Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/281-290

Fascicules du tome 2
pages 271 à 280

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 281 à 290

pages 291 à 300


ainsi improprement, car en effet elle n’a point de langue.

Ménage dérive ce met de carpa, latin, qui se trouve en cette signification dans Cassiodore. On croiroit peut-être à cause de la ressemblance des noms, que ce mot vient du latin carpio, qui est un poisson qu’on pêche dans un lac d’Italie ; mais il est tout différent. Les Grecs appellent la carpe, κυπρῖνος ; les Latins cyprinus.

On appelle le saut de la carpe, le saut que font les Baladins, après avoir plié tout le corps, & joint la tête à leurs pieds. La carpe en fait un pareil pour se sauver des filets quand on la tire de l’eau. Cyprini saltus.

On dit d’une personne qu’elle fait la carpe pâmée, pour dire qu’elle feint de se trouver mal. Il est familier.

On dit en termes de Jardinage, mettre de la terre en dos de carpe, ce qu’on observe ordinairement dans les plate-bandes des parterres, ou dans les découpés, à dessein d’y planter des fleurs. Liger. C’est l’élever en sorte qu’elle ressemble à un dos de carpe. In dorsum acutum erigere, in dorsi crepidinem subrigere.

Carpe. s. m. Terme d’Anatomie, qui signifie le poignet ou la partie qui est entre le bras & la paume de la main. Carpsimus. Il est composé de huit os, distribués en deux rangs, dont celui de derrière est joint aux deux fociles par des cartilages & ligamens, & celui de devant aux quatre os du métacarpe. Les Médecins Arabes l’appellent rasette. Les Grecs Καρπός.

CARPEAU. s. m. Petite carpe. Cyprinus minor.

Un carpeau, qui n’étoit encore que fretin,
Fut pris par un pécheur au bord d’une rivière.

La Font.

CARPÉE. s. f. Carpæa, du grec Καρπαία. C’étoit une espèce de danse, ou d’exercice militaire, en usage chez les Ænianes & les Magnésiens. J’ai dit, & d’exercice militaire, car la carpée consistoit en ce que deux hommes armés contrefaisoient l’un un Laboureur, & l’autre un voleur. Le Laboureur mettant bas ses armes semoit, ou faisoit semblant de semer, puis prenoit les bassins de sa charrue, & labouroit son champ, regardant sans cesse de tous côtés en homme inquiet, & qui craint d’être surpris. Le voleur en effet paroissoit ; le laboureur alors quittoit sa charrue, prenoit ses armes, & combattoit pour défendre ses bœufs. Tout cela se faisoit au son de la flûte & en cadence. Tantôt le laboureur, & tantôt le voleur étoit vaincu. Quand le voleur vainquoit, il emmenoit les bœufs du laboureur. Xénophon parle de la carpée dans le Festin de Seutas le Thrace. Voyez aussi Scaliger le pere, Poet. L. I, c. 18. C’étoit apparemment un exercice institué pour apprendre & pour accoutumer les paysans à se défendre contre les incursions des brigands, ou de l’ennemi, comme on tire l’oiseau en France, pour accoutumer le peuple aux exercices de guerre.

☞ CARPENTERIE ou CARPENTER-LAND. Grand pays d’Asie, au midi de la nouvelle Guinée & dans la nouvelle Hollande, découvert par Carpenter, Hollandois, qui lui a donné son nom. Les relations hollandoises ne disent rien de particulier de ce pays.

CARPENTRAS. Carpentoracte Meminorum ou Mimenorum. Ville de Provence, capitale du comté Vénaissin, située sur la rivière de Russe. Elle appartient au Saint Siége. L’Evêque de Carpentras est suffragant d’Avignon. Quelques-uns croient que c’est l’ancien Forum Neronis. Pline l’appelle Carpentoracte, L. III, C. 4. Deux anciennes Notices l’appellent Civitas Carpentoractensium. Voyez Valois, Not. Gall.

☞ CARPENTUM. Espèce de char à deux roues, rarement à quatre, trainé par des mules, servant à plusieurs usages chez les Romains. Voyez Char.

CARPESIUM. s. m. Plante dont Gallien fait mention, mais d’une telle manière qu’on ne sait à présent ce qu’elle est. Quelques Botanistes croient que le carpesium de Gallien est le poivre d’Ethiopie, & d’autres les cubèbes mais ni les uns ni les autres ne font suivis.

CARPETTE. s. f. Carpita. C’est le nom que les Carmes donnoient autrefois à leur chappe, comme il paroît par une Ordonnance d’un Chapitre tenu à Londres l’an 1281. Frater professus habeat unam carpitam, non de petiis consutam, sed contextam ; & habeat septem radios tantùm, ut simus uniformes. Il s’en suit de-là que ces carpettes étoient barrées en pal, dit le P. Hélyot. Qu’elles fussent barrées en pal ou autrement, cela ne se voit point par ces paroles ; mais seulement qu’elles étoient barrées ou rayées, ainsi que tous les habits des premiers Carmes, qui pour, cela furent appelés en France les Freres Barrés.

Carpettes. s. f. Ce sont de gros draps rayés, qu’on appelle autrement tapis à emballer. Pannus crassior & virgatus.

☞ CARPI. Ville d’Italie en Lombardie, à quatre milles de Corrégio. Elle appartient au Duc de Modène.

☞ Il y a une autre ville de même nom en Italie, sur l’Adige, au-dessous de Porto. Celle-ci appartient aux Vénitiens.

☞ CARPIÈRE. s. f. Vieux mot. Réservoir où l’on met des carpes.

CARPILLON. s. m. Diminutif, très-petite carpe. C’est encore moins que carpeau.

Le pauvre carpillon lui dit en sa manière :
Que ferez-vous de moi ? La Fontaine.

CARPIN. s. m. Plante que Matthiole dit être fort connue en Italie, & qui a des feuilles prescque semblables à l’orme, mais plus minces. Elle croît dans les forêts entre les chênes, & d’autres arbres sauvages. Son tronc est haut, couvert d’une écorce blanchâtre, & un peu rude & âpre. Elle jette quantité de branches. Ses fleurs sont de forme triangulaire, & du milieu sortent de petites têtes comme de pois chiches, où la graine est contenue. Les racines de cette plante sont fermes & grosses, & son bois est blanc, solide & visqueux.

☞ CARPIO. Petite ville d’Espagne, dans l’Andalousie, sur le Guadalquivir, entre Cordoue & Anduxar.

☞ CARPOBALSAMUM. s. m. Mot emprunté du latin, pour exprimer le fruit de l’arbre qui produit le baume de Judée. Ce fruit est fort semblable en grosseur, en figure & en couleur, à celui du térébinthe. Il est attaché à la plante par un petit calice, & couvert d’une petite membrane de couleur rougeâtre, ayant au-dedans d’autres tuniques plus épaisses, sous lesquelles est contenue sa semence pleine d’un suc jaune & mielleux, donc le goût est un peu amer & âpre, & l’odeur agréable, approchant de celle du baume. Il est fort rare ; & comme on doute si ce qu’on vend dans les boutiques sous le nom de carpobalsamum, est le même que celui des Anciens, n’ayant pas les mêmes marques, on a accoutumé de lui substituer les cubèbes, qui ont les mêmes qualités.

Ce mot vient de deux mots grecs, καρπός, fruit ; & βάλσαμον, baume.

CARPOCRATIENS. Anciens hérétiques qui tirent leur nom de Carpocrate, Auteur d’une branche de Gnostiques, sous l’Empereur Adrien, c’est-à-dire, au second siècle de l’Eglise. Carpocrate, dit S. Epiphane, Hœr. 27, Chef d’une nouvelle secte, & dont les mœurs étoient fort corrompues, a fait comme revivre les erreurs de Simon le Magicien, de Ménandre, de Saturnin & des autres Gnostiques. Il reconnoissoit avec eux un seul principe & père de toutes choses, dont le nom étoit inconnu aussi-bien que la nature. Le monde, selon lui, avoit été fait par les Anges, fort inférieurs en dignité à ce premier principe. Il étoit entièrement opposé à la Divinité de J. C. voulant qu’il fût né à la manière des autres hommes, & qu’il n’eut aucun avantage sur eux par sa naissance, si ce n’est qu’il avoit eu une ame plus parfaite, qui avoit reçu du premier principe de très-grands dons, qui l’avoient élevé au-dessus des autres créatures. Eusèbe, Liv. IV de son Hist. ch. 7, le fait contemporain de Basilide, après S. Irénée. Il enseignoit la comunauté des femmes, & prétendoit que les âmes ne pouvoient être purifiées, qu’elles n’eussent auparavant commis toutes sortes d’abominations. C’étoit, selon lui, une condition nécessaire pour la perfection. Aussi la vie des Carpocratiens étoit si infâme, que les Païens, qui ne distinguoient pas assez les anciens Hérétiques d’avec les véritables Chrétiens, prirent de-là occasion de parler des Chrétiens comme de gens abandonnés à toutes sortes d’impuretés. Carpocrate eut un fils nommé Epiphane, héritier de ses extravagances ; & Cérinthe pour disciple. Voyez S. Irénée, Liv.I, ch. 24. Tertull. De Præscript. c. 48. Clem. d’Alex. Strom. Liv. III. Eusèbe, Liv. IV, ch. 8 ; & principalement S. Epiphane, Hær. 27, où il parle fort au long des Carpocratiens. Voyez encore Danæus, & Christ. Lupus, sur Tertullien.

CARPOT. s. m. Vieux terme de Coutume. Jus carpendi partem. Nom d’un impôt qui se levoit autrefois sur le vin. Carpot est aussi la part de vendange du propriétaire d’une vigne, qui en partage les fruits avec son vigneron. Portio ou pars capienda.

☞ CARQUEBAS. Voyez Cale-bas.

CARQUÈSE. s. m. Terme de Verrerie. Four de frite. C’est un four séparé du four de la Verrerie, dans le quel on fait cuire les pots avant que de les mettre dans le four de la Verrerie.

CARQUOIS. s. m. Etui à flèches, qu’on porte sur l’épaule. Pharetra. On peint Cupidon avec un arc & un carquois, & Diane pareillement.

Tout est mystère dans l’amour,
Ses flèches, son carquois, son flambeau, son enfance ;
Ce n’est pas l’ouvrage d’un jour,
Que d’épuiser cette science. La Font.

Ménage, après Lipse, tient que ce mot vient de l’allemand kœcher, signifiant la même chose. Du Cange le dérive de carcaissum, mot de la basse latinité, qu’on a dit dans le même sens.

CARRAQUON. Voyez Caraquon.

CARRAQUE. Voyez Caraque.

CARRARA. Lieu près de Gènes où se tire le plus beau marbre. Vie de S. Fiacre, Liv. III, p. 222.

☞ CARRARE. s. m. est le nom qu’on donne au beau marbre qu’on tire du lieu dont on vient de parler.

CARRAS. s. m. pl. On nomme ainsi en Languedoc les bois de sapin qui sont débités comme nos bois carrés.

☞ CARRAVERIA ou BOOR CASTORO, anciennement BERRHOCA. Ville archiépiscopale de Turquie en Europe, dans la Macédoine. C’est le Beroée des actes des Apôtres.

CARRE. Voyez Care.

CARRE. s. f. Ce mot n’est guère en usage que dans ces façons de parler. La carre d’un chapeau ; pour dire, le haut de la forme d’un chapeau. La carre d’un habit ; pour dire le haut de la taille d’un habit ; la carre d’un soulier ; pour dire, le bout d’un soulier.

On dit populairement, qu’une personne a une bonne carre, pour dire, qu’elle a les épaules bien larges & bien fournies, & que cela lui donne de la prestance. Acad. Fr.

Carre. Terme de Chaudronnier. Les Chaudronniers appellent la carre d’un chaudron, d’un poêlon, ou d’une marmite, l’endroit où le fond de ces ouvrages se joint au bord.

Carre, qu’on nomme aussi Carse. Terme de commerce. Mesure de continence dont on se sert à Briare, pour mesurer les grains.

Carre. (B) Terme de Musique. C’est une marque qui fait chanter demi-ton plus haut que quand il y l’un B mol.

CARRÉ. s. m. Plusieurs écrivent QUARRÉ. En termes de Géométrie, c’est une figure quadrangulaire qui a les quatre angles droits, & les quatre côtés égaux. Quadratum, vel figura quadrangularis. La diagonale du carré est incommensurable avec un de ses côtés. Euclide, Liv. X.

Carré long, est une figure quadrangulaire qui a quatres angles droits, mais qui a plus de longueur que de largeur. On l’appelle autrement bar-long. Quadratum longius.

Carré parfait. C’est une figure régulière, dont les quatre côtés & les quatre angles sont égaux. Daviler.

Carré long, ouvrage de Fortification. Il a à chacun de ses angles un bastion. Au milieu de ses deux grands côtés on place, ou de simples bastions, ou des bastions plats, ou des demi-redoutes formées d’un angle saillant.

Carré géométrique, c’est un instrument qui est de grand usage pour observer tant sur terre que sur mer. Quadratum geometricum. Il a un centre à l’un de ses angles. Les deux côtés éloignés du centre sont divisés en plusieurs parties égales. L’un de ceux qui est vers le centre est chargé de deux pinnules, & il y a une alhidade mobile qui part du centre, qui sert aux Géomètres & aux Astronomes à observer. Toutes les observations de la Géométrie de la Trigonométrie se peuvent faire avec le carré. Il y a aussi un quart de cercle tracé du même centre, divisé en 90 degrés.

Carré de carré. Terme d’Algèbre, est la troisième puissance ou multiplication d’un nombre, quand on multiplie encore un cube par sa racine. Quadratum quadrati.

☞ Ce mot s’applique dans les arts méchaniques à plusieurs choses qui ont la forme du carré, ou approchant du carré.

Carré de parterre ou Carreau, est une division qu’on fait dans les compartimens d’un parterre, avec du buis nain, ou autres petites herbes, pour y mettre des fleurs. Area. On le dit encore en jardinage d’une espèce de terrein carré dans lequel on plante des légumes, des racines, des salades. Comme les parties d’un jardin, renfermées par des allées, forment souvent des surfaces carrées, les Jardiniers disent, j’ai planté un carré de choux, d’artichauds, de sémidoubles, &c. lors même que les lieux qu’ils plantent ont d’autres figures. On dit aussi les carrés d’un échiquier.

Carré de Mars ou de Saturne. Quadratum. Voyez Quadrat. C’est la même chose.

Carré de mouton, est la partie du mouton qui est sous l’épaule, & qui contient toutes ses côtes. Quadrans vervecis.

Carré, se dit aussi chez les Monnoyeurs, du morceau d’acier fait en forme de dé qu’on met sous le balancier, où est gravée en creux la figure qu’on veut faire venir en relief sur le métal qu’on presse dessus. Pixis monetaria quadrata.

Les Orfèvres appellent carré le pied d’un flambeau, d’une aiguière, & de tous autres ouvrages, ce qui leur sert de pied, de quelque figure qu’ils soient ; carrés ronds, ou a plusieurs pans ou angles. Basis quadrata.

On appelle aussi carré de bâtiment, une maison bâtie de quatre côtés, qui environne la cour qui est au milieu. Domus quadrata.

On dit en termes de Manège, travailler en carré, quand, au lieu de conduire le cheval en rond autour du pilier, en le mène par quatre ligne droites, qui forment un carré, tournant la main a chacun des angles. Equum per quadrum aqere.

Carré au piquet, se dit quand on marque soixante-six avec quatre jetons, ensorte que cela fasse un carré. Calculus, numerus in quadrum dispositus. Le père de Voiture avoit été fort grand joueur de piquet : il avoit accoutumé de dire qu’il tenoit la partie gagnée, quand il pouvoit attraper le carré, c’est-à-dire, soixante-six, qu’on marque avec quatre jetons en carré, d’où vient qu’on appelle encore aujourd’hui ce point-là parmi les Joueurs, le carré de Voiture. Pelisson, Hist. de l’Acad. Fr. in-8°. p. 469 & p. 280 de l’edit. in-12 1730.

Carré de toilette, est un petit coffret carré, où les Dames mettent leurs essences, fards & pommades, qui servent à leur toilette. Capsulæ mundi muliebris.

Carré magique. Quadrans magicum, est une disposition de certains nombres en carré, de manière que ceux d’une même file, & ceux d’un même rang, & ceux qui composent les deux diagonales étant ajoutés ensemble, fassent toujours une même somme, comme si on met au premier rang deux-cens soixante-seize, au second neuf-cens cinquante-un, au troisième quatre-cens trente-huit, de quelque côté qu’on assemble ces nombres, ils feront quinze. On l’appelle magique, parce que c’est un problême très-difficile. Bertinus en rapporte quantité d’exemples en de plus grands nombres. Dans les divers Ouvrages de Messieurs de l’Académie des Sciences, il y a un traité des Carrés Magiques, par M. Frénicle ; une table des Carrés Magiques par le même.

Carré, en termes d’Anatomie, se dit de trois muscles. Le second des quatre muscles du rayon s’appelle le carré, à cause de sa figure quadrangulaire ; il prend son origine de la partie inférieure, & quali externe du cubitus, & s’insoie à la partie inférieure & quasi externe du radius. Ce muscle est placé proche le poignet sous les autres : il finit par un tendon aussi large que son principe, & conjointement avec le rond, il fait faire un mouvement demi-circulaire au radius. Dionis. Le second muscle des abducteurs de la cuisse s’appelle aussi le carré, parce qu’il a quatre angles : il prend son origine de la partie latérale & externe de l’éminence de l’ischion, & va s’insérer à la partie postérieure & externe du grand trocanter. Id. Le muscle des lèvres appelé montanus, est aussi nommé carré. Voyez Montanus.

Carré, traîne ou traîneau. Terme de Cordier. Bâtis de charpente en forme de traîneau, sur le devant duquel s’élèvent deux forts montans pour supporter une traverse dans laquelle passent les manivelles qui servent à tordre les torrons ou à commettre la corde ; on charge le carré de poids, pour que les torrons soient bien tendus quand on les commet.

Carré de cuir, chez les Tanneurs & les Cordonniers ; morceaux de cuir coupés par carrés. Un carré contient juste ce qu’il faut de cuir pour faire une paire de souliers. On l’appelle aussi tableau, & l’on dit des Cordonniers qui se pourvoient de cette manière, parce qu’ils ne sont pas en état d’acheter des cuirs entiers, qu’ils vont au tableau.

Carré, ée adj. Qui est d’une figure à quatre côtés perpendiculaires l’un à l’autre & égaux entr’eux. Cette cour n’est pas bien carrée. Ce jardin est parfaitement carré.

Carré, (bonnet) est un bonnet de Prêtre, d’Avocat, ou d’autre homme de robe, qui a quatre petites éminences sur la tête qu’on appelle cornes, par où on le prend. Biretum quadratum. Voyez Bonnet.

Carré (nombre). Terme de Géométrie. C’est le produit d’un nombre multiplié par lui-même. Quatre est un nombre carré ; il est formé de deux multiplié par deux : neuf est un nombre carré, formé du nombre trois multiplié par lui-même : seize est un nombre carré formé de la multiplication de quatre par quatre, &c. Ainsi le nombre carré est un nombre qui résulte d’un autre nombre multiplié par lui-même.

Racine carrée, un nombre, qui étant multiplié par lui-même, fait un nombre carré, ou il y a autant d’unités en largeur, qu’en hauteur. Radix quadrata. Dix est la racine carrée de cent, parce que dix multiplié par dix, fait cent.

Homme carré, se dit de celui qui est gros & trapu qui est large des épaules. Homo corpore crasso, repleto. On dit aussi un visage carré, quand sa largeur égale presque sa hauteur.

Jeu de paume carré, est un jeu ordinaire, dont les murailles sont parallèles, & font un carré-long. On l’appelle un jeu carré, par opposition au jeu de dedans, où il y a un tambour. Ludus quadiatus Sphærifierii.

La monnoie carrée, dont il est parlé dans les Novelles de Justinien, étoit une des quatre plus petites espèces qui eussent cours alors. Elle étoit ainsi nommée, parce qu’elle étoit carrée. Voyez la dissertation de M. Du Cange, De inferioris ævi numismatibus.

On appelle en termes de rhétorique une période carrée, une période de quatre membres, quadrata periodus : & par extension, on le dit de toute période nombreuse & bien soutenue, quoi qu’elle ne soit pas de quatre membres.

☞ On appelle prose carrée, un style qui tient le milieu entre la prose ordinaire & les vers, & qui n’est ni l’un ni l’autre. On se sert ordinairement de la prose carrée dans les inscriptions & les épitaphes ; c’est pourquoi on lui a aussi donné le nom de style lapidaire, parce que ces sortes d’ouvrages sont souvent gravés sur la pierre : mais comme ces monumens sont encore plus souvent gravés sur le cuivre, qui résiste davantage aux insultes du temps, le terme de prose carrée est aujourd’ui le plus commun.

Batallion carré, est celui qui a autant de files que de rangs. Agmen quadratum. On l’appelle aussi carré de terrein, quand il occupe autant de terre en longueur qu’en hauteur. Voyez Bataillon.

On appeloit à Rome une légion carrée, legio quadrata, celle qui étoit de quatre-cens hommes.

Bois carré, est le bois de charpente & de sciage, dont on fait des poutres & des solives. Lignum quadratum.

☞ On appelle ironiquement un vendeur d’allumettes, un marchand de bois carré. Sulfuratorum propola.

On dit proverbialement, juste & carré comme une flûte. On appelle aussi partie carrée, une partie de plaisir où il n’y a que deux hommes & deux femmes. Societas quadrata. On le dit de toute compagnie où l’on n’est que quatre hommes ou femmes, sans qu’il soit besoin qu’il y ait deux hommes & deux femmes.

CARREAU. s. m. Diminutif de carré, qui se dit d’une figure qui a quatre côtés, quoiqu’ils ne soient pas égaux, ni à angles droits, comme un carreau de vitres qui est quelquefois en losange. Quadratum. On dit une étoffe à petits carreaux, où il y a plusieurs petits carrés. Plier du linge par petits carreaux. Les Jardiniers divisent leurs parterres, ou jardins en carreaux. Area. Il y a un beau carreau de tulippes, c’est-à-dire une planche. Carreau de parterre, est une espace carré ou figuré avec une bordure de buis nain, rempli de fleurs ou de gazon, dans le compartiment d’un parterre de pièces coupées. Ce mot a été fait de quadrellum. Ménage.

Carreau, signifie aussi le pavé des chambres, des salles, des Eglises, de quelque matière & figure qu’il puisse être. Quadratus later, laterculus. Il y a des carreaux de marbre, de poterie, de fayence ou d’ais ; il y en a de carres, d’hexagones, &c.

En ce sens on dit au jeu de paume, une chasse à trois carreaux, à dix carreaux, lorsqu’une balle est tombée sur le troisième ou le dixième carreau, & qu’elle fait chasse.

Carreau, se dit plus particulièrement du carreau de plancher, qui est de terre moulée & cuite, de différente grandeur & épaisseur suivant les lieux. Il y a de grand, de moyen & de petit carreau ; le grand a huit ou dix pouces de largeur ; le moyen en à six à sept, & le petit environ quatre. Il y a du carreau de figure carrée : il y en a à pans ; & celui-ci quelquefois est à six pans, quelquefois à huit.

☞ Jouer au franc-carreau, espèce de jeu où chaque joueur jette en l’air une pièce de monnoie, & où celui dont la pièce tombe le plus loin des bords du carreau, gagne le coup.

☞ On dit, coucher sur le carreau, pour dire hors du lit, sur le plancher.

☞ Mettre, jeter les meubles de quelqu’un sur le carreau, c’est-à-dire, dans la rue.

☞ Jeter, coucher quelqu’un sur le carreau, l’étendre sur la place, mort ou blessé.

☞ Tant de Soldats sont restés sur le carreau, ont été tués sur la place.

Carreau vernissé, est un grand carreau plombé, qu’on met dans les écuries, au-dessus des mangeoires des chevaux, ce qui les empêche de lécher le mur. Quadratum Juniperi gummi illitum. On fait aussi du petit carreau vernissé pour les compartimens.

Carreau de parquet est un petit ais carré. Il en faut plusieurs pour remplir la carcasse d’une feuille de parquet. Quadratum tessellatum.

On appelle carreau de verre, une pièce de verre carré, ☞ ou d’une autre figure, mise en plomb, ou retenue avec des pointes ou du papier, ou du mastic, dans les chassis d’une fenêtre. Vitreum quadratum.

Carreau de faiance, ou de Hollande. Il sert à faire des foyers, & à revêtir les jambages de cheminée, & a ordinairement quatre pouces en carré. On l’emploie aussi à paver & à revêtir des grottes, des salles, des bains, &c.

Carreau, signifie aussi un grand oreiller ou coussin carré que les personnes d’un certain rang font porter à l’Eglise pour se mettre à genoux plus commodément. Pulvinus. C’est une Dame à carreau, on lui porte le carreau. Un Auteur qui a fait les Observationes Eugenialogicæ, c’est-à-dire, des observations sur la noblesse, imprimées à Cologne en 1678, trouve chez les Romains l’origine des carreaux, dont les Dames se servent dans les Eglises. Les Romains mettoient dans les temples des carreaux en forme de petits lits, ou plutôt de petits chars sur lesquels on plaçoit les statues des faux Dieux ; & il prétend que l’ambition & la commodité ont fait usurper ce droit ou cette coutume au sexe.

On a aussi des carreaux dans les chambres pour s’asseoir ou s’accouder. Les Cavaliers étoient à ce bal aux pieds des Dames sur des carreaux.

Un porte-carreau, est un petit meuble de bois qui n’a d’autres piés que des pommes tournées, sur lequel on met des piles de carreaux.

Carreaux, en termes de Marine, sont des rebords ou bandes de bois qui règnent par dehors sur le bordage du vaisseau en guise d’un cordon, qui lie & distingue les tillacs, & particulièrement ceux qui sont au-dessus de l’eau. On les appelle autrement lices cintes, ou précintes, ou chaintes. On donne le même nom de carreaux à certaines pièces de bois qui font le haut des côtés d’une chaloupe.

Carreau, en termes de Maçon, est une pierre de taille de médiocre grosseur, & qui a plus de largeur au parement, que de queue dans le mur. Lapis sola superficie extimâ quadratus. Il en faut deux ou trois pour faire une voie. Quand il n’y en a qu’un, on l’appelle quartier. Quand il y en a plus de deux ou trois, on dit libes ou libage.

Carreau, est aussi un arme de trait, ou flèche carrée, qu’on tiroit autrefois avec une arbalète. De-là sont venues, les expressions figurées, carreaux vengeurs de Jupiter, carreau de la foudre, le trait ou la pierre qu’on croit être dans la foudre, qui blesse & qui tue. Fulmen. Voyez Tonnerre.

Déja ces Tirans insensés
Du haut de leurs monts entassés,
Voyaient le Ciel comme leur proie ;
Quand d’un effort impétueux,
Le carreau s’élance… & foudroie
Ces colosses présomptueux. Anony.

Carreau, chez les Tailleurs, se dit d’un fer plat & pointu par un bout, qu’on fait chausser, & qu’on passe sur les coutures pour aplatir les rentraitures.

☞ Il y a aussi des carreaux de Blanchisseuses, différens des carreaux des Tailleurs, en ce qu’ils sont arrondis par la partie antérieure, & que la platine est fort unie.

Carreau, chez les Marchands de poisson, se dit des brochets qui sont les plus gros, qu’ils appellent un brochet carreau. Lucius crassior & amplior.

Carreaux se dit aussi chez les ouvriers qui emploient le fer, des grosses limes ☞ carrées, triangulaires, ou méplates, dont on se sert pour enlever au fer les inégalités de la forge ; ce qui s’appelle dégrossir. Lima crassior & quadrata. Les gros carreaux & gros demi-carreaux servent à ébaucher le fer. Les carreaux doux & demi-carreaux sont des limes dont la taille est moins rude, & qui servent pour les ouvrages dont le dégrossissage est moins consid&rable.

Carreau se dit aussi au jeu de cartes, des figures rouges, marquées en losange. Folium lusorium rhombo coloris rubri pictum. Le Roi, la Dame de carreau. Il a une quinte majore en carreau.

On dit proverbialement & bassement d’un homme qui a vomi, qu’il a jetté du cœur sur du carreau. On dit aussi pour mépriser quelqu’un, que c’est un valet de carreau.

Carreau, terme d’ancien monnoyage, lorsqu’on fabriquoit les espèces au marteau. Il se dit des pièces d’or ou d’argent qu’on taille pour fabriquer les espèces. Nummaria massula, monetaria tessella. La première façon qu’on donne en la fabrique des monnoies au marteau, est de tailler les carreaux, c’est-à-dire, couper les lingots, ou lames d’or ou d’argent, en petits morceaux carrés avec de grandes cisoires. La seconde façon, est de battre ou frapper les carreaux ; ce qui se fait par un habile ouvrier sur une enclume oblongue qui est sur son banc dans sa fournaise. Sa troisième façon est de recuire les carreaux : & la quatrième de les ajuster, approcher ou rebaisser, pour les rendre de leur juste poids, & ensuite les rechauffer & flatir, elsaizer & boicer, qui sont les cinq, six, sept & huitième façon qu’on leur donne, après lesquelles les carreaux s’appellent flins ou espèces.

Carreau. Terme de Commerce. Mesure comme une aune. C’est peut-être aussi un drap plié en carré, Borel, Pathelin.

Or ça, montrez ces carreaux.

Carreau. On donnoit encore autrefois ce nom aux grosses pierres qu’on jetoit dans les villes avec les mangoneaux ; de carrus, parce que chacune chargeoit un char ; ou de leur forme carrée. Cairou, en Languedoc, est la même chose que carreau & pierre ; qui vient de quaire, c’est-à-dire angle, ou de quadratum. Borel. Ovide MS.

Carreau. Terme de Médecine. Sorte d’opilation qui presse l’estomac, la poitrine, & qui rend le ventre dur & tendu. Les enfans sont plus sujets au carreau que les grandes personnes.

CARRÉE FINE, CARRÉE FORTE. Ce sont deux diverses espèces d’ardoises qui se taillent dans les ardoisières d’Anjou.

CARREFOUR. s. m. Lieu où aboutissent & se croisent plusieurs rues & chemins. Compitum, trivium. On fustige les criminels dans les places publiques, & dans les carrefours. Les publications à son de trompe se font dans les carrefours.

Ce mot vient de quatre fourc, parce que fourc signifioie autrefois un angle aigu, comme celui que font les doigts l’un à l’égard de l’autre ; d’où a été fait aussi le mot de fourche. Les Latins l’ont appelé quadrivium, ubi quatuor viæ conveniunt ; & ☞ trivium, l’endroit où aboutissent trois rues, trois chemins. Compita frequentia. Carrefours remplis de peuple. Perse appelle compita ramosa des carrefours d’où sortent plusieurs rues ; & compita pertusa, l’endroit dans un bois d’où l’on voit plusieurs avenues.

☞ On appelle aussi carrefour, en jardinage, la rencontre de quatre allées dans un bois ; ce qui imite l’issue de quatre rues dans une ville. On peut les faire circulaires ou carrées, en retranchant les encoignures, pour les agrandir, & leur donner plus de grâce.

CARRÉGER. v. n. Terme de Marine. C’est sur la Méditerranée ce que louvier ou louvoyer signifie sur l’Océan, c’est-à-dire, prendre & courir plusieurs bordées, en voguant tantôt à droite & tantôt à gauche. On est obligé de carréger, quand on a le vent contraire, afin d’avancer un peu ; ou du moins de se conserver dans le même parage.

CARRELAGE. s. m. Action d’appliquer des carreaux, ☞ de terre cuite, de marbre, ou d’autre matière ; ouvrage de celui qui les pose. Stratura, La toise de carrelage coûte tant.

☞ On le dit aussi du carreau, & de ce qu’il en coûte pour le faire poser. Pavimentum. Il m’en a tant coûté pour le carrelage de ma chambre.

CARRELER. v. a. Paver une chambre, ou autre lieu de carreaux de terre, de faiance, de marbre. Cubiculum sternere è lateribus, faventiâ, marmore ; pavimentare. Carreler une chambre de grands, de petits carreaux, de pierre de liais, &c.

☞ On disoit autrefois carreler des souliers, les remonter.

CARRELÉ, ÉE. part. & adj. Stratus. Un plancher, une chambre carrelée.

Carrelé. adj. Pris substantivement, espèce d’étoffe composée comme le cannelé, de quarante portées de chaînes un peu plus ou un peu moins, & d’un pareil nombre de portées de poil.

CARRELET. s. m. Grosse aiguille à quatre carnes ou côtés, dont se servent les Savetiers, Selliers, & autres qui travaillent en cuir. Acus quadrata.

Carrelet. Poisson de mer fort plat, taillé en losange, comme le turbot. Il est blanc d’un côté, & grisâtre de l’autre, avec de petites taches rouges. Ce poisson est appelé par quelques-uns plie, ouand il est grand, & carrelet, quand il est petit. En latin quadratulus.

☞ Rondelet prétend avec raison que le carrelet & la plie sont deux espèces du même genre, qui se ressemblent beaucoup, mais qui différent cependant en ce que la figure du carrelet approche plus du carré que la plie, d’où lui vient son nom, & que sa face supérieure est parsemée de taches rousses.

Carrelet. Terme de Pharmacie. C’est un instrument de bois fait en carré, ayant aux quatre coins des pointes de clous pour y attacher un blanchet, par lequel on passe quelque liqueur.

Carrelet. Terme de Chapelier. Espèce de petite carde sans manche, dont les pointes sont de fil très-fin, qui sert aux Chapeliers à tirer le poil des chapeaux : ce qu’ils appellent, tirer le chapeau à poil.

Carrelet. Outil d’acier, raillé en triangle, dont les Tabletiers-Peigniers se servent pour amorcer les dents de leurs peignes, c’est-à-dire, pour les ouvrir.

Carrelet. Terme de Chirurgie. Acus quadrata. C’est une aiguille droite, longue de deux ou trois pouces, ronde dans son corps, carrée du côté de la pointe, dont les angles sont adoucis & ne coupent point. On s’en sert pour percer l’épiploon, & faire la ligature du cordon des vaisseaux spermatiques.

☞ Les Selliers, Cordonniers, &c. se servent aussi d’une grande aiguille à quatre angles, nommée carrelet, pour coudre les cuirs foibles & minces,

☞ Les Cordonniers se servent encore d’un carrelet à renverser, qui est une aiguille un peu coudée, pour faire la trépointe du derrière du soulier.

Carrelet. Terme de pêche. Sorte de filet dont on se sert pour prendre le poisson. Prendre du poisson au carrelet, avec un carrelet.

CARRELETTE. s. m. Lime qui sert à limer & polir fe ter. Grosses carrelettes. Les petites carrelettes sont des limes douces.

CARRELEUR. s. m. Ouvrier qui pave avec des carreaux, ainsi que le maître qui entreprend les ouvrages de carrelage. Artifex sternendi pavimenti & lateribus.

CARRELURE. s. f. Application des carreaux sur le plancher d’une chambre. Stratura. Il a tant coûté pour la carrelure de cette maison. On dit carrelage.

Carrelure ne se dit plus que des semelles neuves qu’on met à de vieux souliers, à de vieilles bottes. Veterum calceamentorum instauratio, calceorum sartura. Il faut une carrelure à ces bottes.

On dit figurément & bassement, une carrelure de ventre, pour dire un bon repas. Le temps qui se passa jusqu’au souper me parut un siècle, tant j’avois besoin d’une bonne carrelure de ventre. Abl.

☞ CARRÉMENT. adv. En carré, à angle droit. On ne le dit guère que dans ces phrases. Couper quelque chose carrément. Tracer un plan carrément. Planter carrément.

☞ CARRER. v. a. Réduire en carré, donner une figure carrée à quelque chose que ce soit. Quadrare. Carrer un bloc de marbre.

☞ En Charpenterie, carrer une poutre, c’est l’équarrir.

☞ En Arithmétique & en Algèbre, carrer un nombre, c’est le multiplier par lui-même. Carrer le nombre quatre, c’est multiplier quatre par quarre, pour avoir le produit 16, carré de quatre.

☞ En Géométrie, carrer une figure, c’est trouver un carré dont la surface soit égale à l’aire du plan proposé, réduire en carré une autre figure. Quadrare. On peut aisément carrer un triangle, & toute autre figure rectiligne. Le grand problème de la Géométrie, est de carrer un cercle, une ellipse, une parabole, & toute autre figure curviligne, c’est-à-dire, faire un carré qui leur soit parfaitement égal. Voyez Quadrature.

On dit avec le pronom personnel, se carrer ; pour dire, marcher avec affectation, ☞ d’une manière qui marque l’arrogance. Voyez comme il se carre. Subnixis alis se inferre, ansatum ambulare, esterre se magnificè. On ne le dit que dans le style familier.

☞ CARRET. s. m. Chez les Cordiers, fil de carret, gros fil qui sert à faire les cordages.

Carret. Terme de Marine, qui se dit d’un fil tiré d’un des cordons de quelque vieux cable coupé par pièces, qui est de grand usage pour racommoder les manœuvres. Funiculus.

Carret, est aussi un nom que donnent les Marchands à l’écaille de tortue. Testudinis putamina.

On donne encore ce nom à une des trois espèces de tortues, qui est la seule dont l’écaille soit utile. Sa chair est un purgatif très-violent. Les deux autres espèces de tortues, sont la tortue franche ou verte, dont la chair est délicieuse à manger, & la coanne, qui est la plus grande de toutes, mais dont la chair ni l’écaille ne valent rien. Le carret est la plus petite des espèces de tortue ; & c’est de son nom que les Marchands ont appelé l’écaille de tortue carret.

CARRHES. Nom ancien de plusieurs villes en Orient. Carrhæ, Carrhes, ville de l’Arabie proche de la mer, est, à ce que l’on croit, celle qui se nomme aujourd’hui Héren. Carrhes, ville de Mésopotamie, aujourd’hui du Diarbeck, est l’ancienne חרן, Hharan ou Charan, séjour de Tharè & d’Abraham, dont il est parlé, Gen. XII, 31, & Act VIII, 2. Ptolomée la place à quarante milles d’Edesse : d’autres sur le fleuve Chaboras ; & d’autres sur le Charra. C’est à Carrhes que Crassus fut défait par les Parthes, & que Caracalle fut tué. Carrhes eut depuis un Evêché suffragant d’Edesse. Voy. Bochart Phaleg Liv. I, c. 14. p. 107.

☞ CARRICK. Province de l’Ecosse méridionale, entre celle de Kyle au nord & celle de Galloway au midi.

CARRIER. s. m. Ouvrier qui tire & qui coupe la pierre des carrières. Latomus, lapicida. On le dit aussi des Marchands de pierre, ☞ ou de l’Entrepreneur qui fait ouvrir une carrière pour en tirer de la pierre.

CARRIÈRE. s. f. Lieu creusé en terre pour en tirer la pierre. Lapidicina. On ne peut pas bâtir sur ce terrain, il est creux, on y a fouillé des carrières. Une carrière de marbre, de jaspe, de pierre de Saint Leu, de Tonnerre, &c. On les distingue par la matière que l’on en tire. Les carrières d’où on tire le marbre, s’appellent marbrières : & celles d’où on tire la pierre, pierrières, & celles d’où l’on tire l’ardoise, ardoisières, quelquefois pierrières, comme en Anjou. Il y a des carrières où on trouve deux cieux, ou bancs de ciel, à 12 ou 15 pieds au dessous l’un de l’autre, comme a remarqué Blondel.

Ce mot vient de carreaux, ou grosses pierres qu’on tire des carrières, qu’on a appelé en latin Quadrariæ, ou carreriæ.

On dit figurément & proverbialement, qu’un homme a une carrière dans la vessie, quand après en avoir tiré quelques pierres, il s’y en engendre de nouvelles.

Les Botanistes appellent aussi dans une poire, la carrière, cette partie où s’amassent plusieurs petits nœuds pierreux, qui vers le centre du fruit semblent ne former qu’une pierre. Cette carrière, ces nœuds se forment, non-seulement dans le centre, mais encore dans la chair de la poire, principalement de celles qu’on appelle poires d’estranguillon. M. Grew, dans son Anatomie des Plantes, dit que ces nœuds ne sont autre chose que plusieurs parties du suc endurcies & coagulées de la même manière que celles qu’on voit souvent dans les urines, dans les tonneaux de vin & dans plusieurs autres liqueurs, par la précipitation que cause quelquefois le mélange & la force des sucs qui se trouvent dans les corps ligneux & dans le parenchyme, qui agissent les uns sur les autres.

Carrière. Terme de Coutumes. Chemin large de huit pieds, où l’on peut mener charrette l’une après l’autre, & bétail en cordel & non autrement.

Carrière, en ternes de Manège, signifie un lieu fermé de barrières où l’on entre pour courir la bague & la course même du cheval. On le dit généralement d’un parc destiné aux exercices d’un homme de cheval. Stadium curvatum, Hippodromus. Il a fourni sa carrière. Il a bronché au milieu de la carrière, sitôt qu’il est entré dans la carrière. Ce cheval a une certaine carrière tride, c’est-à-dire, il galope fort vite.

☞ On dit qu’un cheval a bien fourni sa carrière, pour dire, qu’il a bien fait la course qu’on vouloit qu’il fît.

En Fauconnerie on appelle carrière, la montée de l’oiseau d’environ 60 toises. S’il monte plus ou moins, on dit double carrière ou demi-carrière.

Dans les cirques anciens on appeloit carrière, le chemin que devoient faire les biges, ou quadriges, c’est-à-dire, les chariots à deux ou à quatre chevaux, qu’on faisoit courir à toute bride jusqu’aux bornes du stade, pour remporter les prix.

☞ On dit figurément ouvrir à quelqu’un une carrière, une belle carrière, lui donner occasion de faire briller ses talens. Cet événement lui a ouvert une belle carrière.

☞ Donner carrière à son esprit, se laisser emporter à son génie, se laisser aller à l’envie qu’on a de dire certaines choses. Ciceron pouvoir donner une libre carrière à son esprit, & employer l’art de persuader dans toute son étendue. P. Rap.

☞ Courir la carrière, s’exercer à quelque chose. Ils courent tous deux la même carrière.

O vous donc, qui brûlant d’une ardeur périlleuse,
Courez du bel esprit la carrière épineuse. Boil.

☞ Se donner carrière, signifie aussi se livrer à la joie, se laisser emporter à l’envie, au plaisir que l’on a de faire ou de dire quelque chose. On dit dans le même sens se donner carrière aux dépens de quelqu’un, s’en divertir par des railleries.

Carrière, se dit encor, figurément du cours de la vie, & du temps qu’on passe dans quelque fonction, dans l’exercice de quelque charge, Curriculum, cursus, stadium. Ce saint homme a fourni sa carrière, a passé sa vie dans les exercices de piété. Le prix nous attend au bout de la carrière. Cet Ambassadeur a fourni sa carrière, a achevé sa négociation avec succès. Sa carrière, qui pouvoit être plus longue, ne pouvoit être ni plus belle, ni plus glorieuse. Patru.

On dit proverbialement, qu’on a fait passer carrière à quelqu’un ; pour dire, qu’on lui a fait faire quelque chose haut la main & malgré lui.

☞ On le dit poétiquement, du mouvement périodique des astres. Les astres commencent leur carrière quand ils se levent. Ils finissent leur carrière quand ils se couchent.

Avant que le soleil commence sa carrière,
Et que l’aurore au monde annonce son retour.

☞ Ce mot vient de carrera, de la basse latinité, qui est aussi espagnol, & qui a été fait de carra, comme qui diroit chemin de charrette. Men. Ou bien il vient de quadrariæ ou quadratariæ, à quadris vel quadratis lapidibus. Borel le dérive de charrière, vieux mot françois, rue par où peut passer une charrette.

CARRILLON. Voyez Carillon.

CARRILLONNER. Voyez Carillonner.

CARRILLONEUR. Voyez Carillonneur.

CARRIOTTE. s. f. Fruit du Palmier qu’on appelle communément datte. Palma, palmula, palmæ pomum.

CARROSSE. s. m. Voiture commode pour aller par la ville & à la campagne. Rheda, currus, petoritum, carpentum, essedum. C’est un vaisseau propre à tenir plusieurs personnes, suspendu avec de grosses courroies sur quatre moutons, posé sur un train à quatre roues. Ses parties sont le train, le bateau, l’impériale, les quenouilles, les fonds, les portières, les mantelets, les gouttières. Teissier, dans ses Eloges des Hommes ilustres, remarque que du temps de François I, il n’y avoit à Paris que deux carrosses, celui de la Reine, & celui de Diane, fille naturelle d’Henri II, & que le premier des Seigneurs de la Cour qui en eut un, fut Jean de Laval de Bois-Dauphin, qui, ne pouvant se tenir à cheval à cause de son excessive grosseur, fut contraint de se servir de cette voiture. Les Ducs & Pairs ont le privilége d’entrer en carrosse dans le Louvre ; & les Duchesses, de mettre des housses sur leurs carrosses.

Ménage dérive ce mot de carruca, ou carrucha, qui se trouve ainsi écrit dans les Pandectes de Florence. On trouve carroccium, pour un char de guerre, Acta SS. Maii, Tome VII, p. 39. D. Le mot carrosse vient de carrus, carrum. Schrieck fait venir le nom françois carrosse, & le mot latin carrum, de l’hébreu חרוץ, carots, plaustrum, chariot.

Un carrosse coupé, est un carrosse qui n’a qu’un fond sur le derrière, & qui n’a tout au plus sur le devant qu’un strapontin. Currus accisus. Un carrosse à glaces, c’est celui qui est garni de glaces. Laminis cristallinis instructus, ornatus. Un carrosse drapé, est un carrosse de deuil, garni de drap dehors & dedans. Pullatis intra extraque pannis opertus. L’attelage d’un carrosse s’entend de six chevaux avec un volontaire, pour servir à la place de quelqu’un des autres à qui il arriveroit quelque accident. Ce Prince a trois attelages de carosse. L’attelage ordinaire n’est que de deux chevaux.

D’où vient cet embaras, ces carrosses de file ?
Quel spectacle nouveau fait accourir la ville ? Vill.

On appelle un homme à carrosse, une Dame à carrosse, ceux qui se distinguent du peuple par l’équipage d’un carrosse qu’ils entretiennent, qui font rouler carrosse. La sottise de l’esprit humain est telle, qu’il n’y a rien qui ne lui serve à aggrandir l’idée qu’il a de lui-même ; & si l’on y prend garde, il s’estime davantage à cheval, ou en carrosse, qu’à pied. P. Royal.

Les carrosses de louage sont de deux sortes. Les carrosses de remise & les carrosses de places, appelés communément Fiacres. Ces derniers à Paris ne sont pas si propres que les carrosses de remise. On les appelle carrosses de places, parce qu’on les trouve sur les places publiques à Paris, où ils attendent qu’on les loue ; & les autres, carrosses de remise, parce qu’ils ne sont point fut les places. Pour le nom de Fiacre, il vient du nom de celui qui a établi ces carrosses, & les a le premier fournis au public à Paris, & qui se nommoit Fiacre.

☞ Il y a aussi des carrosses publics pour aller d’une ville à une autre. Voyez Voiture publique.

Les Historiens, & sur-tout ceux d’Italie, ont appelé carrosse, le principal étendard d’une armée, qui étoit attaché à un arbre gros comme un grand mât, avec des cables, sur un chariot couvert d’écarlate, & tiré par quatre paires de bœufs caparaçonnés & couverts de satin blanc avec une croix rouge sur le milieu. Il avoit au haut une croix d’or fort brillante, & l’étendard étoit blanc chargé d’une croix rouge. Personne n’osoit prendre la fuite, tant qu’ils subsistoit debout. Il étoit à la garde d’un Capitaine, avec huit Trompettes & huit soldats d’élite, & il y avoit un Aumônier qui disoit tous les jours la Messe auprès. Les Auteurs en attribuent l’invention à Héribert, Archevêque de Milan vers l’an 1124. L’Empereur Othon IV, avoit un semblable carrosse. Plusieurs autres Princes en ont eu aussi, comme les Rois de Hongrie, & même les Sarrazins.

On appelle proverbialement un cheval de carrosse, un homme sans esprit, grossier & brutal.

CARROSSIER. s. m. Ouvrier qui fait & qui vend des carrosses. Rhedarum opifex. Ceux de ce métier sont plus connus sous le nom de Selliers. Dans leurs statuts ils ont la qualité de Selliers, Lormiers, Carrossiers ; & ils font à Paris un corps séparé d’avec les Bourreliers.

On appelle encore carrosser, un cheval propre pour le carrosse, principalement quand il n’est bon qu’à cet usage. Ce cheval est trop haut & trop matériel pour faire un cheval de maître, il n’est bon qu’à faire un carrossier. Il étoit monté sur un grand carrossier qui se secouoit d’une étrange manière,

CARROUBE ou CARROBE. Voyez CAROUGE.

CARROUBLE. s. m. Baudelot dans son histoire de Ptolémée Aulétès, p. 102, donne ce nom pour un nom de poisson. Je ne l’ai point trouvé ailleurs, & je ne sais quel poisson ce peut-être.

CARROUS. Voyez Carrousse. C’est la même chose, si ce n’est que carrous n’est plus en usage,

CARROUSEL. s. m. Course de chariots & de chevaux, fête magnifique que font des Princes, ou des grands Seigneurs pour quelque réjouissance publique ; comme aux mariages, aux entrées des Rois, &c. Ludus equestris. Elle consiste en une cavalcade de plusieurs Seigneurs superbement vêtus, & équipés à la manière des anciens Chevaliers, qui sont divisés en quadrilles. Ils se rendent à quelque place publique, où ils font des courses de bagues, des joutes, tournois & autres exercices convenables à la Noblesse. On y ajoute quelquefois des charriots de triomphe, des machines, des danses, des courses de chevaux, &c. & c’est de-là que ces fêtes ont pris leur nom. Les Maures y introduisirent les chifres & les livrées, dont il ornèrent leurs armes & les housses de leurs chevaux, avec plusieurs applications mystérieuses. Les Goths & les Allemands y ajoutèrent l’usage des cimiers, des masses de héron & des aigrettes. La plupart des machines sont des inventions des Italiens.

☞ Ces combats, qui tenoient de l’ancienne Chevalerie, prirent la place des Joûtes & des Tournois sous le règne de Henri IV. Depuis Louis XIV, ils ont cessé d’être de mode.

On appelle aussi carrousel, le lieu, la place où l’on a fait un carrousel.

Ce mot vient de l’italien carrosello, diminutif de carro. Men. Le P. François Menestrier Jésuite, a écrit des carrousels, des joûtes & des tournois. Il y décrit la pompe ou la marche des carrousels, le lieu ou la carrière des carrousels, les sujets des carrousels, les machines des carrousels, les récits & l’harmonie des carrousels, les personnes qui entrent dans la pompe des carrousels, les comparses, & toutes les actions ordinaires des carrousels.

Tertullien en son livre des Spectacles, attribue à Circé l’invention des carrousels, & veut qu’elle ait été la première à dresser le cirque & des courses en l’honneur du Soleil son père. De sorte que quelques-uns croient que ce mot vient de carrus solis, ou de caro del sole. Mais il y a plus d’apparence qu’il vient des chars & carosses qu’on y menoit.

CARROUSSE. s. f. Bonne chère qu’on fait en buvant ; & en se réjouissant. Larga & hilaris compotatio. Ils ont été trois jours chez un tel à faire carrousse. Ce mot est populaire & vient de l’allemand garhaus, qui veux dire, tout vuidé ; on sous-entend le verre ; d’où on a fait depuis carrous, & puis carrousse. Men. Borel le dérivent de κάρα, gaudium,

CARROY. s. m. Vieux mot, qui se trouve dans Marot. Place publique, grande & spacieuse où peuvent aller & venir les cars ou les carres, c’est-à-dire, les chars ou chariots. Forum.

 
Quand fut en plein carroy
Sur un haut lieu se mit en bel arroy. Marot.

CARRUCHEN. s. m. Espèce de petite carpe qu’on a apportée depuis peu de Hambourg en Angleterre. Hist. de l’Acad. des Sc. 1742, 31.

CARRURE. s. f. ☞ La largeur du dos par les épaules & un peu au-dessus. Voila un homme d’une belle carrure. Les Tailleurs se servent de ce mot en parlant de la taille d’un pourpoint, ou d’un corps de jupe, qui se dit particulièrement de l’espace qui est entre les deux épaules. Spatium inter humeros interjectum. On dit carrure de devant, carrure de derrière.

☞ CARS. Ville d’Asie dans l’Arménie, vers les sources de l’Euphrate & les frontières de la Géorgie.

CARSAYE. s. f. ou CRESEAU. s. m. Etoffe qui se fabrique en Angleterre,

CARSE. s. f. Mesure. Voyez Carre.

☞ CARSISTE. Voyez Carciste.

CARTAGE. Voyez Carthage.

☞ CARTAGER. v. n. Mot qui n’est en usage que dans l’Orléannois, pour signifier, donner à la vigne un quatrième labour. Cette quatrième façon devient nécessaire, quand la vigne a été fumée depuis la dernière recolte, principalement si l’année a été pluvieuse, à cause des herbes que le fumier & les pluies fréquentes font pousser.

CARTAHU. s. m. Terme de Marine. C’est une Manœuvre passée dans une poulie au haut des mâts, pour hisser les autres manœuvres, ou autre chose.

☞ CARTAMA. Ville d’Espagne, au Royaume de Grenade, environ à trois lieues de Malaga, sur la rivière de Guadaljose.

CARTAME ou CARTHAME. s. m. Carthamum officinarum, sive tenicus sativus. Plante annuelle à fleurons ; ainsi nommée à cause de sa qualité purgative. Sa racine est menue, & quelquefois se divise en plusieurs menus bras. Elle ne pousse qu’une seule tige, haute de deux pieds environ, arrondie, branchue à son extrémité, & chargée de feuilles alternes, lisses, nerveuses, longues de deux pouces sur demi pouce de largeur, pointue à leur extrémité, plus larges à leur base, & un peu épineuses sur leurs bords. Ses branches sont terminées par des têtes grosses comme des noix, composées de plusieurs écailles assez larges, pointues, & de couleur pareille à celle des feuilles. Les fleurons qu’enferment ces têtes sont d’un beau jaune qui rougit en se desséchant. Chaque fleuron est porté par un embryon qui devient une semence blanche, faite en forme de coin, plus grosse qu’un grain d’orge, & qui n’est point chargée d’aigrettes. Cette semence dépouillée de sa peau extérieure est purgative, & sert de base aux tablettes diacarthami. Cette même semence se donne aux perroquets ; d’où lui vient le nom de semence de perroquet. Sa fleur est employée comme le vrai saffran, d’où vient le titre de saffranum ou saffran bâtard. On l’emploie dans les teintures de laine & de soie. Voyez Saffran bâtard.

Ce mot vient de caten, qui, chez les Mores, signifie la même plante, ou du grec καθαίρειν, purger ; car cette plante est purgative,

CARTAMY. s. m. Drogue ou semence employée dans les tarifs.

CARTAUT. Voyez Quartaut.

CARTAUX. s. m. pl. Sur mer on appelle cartaux les cartes marines. Tabulæ nauticæ, ou maritimæ.

CARTAYER. v. n. Terme de Cocher & de Charretier. Conduire une voiture de manière que les roues soient entre les ornières & les ruisseaux, & non dedans, ce qui soulage les chevaux. Il y a de l’adresse & quelquefois du danger à cartayer. On prononce carteyer. On dit aussi quarter & quartoyer.

CARTE. s. f. Papier. Charta. Il n’est plus en usage que dans cette phrase, donner la carte blanche à quelqu’un, ou donner carte blanche ; pour dire, lui donner un papier blanc ligné pour le remplir de ce qu’il lui plaira.

On le dit aussi au figuré, pour dire ; se soumettre à toutes les conditions qu’un autre nous voudra imposer ; lui laisser la liberté entière de faire ce qu’il lui plaira, dans une affaire qu’on lui propose, ou dont on le charge. On dit, avoir carte blanche, de celui à qui on la donne. ☞ Dans l’art militaire, dire qu’un Général a carte blanche, c’est dire qu’il peut attaquer l’ennemi sans avoir besoin d’ordres particuliers, sans en avertir la Cour auparavant.

Carte, se dit aussi du mémoire de la dépense d’un repas, chez un Traiteur. Apportez la carte.

Carte, signifie en général le carton dont se servent les Artificiers. Ils en désignent l’épaisseur par le nombre des feuilles de gros papier gris dont il est composé : ainsi l’on dit de la carte en deux, trois, quatre ou cinq, sans y ajouter le mot de feuilles, qui est sous-entendu chez eux & chez les Marchands qui les vendent. On désigne les petites cartes, en les appelant cartes à jouer, & le gros carton plus roide & moins propre au moulage, qui doit être flexible, s’appelle carte-lisse.

Carte, est aussi une grande feuille de papier ou plusieurs feuilles collées ensemble, sur lesquelles on a tracé, dépeint ou gravé la représentation du monde, ou de ses parties. Tabula. Les cartes géographiques contiennent la description des terres, les hydrographiques, celle de la mer ; les chorographiques, celle d’une région ; les topographiques, celle de quelques lieux particuliers.

Hévélius a fait le premier des cartes sélénographiques, qui contiennent la description des figures qui apparoissent dans la lune. La carte universelle, qui représente toute la surface de la terre ou les deux hémisphères, s’appelle mappemonde. Totius orbis in tabula descriptio. On dit aussi des cartes cosmographiques ; pour dire, la description du monde. La carte particulière est celle qui représente quelques pays particuliers, ou quelques portions de pays. On a trouvé l’invention de faire des cartes topographiques fort exactes, en faisant des observations avec des instrumens garnis d’alhidades en deux stations. Le premier qui en a écrit, a été Philippe d’Amfrie, Tailleur général des monnoies de France en 1597 & les PP. Jean-François Schot & Pardies, Jésuites, comme a rapporté le sieur Comiers en son Traité des Lunettes. On prétend que Sesostris, premier Roi d’Egypte, qui se rendit redoutable par les armes, fut aussi le premier des hommes qui inventa les cartes géographiques, pour faire connoître l’étendue de ses conquêtes.

Carte Marine ou Hydrographique, est la projection de quelques parties de la mer sur un plan, pour l’usage des Navigateurs : c’est une carte où l’on prend peu de soin de marquer les villes qui sont en terre ferme ; mais on y décrit exactement la mer, les côtes, les ports, les rochers, les îles, les bancs de fable, les fèches & les golfes. Marina, nautica tabula. On y décrit aussi, outre les longitudes & latitudes, les lignes des rhumbs des vents. On y marque les méridiens en lignes parallèles ; ce qui est sujet à beaucoup d’erreurs. On se sert sur la méditerranée de cartes par routes & distances. Elles n’ont point d’autres lignes que celles des rhumbs des vents ; & une seule échelle, qui se mesure par milles. Les matelots ont des cartes au point plat, au point commun, qui sont les ordinaires ; d’autres au point réduit, quand les degrés de latitude, c’est-à-dire, les degrés qui courent nord & sud, sont tous inégaux entr’eux, plus petits auprès de l’équateur, & plus grands à mesure qu’ils s’approchent des pôles ; ce qui arrive, lorsque la projection de la carte est telle, que le pole y sert de centre, & que les rayons en marquent les méridiens.

Carte plate, est une carte qui représente une moyenne étendue, comme sont les côtes ; qui ont une échelle de lieues, & de plus les degrés de latitude marqués sur leurs côtés parallèles au méridien. Plus les cartes sont à grands points, c’est-à-dire, plus elles sont grandes à proportion du terrain qu’elles représentent, plus elles sont parfaites.

On appelle cartes réduites, celles où les degrés de latitude vont en augmentant de l’équateur vers les pôles, en raison des sécantes. Ainsi, prenant pour un degré de l’équateur, & pour le premier degré de latitude, ou le rayon entier, ou une partie aliquote quelconque de ce rayon, on prerd pour le second degré de latitude la sécante d’un degré, ou la partie aliquote semblable de cette sécante. Pour le 3e degré, on prend la sécante de deux degrés, ou la partie aliquote semblable, & ainsi de suite.

Lorsque l’on veut avoir une carte à plus grand point, on prend pour 30 minutes de latitude, ou pour 30 minutes de l’équateur, un rayon de cercle, ou une partie aliquote quelconque de ce rayon : pour un degré de latitude, on ajoute de suite la sécante de 30 minutes. Pour le second degré de latitude, on ajoute la sécante de 30′ ou les parties aliquotes semblables de ces sécantes, & ainsi de suite. C’est absolument la même construction pour les échelles de latitude. Dans les cartes au plus grand point, comme celles du Neptune François, au lieu de prendre les sécantes de degré en degré, ou de démi-degré en demi-degré, on les prend de 10 minures en 10 minutes, & même plus près à près ; & tous les Auteurs conviennent que les cartes réduites & les échelles de latitude, sont d’autant meilleures, que l’on prend de suite de plus petits arcs. De Lagny, Acad. des Sciences, 1703, p. 96, 97. On dit que les cartes sont réduites en grand ou en petit point, suivant que la divison des degrés est faite en un plus grand ou en un plus petit nombre de parties. Snellius est le premier Auteur des cartes réduites.

Carte de Mercator, ainsi nommée de Mercator, qui l’a proposée le premier, est celle dans laquelle les méridiens & les parallèles sont représentés par des droites parallèles, mais où les degrés des méridiens sont inégaux, & croissent toujours à mesure qu’ils s’approchent au pôle, dans la même raison que ceux des parallèles décroissent sur le globe, au moyen de quoi, ils conservent entr’eux la même proportion que sur le globe.

Pointer la carte, c’est marquer le lieu sur la carte où on croît être en pleine mer, suivant l’observation & l’estime d’un Pilote. Altum mare in tabula nautica designare.

On fait aussi sur terre des cartes de routes pour les logemens de gens de guerre, &c pour les campemens : & on dit, ôter quelqu’un de dessus la carte, pour dire l’exemter du logement des gens de guerre, faire détourner un peu la route.

Savoir la carte, se dit au propre de ceux qui savent la Géographie. Peritum esse Geographiœ, in Geographia esse versatum. Il se dit mieux encore, au figuré, de ceux qui connoissent les intrigues d’une Cour, le train des affaires d’un Etat, les détours d’une maison, les connoissances, les habitudes, les secrets d’une famille, d’un quartier. Occultas aulicorum artes, initas rerum rationes, secreta domus, arcana familiarum nosse, callere. Balzac a dit qu’il est aisé de trafiquer sur la carte, c’est-à-dire, qu’il est facile de donner des conseils, loin des événemens & du danger.

Carte Astronomique, est une carte qui représente les Constellations, dans la situation qu’elles ont les unes à l’égard des autres. Tabula astronomica.

Carte Généalogique, est une carte qui contient toute la Généalogie d’une Maison. Tabula genealogica.

Carte signifie aussi, un corps fait de plusieurs feuilles de papier collées ensemble, ou de papier haché, mouillé, réduit en bouillie, rassemblé & sèché dans une presse. Charta spissior, On met de la carte dans les collets de pourpoint, & dans plusieurs autres choses qu’on veut rendre dures & fermes. On fait des images de carte dans des moules, des plaques ; des ornemens de plafond avec de la carte dorée.

Carte, en termes de Cartier, est une feuille de carton, où il y a plusieurs cartes sans êtres coupées. Tabula pictis foliis lusoriis distincta.

Cartes, se dit plus ordinairement au pluriel, quoiqu’on dise aussi fort bien au singulier, une carte. ☞ Petits feuillets de carton fin coupé en carré long, blancs d’un côté, marqués de l’autre de quelque figure & de quelque couleur, dont on se sert à plusieurs jeux, qu’on appelle pour cette raison jeux de cartes. Folia lusoria. Il y a plusieurs jeux de cartes, le piquet, le brelan, l’ombre, le quadrille, la bassette, le lansquenet, la triomphe, le hère, l’impériale, le hoc, le reversis, la grande & petite prime, la menille, &c.

On appelle fausses cartes ou cartes préparées, des cartes qui ont des marques auxquelles on les connoît, & par le moyen desquelles on voit si elles sont dans le jeu de l’adversaire, ou qui servent à les faite tomber à qui l’on veut. Adulterinum folium. Les filoux se servent de cartes préparées, pour tromper ceux contre lesquels ils jouent. Cléon étoit d’un quart à la bassette avec une jeune dupe, pour laquelle il tailloit avec des cartes préparées. Chev. de Rior.

On dit aussi qu’il est entré une fausse carte dans un jeu, quand c’est une carte toute seule d’un point. Folium lusorium notæ inferioris. Elle est désavantageuse, parce qu’on est obligé d’obéir à une haute de même point qu’on jette, & qui fait perdre la main. Les Lydiens, pour charmer la faim pendant une extrême disette, inventèrent les cartes & la paume ; ils jouoient un jour, ils mangeoient l’autre. Le Gendre.

On dit aussi, battre, mêler, brouiller, couper les cartes ; lorsqu’on les manie long-temps pour en changer l’ordre & la disposition, & qu’ensuite on en sépare le jeu en deux, & qu’on met dessus celles qui étoient dessous, après quoi on les distribue. Miscere, perturbare.

On dit figurément en ce sens, que les cartes sont bien brouillées, quand dans un Etat, ou dans une Cour, il y a des troubles, des guerres, des dissensions, des intérêts & affaires fort difficiles à accommoder.

On dit figurément, le dessous des cartes, pour dire, une chose secrète. Je trahis son secret pour vous, par le plaisir que j’ai de vous faire voir le dessous des cartes, qu’il a dessein de vous cacher à vous-même. Madame de Sevig.

On dit proverbialement à un homme qui se plaint, & qui est difficile à satisfaire. Si vous n’êtes pas content, prenez des cartes.

On appelle jouer bien les cartes, faire des cartes, gagner les cartes, quand on fait un plus grand nombre de levées des cartes qu’on joue sur la table, que celui contre qui l’on joue. Scienter foliis pictis ludere, folia versare, dimittere.

On appelle cartes, ce que les joueurs laissent pour la dépense des cartes. Les domestiques ont les cartes.

On dit figurément d’une maison bien enjolivée, mais bâtie peu solidement, que c’est un château de cartes.

Carte. Dans l’Ordre des Chartreux on donne le nom de carte aux décisions du chapitre général de l’Ordre.

Carte de Charité. Nom en usage dans l’Ordre de Cîteaux. Charta charitatis. S. Etienne, Abbé de Cîteaux, ayant fondé plusieurs monastères en France & en Allemagne, & voulant les unir par les liens de charité & d’uniformité d’observances, dressa avec les Abbés & quelques Religieux de ces monastères le premier statut de l’Ordre qu’il appella la Carte de charité, qui contient en cinq chapitres tous les réglemens nécessaires pour l’établissement & la conduite de cet Ordre, & pour maintenir l’union, la régularité, la dépendance & la charité. P. Hel. T. V, p. 351. La carte de charité fut modifiée en 1265, par la Clémentine ou Bulle de Clément V.

Carte de Perruquier. Voyez Carde.

CARTEL. s. m. Lettre de défi, écrit qu’on envoie a quelqu’un pour le défier à un combat singulier, soit pour des tournois, soit pour un duel formé. Scriptum quo quis provocat ad certamen. Cet écrit contient ordinairement le lieu, la manière, le sujet, le jour & l’heure du combat. Les cartels ne sont plus en usage depuis que le Roi a si sévèrement défendu les duels, si ce n’est figurément & en raillerie, quand on veut défier quelqu’un à la dispute, & faire un assaut de réputation & d’esprit. L’usage des cartels & des défis est fort ancien, & on en voit divers exemples dans Homère, Virgile & autres Poëtes Grecs & Latins,

L’ami pour son ami, présenfant le cartel,
Se fit d’être assassin un devoir criminel. Vill.

Cartel, signifie aussi un accord qui se fait entre les Etats, pour la rançon des prisonniers pendant la guerre. Pactio de captivis inita belli tempore.

Cartel. Mesure de continence pour les grains, qui est en usage à Rocroy, à Mezières & autres lieux. Cette mesure est différente selon les différens lieux. Voyez le Dict. de Commerce.

CARTELADE. s. f. Mesure en longueur dont on se sert pour l’arpentage des terres dans quelques endroits de la Guienne, particulièrement à Aiguillon & à Colleigne. Il faut 36 picotins pour faire la cartelade ; chaque picotin de 12 escairs, & chaque escair de douze pieds, mesure d’Agen, qui est environ de trois lignes plus grande que le pied du Roi.

CARTELET s. m. Petite étoffe ordinairement toute de laine.

CARTELETTE. adj. f. Terme de couvreur. On appelle la plus petite ardoise, ardoise cartelette.

CARTELLE. s. f. Terme de Charpenterie, qui se dit des grosses planches ou dosses qui servent aux moulins à porter les meules, ou à faire des planchers qui sont à côté, & à d’autres usages. Materies.

Cartelle, est aussi une façon de débiter les bois qui sont recherchés ; comme les frênes & érables loupeux & nouailleux, lorsqu’on les met par petites planches de trois, quatre & cinq pouces d’épaisseur pour servir aux Ebénistes. Tessella.

CARTENIER. Voyez Quartenier.

CARTARO. s. m. De l’italien Carterio. Porte-lettre. Sorte d’étui ou de porte-feuille, dans lequel on met des lettres & des papiers, & que l’on porte dans sa poche. Le Comte de Tournon sortit, Madame (Marguerite de Valois) lui ayant donné un cartero de peau d’Espagne en broderie de perles pour Monsieur (le Duc d’Anjou,) à dessein de redoubler l’inquiétude du Duc de Guise… Madame de Ville-Dieu, Journal amoureux, Tom. 10, p. 306. Le Comte, en portant le cartero à Monsieur d’Anjou, l’ouvrit, & trouva dedans un billet cacheté, sur lequel il y avoit écrit : Pour vous, Tournon,.., p. 308.

CARTERON. Voyez Quarteron.

CARTÉSIANISME. s. m. Prononcez la seconde s. La philosophie de Descartes. Sentimens, opinions du philosophe Descartes. Cartesianismus. Secte de Philosophes modernes dont Descartes est le chef, & qui prend son nom du mot latin de son chef, Cartesius.

Le Cartésianisme a ses principes de Méthaphysique & de Physique. ☞ Le principe de Méthaphysique est, qu’il faut douter de tout d’un doute méthodique, c’est-à-dire, qu’il faut d’abord se comporter comme si tout étoit douteux. Defcartes débute ensuite par ce principe ; je pense, donc je suis : & conclut qu’il n’y a de vérités philosophiques que celles qu’on apperçoit par l’idée claire ou par le sentiment intérieur. Ce principe a été attaqué & soutenu avec beaucoup de vivacité, & avec trop de partialité de part & d’autre : car, quoiqu’il soit vrai que nous sommes assurés en même temps par le sentiment intérieur de la conscience, que nous existons, comme nous le sommes que nous pensons, il est vrai de dire que la conclusion de ce raisonnement, je suis, se tire bien de l’antécédent, je pense, puisque penser, suppose nécessairement être ou exister, & que l’esprit voit clairement la liaison nécessaire qu’il y a entre penser & être. Cependant Descartes n’a pas dû proposer son principe comme une nouvelle découverte. Avant lui on savoit que, pour penser, il faut être, & que celui qui pense actuellement, existe actuellement. Pour la Physique le principe du Cartésianisme est qu’il n’y a que des substances ; ce principe a paru dangereux, & on le combat tous les jours dans les écoles Catholiques, en prouvant, ou en voulant prouver, qu’il y a des accidens absolus. Ces substances sont de deux sortes. L’une est la substance qui pense, & l’autre la substance étendue ; la pensée actuelle ; l’étendue actuelle, sont de l’essence de la substance, tellement que la substance pensante ne peut être sans quelque pensée actuelle, & qu’on ne peut rien retrancher de l’étendue d’une chose, sans retrancher de la substance. A l’égard de la substance pensante, on ne conçoit pas comment Dieu ne pourroit pas l’empêcher de penser, en lui refusant son concours pour quelque action que ce soit, tandis qu’il lui conservera l’existence. A l’égard de la substance étendue, la foi nous apprend que le corps de Jesus-Christ ne perd rien de sa substance dans le Sacrement de l’Eucharistie, quoiqu’il y perde beaucoup de son étendue ; ainsi l’on ne peut pas dire que l’étendue est l’essence de la matière. Un autre principe du Cartésianisme, est qu’il n’y a point de vide, & qu’il n’y en peut avoir dans la nature, parce que ce vide pourroit être mesuré, il seroit étendu. Ce seroit donc de la matière, car tout ce qui est étendu est matière.

Ces principes de Physique une fois supposés, Descartes explique par les principes de la Méchanique, & par les règles du mouvement, comment le monde a été formé tel qu’il est.

MONDE DE DESCARTES.

☞ Descartes suppose une multitude de parcelles de matière, dures, cubiques ou seulement anguleuses, étroitement appliquées l’une contre l’autre, face contre face, & si bien entassées, qu’il ne se trouve pas le moindre vide entr’elles. Ensuite Dieu met toutes ces parcelles en mouvement ; il les fait tourner la plupart autour de leur propre centre, & de plus, il les pousse en ligne droite : enfin, il en fait tourner un certain nombre autour d’un centre commun. Cela supposé, vous allez voir sortir de ce chaos un monde semblable au nôtre, par l’impression seule du mouvement. D’abord de ces parcelles primordiales, inégalement mues, l’on voit sortir trois élémens, & de ces trois élémens toutes les pièces qui se perpétuent dans le monde.

☞ Premièrement les angles, les extrémités des parcelles sont inégalement rompues. La plus fine poussière qui vient de la raclure des ongles, est la matière subtile, qu’il nomme le premier élément ; les corps usés & arrondis par le frottement, sont le second élément, les globules ou la lumière ; la poussière la plus grossière, les éclats les plus massifs & les plus anguleux sont le troisième élément, ou la matière terrestre & planétaire.

☞ Tous ces élémens mis, & se faisant obstacle les uns aux autres, se contraignent réciproquement à avancer, non en ligne droite, mais en ligne circulaire, & à marcher par tourbillons, les uns autour d’un centre commun, les autres autour d’un autre. Voilà la formation des tourbillons. Tous ces élémens, en tourbillonnant ainsi, font effort pour s’éloigner du centre de leur mouvement ; ce que Descartes appelle force centrifuge.

☞ Tous ces élémens tâchant de s’éloigner du centre, les plus massifs d’entr’eux sont ceux qui s’en éloignèrent le plus. Pulvérisez un morceau de cire à cacheter ; secouez le papier sur lequel est la poussière, les morceaux qui ont plus de solidité s’approchent plus des extrémités des papiers. La poussière la plus fine reste au milieu. Ainsi l’élément globuleux sera plus éloigné du centre que la matière subtile ; & comme tout est plein, cette matière subtile se rangera en partie dans les interstices des globules, & en partie vers le centre du tourbillon. Cet amas de la plus fine poussière, qui s’est rangée au centre, est ce que Descartes appelle un soleil. Il y a de pareils amas dans d’autres tourbillons, comme dans celui-ci. Ce sont des étoiles qui brillent moins à notre égard à cause de leur éloignement prodigieux.

☞ Les globules qui ont plus de force centrifuge que la matière subtile à cause de leur solidité, s’écartent le plus vers les extrémités du tourbillon. La poussière qui compose le Soleil, qui est dans une agitation étonnante, communique son mouvement