - tous ces ts, xvi ; hauteur avertit le fidèle de se tenir prêt pour le dernier jour, il décrit’curseurs, le règne de l’Antéchrist, les signes de la vérité, et enfin la venue du Seigneur, xvi. 1-8.

VII. Enseignements doctrinaux. —

Enseignements dogmatiques.

Fn voici un résumé. Dieu un en trois personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit, vu. 2 ; créateur, i. 2, et tout-puissant, il gouverne tout, x, 3. Il est notre Père céleste, viii. 2. notre bienfaiteur, I, ’5, qui nous donne les biens spirituels et les biens temporels, x. 3. qu’il faut craindre. iv, 9, et honorer, iv, 1. Il est saint, x, 1. l’ennemi du mal et de l’hypocrisie, iv, 12. le fondement de notre espérance, iv. 10. l’auteur de notre salut et l’objet de nos prières et de nos louanges, ix. x. Rien n’arrive dans le monde sans lui, m, 10. et à lui appartient la gloire éternelle par Notre-Seigneur Jésus-Christ. TOI, 4 ; ix. 4 ; x, 4 Jesus-Christ est notre Seigneur et notre Sauveur. X. 2, l’enfant de Dieu, ix. 2. le Dieu de David, x. 6. Il estspirit ut dans son Eglise, et reviendra visiblement au jour du jugement. XVI, 1. 7. S. C’est lui qui nous parle dans l’Évangile, viii, 2 ; xv. 4 : c’est par lui que nous connaissons la vérité et la vie éternelle, la foi etl’imm lité. îx. 3 ; x. 2. La divinité de.h sus-Christ est clairement enseignée. Jésus-Christ est appelé Kvs gneur. Dans les prières eucharistiques. IX. x, la puissance et la gloire dans tous les siècles sont d’abord l’apanage du l’ère ; puis, vers la tin. elles sont l’attribut du Seigneur, c’est-à-dire de Jésus-Christ, dont on souhaite la venue, et que l’on salue comme le Dieu de David. Au chapitre xiv. 3. les paroles que Malachie attribue à Jéhovah sont mises dans la bouche du Seigneur qui. d’après le contexte, c- !.1, sus-Christ. 1 nettement appelé Dieu dans l’acclamation qui terl’action de grâces après la communion arrive, et que ce monde passe ! Hosanna au Dieu de l, aN, (., i s ni s]’est Dieu avec le Pi i le Fils, vii, 2. 3 ; il prépare l’homme a l’appel de I IV. 10. et parle par la bouche des prophètes. Le p contre le Saint-Esprit ne Bera pas pardonne, xi. 7. 1. I glise de Dieu est universelle et tout homme est appelé a en faire partie, x. ô ;.’lie a éti par Dieu, délivrée de tout mal. rendue parfaite dans l’amour divin et préparée pour le royaume éternel, iv. <. I.e baptême et l’eucharistie ont été instit Christ, vu. i.. 3 ; t.". 1. catéchumène recevra h terne après avoir et.- Instruit de la doctrine, ra, 1. « .t seul le chrétien peut participer à l’eucharistie, ix, 5, pour laquelle nous devons rendre grâce, IX, x. Le jour du Seigneur sera sanctifié par le sacrifice eucharistique, XIV, 1. Chaque jour on dira la prière que Notrc-Seigneur nous a enseignée dans l’Évangile, viii, 2, et l’on jeûnera le mercredi et le vendredi, viii, 1. Les ministres de Dieu seront honorés et reçus comme le Seigneur, XI, 1, 4 ; XII, 1 ; xiii, 1, 2. A la fin des temps auront lieu la résurrection et le jugement général, xvi. L’homme est fait à l’image de Dieu, v, 2, mais il est pécheur et il a besoin de pardon, viii, 2 pour l’obtenir il confessera ses péchés, iv, 14 ; xiv, 1, 2, Il doit aimer Dieu et son prochain, i, 2, et pratiquer cet amour en s’abstenant de tout péché de pensée, de parole et d’action, I, 3 ; II, 1, 4 ; III, iv, en pratiquant les commandements comme le lui enseigne l’Évangile, xi, 3, sans y rien ajouter ni en rien retrancher, iv, 13. Sur les fins dernières la Didaché est très explicite ; elle retrace dans son ensemble le tableau des derniers jours du monde. Elle en donne d’abord les signes précurseurs. On ne sait à quelle heure le Seigneur viendra, xvi, 1 ; en ces jours les faux prophètes et les corrupteurs se multiplieront, l’amour se changera en haine, xvi, 3, 4 ; alors paraîtra, comme fils de Dieu, le séducteur du monde, qui fera des choses iniques, xvi.l. Les hommes subiront une épreuve ; beaucoup périront, mais quelques-uns seront sauvés par l’anathème lui-même, xvi, 5. Cet anathème est probablement, Jésus-Christ, qui sera en ces jours un objet de contradiction et sur qui on a dit anathème. Gal., ni, 13 ; I Cor., XII, 3. Ensuite apparaîtront les signes de la vérité : le signe de l’expansion (probablement la croix), la voix de la trompette, la résurrection des morts, non pas de tous, mais des saints qui doivent accompagner le Seigneur, xvi, 6, 7. Alors le Seigneur viendra sur les nuées du ciel, xvi, 8.

Enseignements moraux. —

Les six premiers chapitres de la Didaché sont une catéchèse morale, où sont passés en revue nos devoirs envers Dieu, envers le prochain et envers nous-mêmes. Il n’y a rien de particulier à relever, sinon qu’après l’énumération des préceptes, il est dit : « Veille à ce que nul ne te détourne de ce chemin de la doctrine : car son enseignement serait en dehors de celui de Dieu. Car si tu peux porter le joug du Seigneur tout entier, tu seras parfait ; si cela ne t’est pas possible, fais du moins ce que tu pourras, » VI, 1, 2. Cette conclusion a été expliquée de diverses manières ; il est à croire que le joug du Seigneur est l’ensemble des préceptes et des conseils, qui ont été énumérés dans les chapitres précédents. Le chrétien est autorisé à faire seulement ce qui lui est possible, parce que tout n’est pas précepte rigoureux ; il s’y trouve mêlés des conseils de perfection.

Le culte et les sacrements. —

La Didaché est un témoin précieux de la liturgie primitive, qui en est encore réduite à ses parties essentielles. La Didaché défend de jeûner le même jour que les hypocrites, c’est-à-dire les juifs, et ordonne de jeûner le quatrième jour (le mercredi) et le jour de la préparation (le vendredi). Trois fois par jour on récitera la prière prescrite par le Seigneur dans son Évangile. Il est ordonné d’enseigner avant le baptême tout ce qui est contenu dans les six premiers chapitres. Celui qui administre le baptême et celui qui le reçoit devront jeûner ; le baptisé un jour ou deux auparavant. On baptisera aH nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, dans l’eau vive ou. à son défaut, dans une autre eau, froide ou chaude, vii, 1-3 ; si l’on n’a ni de l’une ni de l’autre en quantité suffisante on versera de l’eau sur la tête trois fois, vii, 4. La Didaché affirme nettement que les péchés pourront être remis, xi, 7 ; l’àme est purifiée par la confession, IV, li ; xtv, 1. Il est parlé en détail de l’eucharistie dans les chapitres ix et x ; on y trouve reproduites les prières de bénédiction qui doivent être dites sur la coupe et sur le pain rompu, i prières d’actions de grûci repas eucharistique ces prières cependant ne sont pas des prières officielles puisqu’il est permis aux prophètes de rendre grâces à leur gré, elles se rapportent certainement à l’eucharistie, sacrifice et sacrement, xvi, 1, 2, dont elles relatent les effets ; c’est une nourriture spirituelle, x, 3, qui produit en nous la vie et la science par Jésus-Christ, x, 2, fait habiter le saint nom de Dieu dans nos cœurs, ibid., nous donne la foi et l’immortalité, qui sont révélées par Jésus-Christ, nous gratifie de la vie éternelle. Ibid. Pour participer à l’eucharistie, il faut être chrétien et saint, ix, 5 ; on se réunissait le dimanche pour la célébrer, xiv, 1, et c’est pour tenir ces assemblées que l’on devait élire des episcopoi et des diacres, xv, 1.

Le ministère chrétien, dans la Didaché, est à un état de transition ; il est plus développé que dans le Nouveau Testament, moins que dans les écrits post-apostoliques. Il est difficile de préciser les fonctions des ministres ; il est même probable que sous des noms différents et avec certaines nuances ils remplissaient les mêmes fonctions. La prédication et la célébration de l’eucharistie, le jour du Seigneur, sont les deux principales. La première paraît avoir été réservée aux apôtres et aux prophètes, avec ces deux différences que l’apôtre n’était pas sédentaire, tandis que le prophète pouvait l’être et que la mission du prophète lui venait de ce qu’il était inspiré de Dieu, inspiration qui doit être prouvée par sa conduite. La seconde paraît être celle des episcopoi, car après avoir dit qu’il fallait se réunir le dimanche pour rompre le pain et offrir un sacrifice, la Didaché ajoute : « Choisissez-vous donc des episcopoi et des diacres, » xv, 1 ; ce ne peut être que pour l’oflicef dont il vient d’être parlé, que ces ministres doivent être élus. Leur rôle cependant était plus étendu, puisqu’ils remplissent pour les fidèles le ministère des prophètes et des docteurs, xv, 1. Mais le ministère de ceux-ci était-il restreint à la prédication ? C’est peu probable, car les prophètes sont les grands-prêtres des chrétiens ; ils ont le droit de rendre grâces à leur gré après la célébration de l’eucharistie, seuls ils peuvent former des assemblées pour un mystère terrestre. Malgré ces prérogatives des prophètes, qui toutes dérivent du fait qu’ils sont inspirés de Dieu, nous croyons que le prophète était en dehors de la hiérarchie ecclésiastique, qui tendait à se fixer. La base en était les episcopoi et les diacres, auxquels s’adjoignaient dans certaines communautés, principalement pour la prédication et l’enseignement, l’apôtre, le prophète et le docteur. Seuls les episcopoi et les diacres sont dits l’objet d’un choix et d’une espèce de consécration qu’indique le terme ^etpoTovrjo-aTe, employé en parlant d’eux.

Canon des Écritures.

La Didaché parle de l’Évangile à diverses reprises, VIII, 2 ; xi, 3 ; xv, 3, i. Fait-elle seulement allusion à la tradition évangélique orale ou à un Évangile écrit ? Peut-être aux deux. Chapitre l, 3-5, elle reproduit des passages communs à saint Matthieu et à saint Luc, mais y ajoute des sentences, spéciales à chacun des deux, et ne suit exactement l’ordre ni de l’un ni de l’autre. Dans ces versets, elle a dû reproduire une catéchèse probablement orale ou une harmonie évangélique dans le genre du Diatessaron de Tatien. Il est certain cependant que la Didaché’a connu un Evangile écrit. Les termes employés le prouvent nettement : « Ainsi que le Seigneur l’a prescrit dans son Evangile, vin, 2 ; comme vous l’avez dans l’Évangile, xv, 3, 4. » Cet Évangile étail probablement celui de suint Matthieu. Deux citations, dont l’une assez longue, sont presque textuelles : Matth., vii, 6 = Did., ix, ">, et Matth., VI, .’» et 9-13 liid., viii, 2. On a relevé’66 ressemblances de texte i litre saint Matthieu et la Didaché ; plusieurs sont assez éloi nées ; quelques-unes sont évidentes. Matth., xxii, 37 = Did., i. - !  : Matth., v. 26 Did., i. 5 ; Matth., v, 5 = Did., m. 7 : Matth., xviii, 19 Did., wii, 1, etc. Voir E. Jacquier, La doctrine des doute apôtres, p. 13-45. i i mde la Didai’pa « avoir connu l I vanrile de saint Marc ; il ne le cite jamais U xtuellement, et dans i i jes paralli les, qui se n trouvent dani gain) Marc, on vt.it clairement qu i ! ’de saint

Matthieu, V-t-il connu I Évangile de saint Lui’Il semble bien l’avoir cité, Luc, ii, 28 :  ; l, 35, à moins qu’il a ait emprunté ces passages à la mi me source que saint Luc. H paraît avoir connu les Actes « 1rs apôtres, témoin le rapport d’idéi - et de termes qui existe entre les A< b s, iv, 32, et In.i., iv, 8. De l Évangile de saint Jean il n’existe aucune citation textuelle dans la Didaché ; il j a cependant des ressemblances très frappantes entre les discours de la cène dans saint Jean, xiv-.wn. et 1rs prières eucharistiques dans la Didaché, x. Ces ressemblances s’expliquent parce fait que la Didaché reproduit les prières eucharistiques, composées d’après la prière sacerdotale de Noire-Seigneur, redite par saint Jean. On a compté 75 références aux Épltres de saint Paul ; aucune n’est textuelle et la plupart sont très vagues. La pren Epltre de saint Pierre, ii, H, est citée textuellement. Did., I, 4. Nous avons vu plus haut l’usage qui a été fait des livres de l’Ancien Testament.

VIII. Conclusion. —

En résumé la Doctrine des douze apôtres, manuel élémentaire de religion, écrit dans la deuxième moitié du premier siècle, se place au point de vue tant dogmatique que liturgique entre le Nouveau Testament et les écrits post-apostoliques. Elle a été compilée par un juif converti et présente des traces nombreuses de judaïsme et de dialectique rabbinique. Elle montre comment s’est effectué le passage du judaïsme au christianisme, signale ce qui a été conservé des cérémonies juives et comment s’est opérée la transformation qui leur a infusé une vie nouvelle. Enfin, elle permet de comprendre quel était l’état moral et social des premières communautés chrétiennes ; c’est donc pour les théologiens, les historiens de l’Eglise et les liturgistes un document très précieux.

Nous citerons seulement les ouvrages les plus important ? ; on trouvera une liste plus complète dans E. Jacquier, La doctrine des douze apôtres, p. 261. — Bryennios Philotheos, Juîayj, r<Sv BcîîSexa àiroo-rôXoiv, Constantinople, 1883 (éditii □ pris Funk, Doctrinn duodecim apostotorum, in-8°, Tubingue, 1887 ; Harnack, Die Lehre der zwolf Apostel, in-8 Leipzig, 1884 ; Die AposteÙehre und die jùdischen beiden Wege, in-12, 1896 ; Harris, The teaching of the twelve apostles, in-’i Baltimore, Londres, 1887 ; Ad. Hilgenfeld, Novum Testamentum extra canonem receptum, fasc. 4% 2- éd., in-8-, Leipzig, 1884 ; Hitchkoek et Brown, Teaching of the twelve apostles, 2’« ’dit., in-8°, New-York, 1886 ; E. Jacquier, La doctrine des douze apôtres et ses enseignements, in-8° Paris-Lyon, 1891 ; Majocchi, La dottrina dei dodici apostoti, Modène, in-12, 1886 ; Uinasi, La dottrina del Signore, detta la dottrina dei dodici apostoli, in-8% Rome, 1891 ; von Renesse, Die Lehre der zwôlf Apostel, in-8", Cïiessen, 1897 ; Sabatier, La Didaché ou l’enseign des’douze apôtres, in-8 « , Paris, 18a", ; Schaff, The teaching of the twelve apostles or the oldest Church manital, in-8 -, 3e édit., New-York, 1889 ; Taylor, The teaching o) the ardre apostles. tritli illustrations fromthe Talmud, in-8’, Cambridge, 1886 ; Wohlenberg, Die Lehre der zwôlf Apostel in ihrem Verhàllniss zum neutestamentUchen Schrifttum, in-8°, Erlangen, 1888 ; J. Schlecbt, Die Lehre der iwôlf Apostel in der Liturgie der katliolischen huche, Fiïbourg-en-Brisgau,

1900.

E. Jacquier.