Des principes de l’économie politique et de l’impôt/Chapitre 6

Des principes de l’économie politique et de l’impôt

CHAPITRE VI.

DES PROFITS[1]


Ayant déjà montré que les profits des capitaux dans les différentes branches de la production, gardent toujours entre eux une même proportion, et tendent tous à éprouver des variations dans le même degré et dans un même sens, il nous reste à rechercher la cause des variations permanentes dans la taux des profits, et les modifications qui en résultent toujours dans le taux de l’intérêt.

Nous avons vu que le prix du blé[2] se règle par la quantité de travail nécessaire pour le produire, au moyen de cette portion du capital qui ne paie pas de rente. Nous avons vu aussi que tous les articles manufacturés haussent et baissent de prix à mesure qu’il faut, pour les produire, plus ou moins de travail. Ni le fermier qui cultive cette espace de terres dont la qualité règle les prix courants, ni le manufacturier qui fabrique des marchandises, ne réservent aucune portion du produit pour la rente. La valeur entière de leurs articles se partage en deux seules portions, dont l’une constitue les profits du capital, et l’autre est consacrée au salaire des ouvriers.

En supposant que le blé et les objets manufacturés se vendent toujours au même prix, les profits seront toujours élevés ou réduits, selon la hausse ou la baisse des salaires. Mais si le prix du blé hausse, parce que sa production exige plus de travail, cette cause ne fera point hausser le prix des objets manufacturés dont la fabrication n’exige point de travail additionnel. Dans ce cas, si les salaires restent les mêmes, les profits ne changeront pas ; mais comme il est indubitable que les salaires montent par la hausse du blé, les profits alors doivent nécessairement baisser.

Si un fabricant donnait toujours ses marchandises pour la même somme d’argent, pour 1,000 liv. st., par exemple, ses profits dépendraient du prix du travail nécessaire pour leur fabrication. Ils seraient moindres avec des salaires de 800 livres qu’avec d’autres de 600 livres. À mesure donc que les salaires hausseraient, les profits diminueraient[3]. Mais si le prix des produits agricoles augmente, l’on pourrait demander si du moins le fermier n’aura pas les mêmes profits, quoiqu’il paie de plus forts salaires. Certainement non ; car non-seulement il aura, ainsi que le manufacturier, à payer plus de gages à chacun des ouvriers qu’il emploie, mais il sera obligé de payer une rente, ou d’employer un plus grand nombre d’ouvriers, pour obtenir le même produit. La hausse des produits agricoles ne sera que proportionnée à cette rente ou au nombre additionnel des ouvriers employés, et elle ne saurait le dédommager de la hausse des salaires.

Si le manufacturier et le fermier employaient chacun dix hommes, et si les salaires haussaient de 24 livres à 25 livres st. par an, pour chaque homme, il leur en coûterait à chacun 250 livres au lieu de 240 livres par an. Voilà tout ce qu’il en coûtera de plus au manufacturier pour avoir la même quantité de marchandises ; mais le fermier d’un terrain neuf aura probablement besoin d’employer un homme de plus, et par conséquent de débourser pour ses gages 25 l. de plus ; et le fermier d’un vieux fonds de terre sera forcé de payer pour rente précisément cette même somme additionnelle de 25 liv. : car, sans cette augmentation de travail, le blé n’aurait pas pu hausser. L’un et l’autre auront à débourser 275 livres ; l’un, uniquement pour payer les salaires, et l’autre, pour les salaires et la rente ; et chacun d’eux dépensera 25 livres de plus que le manufacturier. Ils seront remboursés de ces 25 livres par la hausse du prix des produits de la terre, et, par conséquent, leurs profits seront toujours dans le même rapport avec ceux du manufacturier. Comme cette proposition est intéressante, je vais tâcher de l’éclaircir davantage.

Nous avons déjà montré que, dans l’enfance de la société, la part qui revient au propriétaire foncier et au laboureur, sur la valeur totale du produit de la terre, n’est que bien faible, et que cette part augmente en raison du progrès des richesses et de la difficulté de se procurer de la nourriture. Nous avons montré également que, quoique la valeur de la part de l’ouvrier doive augmenter par le haut prix des subsistances, cette part se trouvera réellement diminuée ; tandis que celle du propriétaire foncier se trouvera augmentée à la fois en valeur et en quantité.

Le surplus du produit de la terre, après que le propriétaire et les travailleurs sont payés, appartient nécessairement au fermier, et constitue les profits de son capital. Mais, dira-t-on, quoique, par le développement progressif de la société, la part du fermier soit diminuée, comme elle augmente de valeur, il pourra, aussi bien que le propriétaire et l’ouvrier, recevoir une plus forte valeur.

On peut dire, par exemple, que lors de la hausse du blé de 4 liv. à 10 livres, les cent quatre-vingts quarters récoltés sur le meilleur fonds de terre rapporteraient 1,800 liv. au lieu de 720 liv., et que par conséquent, quoiqu’il soit prouvé que le propriétaire et l’ouvrier reçoivent une plus forte valeur en fermage et en gages, les profits du fermier peuvent aussi s’accroître. Cela est cependant impossible, ainsi que je vais essayer de le démontrer.

D’abord le prix du blé ne hausserait qu’en proportion de la plus grande difficulté de la culture sur un terrain d’une moins bonne qualité.

J’ai déjà fait observer que si le travail de dix hommes, sur une terre d’une qualité donnée, rendait cent quatre-vingts quarters de blé, valant 4 livres le quarter, ou 720 liv., et si le travail de dix hommes de plus ne produisait qu’un surcroît de cent soixante-dix quarters, le blé devrait hausser de 4 liv. à 4 liv. 4 s. 8 d. ; car 170 : 180 :: 4 liv. : 4 liv. 4 s. 8 d. En d’autres termes, puisque, dans un cas, il faut le travail de dix hommes pour avoir cent soixante-dix quarters de blé, tandis que, dans l’autre, celui de 9.44 suffit, la hausse doit être dans le rapport de 9.44 à 10, ou dans celui de 4 liv. à 4 liv. 4 s. 8 d. On pourrait démontrer de même que si le travail de dix autres hommes ne produisait que cent soixante quarters, le prix hausserait encore à 4 liv. 10 s., s’il ne produisait que cent cinquante, à 4 liv. 16 s., et ainsi de suite.

Mais lorsque la terre qui ne paie pas de rente donnait cent quatre-vingts quarters à 4 liv. le quarter, le blé rapportait l. 720
Et quand la même terre, ne payant pas de rente, donnait cent soixante-dix quarters, le blé ayant atteint 4 liv. 4 s. 8 d. rapportait l. 720
De sorte que cent cinquante quarters, à 4 l. 10 s., rapportent l. 720
Et cent cinquante quarters, à 4 l. 16 s., donnent la même
somme de l. 720

Or, il est évident que, sur ces trois valeurs différentes, le fermier étant obligé à une époque de payer des salaires réglés d’après le prix du blé à 4 liv., et dans d’autres temps à de plus hauts prix, le taux de ses profits doit diminuer en proportion de la hausse du prix du blé.

Dans ce cas, il me paraît clairement démontré que toute hausse du prix du blé qui augmente le salaire en argent de l’ouvrier diminue la valeur en argent des profits du fermier.

La situation du fermier de l’ancien et meilleur fonds de terre sera exactement la même ; il devra aussi payer de plus forts salaires, et il ne pourra jamais lui rester sur la valeur des produits, quelque élevé qu’en soit le prix, plus de 720 l., pour être partagées entre lui et le nombre toujours égal de ses travailleurs. Or, plus ils gagneront, moins il leur en restera.

Quand le prix du blé était à 4 l., la totalité des cent quatre-vingts quarters appartenait au cultivateur, qui le vendait 720 l. Quand le blé est monté à 4 l. 4 s. 8 d., il s’est trouvé forcé de payer, sur ces cent quatre-vingts quarters la valeur de dix quarters pour la rente, et par conséquent les cent soixante-dix restants ne lui ont plus rapporté que 720 l. Quand le blé est monté à 4 l. 10 s., il a dû payer vingt quarters, ou leur valeur, pour le fermage, et il ne lui est resté que cent soixante quarters, qui lui rapportaient la somme de 720 l.

C’est pourquoi, quelle que soit la hausse dans le prix du blé, la nécessité d’employer plus de travail ou plus de capital pour obtenir un surcroît donné de production, rend cette hausse égale en valeur à l’augmentation de la rente ou à celle du travail employé ; en sorte que le fermier ne retire de ce qui reste après le paiement du fermage, que la même valeur réelle, soit qu’il vende 4 l., 4 l. 10 s., ou bien 5 l. 2 s. 10 d. le quarter de blé. Que le produit appartenant au fermier soit de cent quatre-vingts, cent soixante-dix, cent soixante ou cent cinquante quarters, il n’en tire jamais que 720 l. ; le prix augmentant en raison inverse de la quantité.

La rente, à ce qu’il parait, retombe donc toujours sur le consommateur, et jamais sur le fermier ; car si le produit de sa ferme est constamment de cent quatre-vingts quarters, le prix haussant, il garderait pour lui une moindre valeur et en donnerait une plus forte à son propriétaire ; mais cette déduction serait toujours telle, qu’elle lui laisserait la même somme de 720 l.

On voit aussi que, dans tous les cas, cette même somme de 720 l. doit se partager entre les salaires et les profits. Si la valeur du produit brut de la terre s’élève au delà de cette valeur, cet excédant appartient à la rente, quel qu’en soit le montant. S’il n’y a pas de surplus, il n’y aura pas de rente. Que les salaires ou les profits éprouvent une hausse ou une baisse, c’est toujours cette somme de 720 l. qu’il fournira aux deux. D’un côté, jamais les profits ne sauraient hausser au point d’absorber une si forte portion de ces 720 l. qu’il n’en restât plus assez pour fournir aux ouvriers de quoi se procurer l’absolu nécessaire, et, de l’autre côté, les salaires ne sauraient hausser au point de ne rien laisser sur cette somme pour les profits.

C’est ainsi que les profits de l’agriculture, comme ceux des manufactures, sont toujours diminués par la hausse des matières premières, lorsqu’elle est accompagnée de la hausse des salaires[4]. Si le fermier n’obtient pas une plus forte valeur pour le blé qui lui reste après le paiement de la rente, si le manufacturier n’en retire pas une plus forte de ses articles, et s’ils sont tous deux forcés de payer une plus forte somme en salaires, peut-il y avoir rien de plus clairement démontré que la baisse infaillible des profits par suite de la hausse des salaires ?

Et cependant le fermier, quoiqu’il ne paie à son propriétaire aucune part de la rente, — celle-ci étant toujours réglée par le prix des produits, et retombant invariablement sur le consommateur, — le fermier, dis-je, a toujours un grand intérêt à maintenir la rente, ou plutôt le prix naturel des produits, à un taux peu élevé. En sa qualité de consommateur des matières premières et des articles dans la composition desquels il entre de ces matières, il a, ainsi que tous les autres consommateurs, un intérêt commun à la modicité du prix. Mais le haut prix du blé, qui influe sur les salaires, le touche de plus près ; car, à chaque hausse, il aura à payer, sur cette somme invariable de 720 l., une part additionnelle pour les salaires des dix hommes qu’il emploie constamment, comme nous l’avons supposé. En traitant des salaires, nous avons déjà vu qu’ils haussaient constamment par suite de la hausse du prix des produits immédiats du sol. En prenant pour base du calcul celle que nous avons posée page 174, on voit que, le blé étant à 4 l. le quarter, les salaires doivent être à 24 l. par an. Et quand le blé est à les salaires doivent être à et sur le fonds invariable de 720 liv. qui doit être partagé entre les ouvriers et les fermiers, quand le blé est à l’ouvrier recevra le fermier recevra [5]


Si l’on suppose le capital primitif du fermier de 3,000 l., les profits étant, dans le premier cas, de 480 l., donneraient un taux de 16 pour cent. Quand les profits baissent à 473 l., le taux descend à 15.7 pour cent.

à 465 l. ........................ 15.5
à 456 l. ........................ 15.2
à 445 l. ........................ 14.8
Mais le taux des profits doit baisser encore davantage ; car le capital du fermier, comme nous l’avons dit, se compose principalement de matières brutes, telles que ses meules de blé et de foin, son blé et son orge en gerbes, ses chevaux et ses vaches, qui doivent tous hausser de prix par le renchérissement des produits. Son produit absolu tombera de 480 l. à 445 l. 15 s. Mais si, d’après les causes que je viens d’exposer, son capital augmentait de 3,000 l. à 3,200 l., le taux de ses profits, le blé étant à 5 1. 2 s. 10 d., serait au-dessous de 14 pour cent.

Si un manufacturier employait de même 3,000 l. sur sa fabrique, il serait forcé, par la hausse des salaires, d’augmenter son capital pour pouvoir être à même de continuer son commerce. Si sa marchandise se vendait auparavant 720 l., elle continuerait à rapporter le même prix ; mais les salaires du travail, qui montaient d’abord à 240 l., hausseront, quand le blé sera à 5 l. 2 s. 10 d., à 274 l. 5 s. Dans le premier cas, il aurait un profit de 480 l. sur 3,000 l. ; dans le second, ce bénéfice ne monterait qu’à 445 l. 15 s. sur un capital augmenté, et par conséquent ses profits se rapprocheraient du changement survenu dans ceux du fermier.

Il est peu de denrées qui ne changent plus ou moins de prix par la hausse des matières premières, parce qu’il entre dans la composition de la plupart des marchandises une certaine portion des produits bruts du sol. Les étoffes de coton, les toiles et les draps, haussent tous de prix par la cherté du blé ; mais ils renchérissent en raison de la plus grande quantité de travail employé à la production des matières premières dont ils sont fabriqués, et non en raison de ce que le manufacturier a payé plus cher les ouvriers employés à la fabrication de ces étoffes.

Les marchandises haussent toujours parce qu’il faut plus de travail pour leur production, et jamais en raison de la cherté du travail qu’elles exigent. Les ouvrages de bijouterie, de fer, d’argenterie et de cuivre, n’éprouveront pas de hausse, attendu qu’il n’entre dans leur composition aucun produit brut provenant de la culture de la terre.

On dira peut-être que j’ai posé en principe que les salaires en argent doivent hausser par la cherté des produits bruts du sol, sans qu’il y ait là une conséquence nécessaire ; car l’ouvrier peut se contenter d’une moindre aisance. Il faut convenir que les salaires peuvent arriver d’abord à un taux élevé, pour subir ensuite quelque diminution. Dans ce cas, il n’y aura pas réduction des profits ; mais il est impossible de concevoir comment le prix en argent des salaires pourrait baisser ou rester stationnaire pendant que celui des objets de première nécessité hausserait graduellement. On peut donc regarder comme une chose démontrée que dans les cas ordinaires il n’arrive point de hausse permanente dans le prix des articles de première nécessité qui ne cause une hausse des salaires, ou qui ne soit l’effet d’une hausse survenue auparavant.

L’effet qu’éprouveront les profits sera le même, ou à peu près, s’il y a une hausse quelconque dans les prix des autres articles de première nécessité que l’ouvrier achète avec ses salaires, — les aliments exceptés. La nécessité où il se trouverait de les payer plus cher le forcerait à exiger une plus forte rémunération ; et tout ce qui augmente les salaires réduit les profits. Mais supposons que le prix des soieries, des velours, des meubles, ou de tout autre article dont l’ouvrier n’a pas besoin, vienne à hausser par suite de l’excédant de travail nécessaire à la fabrication de ces objets, les profits ne s’en ressentiraient-ils pas ? Non assurément ; car rien ne modifie les profits, si ce n’est la hausse des salaires ; et les soieries, les velours n’étant point consommés par l’ouvrier, le renchérissement de ces articles ne saurait faire hausser les salaires.

Je ne parle que des profits en général. J’ai déjà averti que le prix courant d’une denrée pouvait surpasser son prix naturel ou absolu ; car cette denrée peut avoir été produite en quantité moindre que ne l’exige le surcroît de la demande. Cet effet cependant n’est que passager. Les beaux profits retirés du capital employé à la production de cette denrée porteront bientôt des capitaux vers cet emploi ; et aussitôt que les fonds seront suffisants, et que la quantité de la denrée se trouvera assez augmentée, elle baissera de prix, et les profits de ce genre de commerce se nivelleront avec tous les autres. La baisse du taux général des profits n’est nullement incompatible avec la hausse partielle des bénéfices d’une branche particulière d’industrie ; c’est en raison de l’inégalité des profits que les capitaux passent d’un emploi à un autre. C’est ainsi que pendant la baisse des profits en général, et pendant qu’ils tendent graduellement vers un niveau plus bas, par suite de l’augmentation des salaires et de la difficulté croissante de pourvoir à la subsistance du surcroît de population ; c’est ainsi, dis-je, que les profits du fermier peuvent se maintenir pendant quelque temps au-dessus de leur ancien taux. Il peut se faire aussi qu’une branche particulière de commerce étranger et colonial se trouve à une époque extraordinairement encouragée ; mais ce fait, que nous admettons, ne saurait invalider la théorie. Il sera toujours vrai que les profits dépendent de la cherté ou du bas prix des salaires ; que les salaires sont réglés par le prix des denrées de première nécessité, et que le prix de ces dernières tient principalement à celui des aliments ; car la quantité de toutes les autres choses peut être augmentée d’une manière presque illimitée.

L’on devrait se rappeler que le prix courant varie toujours, et varie d’abord par le rapport de l’offre et la demande. C’est ainsi que du drap qu’on peut donner 40 s. l’aune en prélevant les profits ordinaires sur le capital, pourrait hausser jusqu’à 60 ou 80 s., en raison des exigences de la mode, ou par suite de quelque autre cause, qui tout à coup, et sans qu’on s’y attendit, en augmenterait la demande ou en diminuerait l’approvisionnement. Les fabricants de draps feront, pendant quelque temps, des profits extraordinaires ; mais les capitaux afflueront vers ce genre de fabrique jusqu’à ce que l’offre soit au niveau de la demande, et alors le prix du drap baissera de nouveau à 40 s., qui est son prix naturel et absolu. De même des demandes de blé plus considérables peuvent en élever le prix assez haut pour que le fermier en retire plus que les profits ordinaires. S’il y a bon nombre de terrains fertiles, le prix du blé baissera bientôt à son ancien niveau, après que la quantité nécessaire de capital aura été employée sur ces terrains, — les profits restant d’ailleurs les mêmes. Mais s’il n’y avait pas assez de terres fertiles ; et si, pour produire ce surcroît de blé, il fallait plus que la quantité ordinaire de travail et de capital, le blé ne baisserait plus à son ancien niveau. Son prix naturel s’élèverait, et le fermier, au lieu d’obtenir constamment de plus grands profits, se verrait forcé de se contenter du taux diminué qui est la suite inévitable de la hausse de main-d’œuvre, hausse causée par celle des choses nécessaires.

Les profits tendent naturellement à baisser, parce que, dans le progrès de la société et de la richesse, le surcroît de subsistances nécessaires exige un travail toujours croissant. Cette tendance, ou, pour ainsi dire, cette gravitation des profits, est souvent et heureusement arrêtée par le perfectionnement des machines qui aident à la production des choses nécessaires, ainsi que par l’effet des découvertes agronomiques, qui nous donnent le moyen d’épargner une portion de travail, et de diminuer ainsi le prix des articles de première nécessité pour la consommation de l’ouvrier. Le renchérissement des articles de première nécessité et des salaires a cependant des bornes ; car aussitôt que les salaires auront monté (comme dans le cas que nous avons déjà posé) à 720 l., total de la recette du fermier, il ne pourra plus y avoir d’accumulation, puisque aucun capital ne saurait plus donner de bénéfices ; on n’aura pas besoin alors d’une augmentation de travail, et la population aura atteint son maximum. Bien avant ce terme même, la réduction des profits aura arrêté toute accumulation ; et la presque-totalité des produits du pays, les ouvriers une fois payés, appartiendra aux propriétaires fonciers et aux collecteurs des dîmes et des autres impôts.

En prenant donc pour base de mon calcul la supposition ci-dessus, très-inexacte d’ailleurs, il paraîtrait que le blé étant à 20 l. st. le quarter, tout le revenu net du pays sera entre les mains des propriétaires fonciers ; car, dans ce cas, la même quantité de travail qu’il a fallu employer primitivement pour produire cent quatre-vingts quarters, deviendrait nécessaire pour n’en produire que trente-six ; puisque 20 l. : 4 l. : 180 : 36. C’est pourquoi le fermier qui dans l’origine récoltait cent quatre-vingts quarters (si toutefois il en existait, car les anciens et les nouveaux capitaux se trouveraient tellement confondus, qu’il n’y aurait plus moyen de les distinguer), le fermier, disons-nous, vendrait les :

180 quarters à 20 l. le quarter ou l. 3,600
la valeur de 144 muids (payés en fermage au propriétaire, et
constituant la différence entre 36 et 80 muids) 2,880

36 720

la valeur de 36 muids payée aux dix ouvriers 720
ne laissant, par conséquent, rien pour son profit.


À ce prix de 20 l. les ouvriers continueraient
à consommer chacun trois quarters de blé par an, ou l. 60
et ils dépenseraient sur d’autres articles 12

72 par ouvrier ;
par conséquent dix ouvriers coûteront 720 l. par an.

N’ayant cherché dans tous ces calculs qu’à éclaircir le principe, il est presque inutile de dire que je suis parti d’une base prise au hasard, uniquement pour servir d’exemple. Quoique les résultats aient pu varier en degré, ils seraient restés les mêmes en principe, quelque exactitude que j’eusse pu mettre en évaluant la différence dans le nombre des ouvriers nécessaires pour obtenir les quantités successives de blé qu’exige la consommation d’une population croissante. Mon but a été de simplifier la question ; c’est pourquoi je n’ai point tenu compte du renchérissement des choses nécessaires, autres que les subsistances. Ce renchérissement, suite de l’augmentation dans la valeur des matières premières dont ces articles sont fabriqués, ferait encore baisser les profits, en faisant hausser davantage les salaires.

J’ai déjà dit que longtemps avant que cet état des prix soit devenu permanent, il n’y aurait plus de motif pour accumuler ; car on n’accumule qu’en vue de rendre cette accumulation productive ; et ce n’est que lorsqu’elle est ainsi employée qu’elle a un effet sur les profits. Il ne saurait y avoir d’accumulation sans motif, et par conséquent un tel état des prix ne peut jamais persister. Il est aussi impossible au fermier et au manufacturier de vivre sans profits, qu’à l’ouvrier d’exister sans salaires. Le motif qui les porte à accumuler diminuera à chaque diminution des profits, et il cessera entièrement quand ils seront tellement minimes qu’ils ne leur offriront plus un dédommagement suffisant de leur peine, et du risque qu’ils courent nécessairement en employant leur capital d’une manière productive.

Je dois aussi avertir que le taux des profits devra baisser encore plus rapidement que je ne l’ai estimé dans mon calcul ; car la valeur des produits étant telle que je l’ai supposée, celle du capital du fermier augmentera de beaucoup, puisque ce capital se compose en grande partie des choses nécessaires qui ont haussé de valeur. Avant que le blé ait pu hausser de 4 l. à 12 l., le fermier aura probablement doublé la valeur échangeable de son capital qui vaudrait 6,000 l. au lieu de 3,000 l. Et si son profit était de 180 l. ou de 6 pour cent sur son capital primitif, les profits ne se trouveraient alors réellement qu’à un taux de 3 pour cent ; car 6,000 l. à 3 pour cent rendent 180 l. ; et c’est à ces seules conditions qu’un nouveau fermier possédant 6,000 l. pourrait et voudrait entreprendre la culture des terres.

Plusieurs autres branches d’industrie tireraient de la même source un avantage plus ou moins grand. Le brasseur, le distillateur, le fabricant de draps et celui de toiles, trouveraient une compensation d’une partie de la diminution de leurs profits dans l’augmentation de la valeur de leur capital en matières premières et en articles ouvragés ; mais le fabricant de quincailleries, de joailleries, et beaucoup d’autres, ainsi que ceux dont le capital serait en argent, verraient diminuer les profits sans aucune compensation.

On serait aussi porté à croire que, quelle que soit la diminution des profits du capital occasionnée par l’accumulation des capitaux consacrés à la terre, et par la hausse des salaires, la somme totale des profits doit cependant augmenter. Supposons que par l’accumulation renouvelée souvent d’un capital de 100,000 l. le taux des profits tombe successivement de 20 à 19, à 18, à 17 pour cent, toujours en diminuant, on croirait que la somme totale des profits retirés par les possesseurs de ces capitaux successifs, doit toujours être progressive, et qu’elle sera plus forte lorsque le capital est de 200,000 l. que quand il n’est que de 100,000 l., et plus forte encore quand il est de 300,000 l., en continuant ainsi à augmenter, quoique dans une proportion moindre, par suite de toute nouvelle augmentation de capital. Cette progression, cependant, n’est exacte que pendant un certain temps ; car 19 pour cent sur 200,000 l. sont plus que 20 pour cent sur 100,000 l. ; et 18 pour cent sur 300,000 l. sont plus que 19 pour cent sur 200,000 l. Mais lorsqu’une grande somme de capital a été déjà accumulée et que les profits ont baissé, une nouvelle accumulation diminue la somme totale des profits. Supposons, par exemple, que l’accumulation soit de 1,000,000 l. et les profits de 7 pour cent, la totalité des profits montera à 70,000 l. ; qu’on ajoute ensuite à ce million un capital de 100,000 l. et que les profits baissent à 6 pour cent, les capitalistes ne recevront plus que 66,000 l., c’est-à-dire 4,000 l. de moins, quoique le capital se trouve porté de 1,000,000 l. à 1,100,000 l.

Tant que le capital donne un profit quelconque il ne peut y avoir aucune accumulation qui ne soit suivie d’une augmentation dans la quantité et la valeur des profits. Par l’emploi de 100,000 l. de capital additionnel, aucune portion de l’ancien capital ne deviendra moins productive. Les produits du sol et de l’industrie nationale devront s’accroître, et leur valeur s’élèvera non seulement en raison de l’augmentation de la quantité des produits, mais aussi en raison de la nouvelle valeur que donne à tous les anciens produits du sol la difficulté croissante de la culture sur les dernières qualités de terres, et c’est cette nouvelle valeur qui devient le prix de la rente. Néanmoins, lorsque l’accumulation des capitaux devient très-considérable, malgré cette augmentation de valeur, elle se trouve distribuée de telle sorte qu’il en est attribué une moindre part aux profits et une plus forte part au contraire à la rente et aux salaires. Ainsi, par l’addition successive de 100,000 l. au capital, le taux des profits baissant de 20 à 19, à 18 et à 17 pour cent, etc., les produits annuels augmenteront eu quantité, et dépasseront la totalité de la valeur additionnelle que le nouveau capital est susceptible de produire. De 20,000 l. le produit haussera à plus de 39,000 l., puis à plus de 57,000 l., et quand le capital employé sera d’un million, ainsi que nous l’avons déjà supposé, si on y ajoute encore 100,000 l., quoique la totalité des profits soit moindre que par le passé, le revenu national sera cependant augmenté de plus de 6,000 l. ; mais l’augmentation portera sur cette partie du revenu qui appartient aux propriétaires fonciers et aux ouvriers : ils obtiendront plus que le produit additionnel, et par leur position ils pourront même empiéter sur les profits antérieurs du capitaliste. C’est ce que nous allons voir.

Supposons que le blé soit a 4 l. le quarter, et que par conséquent, ainsi que nous l’avons déjà calculé, sur les 720 l. qui restent au fermier, la rente payée, il en garde 480 l. pour lui, en payant 240 l. à ses ouvriers. Si le blé monte à 6 l. le quarter, il sera obligé de donner 300 l. aux ouvriers, et il n’aura pour profit que 450 l. Supposons maintenant que le capital employé soit assez fort pour rapporter cent mille fois 720 l. ou 72,000,000 l., le total des profits sera alors de 48,000,000 l. quand le blé sera à 4 l. ; et si par l’emploi d’un plus grand capital on obtenait cent cinq mille fois 720 l. le blé étant à 6 l. soit 75,000,000 l., les profits baisseraient alors de 48,000,000 l. à 44,100,000 l., ou à cent cinq mille fois 420 l. ; tandis que le montant des salaires s’élèverait de 24,000,000 l. à 31,500,000 l. Les salaires doivent monter, parce qu’il faudra plus d’ouvriers en proportion du capital. Chaque ouvrier recevra plus d’argent ; mais sa condition, comme nous l’avons déjà montré, sera moins heureuse, en ce qu’il ne pourra plus se procurer qu’une moindre quantité des produits nationaux. Les propriétaires gagneront à cet état de choses ; ils recevront de plus fortes rentes, d’abord parce que les produits auront plus de valeur, et ensuite parce qu’ils recevront une plus grande quantité de ces produits. Quoique une plus grande valeur soit produite, une plus grande partie de ce qui en reste après le paiement de la rente, est consommée par les producteurs ; et c’est cette portion seule qui règle les profits. Pendant que la terre produit abondamment, les salaires peuvent hausser pour un temps, les producteurs ayant les moyens de consommer plus qu’ils ne faisaient habituellement ; mais l’encouragement que cela doit donner à la population, forcera bientôt les ouvriers à s’en tenir à leur ancienne consommation. Toutefois, lorsqu’on commence à défricher des terrains peu fertiles, ou lorsque plus de capital et de travail sont consacrés aux vieux terrains avec un moindre retour de produits, cet effet est alors permanent. Une plus grande part de la portion du produit qui reste, après le paiement de la rente, pour être partagée entre les propriétaires du capital et les ouvriers, revient alors à ces derniers. Chacun d’eux en a vraisemblablement une moindre quantité absolue ; mais comme il y a plus d’ouvriers employés en proportion du produit total gardé par le fermier, les salaires absorbent une part plus grande sur la valeur du produit total, et par conséquent il en reste moins pour les profits. Les lois de la nature rendraient ces phénomènes permanents en mettant des bornes à la force productive du sol.

Nous voilà donc arrivés aux conclusions mêmes que nous avons déjà cherché à établir : — que dans tous les pays et dans tous les temps, les profits dépendent de la quantité de travail nécessaire pour fournir les denrées de première nécessité aux ouvriers sur des terres et avec des capitaux qui ne donnent pas de rente. Les effets de l’accumulation doivent donc être différents selon les pays, et, surtout, selon la fertilité du sol. Quelque étendu que soit un pays dont le sol est peu fertile, et où l’importation des subsistances est prohibée, les moindres accumulations de capital y produiront de grandes réductions dans le taux des profits, et causeront une hausse rapide de la rente. Au contraire, dans un pays peu étendu, mais fertile, il peut y avoir un grand fonds de capital accumulé sans diminution notable dans le taux des profits, ou sans une forte hausse de la rente des terres, surtout si la libre importation des vivres y est permise. Dans le chapitre des Salaires, j’ai essayé de prouver que le prix métallique des denrées ne saurait hausser par la cherté de la main-d’œuvre, que l’on suppose l’or, — mesure constante du numéraire, — produit dans le pays, ou tiré de l’étranger. Mais s’il en était autrement et que le prix des denrées s’élevât constamment par la hausse des salaires, il serait encore exact de dire que la cherté des salaires atteint constamment les personnes qui emploient des ouvriers, et les prive d’une portion de leurs profits réels. Que le chapelier, le marchand de bas et le cordonner, soient obligés de payer chacun 10 l. de plus à leurs ouvriers pour la fabrication d’une quantité donnée de produits, et que le prix des chapeaux, de bas et des souliers monte assez pour rembourser les fabricants de ces 10 l., leur condition ne sera pas meilleure qu’avant cette hausse. Si le marchand de bonneterie vend ses bas 110 l. au lieu de 100 l., il aura exactement le même profit en argent ; mais comme il aura en échange de cette même somme un dixième de moins en chapeaux, en souliers, et en autres articles, et comme il pouvait avec le montant de ses épargnes employer auparavant moins d’ouvriers chèrement payés, et acheter moins de matières premières à des prix élevés, sa situation ne sera pas meilleure que si, les prix restant les mêmes, ses profits en argent étaient réellement diminués. J’ai cherché à prouver ainsi, 1o que la hausse des salaires ne peut faire hausser le prix des denrées, mais qu’elle doit constamment diminuer les profits ; 2o que, si le prix des denrées pouvait hausser, l’effet sur les profits serait toujours le même. Le fait est que l’argent seul, mesure des prix et des profits, pourrait baisser.

  1. Les auteurs anglais entendent par ce mot les bénéfices que tout entrepreneur d’industrie fait dans sa profession, quelle qu’elle soit, sans distinguer dans ces bénéfices ce qui peut être considéré comme profit du capital de cet entrepreneur de ce qui peut être considéré comme le prix de ses conceptions et de son activité. Dans mon Traité, j’ai cru devoir mettre en garde contre cette confusion. — J. B. Say.
  2. Le lecteur est prié de se rappeler que dans le but d’être plus clair, j’ai considéré l’argent, ou la monnaie, comme invariable dans sa valeur ; et par conséquent toute variation de prix comme l’effet d’un changement dans la valeur de la marchandise seulement. (Note de l’Auteur.)
  3. Je vois, moi, dans ces deux faits un parallélisme, constant, inévitable même, et non cet antagonisme déplorable que signale Ricardo. Suivant lui, les salaires et les profits représenteraient les deux plateaux d’une balance, l’un s’abaissant tandis que l’autre s’élèverait : et comme le manufacturier peut toujours troubler l’équilibre à son profit, grâce aux capitaux dont il dispose, il s’ensuivrait que les profits suivraient une progression toujours ascendante. Or, il n’en est rien. Pour nous les intérêts de l’ouvrier et du chef d’industrie sont entièrement liés : greffés comme deux rameaux sur la production, ils ensuivent toutes les phases, prospérant ou languissant avec elle. En effet, n’est-ce pas sur le prix courant des marchandises que le manufacturier prélève son revenu et celui de l’ouvrier, et ce prix courant ne varie-t-il pas en raison des frais de production combinés avec l’abondance des produits ? Faites que les demandes soient actives, que les échanges se multiplient, que l’industrie fatigue les machines à produire, et vous, aurez élevé le prix des marchandises. Et comme une production animée nécessite des bras nombreux, le travail haussera de valeur inévitablement : — c’est l’époque où l’ouvrier commande et fait largement sa part dans le butin industriel. Faites, au contraire, que les besoins diminuent, que les magasins encombrés de produits réduisent au repos la plupart des usines, et vous voyez fléchir aussitôt le prix des marchandises. Or, comme un travail languissant est le signal de la désertion des ateliers, l’ouvrier voit s’anéantir ses ressources : — c’est l’époque où il fléchit le genou, pressé par la faim et par une concurrence acharnée. Mais dans tous les cas les chances sont les mêmes pour le travailleur et le capitaliste ; et s’il arrive que, même aux époques de prospérité manufacturière, l’ouvrier ne participe que faiblement aux bénéfices de la production, on peut être sûr que sa condition est bien plus douloureuse, plus poignante aux moments de crise et d’abaissement. L’exemple de l’Angleterre depuis ces dernières années suffirait seul pour démontrer la vérité de ces conclusions que nous dictent le bon sens et la logique. En 1838, 39 et 40, on vit les districts manufacturiers s’assombrir tout à coup, menacés par une disette imminente et par une crise qui devait être le contre-coup des crises financières de l’Amérique. Les manufacturiers, privés des demandes ordinaires de la classe laborieuse, restreignirent leur fabrication. Le 12 mai 1839, quarante-cinq filateurs de coton s’engagèrent à ne pas travailler plus de quatre jours par semaine, et tandis que les capitaux s’épuisaient dans une production ruineuse, tandis que les profits se changeaient en faillites nombreuses, les salaires baissaient de 20, de 40 pour cent. Lorsque l’industrie courbée sous ces orages financiers se releva, on vit les manufacturiers reconstituer leurs fortunes ébranlées, activer le travail, et hausser immédiatement les salaires. Or, ce qui est vrai pour l’Angleterre est vrai pour tous les pays, et suffit sans aucune espèce d’optimisme pour nous rassurer sur l’avenir des masses et les prédictions de Ricardo. A. F.
  4. Le lecteur doit s’apercevoir que nous faisons abstraction des variations accidentelles qui proviennent des bonnes ou mauvaises saisons, et de l’augmentation ou de la diminution de la demande par suite de quelque changement soudain dans l’état de la population. Nous voulons parler du prix naturel et constant du blé, et non de son prix accidentel et variable. (Note de l’auteur.)
  5. Les cent quatre-vingts quarters de blé se partageraient dans les proportions suivantes entre le propriétaire, le fermier et les ouvriers, par l’effet des variations supposées dans la valeur du blé.
    Prix du qarter.
    l. s. d.
    4 0 0
    4 4 8
    4 10 0
    4 16 0
    5 2 10
    Fermage
    en blé
    point
    10 quarters
    20 -
    30 -
    40 -
    Profit
    en blé
    120 quarters
    117. 7
    103. 4
    95.
    76.
    Salaires
    en blé
    60 quarters
    58. 3
    56. 6
    55.
    53. 3
    Total
    180


    et dans ces mêmes circonstances, les fermages en argent, le salaire et les profits seraient :


    Prix du qarter.
    l. s. d.
    4 0 0
    4 4 8
    4 10 0
    4 16 0
    5 2 10
    Fermage.
    l. s. d.
    point
    42 7 6
    90 0 0
    144 0 0
    205 18 4
    Profit.
    l. s. d.
    480 0 0
    473 0 0
    465 0 0
    456 0 0
    445 15 0
    Total.
    l. s. d.
    240 0 0
    247 0 0
    255 0 0
    264 0 0
    274 5 0
    Total.
    l. s. d.
    720 0 0
    762 7 6
    810 0 0
    864 0 0
    925 13 4