De la baguette divinatoire/Partie 5/Introduction

INTRODUCTION.

276.Je distinguerai dans la vie de l’homme et des animaux des actes appartenant à quatre catégories distinctes, avant de parler de l’intervention du principe du pendule explorateur dans un grand nombre d’actes de la vie humaine. Ces quatre catégories d’actes sont :

  1. Des actes relatifs à l’instinct ;
  2. Des actes relatifs à la raison ;
  3. Des actes relatifs à l’imitation ;
  4. Des actes relatifs à l’habitude.


I. — Actes relatifs à l’instinct.

277.Lorsqu’on étudie les actes des animaux dépendant de l’instinct, non dans les livres, mais dans la nature même, on acquiert bientôt la conviction que les explications qu’on en a proposées en les faisant dépendre d’une transmission de connaissance des ascendants à leurs petits, ou à l’imitation de ce que ceux-ci voient faire aux premiers, sont dénuées de toute vraisemblance. Il n’y a réellement ni enseignement aux petits, ni imitation de leur part. Le poulet, dès sa sortie de l’œuf, sait éviter les obstacles qu’il rencontre, et connaît le grain propre à le nourrir, car du plus loin qu’il en aperçoit pour la première fois, il se précipite dessus pour le becqueter. Le petit canard, auquel l’eau est inconnue, se précipite dans celle qu’il vient d’apercevoir, et sait s’y diriger avec ses pattes sans hésitation, sans incertitude, et avec la même aisance qu’il le fera à la fin de sa vie.


II. — Actes relatifs à la raison.

278.Les actes que nous rapportons à la raison, produits de la réflexion et d’un examen préalable à leur exécution, auraient pu différer de ce qu’ils sont, à cause de leur émanation d’un être libre et doué d’une volonté.


III. — Actes relatifs à l’imitation.

279.Il est des actes auxquels on peut se livrer, parce qu’on est témoin qu’un autre que soi les exécute, et que, sans cette circonstance, on n’aurait jamais pensé à faire. Ils diffèrent donc des actes relatifs à l’instinct, et sont tout à fait étrangers à ceux de la raison, lorsqu’on les exécute sans le vouloir ou sans s’en rendre compte.


IV. — Actes relatifs à l’habitude.

280.Les actes auxquels l’homme et les animaux se livrent souvent peuvent devenir si familiers, qu’ils les exécutent avec une telle spontanéité qu’on est tenté de les rapporter à une sorte d’instinct ; mais, comme résultat d’un exercice plus ou moins fréquemment répété, ils diffèrent absolument des actes de l’instinct, tel que je viens de l’envisager.

Les actes que l’on rapporte à l’habitude chez les animaux proviennent presque tous de l’influence que l’homme a exercée sur eux.

281.Les actes que chez l’homme on rapporte à l’habitude peuvent avoir plusieurs causes premières.

Ils peuvent dépendre :

  1. D’habitudes qu’on a prises d’un maître ;
  2. D’habitudes qu’on s’est données soi-même volontairement ;
  3. D’habitudes qu’on a contractées sans le vouloir et sans s’en rendre compte ;
  4. D’habitudes nées de l’imitation.

282.Les mouvements d’un musicien jouant d’un instrument, comme piano, harpe, violon, etc., ne peuvent être que le résultat d’un long exercice, quelle que soit d’ailleurs l’agilité de ses organes. C’est cette longue habitude qui lui permet d’aller aussi vite que la pensée.

283.L’artiste dramatique est dans le même cas que le musicien : ses paroles, le jeu de sa physionomie et ses gestes doivent aller ensemble, pour que tout l’effet dont il est capable soit produit.

284.Une conséquence de ce que je viens de dire de la nécessité de l’habitude pour que les mouvements de certains organes, la main en particulier, suivent la rapidité de la pensée qui les ordonne lorsque ces mouvements sont nombreux et variés, et en succession continue, c’est qu’il existe une correspondance suffisamment rapide entre eux et cette pensée, correspondance que je désignerai quelquefois par l’expression d’harmonie.

Or, cette correspondance, fruit de l’habitude une fois acquise, a besoin d’être entretenue par un exerce fréquent, et, malgré cela, il arrive un âge où cette harmonie s’affaiblit, si même elle ne disparaît pas absolument.

Par exemple, tant que l’harmonie existe entre la pensée et le mouvement de la main qui la retrace par l’écriture, la plume suit la marche des idées sans lacune ; mais dans le cas contraire où l’accord est rompu ou plutôt affaibli par l’âge, votre pensée dit Alexandre est, et votre main écrit Alexest, soit que le mouvement de la main ne puisse suivre la pensée, ou bien que la mémoire s’affaiblissant lorsque vous avez pensé Alexandre, la durée de la perception est telle, que andre s’efface lorsque vous pensez est ; de sorte que s’il n’y a pas solution de continuité dans la pensée, elle existe dans l’écriture qui aurait dû la retracer.

285.Si le poulain sortant du ventre de sa mère, aussi bien que le petit poulet sortant de l’œuf, se soutiennent sur leurs pieds et marchent aussitôt sans l’avoir appris, l’enfant qui marche seul à un certain âge s’est trouvé dans un cas différent, car, évidemment, il a appris à marcher ; si donc l’instinct a eu part dans la marche, cette part est décidément très-faible, relativement à la part de l’exercice auquel il s’est livré pour assurer sa marche.

286.Dans l’étude faite pour apprendre à marcher, il faut comprendre les mouvements tentés pour se déranger assez vite de la direction qu’on suit, lorsqu’on n’aperçoit un obstacle qu’au moment où il vous menace, l’exercice auquel on s’est livré pour marcher sans danger sur un toit, sur la corniche d’une montagne, sur une planche étroite placée au-dessus de l’eau ou d’un abîme, sur une corde tendue, etc.

287.Les actes dans lesquels intervient le principe que j’ai exposé plus haut, en parlant du pendule explorateur, ne rentrent dans aucune des catégories précédentes :

  1. Ils ne sont pas instinctifs ;
  2. Ils ne sont pas le produit d’un raisonnement ;
  3. Ils ne sont pas le produit d’une habitude ;
  4. Ils ne sont pas le résultat de l’imitation.

Mais en concluant ainsi, je suis loin de méconnaître la part de l’habitude et de l’imitation dans des actes variés où intervient, sans doute, le principe dont je vais étudier l’influence.