Des théorèmes mécaniques (trad. Reinach)/Théorème XI-XIV

Traduction par Théodore Reinach.
Texte établi par Théodore ReinachArmand Colin (p. 66-83).


(Théorème XI-XIV).

Si, dans un prisme droit à bases carrées, on inscrit un cylindre ayant ses bases inscrites dans les carrés opposés et sa surface latérale tangente aux plans des 4 faces latérales du prisme, un plan passant par le centre du cercle de base et l’un des côtés du carré opposé détachera du cylindre un volume[1] qui sera le sixième du volume total.

Nous allons d’abord établir cette proposition par la méthode susdite [XI, XII, XIII], puis procéder à la démonstration géométrique proprement dite [XIV].

(XI).

Soit donc un cylindre inscrit dans un prisme à bases carrées. Coupons le prisme par un plan passant par son axe et perpendiculaire au plan ΓαΒ (fig. 12) qui a détaché le sabot de cylindre. Ce plan coupera le prisme circonscrit (fig. 13) suivant le rectangle ΑΒ et le plan sécant suivant la droite ΒΓ. Soit ΓΔ l’axe commun du prisme et du cylindre, ΕΖ une droite qui lui soit perpendiculaire en son milieu (Θ) ; par ΕΖ menons un plan (horizontal) perpendiculaire à ΓΔ.

Sa section dans le prisme sera un carré ΜΝ (fig. 14), et dans le cylindre un cercle ΞΟΠΡ, tangent Figure 12 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode mécanique.
Fig. 12.
aux côtés du carré aux points Ξ, Ο, Π, Ρ. Le plan sécant et le plan horizontal mené par ΕΖ se Figure 13 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode mécanique (section verticale).
Fig. 13.
coupent suivant la droite ΚΛ, que le diamètre ΠΘΞ coupe en son milieu. Dans le demi-cercle ΟΠΡ, menons une droite quelconque ΣΤ perpendiculaire à ce diamètre et à une distance ΠΧ de Π ; par cette droite, faisons passer un plan (vertical) perpendiculaire au diamètre ΠΞ et prolongeons-le de part et d’autre du plan (horizontal) ΞΟΠΡ. Ce plan (vertical) déterminera : 1o dans le demi-cylindre Figure 14 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode mécanique (section horizontale).
Fig. 14.
— qui a pour base le demi-cercle ΟΠΡ et pour hauteur l’axe du prisme — une section en forme de rectangle dont un côté (horizontal) = ΣΤ, et l’autre côté (vertical) = l’axe du cylindre ; 2o dans le sabot de cylindre, un autre rectangle dont un côté (horizontal) = ΣΤ, l’autre (vertical) = ΝΥ, ΝΥ étant une parallèle à ΒΩ, menée dans le rectangle ΑΒ[2] (fig. 13), à une distance ΙΕ (de ΒΩ) égale à ΧΠ.

Puisque ΕΓ est un rectangle et ΝΙ, ΘΓ des parallèles coupées par ΕΘ, ΒΓ, on a :

ΕΘ/ΘΙ = ΩΓ/ΓΝ = ΩΒ/ΥΝ.

Or, le rectangle déterminé dans le demi-cylindre est au rectangle déterminé dans le sabot comme ΩΒ est à ΥΝ : car leurs deux autres côtés sont égaux à ΣΤ. On a donc :

rect. du 1/2 cyl./rect. du sabot = ΩΒ/ΥΝ = ΕΘ/ΘΙ = ΘΞ/ΘΧ.

Supposons donc le rectangle du sabot suspendu en Ξ, ce point étant son centre de gravité, et ΠΞ un levier dont le milieu fixe est Θ. Le rectangle du demi-cylindre ayant (lemme V) pour centre de gravité Χ, l’égalité susdite signifie que les distances des deux centres au point fixe sont inversement proportionnelles aux aires des rectangles, et par conséquent que les deux rectangles s’équilibrent par rapport à Θ. On démontrerait de même, pour toute autre position de la perpendiculaire à ΠΘ menée dans le demi-cercle ΟΠΡ et par laquelle on mène un plan perpendiculaire à ΠΘ, prolongé dans les deux sens, que le rectangle déterminé dans le demi-cylindre, restant en place, équilibrera par rapport à Θ le rectangle déterminé dans le sabot, transporté au centre de gravité Ξ. Au total, la somme des rectangles du demi-cylindre — c’est-à-dire le demi-cylindre restant en place — équilibrera par rapport à Θ la somme des rectangles de sabot, c’est-à-dire le sabot lui-même, transporté en Ξ.

(XII).

Considérons maintenant séparément (fig. 15) le carré ΜΗΝΨ perpendiculaire à l’axe, [le cercle ΞΟΠΡ, les diamètres rectangulaires ΡΟ, ΞΗ. Tirons] ΘΜ, ΘΗ et, par ces droites, menons des plans (verticaux) perpendiculaires au plan du demi-cercle ΟΠΡ Figure 15 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode mécanique (section horizontale).
Fig. 15.
et prolongeons-les au-dessus et au-dessous de ce plan. Nous formerons ainsi un prisme triangulaire ayant pour base un triangle égal à ΘΜΗ, et une hauteur égale à l’axe du cylindre : ce prisme est (évidemment) le quart du prisme total circonscrit au cylindre.

Dans le carré ΜΝ, tirons deux droites ΚΛ, ΤΥ, équidistantes de ΠΞ (et parallèles à ce diamètre) : elles coupent la demi-circonférence ΟΠΡ aux points Κ, Τ, le diamètre ΟΡ en Σ, Ζ, les obliques ΘΗ, ΘΜ en Χ, Φ. Par ces droites, menons des plans perpendiculaires à ΟΡ et prolongeons-les au-dessus et au-dessous du plan ΟΞΠΡ. Chacun de ces plans produira : 1o dans le demi-cylindre qui a une base égale à ΟΠΡ et une hauteur égale à l’axe une section en forme de rectangle, dont un côté égale ΚΣ (ou ΤΖ) et l’autre égale l’axe ; 2o dans le prisme triangulaire ΘΗΜ une autre section rectangulaire, dont un côté égale ΛΧ (ou ΥΦ) et l’autre égale l’axe.

[Considérons la paire de rectangles égaux ΛΧ, ΥΦ du prisme, d’une part, et les rectangles correspondants ΣΚ, ΖΤ du demi-cylindre, d’autre part. Tous ces rectangles ayant même hauteur, leurs aires — égales deux à deux — sont proportionnelles à leurs seconds côtés. On a donc :

rect. ΣΚ + rect. ΖΤ/rect. ΛΧ + rect. ΥΦ = 2 rect. ΣΚ/2 rect. ΛΧ = ΣΚ/ΛΧ.

Les rectangles ΣΚ, ΖΤ ont respectivement leurs centres de gravité au point de rencontre de leurs diagonales (lemme V) et par conséquent aux milieux des droites ΣΚ, ΖΤ. Le centre de gravité de leur système sera donc situé sur la droite qui joint ces milieux (lemme II) et, par raison de symétrie, au milieu de cette droite, c’est-à-dire à sa rencontre β avec ΞΠ.

Semblablement le centre de gravité du système des rectangles ΛΧ, ΥΦ sera situé à la rencontre α de ΞΠ avec la droite qui joint les milieux de ΛΧ, ΥΦ.

Le triangle rectangle ΗΛΧ semblable à ΗΞΘ étant isocèle, on a ΛΧ = ΗΛ = ΣΡ. On a donc successivement :

rect. ΣΚ + rect. ΖΤ/rect. ΛΧ + rect. ΥΦ = ΣΚ/ΣΡ = ΣΚ²/ΣΡ.ΣΚ = ΣΡ.ΣΟ/ΣΡ.ΣΚ = ΣΟ/ΣΚ = ΣΡ + 2 ΣΘ/ΣΚ = ΛΧ + 2 ΧΣ/ΣΚ = 1/2 ΛΧ + ΧΣ/1/2 ΣΚ.

Or 1/2 ΣΚ = βΘ ; 1/2 ΛΧ + ΧΣ = αΘ. Si donc on considère ΞΜ comme un levier dont Θ est le milieu fixe, les systèmes (ΣΚ + ΖΤ), (ΛΧ + ΥΦ) se font équilibre par rapport à Θ. Il en est de même pour toutes les autres positions des parallèles conjuguées ΛΚ, ΥΤ. Donc, au total, la somme des rectangles interceptés dans le prisme ΗΘΜ — c’est-à-dire le prisme ΗΘΜ — équilibrera par rapport à Θ la somme des rectangles du demi-cylindre — c’est-à-dire le demi-cylindre ΟΠΡ.

On a vu plus haut que le demi-cylindre équilibre, par rapport au même point fixe, le sabot transporté en Ξ : il en résulte, par symétrie, que le sabot transporté en Π équilibrera le prisme ΗΘΜ restant en place. Le prisme peut être considéré comme la somme des triangles égaux à ΗΘΜ empilés sur une hauteur ΒΩ. Chacun de ces triangles a son centre de gravité au point de rencontre de ses médianes (lemme IV), c’est-à-dire aux deux tiers de la médiane partant du sommet situé sur l’axe. Tous ces centres de gravité sont d’ailleurs évidemment en ligne droite ; dès lors, le centre de gravité du prisme lui-même est sur cette droite (lemme II) et, par raison de symétrie, au milieu de cette droite, c’est-à-dire aux 2/3, en γ, de la médiane du triangle ΗΘΜ intercepté par le plan[3] équidistant des bases. L’équilibre du sabot et du prisme triangulaire par rapport à Θ exige donc qu’on ait :

sabot/prisme ΗΘΜ = γΘ/ΠΘ = 2/3,

et comme le prisme ΗΘΜ est le quart du prisme total, il vient bien :

sabot/prisme ΑΒ = 2/12 = 1/6. C. q. f. d.]

(XIII

Deuxième démonstration.)

Soit un prisme droit à bases carrées, ΑΒΓΔ une de ses bases (fig. 16), un cylindre inscrit dans ce prisme, ayant pour base le cercle Κ tangent en Ε, Ζ, Π, Θ aux 4 côtés du carré ΑΒΓΔ. Par le centre Κ de ce cercle et le côté (Γ′Δ′) de la base opposée du prisme qui correspond à ΓΔ, je mène un plan. Il détache du prisme total un prisme partiel qui en est le quart et qui est compris entre trois rectangles (ΗΕΔ′Γ′, ΗΕΔΓ, ΓΔΓ′Δ′) et deux triangles (rectangles) opposés (ΕΔΔ′, ΗΓΓ′). Dans le demi-cercle ΕΖΗ, inscrivons un segment de parabole, ayant pour base ΗΕ et pour axe ΚΖ (fig. 17). Dans le rectangle ΔΗ, menons une parallèle quelconque ΜΝ Figure 16 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode d’exhaustion.
Fig. 16.
à ΚΖ : elle coupera la circonférence du demi-cercle en Ξ, la parabole en Λ. On a évidemment :

(1)

ΜΝ.ΛΝ = ΝΖ²,

et par conséquent

(2)

ΜΝ/ΛΝ = ΗΚ²/ΛΣ²[4] (= ΗΚ²/ΜΚ²).

Par ΜΝ menons un plan (vertical) perpendiculaire à EH (fig. 16). Il interceptera : 1o dans le prisme partiel un triangle rectangle (ΜΝΝ′), ayant pour côtés de l’angle droit ΜΝ et une perpendiculaire (ΝΝ′) à ΓΔ en Ν dans le plan ΓΔ (Δ′Γ′), et l’hypoténuse dans le plan sécant ; 2o dans le sabot cylindrique, détaché par le plan sécant, pareillement un triangle rectangle (ΜΞΞ′) ayant pour côtés Figure 17 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode d’exhaustion (section horizontale).
Fig. 17.
de l’angle droit ΜΞ et une perpendiculaire (ΞΞ′) au plan ΚΝ menée le long de la surface du cylindre, [et l’hypoténuse dans le plan sécant.

Les triangles ΜΝΝ′, ΜΞΞ′ étant semblables, on a :

(3)

tr. ΜΝΝ′/tr. ΜΞΞ′ = ΜΝ²/ΜΞ² = ΗΚ²/ΜΞ².

Mais ΜΞ² = ΜΗ.ΜΕ = (ΗΚ − ΜΚ) (ΗΚ + ΜΚ) = ΗΚ² − ΜΚ². Donc :

tr. ΜΝΝ′/tr. ΜΞΞ′ = ΗΚ²/ΗΚ² − ΜΚ².

Or l’égalité (2) donne :

ΜΝ/ΜΝ − ΝΛ = ΗΚ²/ΗΚ² − ΜΚ²,

donc :

(4)

tr. ΜΝΝ′/tr. ΜΞΞ′ = ΜΝ/ΜΝ − ΛΝ = ΜΝ/ΜΛ[5],

c’est-à-dire : le triangle intercepté dans le prisme partiel est au triangle intercepté dans le sabot comme la parallèle ΜΝ menée dans le rectangle ΗΓΔΕ est à la partie de cette parallèle comprise entre ΕΗ et la parabole. Cette relation étant vraie pour n’importe quelle position de la parallèle, au total] la somme des triangles du prisme partiel est à la somme des triangles du sabot comme la somme des parallèles ΜΝ est à la somme de leurs sections comprises entre ΗΕ et la courbe. La première somme n’est autre que le prisme partiel, [la seconde le sabot], la troisième le rectangle ΗΓΔΕ, la quatrième le segment parabolique ΗΖΕ, donc :

(5)

prisme partiel/sabot = rect. ΗΓΔΕ/segm. ΕΖΗ.

[Le rectangle ΗΓΔΕ vaut deux fois le triangle ΗΖΕ ; le segment parabolique ΗΖΕ vaut les 4/3 de ce triangle] car ceci a été montré précédemment[6] ; donc :

prisme partiel/sabot = 2/4/3 = 3/2.

Si donc le sabot vaut 2, le prisme partiel vaut 3, et le prisme total qui en est le quadruple vaut 12 : donc le sabot est bien le 6e du prisme. C. q. f. d.

(XIV

Justification rigoureuse de la démonstration précédente.)

Soit un prisme droit à bases carrées, ΑΒΓΔ une de ses bases[7]… [un cylindre ΕΖΗΘ inscrit dans le prisme. Un plan mené par le centre Κ du cercle de base ΕΖΗ et un des côtés (Γ′Δ′) de la base opposée du prisme coupe le cercle de base suivant le diamètre ΕΗ (parallèle à Δ′Γ′)…] Il détache du prisme total un prisme partiel (ΗΓΓ′ΕΔΔ′) et du cylindre total un sabot cylindrique : il s’agit de montrer que ce sabot vaut le sixième du prisme total.

1o Je vais montrer d’abord qu’on peut inscrire dans le sabot cylindrique et lui circonscrire deux solides composés chacun d’une série de prismes qui ont même hauteur et pour bases des triangles semblables, solides tels qu’on peut ramener leur différence à être plus petite que toute grandeur donnée.

[Divisons (fig. 18) le diamètre ΗΕ en un nombre quelconque de parties égales ; par chacun des points de division, menons des parallèles ΜΝ, Μ1Ν1… à ΚΖ et par ces droites des plans perpendiculaires au plan de base Κ. Ces plans divisent le prisme partiel ΗΓΓ′ΕΔΔ′ en une série de prismes élémentaires ayant même hauteur = ΜΜ1 et pour bases des triangles rectangles égaux = ΜΝΝ′ (voir fig. 16). Ils déterminent aussi dans le sabot une série de sections en forme de triangles rectangles inégaux ΜΞΞ′, Μ1Ξ1Ξ′1… Considérons deux sections voisines et soit Μ1Ξ1 > ΜΞ. Projetons Ξ sur Μ1Ν1 en ξ1 et Ξ1 sur ΜΝ en ξ, et formons dans les plans verticaux les triangles Μξξ′ = Μ1Ξ1Ξ′1, Μ1ξ1ξ′1 = ΜΞΞ′. Le prisme élémentaire déterminé par les deux triangles égaux ΜΞΞ′Μ1ξ1ξ′1 est évidemment contenu tout entier dans la section du sabot qui a pour base le trapèze curviligne ΜΞΞ1Μ1. Au contraire le prisme élémentaire déterminé par les triangles égaux Μξξ′Μ1Ξ1Ξ′1 contient tout entière cette même section. En opérant de même pour la section suivante, on formera de même un prisme élémentaire Μ1Ξ1Ξ′1Μ2ξ2ξ′2 inscrit dans le sabot et un prisme élémentaire Μ1ψψ′Μ2Ξ2Ξ′2 circonscrit et ainsi de suite. Si l’on compare les deux séries ainsi formées, on verra que chaque prisme élémentaire de la série circonscrite a pour équivalent un prisme de la série inscrite : ainsi le prisme circonscrit ΜξΜ1Ξ1 équivaut au prisme inscrit Μ1Ξ1Μ2ξ2 de la section suivante[8]. Seul le dernier prisme circonscrit Μ5Ξ5ΖΚ n’a pas d’équivalent dans la série inscrite. La différence des deux séries se réduit donc à ce seul prisme deux fois répété (dans chacun des deux quarts de cercle). Or, ce prisme peut être rendu aussi petit que l’on veut en multipliant le nombre des divisions du diamètre ΗΕ et des plans verticaux[9] ; donc aussi la différence Figure 18 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode d’exhaustion (approximation de l’onglet).
Fig. 18.
Figure 19 : Calcul du volume d’un onglet par la méthode d’exhaustion (approximation du segment parabolique).
Fig. 19.
des deux séries de prismes élémentaires, c’est-à-dire des deux volumes considérés, peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée. À plus forte raison peut-on rendre plus petite que toute grandeur donnée la différence de chacun de ces volumes et du sabot qui est compris entre eux.

2o Je vais montrer de même (fig. 19) que si l’on trace l’arc de parabole ΗΖΕ inscrit dans le demi-cercle ΗΖΕ, on peut inscrire et circonscrire au segment parabolique ΗΖΕ deux séries de rectangles élémentaires (correspondant aux prismes élémentaires des volumes du sabot) dont la différence peut devenir plus petite que toute grandeur donnée.

Chacun des plans sécants verticaux de tout à l’heure détermine dans le segment parabolique une trace ΜΛ, Μ1Λ1, etc. Ces traces sont équidistantes et de grandeur croissante depuis Η jusqu’à Ζ. Si donc nous projetons Λ en λ1 sur Μ1Ν1, Λ1 en λ2, sur Μ2Ν2… et de même Λ1 en λ′ sur ΜΝ, Λ2 en λ′1 sur Μ1Ν1…, nous formons deux séries de rectangles : l’une enveloppante Ηλ0ΛΜ, Μλ′Λ1Μ1,… l’autre enveloppée ΜΛλ1Μ1, Μ1Λ1λ2Μ2…, et chaque rectangle de la série enveloppante équivaut au rectangle enveloppé de la section suivante (Ηλ0ΛΜ = ΜΛλ1Μ1). Seul, le dernier rectangle enveloppant Μ5Ν5ΖΚ reste sans équivalent. La différence des deux séries se réduit donc à ce rectangle élémentaire (deux fois répété), et comme, si le nombre des divisions du diamètre est suffisamment grand, on peut rendre ce rectangle aussi petit qu’on veut, la différence des deux séries elle-même (et a fortiori la différence de chacune d’elles à l’aire du segment parabolique qu’elles comprennent entre elles) peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée.

3o Le prisme partiel est au solide inscrit (ou circonscrit) au sabot cylindrique comme le rectangle ΗΓΔΕ est à la somme des rectangles élémentaires inscrits (ou circonscrits) au segment parabolique.

Considérons d’abord le solide circonscrit (fig. 19). À chacun des prismes élémentaires déterminés dans le prisme partiel par deux plans sécants consécutifs correspond un prisme élémentaire du solide circonscrit. Comparons deux de ces prismes élémentaires correspondants ΗΝ, ΗΞ. Ayant même hauteur, ils sont proportionnels à leurs bases, c’est-à-dire aux triangles rectangles ΜΝΝ′, ΜΞΞ′.

Or, on a vu (no XIII) que :

tr. ΜΝΝ′/tr. ΜΞΞ′ = ΜΝ/ΜΛ ;

donc aussi :

(1)

élément du prisme/élément du solide circonscrit = ΜΝ/ΜΛ = rect. ΗΝ/rect. ΗΛ ;

et aussi :

(2)

Σ éléments du prisme (ou prisme partiel)/Σ éléments du sol. circ. (ou solide circonscrit) = Σ rect. ΗΝ (ou rect. ΗΓΔΕ)/Σ rect. ΗΛ.

(cf. lemme IX).

Pour le solide inscrit, la démonstration serait la même, puisque les triangles et les rectangles sont les mêmes deux à deux dans les deux séries. Toutefois, il faut observer que, tandis qu’à chaque élément du prisme partiel correspond un élément prismatique du solide circonscrit, en ce qui concerne le solide inscrit le premier élément de chaque demi-cercle (prisme ΗΝ) n’a pas de correspondant dans le solide, et de même pour les rectangles. On devra donc écrire en toute rigueur :

(3)

(Σ − 2) él. prisme/Σ él. solide inscrit = (Σ − 2) rect. ΗΝ/Σ rect. Μλ1

Mais comme :

él. prisme/él. solide inscrit = rect. ΗΝ/rect. Μλ1,
on ne change pas l’exactitude de l’égalité (3) en ajoutant au numérateur du premier membre deux éléments prismatiques et à celui du second deux rectangles ΗΝ, et l’on retombe alors sur l’égalité (2).

Ces préliminaires posés, supposons d’abord que le sabot soit plus grand que 1/6 du prisme total, c’est-à-dire que le prisme partiel soit moindre que 3/2 du sabot. Si petite que soit la différence, il en résulterait que le prisme partiel est aussi moindre que 3/2 du solide inscrit dans le sabot, car la différence de ce solide au sabot peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée. Or] le prisme partiel est à ce solide inscrit (3o) comme le rectangle ΗΓΔΕ est à la somme des rectangles élémentaires inscrits dans le segment parabolique. Si donc l’hypothèse était vraie, on aurait :

rect. ΗΓΔΕ/Σ rect. ΜΛλ1Μ1 < 3/2.

Mais on a vu (Théorème I) que le rectangle ΗΓΔΕ vaut exactement les 3/2 du segment de parabole, lequel enveloppe la somme des rectangles ΜΛλ1Μ1 : il est donc impossible que ce rectangle vaille moins que les 3/2 de cette somme ; [l’hypothèse est donc fausse et le sabot ne saurait être plus grand que 1/6 du prisme total.

Supposons maintenant que le sabot soit plus petit que 1/6 du prisme total, c’est-à-dire que le prisme partiel soit plus grand que 3/2 du sabot. Si petite que soit la différence, on montrerait de même qu’il en résulte que le prisme partiel est aussi plus grand que 3/2 du solide enveloppant le sabot.] Mais le prisme partiel est à ce solide enveloppant (3o) comme le rectangle ΗΓΔΕ est à la somme des rectangles élémentaires circonscrits au segment parabolique. On aurait donc :

rect. ΗΓΔΕ/Σ rect. Ηλ0ΛΜ > 3/2.

Or (Théorème I), le rectangle vaut exactement les 3/2 du segment parabolique qui est plus petit que la somme des rectangles enveloppants ; il ne saurait donc valoir plus que les 3/2 de cette somme : [donc l’hypothèse est fausse.

Puisque le sabot ne saurait être ni plus grand ni plus petit que le sixième du prisme total, il vaut donc exactement le sixième de ce prisme. C. q. f. d.]


  1. Ce « sabot » ou « onglet » a pour faces : 1o une portion de la surface cylindrique ; 2o un demi-cercle ; 3o une demi-ellipse (intersection d’un cylindre par un plan oblique).
  2. Le texte dit ΔΕ.
  3. J’ai été obligé d’introduire cette démonstration sommaire de la position du centre de gravité d’un prisme, ce théorème ne figurant pas dans les ouvrages conservés d’Archimède. Il est possible qu’il fût exposé dans un ouvrage perdu auquel l’auteur se contentait de renvoyer ici. Il est possible aussi qu’au lieu du centre de gravité du prisme, Archimède ait déterminé celui du demi-cylindre.
  4. La première proposition est démontrée dans Apollonius, Coniques, I, 11, et l’était probablement dans les ouvrages élémentaires sur les coniques connus d’Archimède. On en déduit aussitôt ΗΚ²/ΜΝ.ΛΝ = ΗΚ²/ΝΖ² ; en remplaçant ΗΚ par ΜΝ, ΝΖ par ΛΣ, il vient ΜΝ/ΛΝ = ΗΚ² (ou ΜΝ²)/ΛΣ². Notons d’ailleurs que l’égalité (2) résulte immédiatement de l’équation de la parabole (Quad. parab. 3) ΗΚ²/ΛΣ² = ΖΚ/ΖΣ = ΜΝ/ΛΝ.
  5. On obtiendrait plus vite cette relation en partant de l’équation de la parabole y² = Rx, d’où :
    /y² = R/x et /R² − y² = R/R − x.

    Dès lors on a tr. ΜΝΝ′/tr. ΜΞΞ′ = ΜΝ²/ΜΞ² = /R² − y² = R/R − x = ΜΝ/ΜΛ.

  6. Théorème I. On peut aussi traduire (en lisant ἐν τοῖς πρότερον ἐκδεδομένοις) « dans un ouvrage précédent », à savoir dans Quadr. parab., II, p. 251 et suiv.
  7. Les mots qui suivent (s’ils sont bien déchiffrés) signifieraient : « Comme le prisme est au prisme, ainsi le cercle ΕΖΗ est… », ce qui n’offre point de sens. Il serait exact, mais sans intérêt, de dire que le prisme est au carré qui lui sert de base comme le cylindre est au cercle ΕΖΗ.
  8. Cf. De Conoidibus, 19 (I, 377 Heiberg).
  9. Cf. Euclide, Élém., X, 1.