De l’Imitation de Jésus-Christ (Brignon)/Livre 3/24

Traduction par Jean Brignon.
Bruyset (p. 185-186).


CHAPITRE XXIV.
Qu’il ne faut point s’enquerir curieusement de la conduite des autres.
Le Maître.

MOn fils, ne soyez point trop curieux ; ne vous mêlez point de trop de choses.

Pourquoi vous interesser tant à ceci ou à cela ? Songez seulement à me suivre[1].

Que vous importe de sçavoir quelle vertu ou quel vice a celui-ci ; de quoi parle, ou ce que fait celui-là : Vous n’êtes pas responsable de la conduite d’autrui : vous n’avez à rendre compte que de la vôtre. Qu’est-il donc besoin que vous vous donniez tant d’inquiétude ?

Il n’y a que moi qui connoisse à fond tous les hommes, ni qui voye tout ce qui se passe sous le Ciel. Je sçai les bonnes & les mauvaises qualitez de chacun : je sçai ce qu’il pense, ce qu’il veut, & quelles sont ses intentions.

Il faut donc vous reposer de tout sur ma Providence. Laissez dans l’agitation & dans le trouble les esprits inquiets & turbulens : pour vous demeurez en paix.

Tout ce qu’ils ont jamais dit, ou fait de mal, ils en porteront la peine : car je suis leur Juge, & rien n’échappe à ma connoissance.

Ne vous mettez pas en peine d’acquerir une grande réputation, ni de vous faire beaucoup d’amis.

Tout cela ne serviroit qu’à vous distraire, & vous priveroit de la lumiere divine.

Je prendrois plaisir à m’entretenir avec vous, & je vous découvrirois des mystéres, que vous n’avez jamais connus, si vous êtiez toûjours attentif à observer le tems de ma visite ; & toûjours prêt à m’ouvrir la porte de vôtre cœur.

Tenez-vous donc sur vos gardes ; appliquez-vous à l’oraison ; ne laissez échapper aucune occasion de vous humilier.

  1. Joan. 21. 22.