De la Présence et de l’Action du Saint-Esprit dans l’Église/Chapitre 5


CHAPITRE V.

DU CHAPITRE Ve DE M. WOLFF, OÙ L’AUTEUR MONTRE QUE L’ÉVÊQUE EST ÉTABLI DE DIEU.

En général je suis d’accord avec l’auteur que l’évêque était établi de Dieu.

Mais nous avons à faire remarquer la confusion entre pasteur et évêque, confusion ensuite de la quelle la plupart des passages qu’il allègue sont mal cités. Le passage Hébr. XIII, 17 : « Obéissez à vos conducteurs, » ne parle pas en particulier des pasteurs, mais en général des conducteurs, mot qui du reste ne démontre pas qu’il y ait eu une charge. Aussi n’est-il nullement dit qu’ils doivent rendre compte à Dieu des âmes qu’ils paissent, Dieu les leur ayant confiées. Ils veillent sur les âmes comme ceux qui doivent rendre compte. L’on a souvent remarqué que « qui doivent en rendre compte » n’est pas une traduction fidèle.

Nous avons déjà considéré le passage Éph. IV, 11, l’évêque n’y est pas nommé.

Actes XX, 28. Ce passage est très-clair pour démontrer que les évêques à Éphèse, et par conséquent ailleurs étaient établis de Dieu ; mais de même ici il y a une confusion dont l’importance est assez grande.

L’auteur veut que, parce que le mot (εθετο), établi, est employé en Actes XX et 1 Cor. XII, l’établissement soit le même dans les deux cas. Mais il ne s’est pas aperçu que, dans le premier de ces passages, il est question d’établir certaines personnes dans une charge, et, dans le second, d’établir la charge, la fonction elle-même. Autre chose est d’établir un professorat dans une université et de le doter, autre chose de placer ou d’établir un individu dans la fonction de recteur dans la même académie. Dans le passage, Act. XX, Dieu avait établi ou placé certaines personnes dans la charge d’évêque, et, dans 1 Cor. XII, Dieu avait établi dans l’Église certains dons, certaines jointures ou membres du corps. Il a fait le corps ainsi. De sorte qu’il n’y a aucune analogie entre le sens des deux passages.

Aussi l’auteur n’a cité aucun passage qui parle d’un appel immédiat ou intérieur ; il y a de la part de Dieu, nomination de certaines personnes ; mais cela n’est pas un appel intérieur. Ce que l’auteur nous donne, ce ne sont que des raisonnements qui n’aboutissent pas à grand chose. Un seul passage affirme que le Saint-Esprit avait placé certaines personnes dans la charge de surveillant, ce que j’admets pleinement ; mais il n’est pas dit qu’il y eut appel intérieur ; et j’observe qu’il n’est pas même dit que Dieu ait établi des évêques dans son Église ; cela n’est dit nulle part. Nulle part il n’est dit non plus, que Dieu, selon cette puissance qui crée et qui ordonne, ait mis une telle fonction dans le corps. Cela est dit des dons en les comparant à l’œil, à l’oreille, etc., que Dieu a mis dans le corps naturel. Quand il a placé certains individus dans une telle charge, c’était, dans ce cas là, sanctionner l’existence de cette charge ; mais la Parole de Dieu ne va pas jusqu’au point de dire que Dieu avait établi la charge elle-même ; une charge n’est pas de la nature d’une fonction dans le corps. Le fait est que l’évêque était un gouvernement local ; ce n’était pas une impulsion du Saint-Esprit qui agissait en don ; c’était une charge à laquelle on était nommé. Le Saint-Esprit avait établi certaines personnes dans cette charge. Et voici l’importance de cette remarque, ce n’était pas une chose qui existât dans l’individu qui agissait de telle ou telle manière ; c’était une charge extérieure à soi que l’on pouvait désirer et pour laquelle certaine qualité était nécessaire ; ainsi, on pouvait être nommé pour cette charge, et la vocation de Dieu n’était pas dans ce cas-ci, sa puissance agissant en don ; puissance qu’il avait distribuée, que le Saint-Esprit avait distribuée ; mais cette vocation était uniquement la nomination de la part de Dieu d’un individu à la charge en question et son établissement dans cette charge. Ainsi, quand il s’agit d’une charge, nous avons la seule vraie vocation de Dieu : savoir sa nomination de l’individu. Le Saint-Esprit établissait dans cette place, dans cette fonction ; il l’établissait pas la fonction elle-même, sauf par l’acte de nomination de l’individu. Il va sans dire que le Saint-Esprit nommait des personnes ayant des qualités convenables.

Ce que nous avons donc à chercher, c’est comment Dieu a établi ces évêques. C’est ainsi que nous découvrirons ce que c’est que cette vocation reçue de Dieu.

Nous avons de cela des exemples très-clairs dans la Parole. Un homme n’est pas établi de Dieu dans une charge par une qualité seulement ; cela peut-être le rend propre pour la charge ; mais, comme M. Wolff le dit, il faut qu’il soit régulièrement installé dans cette charge ; il n’est pas évêque, il n’est pas établi évêque ni de Dieu ni des hommes, avant cela, quelles que soient d’ailleurs ses qualités. Eh bien ! Christ a nommé et envoyé les douze auxquels il a donné plus tard, après son ascension, des dons nécessaires pour la charge d’apôtre, comme il avait donné, pendant sa vie, ce qui était nécessaire pour en faire les messagers de sa gloire de Messie ici bas. Mais il les avait nommés à sa place. L’apôtre Paul, spécialement chargé d’une telle fonction, a nommé des anciens pour le gouvernement, la surveillance de chaque Église. Il a envoyé Tite muni de son autorité pour faire la même chose en Crète : ainsi au moins, Dieu les a établis. C’est tout ce que la Parole renferme de positif là dessus. Est-ce que je pense que l’autorité de Dieu y manquait ? Nullement, je dis que Dieu avait établi ces évêques selon l’autorité conférée à saint Paul par le Seigneur ; autorité qu’il exerçait par la puissance du Saint-Esprit, comme il le dit dans un autre occasion : « quand vous serez tous réunis avec mon esprit et la puissance du Seigneur Jésus-Christ. » Le Saint-Esprit avait établi les anciens par son moyen.

Quoiqu’il en soit du moyen, ce que nous trouvons dans la Bible et ce que je demande par conséquent, c’est que le Saint-Esprit établisse les personnes dans ces charges ; car ne venez pas nous dire que le Saint-Esprit a établi la charge et qu’il faut la continuer ; ce n’est pas ce que dit la Parole de Dieu. Elle dit que le Saint-Esprit a établi les personnes qui en étaient revêtues dans la charge en question. C’est ce que je demande dans ceux qui prétendent en être revêtus maintenant. Si le seul fait de s’y trouver suffisait sans demander qui a placé ces personnes dans cette charge, ce fait suffirait aussi bien pour les prêtres de Rome que pour les autres ; ils seraient établis par l’autorité de Dieu, par le Saint-Esprit ; et il faudrait les reconnaître ; ce serait le papisme tout pur dans son vrai principe, savoir l’autorité de Dieu attachée à l’homme sans preuve. L’autorité du Saint-Esprit reconnue à la possession d’une charge, et non pas la légitimité de la possession jugée par la démonstration de l’autorité du Saint-Esprit.

Voilà ce qui regarde l’établissement de l’évêque par Dieu lui-même.

Je demande maintenant que l’on prouve l’établissement de l’individu dans la charge de la part de Dieu. Dans le cas d’un don, ce n’est plus la même chose ; car il se démontre lui-même ; mais une charge d’autorité a besoin d’être légitimée. On n’a pas droit de dire que le Saint-Esprit établissait des évêques. Le Saint-Esprit établissait certaines personnes évêques. Montrez-moi cela et je serai content, mais c’est là votre tâche.

M. Wolff reconnait (p. 37) que le choix de l’Église exclut la vocation de Dieu. Mais pour être conséquent il faut me montrer quelqu’un établi par une intervention sensible du Saint-Esprit (sans cela le choix de tout autre l’exclut également), mais c’est une prétention que l’on n’a pas : ou bien quelqu’un établi selon la Parole par des autorités supérieures. Mais dans la Parole cela ne se trouve attribué qu’aux apôtres et à leurs délégués.

Si l’on objecte qu’il est écrit : « Obéissez à vos conducteurs, car ils veillent sur vos âmes ; et connaissez ceux qui travaillent au milieu de vous [1]; je réponds : j’y consens, et je fais plus que d’y consentir, car la Parole de Dieu n’a pas besoin du consentement de l’homme. Que Dieu pousse tous ses enfants à le faire ; voilà ma prière.

Je bénis Dieu de ce qu’il y a, dans sa Parole, provision pour des temps où le désordre empêche que tout se légitime extérieurement. Le cœur de l’homme y est mis à l’épreuve d’une manière précieuse. Les humbles discerneront tout ce qui est de Dieu et s’y soumettront ; la chair se révoltera contre tout. Mais quand, en employant la phrase : « le Saint-Esprit a établi », on veut m’imposer ce que l’homme a établi et arrêter un ordre de choses comme obligatoire, dans des circonstances où Dieu demande patience et humiliation, j’exige qu’on donne ses preuves. Une telle prétention doit être légitimée ; sinon je déshonore le Saint-Esprit, dont on introduit l’autorité et le nom pour soutenir ce qui n’est que de l’homme, ce qui n’est qu’une autorité, un Ministère sans don. Mais il faut, et c’est le moins qu’on puisse exiger, qu’une autorité sans don fournisse des preuves très-claires, qu’elle est établie par le Saint-Esprit, avant qu’on puisse lui reconnaître une telle autorité. C’est ce que je n’ai pas vu encore. Et quand cette prétendue autorité est employée pour entraver l’activité d’amour ou pour s’arroger le droit de la régler comme d’office et nier tout don quelconque, cela devient sérieux. Est-il de Dieu ? et cette question est très-grave.

Mais voilà quelqu’un qui désire cette charge ; qui a toutes les qualités voulues par la Parole ; qui y est béni de Dieu ; pour mon compte je l’appuyerais de toute ma force, et d’autant plus qu’il ne peut légitimer sa vocation d’une manière extérieure, ni dire le Saint-Esprit m’a établi, en en appelant à la preuve. Mais qu’il reste sincèrement dans cette position de faiblesse reconnue, parce qu’alors nous nous appuyerons tous les deux sur Dieu, et la force de Dieu sera là. Si, d’un autre côté, j’ai travaillé dans un endroit ; si Dieu m’y a béni ; s’il a rassemblé bien des âmes, s’il a suscité lui-même de vrais évêques, qui coopèrent, qui aident, qui enseignent, qui veillent sur les âmes, et que je m’en aille travailler ailleurs, aurais-je quelque scrupule à les engager, à les conjurer par les entrailles de Christ, à veiller sur les âmes que dans cet endroit Dieu m’avait données pour mon salaire ? Si j’aime les âmes, si j’aime Christ et si je suis animé du Saint-Esprit, je ne pourrais pas agir autrement. Si ces mêmes personnes cherchaient à se placer dans une position où il s’agirait d’un droit, toute l’œuvre d’amour serait détruite de fond en comble.

Celui qui ne peut pas sentir la différence entre une telle conduite et le fait d’insister sur un Ministère sans don, je le plains.

Souvenons-nous aussi que les anciens, dont il y avait toujours plusieurs d’établis dans chaque Église « à côté des dons », sont tout autre chose qu’un jeune homme qui sort d’une académie, ayant peut être des talents naturels, peut-être de la piété, mais pas une seule des qualités demandées par la Parole de Dieu pour les anciens ; les anciens que dépeint la Parole sont tout autre chose que les jeunes ministres que nous présente M. Wolff dans ce triste tableau dans lequel il en résume les traits en disant : « Avec études—tous prêchent sans dons. » Voyez la dernière page de sa brochure.

Reconnaître un ouvrier selon son don, dans son champ de travail, c’est un devoir positif ; celui qui ne le fera pas en souffrira. C’est ce que dans leur prétention à diriger l’œuvre, les sociétés religieuses ne font pas. Elles respectent des ministres qu’elles savent n’être pas établis de Dieu ; elles laissent souvent les âmes et leur propre œuvre passer dans un système qu’elles croient n’être pas de Dieu et elles s’opposent à tout vrai ouvrier qui ne leur est pas soumis.

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  1. Ce passage ne prouve pas que l’Église ait reconnu ceux qui avaient travaillé, mais bien le contraire ; car il n’y aurait pas eu besoin de prendre connaissance de ceux qui travaillaient, s’ils avaient été publiquement et officiellement reconnus par l’Église. Cela aurait été une exhortation tout-à-fait déplacée.