Dictionnaire de théologie catholique/ABELLY Louis

V. Oblet
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 34-35).

ABELLY Louis, théologien français, né à Paris ou près de Paris dans le Vexin français en 1603. Il étudie à Paris et c’est peut-être dans cette ville qu’il prend le bonnet de docteur en théologie. Il s’attache à Vincent de Paul qui le donne en qualité de grand-vicaire à François Fouquet, évêque de Bayonne. Peu de temps après, il revient à Paris ; en 1644, il est nommé curé de Saint-Josse. Désigné pour l’évêché de Rodez en 1662, sacré en 1664, il se démet de cette dignité trois ans plus tard et se retire à Paris chez les Pères de la Mission dans la maison Saint-Lazare. Il y demeure jusqu’à sa mort (4 octobre 1691), partageant son temps entre la prière et l’étude. C’était un prélat d’une haute piété ; comme saint Vincent de Paul il combattit énergiquement le jansénisme.

Abelly a beaucoup écrit. (Voir dans les Mémoires de Nicéron, Paris, 1740, t. xli, p. 183 sq, la liste de ses travaux). Voici les principaux de ses ouvrages théologiques : 1o  Medulla theotogica, ex sacris Scripturis, conciliorum pontificumque decretis et sanctorum Patrum ac doctorum placitis expressa. La première édition de cet ouvrage (2 in-12, Paris, 1650) fut suivie de beaucoup d’autres (7e édition en 1662, 13e édition, Anvers, 1698). La Medulla est un manuel pratique à l’usage de ceux qui se préparent au ministère pastoral ; les questions purement spéculatives sont exclues ; Abelly n’a voulu donner que les notions essentielles, la « moelle » de la théologie. De là le titre de l’ouvrage ; de là vient aussi l’épithète de « moelleux » que Boileau (Lutrin, chant iv) attache au nom de l’auteur. En morale, Abelly combat le rigorisme des jansénistes ; il est probabiliste. Aussi les écrivains de la secte ne lui ménagent ni leurs critiques, ni leurs railleries. M. de la Berchère, archevêque d’Aix, ayant ordonné aux directeurs de son séminaire de remplacer par la Medulla la rigide Théologie de Grenoble, un écrivain janséniste s’en plaignit amèrement ; dans un libelle paru à Luxembourg, il reproche à Abelly de renverser par son probabilisme la règle la plus certaine de la bonne conscience ; il l’accuse de réduire à presque rien le précepte de l’amour de Dieu et les dispositions nécessaires pour l’absolution. 2o  Tradition de l’Église touchant la dévotion des chrétiens envers la sainte Vierge, in-8o, Paris, 1652. 3o  Les Sentiments des Pères et des Docteurs de l’Église touchant les excellences, les prérogatives et les cultes de la sainte Vierge sont une réponse au fameux libelle, Monita salutaria B. V. Mariæ ad cultores suos indiscretos, traduit en français par le bénédictin Gerberon. Le livre d’Abelly provoque une réplique de Gerberon, bientôt suivie d’une nouvelle Réponse de M. Abelly à la lettre qu’on lui a écrite au sujet des avertissements, in-8o, Paris, 1674. 4o  Défense de l’honneur de la sainte Mère de Dieu, contre un attentat de l’Apologiste de Port-Royal, in-12, Paris, 1666. 5o  De l’obéissance due à N. S. P. le Pape en ce qui regarde les choses de la foi, in-8o, Paris, 1654, réédité en 1870 par P. Cheruel. 6o  Défense de la hiérarchie de l’Église et de l’autorité du pape, contre un libelle anonyme, in-4o, Paris, 1659. 7o  Traité des hérésies, in-4o, Paris, 1661. 8o  Éclaircissement des vérités catholiques touchant le très saint sacrement de l’eucharistie, in-12, Paris, 1667. 9o  Les vérités principales de la foi et de la justice chrétienne, expliquées clairement et méthodiquement, in-4o, Paris, 1675. 10o  Éclaircissement utile pour la paix des âmes et le soulagement des consciences touchant la nécessité de la contrition ou la suffisance de l’attrition pour l’effet du sacrement de pénitence, in-12, Paris, 1675. 11o  La conduite de l’Église catholique touchant le culte du très saint sacrement de l’eucharistie, in-12, Paris, 1678. 12o  La Vie du vénérable serviteur de Dieu Vincent de Paul, in-4o, Paris, 1664. Cet ouvrage écrit sans art, sans méthode, sans élégance, intéresse pourtant, parce que l’historien « représente au naïf la figure de Vincent, parce qu’il s’efface toujours devant lui et lui cède le plus qu’il peut la parole ». Maynard, Saint Vincent de Paul, introduction. Ce livre déplut aux jansénistes. Abelly, l. II, c. xxvii et xxviii, n’ayant rien caché de l’horreur qu’avaient inspirée à M. Vincent les idées de Saint-Cyran sur l’Église et le concile du Trente, les écrivains de la secte contestèrent vivement l’exactitude de son récit. Martin de Barcos, neveu de Saint-Cyran, publia une Défense de feu M. Vincent contre les faux discours du livre de sa vie. Abelly maintint dans sa réplique la vérité de tout ce qu’il avait avancé. Voir les détails de cette controverse dans Maynard, Saint Vincent de Paul, l. V, c. ii.

Bayle, Dictionnaire, art. Abelly, Amsterdam, 1740 ; Collet, La vie de saint Vincent de Paul, préface, Nancy, 1748 ; Niceron, Mémoires pour servir à l’histoire des hommes illustres, t. xli, Paris, 1740 ; Hurter, Nomenclator literarius, Inspruck, 1893, t. ii, col. 586 ; Maynard, Saint Vincent de Paul, préface, Paris, 1860.
V. Oblet.