De la mort des persécuteurs de l’Église/Dissertation/1.3
3. réponse aux objections de dodwel.
Je réponds donc, premièrement, que Dodwel ne saurait tirer aucun avantage contre nous des calendriers anciens, s’il ne nous en produit un qui contienne lui seul les noms de tous les martyrs qui ont jamais été reconnus pour tels dans tout le monde chrétien, ou, ce qui revient au même, s’il ne nous représente le calendrier de chaque Église en particulier, afin que de tous ces différents calendriers on en forme un d’où l’on puisse extraire au juste le nombre des martyrs, et connaître par-là s’il y en a peu, comme le prétendent nos adversaires, ou beaucoup, comme les catholiques le croient. « Mais, répond Dodwel, vous ne pouvez nier que le calendrier de Buchérius, que je produis, ne soit du moins une preuve manifeste du peu de martyrs de l’Église d’Occident, c’est-à-dire de l’Église latine, et peut ainsi suppléer à ce qui manque au recueil d’Eusèbe, qui ne nous a rien donné des martyrs de cette Église ; car il faut remarquer, continuet-il, que ce calendrier ne parle pas seulement des martyrs d’Italie, mais de ceux des autres provinces de l’Occident ; et cependant ils ne font tous ensemble qu’un très-petit nombre de martyrs. Mais j’en appelle de Dodwel à Dodwel même : croit-il de bonne foi que dans tout l’Occident il n’y ait jamais eu aucun autre martyr que ceux qui sont compris dans ce calendrier de Buchérius, et que l’Orient n’en reconnaisse point, hors ceux dont Eusèbe a fait le catalogue ? Je ne puis comprendre comment un homme qui sans doute ne passera jamais pour étranger dans l’histoire ecclésiastique se soit de lui-même renfermé si mal à propos dans un défilé d’où il lui sera si difficile de se dégager.
Nous lui soutenons donc que ce calendrier unique qu’il emploie pour fortifier son opinion ne peut lui être d’aucun usage. 1o Parce que chaque Église particulière avait son calendrier, qui lui était propre et tout différent de celui des autres Églises, dans lequel il était très-rare qu’on écrivit le nom de quelqu’autre martyr étranger, quand même il eût été d’une Église voisine. Tel est le calendrier romain de Buchérius. 2o Il s’en fallait beaucoup que l’on écrivît dans ces calendriers le nom de tous ceux qui souffraient le martyre dans la ville ou dans la province où était cette Église particulière. 3o On doit conclure de ces deux premiers chefs que plusieurs martyrs, qui nous sont maintenant inconnus ou qui nous paraissent douteux parce qu’ils nous viennent d’un endroit suspect, seraient reconnus de nous aujourd’hui sans aucune difficulté, si nous avions les calendriers de toutes les Églises particulières. Examinons ces trois points en peu de mots.