De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication/Tome I/08

De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication (The Variation of Animals and Plants under Domestication)
Traduction par Jean-Jacques Moulinié.
C. Reinwald (Tom. Ip. 293-323).

CHAPITRE VIII.

CANARDS. — OIES. — PAONS. — DINDONS. — PINTADES. — CANARIS.
POISSONS DORÉS. — ABEILLES. — VERS À SOIE.


CANARDS. — Diverses races. — Domestication. — Leur provenance du canard sauvage commun. — Différences des races. — Différences ostéologiques. — Effets de l’usage et du défaut d’usage sur les os des membres.
OIES. — Domestication ancienne. — Variation faible. — Race de Sébastopol.
PAONS. — Origine de la race à épaules noires.
DINDONS. — Races. — Croisements avec l’espèce des États-Unis. — Effets du climat.
PINTADES. — CANARIS. — POISSONS DORÉS. — ABEILLES.
VERS À SOIE. — Espèces et races. — Domestication ancienne. — Soins apportés à leur sélection. — Différences entre les races. — Différences entre les œufs, chenilles et cocons. — Hérédité des caractères. — Ailes imparfaites. — Instincts perdus. — Caractères en corrélation.


Je commencerai, comme dans les cas précédents, par une courte description des principales races domestiques du canard :


Race I. — Canard domestique commun. — Varie beaucoup par sa couleur et ses proportions, et diffère du canard sauvage par ses instincts et son naturel. On y distingue plusieurs sous-races : — 1o La sous-race Aylesbury, de grande taille, blanche, avec le bec et les pattes d’un jaune pâle, et sac abdominal fortement développé. — 2o La sous-race de Rouen, grande, colorée comme le canard sauvage, bec vert ou marbré ; sac abdominal bien développé. — 3o Sous-race Huppée, portant une touffe de belles plumes duvetées, reposant sur une masse charnue, au-dessous de laquelle le crâne se trouve perforé. Dans un canard que j’ai importé de Hollande, la touffe avait deux pouces et demi de diamètre. — 4o Sous-race du Labrador (du Canada, de Buenos-Ayres ou de l’inde) ; plumage tout noir ; bec plus large relativement à sa longueur que dans le canard sauvage ; œufs légèrement teintés de noir. Cette sous-race pourrait peut-être compter comme une race ; elle comprend deux sous-variétés, une aussi grande que le canard domestique commun, et que j’ai gardée vivante, l’autre plus petite et capable de vol[1]. Je suppose que c’est cette dernière qu’on a décrite en France[2] comme volant bien, étant un peu sauvage, et ayant le goût du canard sauvage ; toutefois cette variété est polygame comme les autres canards domestiques, ce qui n’est pas le cas de l’espèce sauvage. Ces canards du Labrador noirs reproduisent fidèlement leur type ; cependant le Dr Turral a signalé le cas d’un canard de cette sous-variété ayant produit, en France, des jeunes présentant sur le cou et la tête quelques plumes blanches et une tache de couleur ocre sur la poitrine.

Race II. — Canard à bec courbé (Hook-billed Duck). — La courbure inférieure du bec de cet oiseau lui donne une apparence extraordinaire ; sa tête est souvent huppée. Il est ordinairement blanc, quelquefois il est coloré comme le canard sauvage. C’est une race ancienne, car il en est fait mention en 1676[3]. Elle témoigne par sa fécondité de l’antiquité de sa domestication, car elle pond presque constamment des œufs[4].

Race III. — Canard Chanterelle (Call-Duck). — Remarquable par sa petite taille et la loquacité extraordinaire de la femelle. Bec court. Ces oiseaux sont blancs ou colorés comme l’espèce sauvage.

Race IV. — Canard Pingouin. — Cette race, la plus remarquable de toutes, paraît originaire de l’archipel Malai. Elle marche avec le corps très-redressé, et le cou tendu et relevé. Bec plutôt court. Queue retroussée, portant dix-huit rectrices. Fémur et métatarse allongés.


Presque tous les naturalistes admettent la descendance de ces diverses races du canard sauvage commun (Anas boschas) ; Les éleveurs par contre ont d’autres idées à ce sujet[5]. À moins de nier que la domestication, prolongée pendant des siècles, ne puisse affecter des caractères aussi peu importants que ceux de la couleur, de la taille, et un peu les dimensions proportionnelles, et le naturel, il n’y a pas à mettre en doute la provenance du canard domestique de l’espèce sauvage commune, car il ne diffère de ce dernier par aucun caractère important. Quelques documents historiques peuvent nous renseigner sur l’époque et les progrès de la domestication du canard. Il était inconnu[6] aux anciens Égyptiens, aux Juifs de l’Ancien Testament et aux Grecs de la période Homérique. Columelle[7] et Varron, il y a dix-huit cents ans, mentionnent la nécessité de tenir les canards dans des enclos fermés comme les autres oiseaux sauvages ; ce qui montre qu’à cette époque, on craignait qu’ils ne s’échappassent. En outre, le conseil que donne Columelle à ceux qui désiraient augmenter le nombre de leurs canards, de recueillir les œufs de l’oiseau sauvage, et de les mettre sous une poule, prouve qu’alors le canard n’était pas encore devenu l’hôte naturalisé et prolifique de la basse-cour romaine. Presque toutes les langues d’Europe témoignent de la provenance du canard domestique de l’espèce sauvage, car toutes désignent sous le même nom l’une et l’autre forme. Le canard sauvage offre une immense distribution, qui s’étend depuis l’Himalaya jusqu’à l’Amérique du Nord. Il s’apparie librement avec la forme domestique, et donne des produits métis entièrement fertiles. On a constaté, tant en Amérique qu’en Europe, que l’apprivoisement du canard sauvage est facile, et qu’il reproduit sans peine en captivité. L’essai a été fait en Suède par Tiburtius, qui réussit à en élever trois générations, sans observer chez eux la moindre variation, bien qu’il les traitât comme des canards domestiques. Les canetons souffraient de ce qu’on les laissait aller dans l’eau froide[8], ce qui, comme on le sait, est aussi le cas, bien qu’il soit étrange, pour les jeunes canetons domestiques. Un observateur bien connu d’Angleterre[9], a décrit avec détails ses essais répétés et réussis sur la domestication du canard sauvage. On obtient aisément l’éclosion des petits, en faisant couver les œufs par une poule Bantam ; mais pour réussir, il ne faut pas mettre sous la même poule, à la fois des œufs de canard sauvage et de canard domestique, car alors les canetons sauvages ne tardent pas à périr, laissant à leurs frères plus robustes, la jouissance complète des soins de leur mère adoptive. C’est le résultat certain des différences de tempérament qui existent au début entre ces différents canetons fraîchement éclos. Les canetons sauvages se montraient dès le commencement très-familiers pour ceux qui les soignaient, tant qu’ils portaient les mêmes vêtements, et étaient accoutumés aux chiens et chats de la maison. Mais la vue d’hommes ou de chiens étrangers les effrayait énormément. Contrairement à ce qui a été observé en Suède, M. Hewitt a toujours trouvé que ses jeunes canards changeaient et dégénéraient dans le cours de deux ou trois générations, tout croisement avec le canard domestique ayant d’ailleurs été évité avec le plus grand soin. Ses canards, après la troisième génération, perdaient le port élégant de l’espèce sauvage, et commençaient à prendre les allures du canard commun. À chaque génération ils augmentaient de taille, et leurs pattes perdaient de leur finesse. Le collier blanc autour du cou du canard devenait plus large et moins régulier, et quelques-unes des plus longues rémiges primaires devenaient plus ou moins blanches. M. Hewitt détruisait alors ses canards, et se procurait de nouveaux œufs de nids sauvages, de sorte qu’il n’a jamais poussé la même famille à plus de cinq ou six générations. Ses oiseaux continuaient à s’associer par couples, et ne sont jamais devenus polygames comme le canard domestique ordinaire. Je donne ces détails, parce que je ne connais aucun autre cas d’une observation aussi complète, et faite par un homme plus compétent, sur les changements progressifs qu’éprouvent les oiseaux sauvages, soumis pendant plusieurs générations à l’influence de la domestication.

Il ne peut donc y avoir de doute, sur le fait que le canard sauvage ne soit la souche primitive de la forme domestique ordinaire, et il n’est point besoin de chercher d’autres espèces distinctes comme souches des autres races domestiques plus marquées que nous avons énumérées plus haut. Je ne renouvellerai pas les arguments invoqués déjà dans les chapitres précédents, sur l’improbabilité que l’homme ait autrefois domestiqué plusieurs espèces inconnues ou éteintes, puisque les canards à l’état sauvage ne sont pas facilement exterminés ; sur la présence, chez ces espèces primitives supposées, de caractères anormaux relativement à ceux des autres espèces du genre, tels que les canards à bec courbé et les Pingouins ; sur la fertilité réciproque de toutes les races entre elles[10] ; sur les dispositions générales, instincts, etc., qui sont les mêmes chez toutes les races. Mais nous devons, dans ce cas particulier, noter le fait que, dans la grande famille des canards, une seule espèce, l’A. boschas mâle, a les quatre rectrices caudales médianes frisées et recourbées en dessus ; or, dans toutes les races domestiques ci-dessus nommées, on retrouve ces pennes frisées ; et, en leur supposant une origine distincte, il faudrait admettre que l’homme ne serait autrefois précisément tombé que sur des espèces possédant toutes ce caractère, actuellement unique. En outre, dans chaque race, il y a des sous-variétés colorées exactement comme le canard sauvage, ainsi que je l’ai vu dans les races les plus grandes et les plus petites, telles que la race de Rouen et la race Chanterelle ; il en est de même, d’après M. Brent[11], chez les canards à bec courbé. Dans les produits d’un croisement, fait entre un canard Aylesbury blanc, et une cane Labrador noire, se trouvaient quelques canetons qui prirent en grandissant le plumage du canard sauvage.

Je n’ai vu que peu de canards Pingouins, et leur coloration n’était pas exactement celle de l’espèce sauvage ; mais sur trois individus provenant de Lombok et Bali, dans l’archipel Malais, et dont Sir J. Brooke m’a envoyé les peaux, les deux femelles étaient plus pâles et un peu plus rousses, que le canard sauvage, et le mâle avait tout son plumage, à l’exception du cou, des tectrices caudales, de la queue et des ailes, d’un gris argenté, finement barré de lignes foncées, et très-analogue à certaines parties du plumage de l’espèce sauvage. Mais cet oiseau s’est trouvé identique, plume pour plume, à une variété de la race commune, provenant d’une ferme du comté de Kent, et dont j’ai eu occasion de revoir ailleurs des individus semblables. Cette circonstance d’un canard, provenant d’un climat aussi spécial que celui de l’archipel Malais (où l’espèce sauvage n’existe pas), et ayant un plumage identique à celui qu’on trouve occasionnellement dans nos basses-cours, est bien digne d’attention. Il paraît que le climat de l’archipel Malais favorise les variations dans le plumage du canard, car Zollinger[12], à propos de la race Pingouine, remarque qu’à Lombok il y a une variété étonnante et exceptionnelle de ces oiseaux. J’ai gardé vivant un canard Pingouin mâle, qui différait de ceux dont j’avais reçu les peaux de Lombok, par sa poitrine et son dos partiellement teintés de brun marron, ce qui le rapprochait encore davantage du canard sauvage.

Ces divers faits, surtout la présence des plumes frisées chez les mâles de toutes les races, et la ressemblance fréquente du plumage de certaines sous-variétés de chacune d’elles, à celui du canard sauvage, nous autorisent à conclure avec certitude, que toutes les races domestiques proviennent de l’A. boschas.


Je vais maintenant signaler quelques particularités caractérisant les diverses races. La coloration des œufs varie ; quelques canards communs pondent des œufs d’un vert pâle, dans d’autres ils sont blancs. Les premiers œufs de chaque saison pondus par la cane Labrador noire, sont teintés de noir, comme si on les avait frottés d’encre. Il y a donc, comme chez les poules, une certaine corrélation entre la couleur du plumage et celle de la coquille de l’œuf. Un bon observateur m’a informé que ses canes Labrador, ayant une année pondu des œufs entièrement blancs, les vitellus se trouvèrent pendant la saison d’un vert-olive sale, au lieu d’être comme à l’ordinaire d’un jaune d’or, de sorte que la teinte noire semblait s’être portée à l’intérieur. Un autre cas curieux, qui montre quelles variations singulières peuvent parfois se produire et être héréditaires, est celui signalé par M. Hansell[13], d’une cane de la race commune, dont les œufs avaient invariablement le vitellus d’un brun foncé, semblable à de la colle fondue ; les jeunes femelles provenant de ces œufs, et qui furent élevées, pondirent aussi des œufs semblables, et on fut obligé de détruire la race.

Le canard à bec courbé a une apparence très-remarquable (fig. 39 crâne) ; cette forme de bec remonte au moins à l’année 1676, et, par sa structure, est évidemment analogue à celui que nous avons décrit chez le pigeon messager Bagadotten. M. Brent[14] assure que, lorsqu’on croise les canards à bec courbés avec la race ordinaire, un grand nombre des jeunes qui proviennent de ce croisement, naissent avec la mandibule supérieure plus courte que l’inférieure, ce qui cause fréquemment la mort de l’oiseau. La présence d’une touffe de plumes sur la tête n’est point une chose rare, et se rencontre d’abord dans la vraie race huppée, chez les Becs-courbés et chez le canard de ferme ordinaire ; je l’ai trouvée aussi sur un canard qui m’avait été envoyé de l’archipel Malais, et qui n’offrait d’ailleurs aucune autre particularité. La huppe est intéressante en ce qu’elle affecte le crâne, qu’elle rend plus globuleux, et qui présente alors de nombreuses perforations. Les canards Chanterelles sont remarquables par leur excessive loquacité ; les mâles ne font que siffler comme les canards mâles communs ; cependant, lorsqu’on les apparie avec les canes de la race ordinaire, ils transmettent à leur progéniture femelle une voix très-bruyante. La voix varie dans les différentes races, M. Brent[15] dit que les canards à bec courbé sont très-bruyants, et que les Rouens ont un cri triste et monotone, qu’une oreille exercée reconnaît facilement. Il peut paraître singulier que la domestication ait développé la loquacité de certains canards ; mais, le canard Chanterelle étant employé comme appeau, et comme tel étant utile par ses cris, il est probable que sa voix aura été développée par sélection. Le col. Hawker dit, par exemple, que, lorsqu’on ne peut se procurer de jeunes canards sauvages pour appeaux, on peut, comme pis-aller, choisir des canards domestiques, les plus criards, quand même ils n’auraient pas la coloration de l’espèce sauvage[16]. On a affirmé à tort que les canards Chanterelles couvaient moins longtemps que la race commune[17].

La race Pingouine est de toutes la plus remarquable ; elle porte son cou mince et son corps très-relevé ; ses ailes sont petites ; sa queue est retroussée, et elle a les fémurs et les métatarses beaucoup plus allongés que ces os ne le sont dans le canard sauvage. J’ai compté sur cinq individus, dix-huit rectrices, au lieu de vingt comme dans le canard sauvage ; et j’en ai trouvé dix-huit et dix-neuf dans deux Labradors. Dans trois individus, le doigt médian portait 27 et 28 scutelles ; il y en avait 31 et 32 dans deux canards sauvages. Croisée, la race Pingouine transmet fortement à sa progéniture, la forme particulière de son corps et sa démarche ; c’est ce qu’ont montré très-évidemment quelques métis obtenus au Jardin Zoologique d’un de ces oiseaux et de l’oie Égyptienne[18] (Anser Ægyptiacus), ainsi que des métis que j’ai élevés moi-même, et produits du croisement d’un Pingouin et d’un Labrador. Je ne suis point surpris que quelques auteurs aient soutenu l’opinion de la descendance de cette race d’une espèce distincte et inconnue, mais pour les raisons déjà données, je crois plus probable qu’elle provient de l’A. boschas, bien que profondément modifiée par le climat et la domestication.

Caractères ostéologiques. — Les crânes des diverses races ne diffèrent entre eux, et de celui du canard sauvage, que peu, si ce n’est par les proportions et la courbure des maxillaires supérieurs. Ces os sont courts chez le canard Chanterelle, offrant un profil droit, tandis qu’il est concave chez le canard ordinaire : leur crâne ressemble donc à celui d’une petite oie. Dans le canard à bec courbé (fig. 39), les maxillaires supérieurs, ainsi que les inférieurs, sont recourbés en dessous d’une manière remarquable. Le Labrador, a les maxillaires supérieurs plutôt plus larges que le canard sauvage et j’ai observé sur deux crânes, une forte saillie des crêtes verticales qui se trouvent de chaque côté de l’occipital supérieur. Les maxillaires supérieurs sont, chez le canard Pingouin, plus courts, et les apophyses mastoïdiennes plus saillantes que dans l’espèce sauvage. Sur un canard Hollandais huppé, dont la touffe de plumes était énorme, le crâne était plus globuleux et présentait deux perforations ; les os lacrymaux étaient beaucoup plus reculés, avaient une forme différente, et se rapprochant jusqu’à presque toucher les apophyses latérales des os frontaux, complétaient à peu près l’orbite osseuse de l’œil. Les os carrés et ptérygoïdiens étant très-compliqués, et en connexion avec un grand nombre d’autres os, je les ai comparés avec beaucoup de soin dans les diverses races, mais sans y remarquer de différences autres que dans la grandeur.


Fig. 39. Crânes, vus de côté, deux tiers de grandeur naturelle.
A. Canard sauvage. — B. Canard à bec courbé.

Vertèbres et côtes. — Sur un squelette de canard Labrador, j’ai compté les nombres habituels, de quinze vertèbres cervicales, et de neuf dorsales portant des côtes ; sur un autre, j’ai trouvé quinze cervicales et dix dorsales à côtes, fait qui, autant que je puis en juger, n’est pas dû au développement d’une côte sur la première vertèbre lombaire, car dans les deux squelettes, les vertèbres lombaires étaient semblables par le nombre, la forme et la grandeur, à celles du canard sauvage. Dans deux squelettes de canard Chanterelle, il y avait quinze vertèbres cervicales et neuf dorsales ; sur un troisième squelette, la quinzième cervicale portait de petites côtes, faisant ainsi dix paires de côtes, mais qui ne correspondaient ni ne dépendaient des mêmes vertèbres que les dix signalées précédemment chez le Labrador. Dans le canard Chanterelle, dont la 15e cervicale portait de petites côtes, les apophyses inférieures des 13e et 14e cervicales, et celle de la 17e dorsale, correspondaient aux apophyses des 14e, 15e et 18e vertèbres du canard sauvage : chacune de ces vertèbres avait donc ainsi acquis la conformation particulière à celle qui la suit. Dans le même canard, la 12e cervicale (fig. 40, B), avait les deux branches de son apophyse inférieure plus rapprochées que dans le canard sauvage (A), et leur portion descendante très-raccourcie. Dans le canard Pingouin, le cou, d’ailleurs mince et que l’oiseau porte très-relevé, paraît à cause de cela fort allongé, ce qui n’est du reste pas le cas, ainsi que le prouvent les mesures directes, et il n’y a pas de différence dans les vertèbres cervicales et dorsales. Toutefois, les dorsales postérieures sont plus complètement soudées au bassin que dans le canard sauvage. Le canard Aylesbury a quinze vertèbres cervicales, et dix dorsales pourvues de côtes, mais, autant que j’ai pu m’en assurer, il a la même nombre de vertèbres lombaires, sacrées et caudales que l’oiseau sauvage. Ses vertèbres cervicales (fig. 40, D), étaient beaucoup plus larges et épaisses, par rapport à leur longueur, que dans l’espèce sauvage (C), comme on peut le voir par l’inspection des figures représentant dans les deux oiseaux la huitième cervicale. Ces faits nous montrent que la 15e cervicale se modifie quelquefois, et se transforme en une vertèbre dorsale, et que, lorsque cela arrive, toutes les vertèbres adjacentes sont modifiées. Nous voyons encore qu’il peut se développer occasionnellement une vertèbre dorsale additionnelle portant une côte, pendant que le nombre des cervicales et lombaires reste le même qu’à l’ordinaire.

Fig. 40. Vertèbres cervicales de grandeur naturelle. — A. Huitième vertèbre cervicale de canard sauvage, vue en dessous. — B. Huitième vertèbre cervicale du canard Chanterelle, vue en dessous. — C. Douzième cervicale du canard sauvage, vue latéralement. — D. Douzième cervicale du canard Aylesbury, vue latéralement.

L’élargissement osseux de la trachée chez les mâles est identiquement le même chez les races Pingouine, Chanterelle, Bec-courbé, Labrador et Aylesbury.

Le bassin est assez uniforme ; sa partie antérieure est passablement arquée en dedans, sur le squelette du canard à bec courbé, et le trou ischiatique est moins allongé chez l’Aylesbury et quelques autres races. Le sternum, la fourchette, les coracoïdiens et l’omoplate n’offrent que des différences trop faibles et trop variables, pour qu’il vaille la peine de les mentionner ; je me bornerai à signaler une forte atténuation de la portion terminale, des omoplates chez le canard Pingouin.

Je n’ai pas observé de modification dans la forme des os des jambes et de l’aile. Dans les Pingouins et les Becs-courbés ; les phalanges terminales des ailes sont un peu raccourcies ; dans les premiers, le fémur et le métatarse (mais non le tibia) sont considérablement allongés, tant relativement aux mêmes os dans le canard sauvage, qu’aux os de l’aile dans les deux oiseaux. Cet allongement des os de la jambe est très-apparent chez l’oiseau vivant, et doit sans doute être en rapport avec sa démarche tout particulièrement redressée. Dans un grand canard Aylesbury, j’ai trouvé, d’autre part, que le tibia était le seul os qui, relativement aux autres os de la jambe, fût un peu allongé.

Effets de l’augmentation et de la diminution de l’usage des membres. — Dans toutes les races, les os des ailes, mesurés séparément, après nettoyage complet, et comparés à ceux du canard sauvage, se sont, relativement aux os des membres, un peu raccourcis, comme le montre la table suivante :

RACES. LONGUEUR
des
fémur, tibia et métatarse ensemble.
LONGUEUR
des
humérus, radius et métatarse ensemble.
RAPPORT.
Pouces. Pouces.
Canard sauvage
7.14 9.28 100 : 129
Aylesbury
8.64 10.43 100 : 120
Huppé (hollandais)
8.25 9.83 100 : 119
Pingouin
7.12 8.78 100 : 123
Chanterelle
6.20 7.87 100 : 125
longueur
des mêmes os.
longueur
de tous les os de l’aile.
rapport.
Canard sauvage (autre exemplaire)
6.85 10.07 100 : 147
Canard domestique ordinaire
8.15 11.26 100 : 138

Cette table nous prouve que, comparés aux os de l’aile du canard sauvage, ceux des races domestiques ont subi une réduction petite mais générale, et que la réduction la plus faible se trouve chez le canard Chanterelle, lequel a conservé l’habitude et le pouvoir de voler. La table suivante montre que, quant au poids, la différence entre les os des jambes et ceux de l’aile est encore plus considérable.

RACES. POIDS
des
fémur, tibia et métatarse.
POIDS
des
humérus, radius et métacarpien.
RAPPORT.
Grains. Grains.
Canard sauvage
54 97 100 : 179
Aylesbury
164 204 100 : 124
Bec-courbé
107 160 100 : 149
Huppé (hollandais)
111 148 100 : 133
Pingouin
75 90.5 100 : 120
Labrador
141 165 100 : 117
Chanterelle
57 93 100 : 163
poids
de tous les os de la jambe et du pied.
longueur
de tous les os de l’aile.
rapport.
Canard sauvage (autre exemplaire)
66 115 100 : 173
Canard domestique ordinaire
127 158 100 : 124

Dans ces oiseaux domestiques, le poids considérablement moindre des os de l’aile, (dont la moyenne est d’environ 25 p. 0/0 de leur poids proportionnel), ainsi que leur diminution de longueur, relativement aux os des jambes, pourraient provenir, non d’une diminution réelle des os de l’aile, mais d’un accroissement du poids et de la longueur des os de la jambe. Dans la première table que nous donnons plus bas, on peut voir que, relativement au poids du squelette entier, les os des jambes ont effectivement augmenté de poids ; mais la deuxième table montre que, d’après le même terme de comparaison, les os de l’aile ont aussi effectivement diminué de poids ; il en résulte que la disproportion relative que signalent les deux tables précédentes entre les os des ailes et des jambes, comparés à ceux du canard sauvage, est en partie due à une augmentation dans le poids et la longueur des os des jambes, et en partie à la diminution du poids et de la longueur de ceux des ailes.

Quant aux tables qui suivent, je dois dire que je les ai vérifiées en prenant un autre squelette de canard sauvage et de canard domestique, et en comparant le poids total des os des jambes à celui de tous les os de l’aile ; le résultat a été le même. D’après la première table, nous voyons que dans chaque cas, les os des membres ont effectivement augmenté de poids. On devait s’attendre à ce que les os des jambes seraient plus ou moins pesants, en proportion de l’augmentation ou de la diminution du poids du squelette entier ; mais on ne peut expliquer leur accroissement relatif de poids dans toutes les races que par le fait que celles-ci marchent et se servent de leurs pattes beaucoup plus que les oiseaux sauvages, car elles ne volent jamais, et les plus artificielles nagent rarement. La deuxième table nous montre qu’à l’exception d’un cas, les os de l’aile ont subi une réduction marquée, résultat évident d’une diminution d’usage. Le cas exceptionnel que présente un des canards Chanterelle, n’est à vrai dire pas une exception,

RACES.
POIDS
du squelette entier.
Nota. On a enlevé à tous les squelettes un métatarse et un pied, ces parties ayant été égarées sur deux d’entre eux.
POIDS
des
fémur, tibia et métatarse.
RAPPORT.
Grains. Grains.
Canard sauvage
839 54 1000 : 64
Aylesbury
1925 164 1000 : 85
Huppé (hollandais)
1404 111 1000 : 79
Pingouin
871 75 1000 : 86
Chanterelle (de M. Fox)
717 57 1000 : 79
poids
du squelette entier.
poids
des humérus, radius et métacarpien.
rapport.
Grains. Grains.
Canard sauvage
839 97 1000 : 115
Aylesbury
1925 204 1000 : 105
Huppé (hollandais)
1404 148 1000 : 105
Pingouin
871 90 1000 : 103
Chanterelle (de M. Baler)
914 100 1000 : 109
Chanterelle (de M. Fox)
717 92 1000 : 129

car cet oiseau avait l’habitude de voler presque constamment, et tous les jours, pendant un temps très-long, il décrivait dans l’air des cercles de plus d’un mille de diamètre. Bien loin d’avoir subi une diminution, les os des ailes de cet oiseau ont réellement augmenté de poids, relativement à ceux du canard sauvage, ce qui probablement est la conséquence de la légèreté et de la minceur de tous les os de son squelette.

J’ai enfin pesé les fourchettes, les coracoïdiens et les omoplates d’un canard sauvage et d’un canard domestique commun, et j’ai trouvé que les poids de ces os, relativement à celui du squelette entier, étaient comme 100 à 89 ; 100 représentant le poids du squelette du premier, d’où les os de l’oiseau domestiqué ont perdu 11 0/0 de leur poids proportionnel. La saillie de la crête sternale est aussi fort réduite relativement à la longueur du sternum, dans toutes les races domestiques. Ces changements sont évidemment le résultat de la diminution de l’usage des ailes.


On sait que plusieurs oiseaux appartenant à divers ordres, et habitant des îles Océaniques, ont des ailes considérablement réduites et sont dans l’impossibilité de voler. Dans mon Origine des Espèces, j’avais émis l’idée que, ces oiseaux n’ayant pas d’ennemis à redouter, leurs ailes s’étaient graduellement réduites par défaut d’usage. On pouvait par conséquent s’attendre à ce que, pendant les premières périodes de ce commencement de diminution, les oiseaux dans ce cas ressemblassent à nos canards domestiques, par l’état de leurs organes du vol. C’est précisément ce qui est pour la poule d’eau de Tristan d’Acunha (Gallinula nesiotis) qui peut voltiger un peu, mais, pour se sauver, se sert surtout de ses jambes et non de ses ailes. M. Sclater[19] ayant examiné cet oiseau, a trouvé que ses ailes, son sternum, ses os coracoïdiens, sont réduits en longueur, et la crête sternale en profondeur, si on les compare aux mêmes os de la poule d’eau européenne (G. chloropus) ; d’autre part, le fémur et le bassin, comparés à ceux de la poule d’eau ordinaire sont plus grands, le premier de quatre lignes. Il s’est donc opéré, à un degré un peu plus prononcé, sur le squelette de cette espèce naturelle, les mêmes changements que sur nos canards domestiques ; je crois que personne ne pourra contester que, dans le cas en question, ils ne soient dus à une diminution de l’usage des ailes et à une augmentation de celui des jambes.

OIES.

De tous les animaux dont la domestication est ancienne, il n’en est presque pas qui aient aussi peu varié que l’oie. L’antiquité de la domestication de cet oiseau nous est révélée par quelques vers d’Homère, et par les oies conservées au Capitole de Rome (388 ans avant Jésus-Christ), et dont la consécration à Junon impliquait une haute antiquité[20]. Le désaccord qui règne entre les naturalistes, relativement à l’espèce sauvage dont elle peut descendre, montre que l’oie a varié dans certaines limites ; il est vrai, que dans ce cas, la difficulté provient surtout de l’existence de trois ou quatre espèces sauvages européennes, très-voisines les unes des autres[21]. La plupart des observateurs compétents rattachent nos oies domestiques à l’oie sauvage, A. férus, dont les jeunes s’apprivoisent facilement[22], et sont domestiqués par les Lapons. Cette espèce, croisée avec l’oie domestique a produit, en 1849, au Jardin Zoologique, des métis parfaitement fertiles[23]. La partie inférieure de la trachée de l’oie domestique est, d’après Yarrell[24], quelquefois aplatie, et la base du bec est aussi parfois entourée d’un anneau de plumes blanches. À première vue, ces caractères sembleraient indiquer un croisement antérieur avec l’oie à front blanc, A. albifrons ; mais dans cette espèce l’anneau blanc est variable, et il ne faut pas méconnaître la loi des variations analogiques, en vertu de laquelle les individus d’une espèce peuvent revêtir certains caractères d’une espèce voisine.

Puisque l’action d’une domestication très-prolongée, paraît n’avoir que peu influencé les caractères de l’oie, voyons quelle est l’importance des modifications qu’on peut déceler chez elle. Elle a augmenté de taille et de fécondité[25], et varie en couleur du blanc au foncé. Plusieurs observateurs[26] ont remarqué que les mâles sont plus souvent blancs que les femelles, et deviennent presque invariablement blancs, lorsqu’ils sont vieux, ce qui n’est cependant pas le cas de la forme souche, l’A. férus. Ici encore, il peut y avoir un cas de variation analogique, car tous ceux qui ont traversé les détroits de Tierra del Fuego ou visité les îles Falkland, ont pu remarquer sur la grève le singulier spectacle du mâle blanc comme neige de l’oie de rocher (Bernicla antarctica), accompagné de sa femelle foncée. Quelques oies portent des huppes, et ont alors, ainsi que nous l’avons dit plus haut, la partie sous-jacente du crâne perforée. On a tout récemment formé une race dont les plumes de la partie postérieure de la tête et du cou sont renversées[27]. Le bec varie un peu de grandeur, et a une teinte plus jaune que celui de l’oie sauvage, cependant sa couleur ainsi que celle des pattes sont légèrement variables[28]. Ce dernier point est important, parce que la coloration des ces organes est fort utile pour la distinction des diverses formes sauvages, voisines les unes des autres[29]. On expose à nos concours deux races, celles d’Embden et de Toulouse, qui ne diffèrent absolument que par la couleur[30]. On a récemment importé de Sébastopol[31] une variété singulière, dont M. Tegetmeier m’a envoyé deux exemplaires, et qui est remarquable par ses plumes scapulaires très-allongées, frisées, et même tordues en spirale. Les bords de ces plumes ont un aspect duveteux par suite de la divergence des barbes et des barbules, et ressemblent un peu à celles qui garnissent le dos du cygne Australien noir. Ces plumes sont encore remarquables par leur tige centrale mince, transparente, et comme refendue en fins filaments qui, distincts sur une certaine étendue, se ressoudent plus loin ensemble. Ces filaments sont garnis régulièrement et de chaque côté d’un duvet fin ou de barbules, identiques à ceux qui se trouvent sur les vraies barbes des plumes. Cette structure des plumes se transmet aux métis. Dans le Gallus Sonneratii, les barbes et barbules se soudent ensemble, et forment ainsi de minces lames cornées de même nature que la tige ; dans cette variété de l’oie, la tige se divise en filaments qui portent des barbules et ressemblent par conséquent aux vraies barbes de la plume.

Bien que l’oie domestique diffère certainement de toutes les espèces sauvages connues, elle a cependant subi beaucoup moins de variations que la plupart des autres animaux domestiques, ce qui s’explique par le fait que la sélection lui a été peu appliquée. Une foule d’oiseaux offrant beaucoup de races distinctes, sont appréciés comme ornements ou comme favoris, ce qui n’a jamais été le cas pour l’oie, dont le nom même, dans plus d’une langue, est un terme de mépris. On apprécie dans l’oie sa taille, sa saveur et sa fécondité ; la blancheur de ses plumes augmente sa valeur ; c’est sur ces points, par lesquels elle diffère de sa forme souche, qu’a surtout porté la sélection. Déjà anciennement les gourmets romains estimaient le foie de l’oie blanche, et Pierre Belon[32], en 1555, en mentionne deux variétés, dont l’une était plus grande, plus féconde et d’une meilleure couleur que l’autre ; il note expressément que les bons éleveurs faisaient très attention à la couleur des jeunes oiseaux, afin de déterminer quels étaient ceux qu’ils devaient choisir et conserver pour la reproduction.

LE PAON.

Cet oiseau est encore un de ceux qui n’ont presque pas varié sous l’influence de la domestication, si ce n’est un peu par la couleur, car il y en a qui sont blancs ou pies. M. Waterhouse, qui a comparé avec soin des peaux de l’oiseau indien sauvage et de la race domestique, les a trouvées identiques, à cela près que le plumage de cette dernière est un peu plus touffu. On est dans le doute au sujet de leur origine, et on ignore si nos paons descendent de ceux qui furent introduits en Europe du temps d’Alexandre, ou s’ils ont été importés depuis. Ils ne se reproduisent pas très-facilement chez nous, et sont rarement gardés en grand nombre, deux circonstances peu favorables à une sélection graduelle et à la formation de nouvelles races.

Un fait étrange relatif au paon, est celui de l’apparition en Angleterre d’une variété dite « à épaules noires, » qu’on a récemment, sur l’autorité de M. Sclater, séparée comme espèce distincte sous le nom de Pavo nigripennis, et que cet auteur croit devoir exister à l’état sauvage dans quelque pays, mais pas dans l’Inde, où elle est certainement inconnue. Ces oiseaux diffèrent considérablement du paon commun par la couleur des rémiges secondaires, des plumes scapulaires, des tectrices alaires et des cuisses ; les femelles sont plus pâles, et d’après M. Bartlett, les jeunes aussi sont différents. Ils se propagent d’une manière constante. Bien qu’ils ne ressemblent pas aux métis qu’on a obtenus du croisement des P. cristatus et muticus, ils sont cependant, sous quelques rapports, intermédiaires entre ces deux espèces par leurs caractères, fait qui, selon M. Sclater, est favorable à l’idée qu’ils doivent former une espèce naturelle distincte[33].

Sir R. Heron assure, d’autre part[34], que cette race a apparu, subitement, dans un grand troupeau de paons ordinaires blancs, et pies, appartenant à Lord Brownlow. Le même fait s’est présenté dans un troupeau entièrement composé de paons communs chez Sir J. Trevelyan, et dans celui de M. Thornton, comprenant des paons ordinaires et pies. Chose remarquable, dans ces deux derniers cas, la variété à épaules noires se multiplia jusqu’à extermination de la race existant précédemment. J’ai aussi appris de M. Hudson Gurney, par l’intermédiaire de M. Sclater, qu’il avait, plusieurs années auparavant, élevé une paire de paons à épaules noires, provenant du paon commun ; un autre ornithologiste, le professeur A. Newton a eu aussi, il y a quelques années, un oiseau femelle semblable sous tous les rapports à celle de la variété à épaules noires, provenant d’une famille de paons communs qu’il possédait, et dont aucun n’avait, depuis plus de vingt ans, été croisé avec aucun oiseau d’une autre branche. Nous avons donc là, cinq cas bien distincts d’oiseaux à épaules noires, surgissant subitement dans des troupeaux de l’espèce commune, qu’on élève en Angleterre. On ne pourrait désirer de preuves plus claires de l’apparition d’une nouvelle variété.

Si nous rejetons cette manière de voir, et considérons le paon à épaules noires comme une espèce distincte, il faut supposer, dans tous les cas, que la race commune a dû autrefois avoir été croisée par le P. nigripennis supposé, qu’elle a perdu depuis, toute trace de ce croisement, et que cependant, elle a occasionnellement produit des individus revêtant subitement et complètement, par voie de retour, les caractères du P. nigripennis. Or jamais un cas pareil ne s’est présenté dans les règnes animal ou végétal. Pour saisir l’improbabilité absolue d’une pareille occurrence, supposons par exemple, qu’à quelque époque antérieure, une race de chiens ait été croisée avec un loup, et ait depuis perdu toutes traces des caractères de cet animal ; que cependant ladite race de chiens ait, dans cinq cas peu éloignés les uns des autres, et dans le même pays, donné naissance à des loups parfaits sous tous les rapports ; il nous faudrait encore supposer que, dans deux des cas, les loups nouvellement produits se seraient ensuite multipliés au point d’exterminer la souche mère. Une forme aussi remarquable que le P. nigripennis, nouvellement importée, eût eu une grande valeur ; il est donc improbable que son introduction ait pu passer inaperçue, et que son histoire se soit ultérieurement perdue. En somme, les faits me paraissent évidemment favorables à l’opinion que la race à épaules noires est une variation, due soit à l’action du climat de l’Angleterre, soit à une autre cause, telle que le retour à un état primitif et éteint de l’espèce. Si donc le paon à épaules noires est une variété, c’est l’exemple le plus remarquable qui ait jamais été enregistré de l’apparition soudaine d’une forme nouvelle, ressemblant assez à une véritable espèce pour tromper un de nos ornithologistes les plus experts.

DINDON.

M. Gould[35] paraît avoir suffisamment établi, d’après ce que nous savons de sa première introduction, que le dindon descend d’une espèce Mexicaine sauvage (Meleagris Mexicana), que les indigènes avaient déjà domestiquée avant la découverte de l’Amérique, et que l’on considère généralement comme spécifiquement distincte de l’espèce sauvage commune des États-Unis. Quelques naturalistes, toutefois, pensent que les deux formes ne sont que des races géographiques bien accusées. Quoi qu’il en soit, le cas mérite d’être examiné, parce que, dans les États-Unis, les dindons mâles sauvages s’apparient très-facilement avec les femelles de la race domestique, qui elle-même provient de la forme mexicaine[36].

On a plusieurs récits de jeunes oiseaux provenant d’œufs de l’espèce sauvage, et élevés aux États-Unis, qui se sont croisés et mélangés avec la race ordinaire. On a aussi conservé dans des parcs séparés, en Angleterre, des oiseaux de cette même espèce ; le Rev. W. D. Fox s’en est procuré qui se sont librement croisés avec la race domestique, et pendant plusieurs années, me dit-il, les dindons de son voisinage portaient des marques très-évidentes du croisement dont leurs parents avaient été l’objet. C’est là un exemple d’une race domestique modifiée par croisement avec une espèce distincte, ou au moins une race sauvage. F. Michaux[37], en 1802, pensait que le dindon domestique ne provenait pas de l’espèce des États-Unis seule, mais aussi d’une forme méridionale ; il allait même jusqu’à admettre que les dindons d’Angleterre et de France différaient entre eux par des proportions variées du sang des souches parentes.

Les dindons anglais sont plus petits que l’une ou l’autre des formes sauvages. Ils n’ont pas varié d’une manière considérable ; mais on peut cependant distinguer quelques races, telles que les Norfolk, Suffolk, Blancs, Cuivrés (ou Cambridge), qui toutes, lorsqu’on évite de les croiser avec d’autres races, propagent leur type d’une manière constante. De toutes ces formes, la plus distincte est le petit dindon robuste noirâtre de Norfolk, dont les petits sont noirs, et ont quelquefois des taches blanches sur la tête. Les autres ne diffèrent guère que par la couleur, et leurs jeunes sont généralement marbrés de gris brunâtre[38]. La touffe de poils sur le poitrail, qui est particulière au mâle seul, apparaît occasionnellement sur la femelle domestique[39]. Les tectrices caudales inférieures varient de nombre, et, d’après une superstition allemande, la femelle pond autant d’œufs qu’il y a de ces plumes chez le mâle[40]. D’après Temminck, il y avait autrefois en Hollande, une race magnifique d’un jaune-chamois, pourvue d’une ample huppe blanche. M. Wilmot[41] a décrit un dindon mâle blanc, portant une huppe formée de plumes longues de quatre pouces, dont les tiges nues étaient garnies à l’extrémité d’une petite touffe de duvet blanc et soyeux. La plupart des dindonneaux héritaient de cette espèce de huppe, mais elle tombait ensuite, ou était arrachée par les autres oiseaux. Ce cas est intéressant, parce qu’avec des soins on aurait probablement pu former une nouvelle race, et qu’une huppe de cette nature aurait été, jusqu’à un certain point, analogue à celle que portent les mâles dans plusieurs genres voisins, comme les Euplocomus, Lophophorus et Pavo.

On a conservé dans les parcs des lords Powis, Leicester, Hill et Derby, des dindons sauvages qu’on croit avoir été tous importés des États-Unis. Le Rev. W. D. Fox ayant étudié les oiseaux des deux premiers de ces parcs, me dit qu’ils différaient certainement un peu les uns des autres, par la forme du corps et par leurs ailes à plumage barré. Ils différaient aussi des oiseaux de lord Hill, dont quelques-uns conservés à Oulton par Sir P. Egerton, tout croisement avec le dindon ordinaire ayant été soigneusement évité, produisirent occasionnellement des oiseaux beaucoup plus pâles, et un qui fut presque blanc, mais non albinos. Ce cas de dindons semi-sauvages différant légèrement les uns des autres, est analogue à celui du bétail sauvage, qui existe encore dans quelques parcs anglais. Nous devons supposer que ces différences sont le résultat de l’empêchement du libre croisement d’oiseaux, dont la distribution géographique est très-étendue, et des changements dans les conditions extérieures auxquelles ils se sont trouvés soumis en Angleterre. Le climat de l’Inde paraît avoir occasionné des changements considérables chez le dindon, car M. Blyth[42] le décrit comme fort dégénéré de taille, tout à fait incapable de s’élever sur ses ailes, de couleur noire, et ayant les longs appendices placés au-dessus du bec énormément développés.

PINTADE.

La pintade domestique descend, suivant l’opinion de quelques naturalistes, de la Numida ptilorhynca, qui habite des régions très-chaudes et en partie très-arides, de l’Afrique orientale ; elle a donc été, dans nos pays, soumise à des conditions extérieures bien différentes. Elle a néanmoins peu varié, si ce n’est par le plumage qui est tantôt plus pâle, tantôt plus foncé. Cet oiseau, et le fait est singulier, varie davantage de couleur dans les Indes occidentales, sous un climat chaud et humide, qu’en Europe[43]. La pintade est redevenue complètement sauvage à la Jamaïque et à Saint-Domingue[44], et a diminué de taille ; ses pattes sont noires, tandis qu’elles sont grises chez l’oiseau africain. Ce petit changement est à noter, à cause de l’assertion souvent répétée, que tous les animaux redevenus sauvages reviennent par tous leurs caractères à leur type primitif.

CANARIS.

Cet oiseau n’ayant été domestiqué que récemment, soit depuis trois cent cinquante ans environ, sa variabilité mérite attention. Il a été croisé avec neuf ou dix espèces de Fringillidés, et a produit des métis, dont quelques-uns ont été presque complètement fertiles ; nous n’avons cependant pas la preuve qu’il soit résulté de ces croisements aucune race distincte. Malgré la récente domestication du canari, un grand nombre de variétés ont été créées ; déjà avant 1718 on publiait en France[45] une liste de 27 variétés, et en 1779, la « Société des Canaris de Londres » fit imprimer un long inventaire des qualités désirables à obtenir chez ces oiseaux, de sorte qu’on leur a depuis fort longtemps appliqué la sélection méthodique. La plupart des variétés ne diffèrent que par la couleur et les marques de leur plumage. Quelques races diffèrent cependant de forme ; ainsi les canaris Voûtés, et les canaris Belges dont le corps est fortement allongé. M. Brent[46] a mesuré un de ces oiseaux, dont le corps avait huit pouces de longueur, tandis que celui du canari sauvage n’a que cinq pouces et un quart. Il existe des canaris huppés, et, fait curieux, lorsqu’on apparie deux oiseaux huppés, les petits, au lieu d’avoir des huppes, sont généralement chauves, ou même présentent une plaie sur la tête[47]. Il semblerait que la huppe fût due à quelques conditions morbides, qui s’accroissent au point de devenir nuisibles, lorsque les deux parents en sont pourvus. On connaît une race à pattes emplumées, et une autre qui porte le long du poitrail une sorte de fraise. Il est un autre caractère qui mérite d’être signalé, parce qu’il n’existe que pendant une période de la vie de l’oiseau, et est rigoureusement héréditaire à cette même période, c’est, chez les canaris de prix, la couleur des rémiges, et des rectrices, qui sont noires jusqu’à la première mue : après celle-ci, cette particularité disparaît[48]. Les canaris diffèrent beaucoup par leur naturel et un peu par leur chant. Ils pondent trois ou quatre fois par an.

POISSONS DORÉS.

En dehors des mammifères et des oiseaux, il n’y a que fort peu d’animaux appartenant aux autres grandes classes, qui aient été domestiqués, mais je crois nécessaire de dire quelques mots des poissons dorés, des abeilles et du bombyx du mûrier, pour montrer combien la loi, que les animaux, sortis de leurs conditions naturelles, sont sujets à varier et à former des races lorsqu’on leur applique la sélection, est générale.

Le poisson doré (Cyprinus auratus), n’a été introduit en Europe que depuis deux ou trois siècles ; mais on croit qu’en Chine, il a été conservé en captivité depuis une époque très-reculée. D’après les variations analogiques d’autres poissons, M. Blyth[49] a été conduit à soupçonner que les poissons dorés n’existent pas à l’état de nature. Ces poissons vivent souvent dans les conditions les moins naturelles, et leur variabilité de taille, de couleur et de quelques points importants de conformation, est considérable. M. Sauvigny en a décrit et publié des dessins coloriés de quatre-vingt-neuf variétés[50]. Plusieurs d’entre elles, comme celle à triple nageoire caudale, etc., devraient être regardées comme des monstruosités, bien qu’il soit difficile d’établir une ligne de démarcation précise, entre une variation et une monstruosité. Les poissons dorés n’étant que des objets d’ornement ou de curiosité, et que les Chinois[51] sont précisément gens à réserver une variété accidentelle pour la propager, il est à peu près certain que la sélection a dû être largement mise en jeu par eux dans la formation de races nouvelles. Il est toutefois singulier que quelques-unes des monstruosités ou variations ne soient pas héréditaires ; car Sir R. Heron[52], ayant observé un grand nombre de ces poissons, et ayant placé dans un réservoir spécial, tous les poissons difformes, tels que ceux privés des nageoires dorsales, ou ayant deux nageoires anales ou une triple caudale, a pu constater que ces poissons anormaux ne produisaient pas une plus forte proportion de poissons difformes que les autres.

Laissant de côté la diversité presque infinie des colorations, nous rencontrons chez ces animaux les modifications les plus extraordinaires dans la structure. Ainsi, sur environ deux douzaines d’individus pris à Londres, M. Yarrell a observé, chez les uns, la nageoire dorsale occupant plus de la moitié de la longueur du dos ; chez d’autres, cette nageoire était réduite à cinq ou six rayons seulement ; un n’en avait point du tout. Les nageoires anales sont quelquefois doubles ; et la caudale est souvent triple. Cette dernière déviation semble généralement avoir lieu aux dépens de tout ou partie d’une autre nageoire[53] ; cependant Bory de Saint-Vincent[54] a vu à Madrid, des poissons dorés ayant à la fois la dorsale et une queue triple. Il y a une variété caractérisée par une bosse dorsale située près de la tête, une autre variété des plus singulières, importée de Chine, a été décrite par le Rev. L. Jenyns[55] ; sa forme est presque globuleuse comme celle de Diodon, la partie charnue de sa queue est supprimée, et la nageoire caudale est implantée un peu en arrière de la dorsale et immédiatement au-dessus de l’anale. Les nageoires caudale et anale étaient doubles, cette dernière étant verticalement attachée au corps ; les yeux étaient aussi très-grands et saillants.

ABEILLES.

La domestication des abeilles est fort ancienne, si toutefois on doit les regarder comme des animaux domestiques, puisqu’elles cherchent elles-mêmes leur nourriture, sauf celle qu’on leur fournit ordinairement pendant l’hiver. Au lieu d’un trou dans un arbre, elles habitent une ruche. Toutefois, comme elles ont été transportées dans presque toutes les parties du globe, les actions climatériques ont dû exercer sur elles toute l’influence directe dont elles sont capables. On a souvent constaté que dans les différentes parties de l’Angleterre, les abeilles varient de taille, de coloration et d’humeur ; Godron[56] dit que dans le midi de la France elles sont généralement plus grandes que dans les autres régions ; on a aussi affirmé que les petites abeilles brunes de la haute Bourgogne, transportées en Bresse, deviennent grosses et jaunes dès la seconde génération ; mais ces assertions demandent à être confirmées. En ce qui concerne la taille, on sait que les abeilles nées dans de très-vieux rayons sont plus petites, les cellules se trouvant rapetissées par la présence des coques des générations précédentes. Les meilleures autorités[57] s’accordent à admettre qu’à l’exception de l’espèce ou race Ligurienne, dont nous allons parler, il n’existe, ni en Angleterre, ni sur le continent, de races distinctes d’abeilles. Il y a cependant, dans un même essaim, quelques variations de couleur. Ainsi M. Woodbury[58] assure avoir vu à plusieurs reprises, des reines de l’espèce commune annelées de jaune comme les reines Liguriennes, et inversement, des reines de cette dernière race, ayant la couleur foncée des reines ordinaires. Il a aussi observé des variations dans la couleur des bourdons, sans que les reines ou ouvrières de la même ruche, présentassent des différences correspondantes. Le grand apiculteur Dzierzon[59], répondant à mes questions sur ce sujet, dit qu’en Allemagne, les abeilles de certaines ruches sont foncées, tandis que d’autres sont remarquables par leur couleur jaune. Dans certaines régions, les abeilles paraissent avoir des habitudes différentes, car Dzierzon ajoute : « Lorsque plusieurs ruches et leur progéniture sont plus disposées à essaimer, tandis que d’autres sont plus riches en miel, ce qui fait que quelques apiculteurs ont pu distinguer des abeilles « récoltant le miel, » et des abeilles « essaimantes, » ces habitudes deviennent une seconde nature, et paraissent résulter du mode adopté dans le traitement des ruches, et du genre de nourriture que leur offre la localité. Il y a, par exemple, sous ce rapport, une grande différence entre les abeilles des landes de Lunebourg et celles de ce pays… On peut là-bas d’une manière infaillible, empêcher la colonie la plus considérable d’essaimer, et éviter la production des bourdons, en substituant à une vieille reine une jeune de l’année courante ; tandis que le même moyen appliqué au Hanovre n’aurait aucune efficacité. » Je me suis procuré une ruche d’abeilles mortes de la Jamaïque, que j’ai comparées avec le plus grand soin avec nos abeilles ordinaires, sans pouvoir déceler entre les unes et les autres la moindre différence.

On peut s’expliquer cette uniformité remarquable de l’abeille par la difficulté, ou plutôt l’impossibilité où l’on est de faire intervenir la sélection, en appariant certaines reines et bourdons, puisque ces insectes ne s’accouplent que pendant le vol. Aussi, à une seule et unique exception près, n’a-t-on aucun exemple de la séparation d’une ruche, et de la propagation d’abeilles présentant quelque particularité appréciable. Pour former une nouvelle race, comme nous le savons maintenant, l’isolement complet des abeilles à propager, de toutes les autres, serait une condition indispensable ; car on a reconnu qu’en Allemagne et en Angleterre, depuis l’introduction de l’abeille Ligurienne, les bourdons de cette race peuvent s’éloigner de leurs ruches à plus de deux milles à la ronde, et se croiser souvent avec les reines de l’espèce commune[60]. L’abeille Ligurienne, quoique parfaitement fertile lorsqu’elle se croise avec l’abeille ordinaire, est regardée par la plupart des naturalistes comme une espèce distincte ; d’autres la considèrent comme une variété naturelle, mais, comme il n’y a aucune raison pour croire qu’elle soit un résultat de la domestication, nous n’avons pas à insister sur ce point. L’abeille Égyptienne et quelques autres, contre l’avis de quelques naturalistes compétents, sont regardées également comme des races géographiques par le Dr Gerstäcker[61], lequel fonde cette conclusion principalement sur le fait que, dans quelques endroits, comme à Rhodes et en Crimée, l’abeille varie tellement par sa couleur, qu’on y trouve des formes intermédiaires qui relient étroitement entre elles les diverses races géographiques.

J’ai fait allusion à un seul cas de séparation et de conservation d’une souche particulière d’abeilles. M. Lowe[62], s’étant procuré quelques abeilles chez un campagnard des environs d’Édimbourg, remarqua qu’elles différaient de l’abeille ordinaire par les poils de la tête et du thorax, qui étaient plus abondants et plus clairs de couleur. La date de l’introduction de l’abeille Ligurienne en Angleterre, excluait toute possibilité d’un croisement avec cette dernière forme. M. Lowe propagea cette variété, mais n’ayant malheureusement pas séparé cette lignée de ses autres abeilles, le nouveau caractère se perdit au bout de trois générations. « Cependant, ajoute-t-il, un grand nombre de mes abeilles ont encore conservé quelques faibles traces du caractère de la colonie primitive. » Ce cas montre ce qu’on pourrait obtenir par une sélection soigneuse et prolongée, appliquée exclusivement aux ouvrières, car, comme nous l’avons dit, il n’est pas possible de choisir et d’apparier les reines et les mâles.

BOMBYX DU VER À SOIE.

Ces insectes offrent pour nous quelque intérêt, surtout par les variations qu’ils présentent dans les premières phases de leur existence, et qui sont devenues héréditaires aux périodes correspondantes. La valeur de cet insecte dépendant entièrement de son cocon, l’attention s’est portée sur tous les changements qui ont pu affecter la structure et les qualités de ce dernier ; et des races très-différentes par leurs cocons, bien que très-semblables à l’état adulte, ont été ainsi produites. Dans les races des autres animaux domestiques, ce sont les jeunes qui se ressemblent, et les adultes qui diffèrent le plus entre eux.

Il serait inutile, même si cela était possible, de décrire toutes les sortes de vers à soie. Il en existe, dans l’Inde et en Chine, plusieurs espèces distinctes, qui produisent de l’excellente soie, et dont quelques-unes peuvent se croiser librement avec l’espèce commune, ainsi qu’on s’en est récemment assuré en France. Le capitaine Hutton[63] constate qu’on a, dans le monde entier, domestiqué au moins six espèces de vers à soie ; et il croit que ceux qu’on élève en Europe, appartiennent à deux ou trois d’entre elles. Ceci n’est toutefois pas l’opinion de plusieurs juges très-compétents, qui se sont tout particulièrement occupés en France de l’éducation de cet insecte, et s’accorde mal avec quelques faits que nous allons exposer.

Le ver à soie commun (Bombyx mori), fut apporté à Constantinople au vie siècle, de là introduit en Italie, puis en 1494 en France[64]. Tout a favorisé la variation de cet insecte. Sa domestication en Chine est supposée devoir remonter jusqu’à 2,700 ans avant Jésus-Christ. Il a été conservé et élevé dans les conditions les plus diverses et les moins naturelles, puis transporté dans une foule de pays. La nature de la nourriture qu’on donne à la chenille paraît influer jusqu’à un certain point sur le caractère de la race[65]. Le défaut d’usage a apparemment restreint le développement des ailes chez le papillon. Mais l’élément essentiel de la production des nombreuses races très-modifiées qui existent actuellement a été, sans aucun doute, l’attention qu’on a donnée, depuis fort longtemps et dans beaucoup de pays, à toute variation promettant quelque avantage. On sait quels soins on apporte en Europe à la sélection des meilleurs cocons et papillons[66], et en France, la production des œufs constitue une branche distincte de l’industrie de la soie. Il résulte des recherches faites par le Dr Falconer, que, dans l’Inde, les habitants pratiquent cette sélection avec les mêmes soins. En Chine, la production des œufs est restreinte à certaines localités favorables, et la loi interdit à ceux qui s’en occupent, l’élevage des vers, pour que toute leur attention et leurs soins soient concentrés sur ce point spécial[67].


Les détails qui suivent, sur les différences des diverses races sont, toutes les fois qu’il n’est pas stipulé le contraire, empruntés à l’excellent ouvrage de M. Robinet[68], travail fait avec beaucoup de soin, et qui dénote chez son auteur une grande expérience. Dans les diverses races, les œufs varient de couleur, de forme (ronds, elliptiques ou ovales), et de grandeur. Les œufs pondus en juin dans le midi de la France, et en juillet dans le centre, n’éclosent que le printemps suivant ; et c’est en vain, dit M. Robinet, qu’on les expose à une température graduellement croissante, pour hâter le développement de la larve. Toutefois il arrive que, sans cause connue, quelques amas d’œufs parcourent immédiatement leurs phases ordinaires, et éclosent dans les vingt ou trente jours. On peut conclure de ce fait et de quelques autres analogues, que les vers à soie Trevoltini d’Italie, dont les œufs éclosent dans les quinze à vingt jours, ne constituent pas nécessairement, comme on l’a soutenu, une espèce distincte. Quoique les races qui vivent dans les pays tempérés, donnent des œufs qu’on ne peut pas immédiatement faire éclore par la chaleur artificielle, lorsqu’on les transporte dans un climat chaud, elles acquièrent graduellement la faculté de se développer plus promptement, comme la race Trevoltini[69].

Vers. — Ceux-ci varient beaucoup quant à la taille et à la couleur. Leur peau est généralement blanche, quelquefois marbrée de noir ou de gris, et occasionnellement tout à fait noire. La couleur, même dans les races pures, n’est toutefois, d’après M. Robinet, pas constante ; il faut en excepter la race tigrée, ainsi nommée parce qu’elle est marquée de raies transversales noires. La couleur générale du ver n’étant pas en corrélation avec celle de la soie[70], les sériciculteurs n’ont fait aucune attention à ce caractère, et il n’a pas été fixé par sélection. Le capitaine Hutton a démontré que les marques tigrées foncées qui apparaissent si fréquemment sur les vers de différentes races, pendant les dernières mues, sont dues à un fait de retour, car les chenilles de plusieurs espèces sauvages, et voisines du Bombyx, présentent des marques et une couleur semblables. Ayant mis à part quelques vers aux marques tigrées, presque tous les vers qu’il obtint le printemps suivant, provenant de ceux qu’il avait séparés, furent tigrés foncés, et leur teinte devint encore plus foncée à la troisième génération. Les papillons obtenus de ces vers[71] furent aussi plus foncés, et ressemblaient par la couleur au B. Huttoni sauvage. Les marques tigrées étant dues à un retour, on comprend facilement la persistance avec laquelle elles se transmettent.

Il y a quelques années, Mme Whitby, élevant des vers à soie sur une grande échelle, me fit savoir que quelques-uns de ses vers avaient, autour des yeux, des marques foncées comme des sourcils. C’était probablement un premier pas vers le retour aux marques tigrées, et curieux de savoir si un caractère aussi insignifiant serait héréditaire, je la priai de mettre à part une vingtaine de ces vers, ce qu’elle fit. Les papillons ayant été tenus séparés, les vers provenant de leurs œufs eurent tous, sans exception, des sourcils plus foncés chez les uns que chez les autres, mais bien apparents chez tous. On voit parfois dans les vers ordinaires, apparaître des vers noirs ; mais le fait est si variable, que, d’après M. Robinet, on voit la même race produire exclusivement des vers blancs une année, et la suivante en donner beaucoup de noirs ; je tiens toutefois de M. A. Bossi, de Genève, que, si on élève à part les vers noirs, les œufs pondus par les papillons qui en proviennent, donnent des vers de la même couleur ; mais les cocons et les papillons n’offrent aucune différence.

En Europe, le ver à soie mue ordinairement quatre fois avant de faire son cocon ; mais il y a des races à trois mues ; c’est le cas pour la race Trevoltini. Il semblerait qu’une différence physiologique de cette importance n’aurait pas pu être le fait de la domestication ; mais M. Robinet[72] a constaté que, d’une part, les vers ordinaires filent parfois leur cocon après trois mues seulement, et, d’autre part, que « presque toutes les races à trois mues que nous avons expérimentées, ont fait quatre mues à la seconde ou à la troisième année, ce qui semble prouver qu’il a suffi de les placer dans des conditions favorables pour leur rendre une faculté qu’elles avaient perdue sous des influences moins favorables. »

Cocons. — En s’enfermant dans son cocon, le ver perd à peu près 50 p. 100 de son poids ; mais la perte varie suivant les races, ce qui a quelque importance pour le sériciculteur. Le cocon présente des différences caractéristiques suivant les races ; il peut être grand ou petit ; presque sphérique, sans étranglement, comme dans la race de Loriol, ou cylindrique avec un étranglement plus ou moins prononcé, ou enfin avec un ou ses deux bouts plus ou moins pointus. La soie varie de finesse et de qualité ; elle peut être presque blanche, de deux teintes, ou jaune. Généralement, la couleur de la soie n’est pas strictement héréditaire, et, dans le chapitre de la sélection, je raconterai le fait curieux, comment, en France, on est parvenu, dans le cours de soixante-cinq générations, à réduire dans une race, de cent à trente-cinq pour mille, le nombre des cocons jaunes. Selon M. Robinet, par suite d’une sélection soigneuse, poursuivie pendant les dernières soixante-quinze années, la race blanche, dite Sina « est arrivée à un tel degré de pureté, qu’on ne trouve pas un seul cocon jaune dans des millions de cocons blancs[73]. » Il y a quelquefois des cocons qui sont totalement dépourvus de soie, mais donnent cependant le papillon ; un accident a malheureusement empêché Mme Whitby de vérifier si ce fait était héréditaire.

État adulte. — Je ne trouve pas de documents relatifs à aucune différence constante chez les papillons des races les plus distinctes. Mme Whitby n’en a point constaté dans les diverses races qu’elle a élevées, et je tiens d’un naturaliste éminent, M. de Quatrefages, la confirmation du même fait. Le capitaine Hutton[74] remarque que les papillons de toutes les sortes varient beaucoup de couleur, mais toujours d’une manière inconstante. Ce point est intéressant, si on considère combien, dans les différentes races, les cocons sont différents, et doit probablement s’expliquer de la même manière que les fluctuations variables de la couleur chez le ver à soie, c’est-à-dire, parce que l’éleveur n’a pas de raison pour choisir et perpétuer aucune variation particulière.

Les mâles des Bombycidés sauvages volent rapidement dans le jour et dans la soirée, mais les femelles sont ordinairement apathiques et inactives[75]. Dans plusieurs papillons de cette famille, les femelles ont les ailes atrophiées, mais on ne connaît aucun exemple de mâles incapables de vol, auquel cas l’espèce risquerait de ne pouvoir se perpétuer. Dans le Bombyx du ver à soie, les deux sexes ont des ailes imparfaites, froissées, et ne peuvent pas voler ; mais il reste cependant une trace de distinction caractéristique entre les deux sexes, car bien qu’on ne voie pas de différence dans le développement des ailes des mâles et des femelles, je tiens de Mme Whitby que, dans les papillons qu’elle avait élevés, les mâles se servaient de leurs ailes plus que les femelles, et pouvaient voleter un peu en descendant, mais non en montant. Elle a remarqué aussi, qu’à leur sortie du cocon, les ailes des femelles étaient moins étalées que celles des mâles. Le degré d’imperfection des ailes, varie d’ailleurs beaucoup dans les différentes races, suivant les circonstances. M. de Quatrefages[76] dit avoir vu beaucoup de papillons, dont les ailes étaient réduites au tiers, au quart, ou au dixième de leurs dimensions normales, quelquefois même à n’être que des moignons droits et courts : « il semble qu’il y ait là un véritable arrêt de développement partiel. » D’autre part, il décrit les papillons femelles de la race André-Jean, comme « ayant leurs ailes larges et étalées. Un seul présente quelques courbures irrégulières et des plis anomaux. » Comme les papillons de tous genres, provenant de chenilles sauvages et éclos en captivité, ont souvent les ailes rabougries, la même cause, quelle qu’elle puisse être, a probablement agi sur les Bombyx des vers à soie ; mais on peut admettre que le défaut d’usage de leurs ailes, pendant autant de générations, a dû contribuer pour une forte part à ce résultat.

Dans plusieurs races, les femelles ne collent pas leurs œufs aux surfaces sur lesquelles elles les déposent[77], ce qui, d’après le capitaine Hutton[78], provient seulement de ce que les glandes de l’oviducte sont affaiblies.

De même que pour d’autres animaux dès longtemps domestiqués, les instincts du Bombyx ont été altérés. Les vers à soie placés sur un mûrier, commettent souvent l’étrange erreur de ronger la tige de la feuille sur laquelle ils se trouvent, et tombent par conséquent à terre ; mais, d’après M. Robinet[79], ils sont capables de remonter par le tronc. Cette capacité leur fait cependant quelquefois défaut, car M. Martins[80], ayant posé quelques vers sur un arbre, ceux qui tombèrent ne purent remonter, et périrent de faim ; il ne leur était même pas possible de passer d’une feuille sur une autre.

Quelques-unes des modifications subies par le Bombyx du ver à soie sont en corrélation mutuelle. Ainsi des œufs des femelles qui produisent des cocons blancs, diffèrent légèrement par la teinte de ceux qui donnent des cocons jaunes. Les pattes abdominales des vers à cocons blancs sont toujours blanches, tandis que celles des vers à cocons jaunes sont invariablement jaunes aussi[81]. Nous avons vu que les vers tigrés de bandes foncées donnent des papillons qui sont plus obscurs que les autres. Il paraît assez bien établi[82] qu’en France, les vers des races produisant la soie blanche, et certains vers noirs ont, mieux que les autres, résisté à la maladie qui a récemment ravagé les districts séricicoles. Enfin, les races présentent des différences constitutionnelles, car il en est qui ne réussissent pas aussi bien que d’autres, sous un climat tempéré ; et un climat humide n’est pas également nuisible à toutes[83].


Les divers faits qui précèdent nous montrent que les vers à soie, comme les animaux supérieurs, varient sous l’influence d’une domestication prolongée. Ils nous apprennent en outre le fait plus important, que les variations peuvent se présenter à différentes époques de la vie, et être héritées à des époques correspondantes. Enfin ils nous montrent encore que le grand principe de la sélection peut aussi s’appliquer aux insectes.



  1. Poultry Chronicle (1854), vol. II, p. 91, et vol. I, p. 330.
  2. Dr Turral, Bull. Soc. d’Acclimat. t. VII, 1860, p. 541.
  3. Willughby, Ornithology ; par Ray, p. 381. Aussi figurée par Albin en 1734, dans Nat. Hist. of Birds, vol. II, p. 86.
  4. F. Cuvier, Ann. du Muséum, t. IX, p. 128, dit qu’il n’y a que la mue et l’incubation qui puissent arrêter la ponte chez ces canards. Aussi Brent dans Poultry Chronicle, 1855, v. III, p. 512.
  5. Rev. E. S. Dixon, Ornemental Poultry, (1848), p. 117. — Brent, Poultry Chron., v. III, p. 512, 1855.
  6. Crawfurd, Relation of domesticated Animals to civilisation etc., 1860.
  7. Dureau de la Malle, Ann. des Sciences naturelles, t. XVII, p. 164 et t. XXI, p. 55. — Rev. E. S. Dixon, Ornamental Poultry, p. 118. — Le canard domestique n’était pas connu du temps d’Aristote, comme le fait remarquer Volz, Beiträge zur Kulturgeschichte, 1852, p. 78.
  8. Cité d’après Die Enten, Schwanenzucht, Ulm, 1828, p. 143. — Audubon, Ornithological Biography, v. III, p. 168, sur l’apprivoisement du canard au Mississipi. — Pour l’Angleterre, Waterton, dans Loudon’s Mag. of nat. Hist. vol. VIII, 1835, p. 542, et St-John, Wild Sports and nat. Hist. of the Highlands, 1846, p. 129.
  9. E. Hewitt, Journal of Horticulture, 1862, p. 773, et 1863, p. 39.
  10. J’ai eu connaissance de plusieurs faits sur la fertilité des produits des croisements de plusieurs races ; M. Yarrell m’apprend que le canard Chanterelle et le canard commun sont parfaitement fertiles ensemble. J’ai croisé ce dernier avec des becs courbés, un Pingouin avec un Labrador ; les produits de ces croisements furent fertiles, mais on ne les a pas croisés inter se, de sorte que l’essai n’a pas été complet. Quelques métis Pingouin et Labrador recroisés avec le Pingouin, que j’ai ultérieurement appariés entre eux, se sont montrés tout à fait fertiles.
  11. Poultry Chronicle, 1855, vol. III, p. 512.
  12. Journal of the Indian Archipelago, vol. v, p. 334.
  13. The Zoologist, vol. VII, VIII ( 1849-50), p. 2353.
  14. O. C., 1855, vol. III, p. 512.
  15. The Zoologist, 1855, vol. III, p. 312. — Pour les Rouens, 1854, vol. I, p. 167.
  16. Col. Hawker’s Instructions to young Sportsmen, cité par Dixon dans Ornamental Poultry, p. 125.
  17. Cottage Gardener, 9 avril 1861.
  18. M. Selys Longchamps a décrit ces métis dans Bulletins de l’Acad. royale de Bruxelles, t. XII, no 10.
  19. Proc. zool. Society, 1861, p. 261.
  20. Sir J. E. Tennent, Ceylon, 1859, vol. I, p. 485 — J. Crawfurd, O. C., 1860. — Rev. E. S. Dixon, Ornament. Poultry, 1848, p. 132. — L’oie figurée sur les monuments égyptiens paraît avoir été l’oie rouge d’Égypte.
  21. Macgillivray, British birds, vol. IV, p, 593.
  22. Strickland, Ann. and Mag. of nat. Hist. (3e série), vol. III, 1859, p. 122, a élevé quelques jeunes oies sauvages, qui étaient par tous leurs caractères et leurs habitudes, identiques à l’oie domestique.
  23. Hunter, Essays (édité par Owen), vol. II, p. 322.
  24. Yarrell, British Birds, vol. III, p. 142, signale la domestication de l’oie par les Lapons.
  25. L. Lloyd, Scandinavian Adventures, 1851, v. II, p. 413, dit que l’oie sauvage pond de cinq à huit œufs, nombre bien inférieur à celui des œufs de l’oie domestique.
  26. Observation du Rev. L. Jenyns dans British Animals. Voir aussi Yarrell et Dixon dans Ornament. Poultry (p. 139), et Gardener’s Chronicle, 1857, p. 45.
  27. M. Bartlett a exposé le cou et la tête d’une oie ainsi caractérisée à la Zoological Society, Fév. 1830.
  28. W. Thompson, Nat. Hist. of Ireland, 1851, t. III, p. 31. — Je dois au Rev. E. Dixon les renseignements sur les variations des couleurs du bec et des pattes.
  29. Strickland, O. C., p. 122.
  30. Poultry Chronicle, vol. I, 1854, p. 498 ; vol. III, p. 210.
  31. Cottage Gardener, 4 Sept. 1860, p. 348.
  32. Hist. de la nature des oiseaux, par P. Belon, 1555, p. 156. — Voir pour la préférence qu’avaient les Romains pour les foies de l’oie blanche, I. Geoffroy Saint-Hilaire, Hist. nat. gén. t. III, p. 58.
  33. Sclater, Proc. zool. Soc., 24 Avril 1860.
  34. Proc. zool Soc., 14 Avril 1835.
  35. Proc. zool. Soc., 8 Avril 1856, p. 61. — Le professeur Baird (cité dans Tegetmeier, Poultry Book, 1866, p. 269), croit que nos dindons proviennent d’une espèce des Indes occidentales actuellement éteinte. Mais à l’improbabilité qu’un oiseau se soit éteint dans ces grandes îles si luxuriantes, il faut encore ajouter ce fait que, le dindon dégénérant dans l’Inde, il n’a pas dû être primitivement un habitant des basses régions tropicales.
  36. Audubon, Ornithological Biograph., vol. I, 1831, p. 4–13, — et Naturalist’s Library, vol. xiv, Birds, p. 138.
  37. F. Michaux, Voyage dans l’Amérique du Nord, 1802.
  38. Rev. R. S. Dixon, Ornement. Poultry, 1848, p. 31
  39. Id., ibid, 1848, p. 35
  40. Bechstein, O. C., v. III, 1793, p. 309.
  41. Gardener’s Chronicle, 1852, p. 699.
  42. E. Blyth, Ann. and Mag. of nat. Hist., 1847, vol. XX, p. 391.
  43. Roulin, Mém. savants étrangers, t. VI, 1835, p. 349. — M. Hill, de Spanish Town, m’envoie dans une lettre la description de cinq variétés de la pintade à la Jamaïque. J’en ai vu des variétés singulières de couleurs pâles, importées des Barbades et de Demerara.
  44. Pour Saint-Domingue, voir A. Salle, Proc. zool. Soc., 1857, p. 236. — M. Hill, dans sa lettre, me signale la couleur des pattes des oiseaux marrons de la Jamaïque.
  45. B. P. Brent, The Canary, British Finches, etc., p. 21–30.
  46. Cottage Gardener, 11 Déc. 1835, p. 184, description des variétés. — E. V. Harcourt ; même ouvrage, 25 Déc. 1855, p. 223, pour les mesures des oiseaux sauvages.
  47. Bechstein, Naturg. der Stubenvögel, 1810, p. 243 ; p. 252 sur l’hérédité du chant des canaris. Pour leur calvitie, W. Kidd, Treatise on Song-Birds.
  48. W. Kidd, O. C., p. 18.
  49. Indian Field, 1858, p. 255.
  50. Yarrell, British Fishes, vol. I, p. 319.
  51. M. Blyth, Indian Field, 1858, p. 255.
  52. Proc. zool. Soc., 25 Mai 1842.
  53. Yarrell, O. C., vol. I, p. 319.
  54. Dict. class. d’Hist. nat. t. v, p. 276.
  55. Observations in nat. Hist. 1846, p. 211. — Dr Gray a décrit dans Annals and Mag. of nat. Hist., 1860, p. 151, une variété semblable, mais privée de nageoire dorsale.
  56. De l’Espèce, 1859, p. 459. — Pour les abeilles de Bourgogne, voir Gérard, article Espèce, dans Dict. universel d’Hist. nat., 1849, t. v, p. 438.
  57. Voir Journal of Horticulture, 1862, p. 225–242 et 284, une discussion sur ce sujet en réponse à une question que j’avais posée.
  58. Journal of Horticulture, 14 Juillet, 1863, p. 39.
  59. Ibid., 9 Sept. 1862, p. 463. — Voir sur le même sujet M. Kleine (11 Nov. p. 643), qui conclut que, sauf quelque variabilité de couleur, on ne peut reconnaître de différences constantes ou appréciables chez les abeilles d’Allemagne.
  60. M. Woodbury a publié plusieurs faits de ce genre dans Journal of Agriculture, 1861 et 1862.
  61. Ann. and Mag. of nat. Hist. (3e série) vol. XI, p. 339.
  62. Cottage Gardener, Mai 1860, p. 110 et Journal of Horticulture, 1862, p. 212.
  63. Transact entom. Soc., (3e série), vol. III, p. 143–173 et p. 295–331.
  64. Godron, O. C., t. I, p. 460. L’antiquité du ver à soie est donnée sur l’autorité de Stanislas Julien.
  65. Remarques du professeur Owen et autres, à la réunion de la Société entomologique de Londres, en Juillet 1861.
  66. A. de Quatrefages, Études sur les maladies actuelles du ver à soie, 1859, p. 101.
  67. Je donnerai au chapitre sur la sélection mes autorités pour ces assertions.
  68. Manuel de l’Éducateur de vers à soie, 1848.
  69. Robinet, O. C., p. 12, 318. — Je puis ajouter que les œufs de vers à soie de l’Amérique du Nord, transportés aux îles Sandwich se sont développés très-irrégulièrement ; et les papillons obtenus pondirent des œufs qui se comportèrent encore plus mal sous ce rapport. Quelques-uns furent éclos dans dix jours, d’autres après un intervalle de plusieurs mois. On aurait sans doute fini par obtenir quelque caractère régulier. Voir Athenæum, 1844, p. 329, et Scenes in the Sandwich Islands, de J. Jarves.
  70. Art d’élever les vers à soie, traduit du comte Dandolo, 1825, p. 23.
  71. Hutton, O. C., p. 153, 308.
  72. O. C., p. 317.
  73. Robinet. O. C., p. 306–317.
  74. O. C., p. 317.
  75. Illustrations Haustellata, vol. II, p. 35, de Stephens. — Voir aussi Cap. Hutton ; O. C., p. 152.
  76. O. C., p. 304, 209.
  77. Quatrefages, O. C., p. 214.
  78. O. C., p. 151.
  79. O. C., p. 26.
  80. Godron, de l’Espèce, etc., p. 462.
  81. Quatrefages, O. C., p. 12, 209, 214.
  82. Robinet, O. C., p. 303.
  83. Id., ibid., p. 15.