Société du Mercure de France (p. 331-351).
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XI

LE PROCÈS EN BELGIQUE. — LA CONDAMNATION
(1873)

Verlaine et Rimbaud se trouvaient à Londres, au mois de juin 1873. La lettre reproduite au chapitre précédent indique qu’il donnait des leçons de français, et qu’il vivait, tant avec le produit de ces cachets qu’à l’aide de subsides que sa mère lui adressait. Une querelle survint entre les deux compagnons. Elles étaient fréquentes, motivées par le caractère despotique de Rimbaud et par le tempérament nerveux et capricieux de Verlaine. La boisson aidant, ces disputes prenaient vite un ton aigu. Il faut ajouter, selon le dicton qui explique la facilité des batteries entre chevaux quand le foin vient à manquer au râtelier, que, les jours de gêne, les deux camarades se trouvaient, l’un plus tourmenté et l’autre plus impérieux.

Brusquement, Verlaine, comme un détenu qui rompt sa chaîne et s’évade, quitte Londres et s’embarque pour Anvers, sans avertir Rimbaud, et, paraît-il, sans lui laisser d’argent. Cette fuite était un mauvais procédé. Verlaine aurait dû agir avec plus de sang-froid, et mettre plus de calme et d’énergie dans sa décision, s’il voulait renoncer à la compagnie onéreuse et troublante de Rimbaud. Il n’avait qu’à lui signifier qu’il avait assez de cette vie en commun, laissant prise aux calomnies, et fournissant des arguments dans le procès en séparation que lui intentait sa femme.

Rimbaud retournerait chez sa mère à Charleville, comme cela lui était déjà arrivé, quand il avait cru posséder suffisamment l’anglais, et lui, Verlaine, irait où il avait l’intention d’aller, c’est-à-dire à Bruxelles.

Pourquoi Verlaine prenait-il cette décision, assez inattendue et ressemblant fort à un coup de tête, de cesser toute cohabitation avec Rimbaud, de se séparer de lui, probablement d’une façon définitive, et de quitter Londres, où il trouvait des leçons à donner, pour retourner en Belgique, où il n’avait nulle occupation assurée, où il ne pouvait que dépenser de l’argent ?

Il ne gagnait rien depuis près de deux ans. Il vivait donc de ses rentes, et comme elles étaient insuffisantes, il consommait son capital, déjà ébréché par toutes les sommes que lui envoyait sa mère.

Quand on se reporte à la détresse légendaire de Verlaine par la suite, il faut songer que, si sa petite fortune était suffisante pour l’aider à subsister, avec un emploi, avec des gains réguliers s’ajoutant à ses revenus, elle ne pouvait lui permettre de vivre en rentier, et en faisant de continuels voyages. Pendant l’année 1871, 1872 et en 1873, jusqu’au mois de juillet, Verlaine, en Belgique, dans les Ardennes, en Angleterre, faisait double dépense, Rimbaud étant sans argent, et, s’ils menaient tous deux un train relativement modeste, ils ne se privaient nullement aux tavernes, bars et cabarets, dont ils étaient les hôtes assidus. Pendant ces deux ans et demi, Verlaine a certainement dépensé trente mille francs de son capital. La réflexion lui était venue, dans une accalmie de sobriété et de sagesse, qu’il ne pouvait continuer à vivre ainsi, qu’il devait modérer ses frais et chercher un autre mode d’existence. La réconciliation avec sa femme lui était apparue comme la seule issue avantageuse à l’impasse où il s’était engagé. Il fallait l’ouvrir, cette porte de sortie. Il pensait faciliter la reprise de l’existence conjugale, en rompant ainsi, brusquement. Il ne se sentait pas le courage de négocier la rupture. En abandonnant Rimbaud, à Londres, par une fuite soudaine, il estimait donner un gage à sa femme, il affirmait ainsi sa volonté d’en finir, en même temps qu’il rendait à peu près impossible toute réunion ultérieure avec son compagnon, jusque-là réputé inséparable.

Peut-être aussi Verlaine prit-il sa résolution, dont la vigueur contrastait avec sa faiblesse coutumière, dans un accès de surexcitation alcoolique. Naturellement il ne me prévint pas, et l’on en est réduit aux conjectures sur ce départ précipité, surprenant, sur cet abandon de Rimbaud et de l’Angleterre, qui devaient avoir, à bref délai, pour conséquence la querelle de Bruxelles, le coup de feu, le procès, et la condamnation.

L’état psychologique de Verlaine à cette époque était douloureux, presque morbide. Il détestait et adorait sa femme, ai-je dit. Selon les phases de sa cérébralité, il l’invoquait, il la désirait, ou bien il la maudissait et l’accablait, à distance, de reproches et d’injures. Il lui écrivit, dans un de ces moments de bienveillance et de nostalgie conjugale. Il la suppliait de venir le rejoindre à Bruxelles. Il promettait de ne donner prise, par la suite, à aucun reproche. Il ajoutait qu’il se tuerait si sa femme ne répondait pas à son appel. Probablement pour la décider, il lui annonça qu’il ne verrait plus Rimbaud, qu’il irait seul en Belgique.

Dans son exaltation fiévreuse, il partit pour la Belgique. Mme Verlaine mère, qui, dans sa touchante pensée de revoir son fils à Paris, près d’elle, loin des vagabondages et des dépenses à l’étranger, entretenait peut-être en lui des illusions conjugales, et lui faisait entrevoir une réconciliation, qui n’existait que dans les désirs de la bonne dame, contribua certainement à lui faire concerter sa fuite de Londres et son éloignement de Rimbaud.

Il avait donc prévenu sa mère, et lui donnait rendez-vous avec sa femme. Arrivé à Bruxelles, Verlaine trouva bien sa mère à l’endroit fixé, mais il éprouva une déconvenue cruelle. Mme Verlaine mère lui apprit que sa femme avait refusé de se rendre à son appel. Il ne fallait pas, pour le moment, compter sur un rapprochement. Toujours optimiste et consolante, Mme Verlaine engagea son fils à ne pas désespérer ; le temps amènerait peut-être du changement. Il fallait encore patienter, et surtout ne pas recommencer l’existence errante avec Rimbaud.

La banalité de ces consolations et le vague de ces espérances surexcitèrent Verlaine. Il reçut assez mal les conseils maternels. Il descendit au cabaret voisin, but coup sur coup, pour noyer ses chagrins, malheureusement insubmersibles ; et comme, sous la double influence de la déception et de l’ivresse, l’animosité contre sa femme reprenait le dessus, tandis que son affection pour Rimbaud reparaissait, avec le remords de l’avoir laissé sans le sou à Londres, il expédia un télégramme à son mauvais génie, lui demandant pardon et le suppliant de venir le retrouver à Bruxelles, afin de recommencer l’existence en commun.

Rimbaud se hâta d’accourir, mais ce n’était plus dans l’intention de renouveler un bail avec Verlaine.

Il en avait par-dessus la tête de cette intimité qui ne l’amusait plus, et qui lui paraissait peu sûre, depuis le lâchage subit et dissimulé de Londres. Il était venu à Bruxelles, uniquement pour obtenir les subsides nécessaires à un séjour à Paris, qu’il avait projeté. Verlaine, irrité de ce projet, lui refusa l’argent, que Rimbaud avait déjà vainement essayé d’extorquer à Mme Verlaine.

Une querelle vive s’ensuivit, qui eut pour dénouement la scène tragique, à la suite de laquelle le poète fut arrêté et traduit devant les tribunaux belges.

Verlaine a raconté cette scène, sur le ton comique, dans son livre : Mes Prisons, mais son récit est incomplet.

Le voici, dans sa teneur tourmentée, tout chargé d’incidences et d’atténuations favorables à Rimbaud, qui pourtant l’avait fait arrêter. Verlaine avait le sens du repentir et le goût du remords très développé.


En juillet 1873, à Bruxelles, par suite d’une dispute dans la rue, consécutive à deux coups de revolver, dont le premier avait blessé sans gravité l’un des interlocuteurs, et sur lesquels ceux-ci, deux amis, avaient passé outre, en vertu d’un pardon demandé et accordé, dès la chose faite, celui qui avait eu le si regrettable geste, d’ailleurs dans l’absinthe auparavant, et depuis, eut un mot tellement énergique, et fouilla dans la poche droite de son veston, où l’arme, encore chargée de quatre balles, dégagée du cran d’arrêt, se trouvait par malchance, ce d’une tellement significative façon, que l’autre, pris de peur, se sauva à toutes jambes par la vaste chaussée (de Hall, si ma mémoire est bonne), poursuivi par le furieux, à l’ébahissement des pons pelches, traînant leur flemme d’après-midi sous un soleil qui faisait rage.

Un sergent de ville, qui flânait par là, ne tarda pas à cueillir délinquant et témoin. Après un très sommaire interrogatoire, au cours duquel l’agresseur se dénonça plutôt que l’autre ne l’accusait, et tous deux, sur l’injonction du représentant de la force armée, se rendirent en sa compagnie à l’Hôtel-de-ville, l’agent me tenant par le bras, car il n’est que temps de dire que c’était moi l’auteur de l’attentat et de l’essai de récidive, dont l’objet n’était autre qu’Arthur Rimbaud, l’étrange et grand poëte, mort si malheureusement, le 23 novembre dernier [1893]. — Mes Prisons.


Les deux longues phrases de Mes Prisons ne font pas bien voir la scène. J’en ai le récit exact, d’après Mme Verlaine mère, seule témoin de l’accident, — en réalité, ce ne fut qu’un accident, un tragique hasard, et une impulsive et inconsciente action dans le trouble cérébral de la demi-ivresse, que cette violence, aussitôt regrettée que commise.

La justice belge voulut y chercher les éléments d’un crime.

Elle désirait trouver un criminel, là où il n’y avait qu’un imprudent et un irresponsable, momentanément égaré par l’alcool.

Rimbaud, lâché à Londres, puis revenu à Bruxelles, sur la demande expresse de Verlaine, qui implorait pardon, offrant excuses, regrets, et peut-être promettant une indemnité, avait exigé une somme d’argent, pour s’en retourner à Charleville, ou plutôt en vue d’entreprendre une de ces randonnées dont il était coutumier. Verlaine tenait à la présence de son ami. Il l’avait fait revenir à Bruxelles pour lui tenir compagnie, dans l’espoir de recommencer, à travers les brasseries et les musicos de la capitale du Brabant, ces interminables conversations littéraires, philosophiques, artistiques, arrosées de lambic et de faro, d’absinthe et de genièvre, qui étaient le grand plaisir du poète alcoolisé.

Ici, sans insister, mais afin de bien préciser le caractère des relations des deux amis, affirmons que l’intimité de Verlaine et de Rimbaud fut toute d’intellectualité et de commensalité. Les exemples, je l’ai indiqué plus haut, sont fréquents, dans l’histoire, de camarades vivant dans une intimité profonde, en dehors de toute sexualité. Cent exemples fameux prouveraient, s’il en était besoin, que des rapports d’amitié et de cérébralité ont pu exister entre deux hommes, sans qu’aucune imputation infâme pût être justifiée, ni même formulée avec vraisemblance et sincérité.


Il y a sans doute des passages énigmatiques, ou équivoques, dans l’œuvre de Verlaine. Ils ont pu tromper l’opinion sur la nature de l’affection très vive qu’il a montrée, à toutes les époques de son existence, pour des camarades comme Lucien Viotti, Létinois, Germain Nouveau, Cazals, etc., etc.

Il a écrit, en effet, ces vers :


Le bonheur de vivre à deux hommes,
Mieux que non pas d’époux modèles,
Chacun au tas versant des sommes
De sentiments forts et fidèles…


Mais leur interprétation est fort prosaïque, nullement passionnelle ; il s’agissait tout bonnement de la popote faite en commun, de la contribution de chacun au ménage de la garçonnière. Les vers suivants de la même pièce « Læti et errabundi » donnent le véritable contexte :


La misère aussi faisait rage,
Par des fois, dans le phalanstère,
On ripostait par le courage,
La joie et les pommes de terre.


Ce fut au cours de cette intimité poétique et pot-au-feu qu’éclata la rixe relatée plus haut, d’après le récit de Verlaine lui-même. Il est nécessaire, pour en comprendre les parties un peu obscures, d’éclairer la confession de l’auteur par la narration de Mme Verlaine mère, qui avait, comme nous l’avons dit, assisté à toute la scène.

Elle se trouvait, en tiers, dans la petite pièce de l’hôtel Liègeois, à Bruxelles, où les deux jeunes gens se querellaient, à l’occasion du départ annoncé par Rimbaud.

Celui-ci affirmait n’être revenu qu’avec l’intention bien arrêtée de repartir aussitôt. De l’argent, et il tournait les talons ! Tous deux avaient la tête montée par les apéritifs. Verlaine, plus faible, ou plus surexcité par l’alcool, s’exaspéra. En vain, Mme Verlaine mère suppliait les deux amis de se mettre à table, et de renvoyer au lendemain, lorsqu’ils seraient pourvus de plus de sang-froid, leur explication, Rimbaud ne voulut rien entendre. Il déclara, de son petit ton sec, qu’il partirait sur-le-champ, et, avec le geste autoritaire qui lui était habituel, il ajouta qu’il lui fallait de l’argent. Il répétait, en scandant nerveusement, sur un rythme analogue à celui des lampions, sa demande impérative « de l’ar-gent !… de l’ar-gent !… ».

Verlaine avait acheté un revolver, peut-être dans une vague appétence de suicide, tourmenté par le souvenir de sa femme, le cœur torturé par la séparation que le refus du voyage à Bruxelles affirmait définitive. Depuis quelque temps, il sentait voltiger autour de ses tempes des chimères funèbres. Il était hanté, la nuit, de démons noirs dégagés des vapeurs de l’alcool. Dans un impulsif élan de violence, il tira l’arme de sa poche, et fit feu dans la direction de Rimbaud.

Le mouvement avait été suffisamment lent pour permettre à ce dernier d’avancer la main, instinctivement, comme pour s’emparer du revolver. La première balle effleura le poignet gauche de Rimbaud, la seconde, tirée après l’effort de celui-ci pour détourner le coup, partit vers le plancher, le canon du revolver étant abaissé.

Une stupeur profonde enveloppa les trois personnages de cette scène. Madame Verlaine mère entraîna son fils dans sa chambre. Il pleura, il exprima les regrets les plus vifs, et revenant vers Rimbaud, qui ne disait mot, il lui cria : « Prends le revolver et tue-moi ! » Madame Verlaine mère s’efforça de calmer les deux jeunes gens. Elle se mit à panser le poignet de Rimbaud, et, sur les instances de ce dernier, qui reprenait son idée fixe, elle lui remit 20 francs comme viatique, pour retourner chez sa mère à Charleville. On croyait, de part et d’autre, l’affaire terminée, et l’égratignure de Rimbaud, insignifiante, semblait déjà cicatrisée, sans suites possibles, ni médicales, ni judiciaires.

Le blessé insistant pour prendre le prochain train, et réintégrer immédiatement la maison maternelle, Verlaine voulut lui faire la conduite. Durant le parcours vers la gare, il était toujours en proie à une surexcitation vive.

Rimbaud crut, à un moment donné, qu’il fouillait dans sa poche pour de nouveau s’armer du revolver et faire feu. C’est du moins l’explication que le plaignant a donnée par la suite. Soit effet de la peur, soit par une sorte de machination diabolique, qui était bien dans son caractère, et afin de se débarrasser brutalement de Verlaine, qui l’obsédait, Rimbaud se mit à courir vers un agent de police, en criant : à l’assassin ! Verlaine le suivit, comme un fou, courant, gesticulant, criant, menaçant peut-être. Rimbaud le désigna au policier. Arrestation.

On alla s’expliquer au poste. On fouilla Verlaine. Le pistolet était une preuve, qui dès lors parut suffisante, de la tentative d’assassinat. L’arrestation fut maintenue, l’arme confisquée, la plainte de Rimbaud recueillie, consignée, et l’on écroua le malheureux poète à l’Amigo [le violon belge], tandis que Rimbaud prenait insoucieusement le train de Charleville, rêvant de vagabondages nouveaux et de lointaines aventures.

Verlaine fut transféré à la prison des Petits Carmes, à Bruxelles, sous l’inculpation de tentative d’assassinat. L’affaire devenait sérieuse. Il a raconté par la suite, avec beaucoup de bonne humeur, son entrevue avec le directeur, petit homme, au visage disparaissant sous les moustaches et les favoris, bedonnant, grisonnant, avec des yeux perçants, sous son binocle.

Ce fonctionnaire tenait une lettre à la main en abordant le prisonnier. Il lui dit poliment : « Veuillez vous asseoir, M. Verlaine ! » C’était la première parole courtoise qu’on lui adressait depuis son arrestation. Tout émoulu de son séjour à l’Amigo et des bourrades traditionnelles des agents, car le passage à tabac est aussi une contrefaçon belge, le poète ne savait à quel motif attribuer la bienveillance inattendue du geôlier. Il en eut ainsi l’explication :

— « Je viens de lire, monsieur, comme c’est mon devoir, dit avec solennité le directeur, une lettre qui vous est adressée, et je m’étonne, ayant de tels correspondants de vous voir ici ; du reste, prenez connaissance ! »

Il tendit la lettre au prisonnier. C’était la réponse à une supplique désespérée et hâtive qu’il avait envoyée à Victor Hugo, le priant d’intervenir pour lui, de faire une démarche à Paris pour une recommandation de l’ambassade. Il avait sans doute aussi parlé de sa femme. Tourmenté par les souvenirs de tout ce qu’il avait laissé de cher en France, évoquant, dans sa détresse, sa vie conjugale brisé Verlaine avait cherché une dernière tentative de rapprochement, et avait supplié Victor Hugo d’agir, avec sa grande autorité, sur sa femme, de la pressentir pour un voyage à Bruxelles, de tâcher de la ramener à lui prisonnier, malheureux, implorant grâce, pitié et pardon.

On n’a pas le texte de cette lettre à Victor Hugo, mais en voici la réponse.

Le grand homme répondit par ce billet laconique, tant soit peu sibyllin :


Mon pauvre poète,

Je verrai votre charmante femme, et lui parlerai en votre faveur, au nom de votre tout petit garçon.

Courage et revenez au vrai.

Victor Hugo.


Que signifie cette exhortation à revenir au « vrai » ? À quel « vrai » faisait allusion Victor Hugo ? Verlaine était écroué pour coups et blessures, il avait besoin d’être signalé aux autorités belges, non pas comme le vagabond, l’ivrogne, le communard suspect et l’homme mal noté dans son pays que désignaient les fameuses notes de police, mais bien comme un artiste nerveux, impressionnable, incapable d’une mauvaise action, mais susceptible d’être entraîné à une violence passagère excusable, de plus, méritant, par ses talents, par sa situation sociale, par sa famille et son éducation, de ne pas être confondu avec les filous et les escarpes du Brabant.

En quoi y avait-il lieu de donner le conseil de revenir à une vérité quelconque ? De plus, Verlaine avait prié Victor Hugo de tenter une démarche de paix et de réconciliation avec la femme dont il était séparé volontairement ; quel rapport cette mission amicale et généreuse avait-elle avec une sorte de prédication en vue d’éloigner le prisonnier de l’erreur ? Il semblerait que l’illustre poète eût été consulté sur une question d’orthodoxie philosophique ou religieuse.

La lettre apocalyptique eut toutefois le bon résultat d’inspirer au directeur une certaine considération pour le détenu, qu’au premier jour, sur le vu des pièces de police, il avait pris pour un malandrin quelconque.

Mme Verlaine mère avait écrit, de son côté, aux magistrats. Le directeur en informa son prisonnier :

— Madame votre mère, dit-il, a sollicité pour vous, de Monsieur le procureur du Roi, l’autorisation d’être admis à la pistole.

Et il ajouta, avec une certaine bienveillance, qui réconforta le pauvre détenu :

— En présence de cette lettre je prends sur moi de vous y autoriser, dès maintenant, en attendant les ordres qui vont m’arriver, et qui, je le pense, seront favorables.

En vertu du régime dit de « la pistole », Verlaine, prisonnier payant, logea seul dans une cellule, avec la permission de faire venir ses repas du dehors. Il lui fut permis également de se promener, seul, dans le préau. La promiscuité des autres prisonniers lui fut donc épargnée.

Une instruction fut ouverte. Les renseignements, demandés à Paris, et obtenus de concierges, de voisins, et de fournisseurs dans le quartier où habitait la femme de Verlaine, chez ses parents, toujours très animés contre leur gendre, furent mauvais. L’ivrognerie, les querelles domestiques, rapportées par de vagues témoins, informés surtout par les exagérations des servantes, s’ajoutèrent au mauvais renom de communard que s’était attiré le poète, en conservant son emploi à l’Hôtel-de-Ville, après le 18 mars. Le beau-père de Verlaine, fort mal disposé à son égard, reproduisit, dans sa déposition chez le commissaire, plusieurs articulations de faits de la demande en séparation de corps introduite par sa fille. Parmi celles-ci figurait l’imputation que l’on sait, concernant les mœurs de Verlaine et de Rimbaud.

Ces défavorables rapports servirent de prétexte à la justice belge pour retenir l’affaire, et pour transformer en procès correctionnel un délit de simple police. Aux termes de notre code, en vigueur en Belgique, puisqu’il n’y avait eu que des violences légères, n’ayant entraîné aucune incapacité de travail, l’infraction constatée, en y ajoutant le port d’armes prohibées, était susceptible seulement d’être punie des peines de simple police, amende et cinq jours de prison au maximum.

Cette exposition des faits qui ont motivé le renvoi de Verlaine devant le tribunal correctionnel de Bruxelles est corroborée par toutes les pièces au dossier.

Je détacherai les deux extraits suivants de « l’instruction suivie à la charge de Paul Verlaine, dossier no 148, de 1873, reposant au greffe de la Cour d’appel séant à Bruxelles », documents absolument inédits, qu’il m’a été difficile de me procurer, et dont l’authenticité est établie par le visa du greffier actuel ainsi conçu : « No 318. Copie du 19 août 1897, signé illisiblement. »

Voici d’abord la déposition d’Arthur Rimbaud devant le Juge d’instruction.

Déposition du témoin Rimbaud Arthur, en date du 12 juillet 1873.


J’ai fait, il y a deux ans environ, la connaissance de Verlaine à Paris. L’année dernière, à la suite de dissentiments avec sa femme et la famille de celle-ci, il me proposa d’aller avec lui à l’étranger ; nous devions gagner notre vie d’une manière ou d’autre, car moi je n’ai aucune fortune personnelle, et Verlaine n’a que le produit de son travail et quelque argent que lui donne sa mère ; nous sommes venus ensemble à Bruxelles au mois de juillet de l’année dernière, nous y avons séjourné pendant deux mois environ ; voyant qu’il n’y avait rien à faire pour nous dans cette ville, nous sommes allés à Londres. Nous y avons vécu ensemble jusque dans ces derniers temps, occupant le même logement et mettant tout en commun. À la suite d’une discussion que nous avons eue, au commencement de la semaine dernière, discussion née des reproches que je lui faisais sur son indolence et sa manière d’agir à l’égard des personnes de nos connaissances, Verlaine me quitta presque à l’improviste, sans même me faire connaître le lieu où il se rendait ; je supposai cependant qu’il se rendait à Bruxelles ou qu’il y passerait, car il avait pris le bateau d’Anvers ; je reçus ensuite de lui une lettre datée « en mer », que je vous remettrai, dans laquelle il m’annonçait qu’il allait rappeler sa femme auprès de lui, et que, si elle ne répondait pas à son appel, dans trois jours, il se tuerait ; il me disait aussi de lui écrire poste restante à Bruxelles ; je lui écrivis ensuite deux lettres, dans lesquelles je lui demandais de revenir à Londres ou de consentir à ce que j’allasse le rejoindre à Bruxelles ; c’est alors qu’il m’envoya un télégramme pour venir ici, à Bruxelles ; je désirais nous réunir de nouveau, parce que nous n’avions aucun motif de nous séparer.

Je quittai donc Londres, j’arrivai à Bruxelles mardi matin, et je rejoignis Verlaine ; sa mère était avec lui ; il n’avait aucun projet déterminé, il ne voulait pas rester à Bruxelles, parce qu’il craignait qu’il n’y eût rien à faire dans cette ville ; moi, de mon côté, je ne voulais pas consentir à retourner à Londres, comme il me le proposait, parce que notre départ devait avoir produit un trop fâcheux effet dans l’esprit de nos amis, et je résolus de retourner à Paris ; tantôt Verlaine manifestait l’intention de m’y accompagner, pour aller, comme il le disait, faire justice de sa femme et de ses beaux-parents ; tantôt il refusait de m’accompagner, parce que Paris lui rappelait de trop tristes souvenirs ; il était dans un état d’exaltation très grande ; cependant il insistait beaucoup auprès de moi pour que je restasse avec lui ; tantôt il était désespéré, tantôt il entrait en fureur ; il n’y avait aucune suite dans ses idées : mercredi soir, il but outre mesure et s’enivra. Jeudi matin, il sortit à six heures ; il ne rentra que vers midi, il était de nouveau en état d’ivresse ; il me montra un pistolet qu’il avait acheté, et, quand je lui demandai ce qu’il comptait en faire, il répondit en plaisantant : « C’est pour vous, pour moi, pour tout le monde ! » Il était fort surexcité.

Pendant que nous étions ensemble dans notre chambre, il descendit encore plusieurs fois pour boire des liqueurs ; il voulait toujours m’empêcher d’exécuter mon projet de retourner à Paris. Je restai inébranlable, je demandai même de l’argent à sa mère pour faire le voyage ; alors, à un moment donné, il ferma à clef la porte de la chambre donnant sur le palier, et il s’assit sur une chaise contre cette porte ; j’étais debout, adossé contre le mur d’en face ; il me dit alors : « Voilà pour toi, puisque tu pars ! » ou quelque chose dans ce sens ; il dirigea son pistolet sur moi et m’en lâcha un coup qui m’atteignit au poignet gauche ; le premier coup fut presque instantanément suivi d’un second, mais cette fois, l’arme n’était plus dirigée vers moi, mais abaissée vers le plancher.

Verlaine exprima immédiatement le plus vif désespoir de ce qu’il avait fait ; il se précipita dans la chambre contiguë, occupée par sa mère, et se jeta sur le lit ; il était comme fou, il me mit son pistolet entre les mains et m’engagea à le lui décharger sur la tempe ; son attitude était celle d’un profond regret de ce qui lui était arrivé ; vers cinq heures du soir, sa mère et lui me conduisirent ici pour me faire panser. Revenus à l’hôtel, Verlaine et sa mère me proposèrent de rester avec eux, pour me soigner, ou de retourner à l’hôpital jusqu’à guérison complète ; la blessure me paraissant peu grave, je manifestai l’intention de me rendre le soir même en France, à Charleville, auprès de ma mère. Cette nouvelle jeta Verlaine de nouveau dans le désespoir ; sa mère me remit 20 francs pour faire le voyage, et ils sortirent avec moi pour m’accompagner à la gare du Midi.

Verlaine était comme fou : il mit tout en œuvre pour me retenir ; d’autre part, il avait constamment, la main dans la poche de son habit, où était son pistolet. Arrivés à la place Rouppe, il nous devança de quelques pas, et puis, il revint sur moi ; son attitude me faisait craindre qu’il ne se livrât à de nouveaux excès ; je me retournai et je pris la fuite en courant ; c’est alors que je priai un agent de police de l’arrêter.

La balle, dont j’ai été atteint à la main, n’est pas encore extraite, le docteur d’ici m’a dit qu’elle ne pourrait l’être que dans deux ou trois jours.

D. — De quoi viviez-vous à Londres ?

R. — Principalement de l’argent que Mme Verlaine envoyait à son fils ; nous avions aussi des leçons de français que nous donnions ensemble, mais ces leçons ne nous rapportaient pas grand’chose, une douzaine de francs par semaine, vers la fin.

D. — Connaissez-vous le motif des dissentiments de Verlaine et de sa femme ?

R. — Verlaine ne voulait pas que sa femme continuât d’habiter chez son père.

D. — N’invoque-t-elle pas aussi comme grief votre intimité avec Verlaine ?

R. — Oui, elle nous accuse même de relations, mais je ne veux pas me donner la peine de démentir de pareilles calomnies.

Lecture faite, persiste et signe.

Signé : A. Rimbaud ; Th. Serstevens ; C. Ligour.


Le Tribunal correctionnel, malgré le peu de gravité de l’affaire, condamna l’accusé à deux ans de cellule et à 200 francs d’amende !

Dans son réquisitoire, le ministère public signala Verlaine comme français, comme communard et comme poète. Ces trois qualités ne furent pas étrangères à la sévérité de la condamnation.

Sur le conseil de son avocat, le condamné interjeta appel, mais en même temps le ministère public, trouvant encore la sentence trop douce, interjeta, de son côté, appel à minima.

Une nouvelle instruction eut lieu ; derechef le témoin Arthur Rimbaud fut entendu.

Voici sa seconde déposition :


Extrait du dossier de l’instruction suivie à charge de Verlaine Paul, dossier no 408 de 1873, reposant au greffe de la cour d’Appel, séant à Bruxelles.

L’an dix-huit cent septante-trois, le dix-huit juillet, à quatre heures après-midi.

Déposition du témoin Rimbaud (Arthur) :

— Je persiste dans les déclarations que je vous ai faites précédemment, c’est-à-dire qu’avant de me tirer un coup de revolver Verlaine avait fait toutes sortes d’instances auprès de moi pour me retenir avec lui ; il est vrai qu’à un certain moment il a manifesté l’intention de se rendre à Paris pour faire une tentative de réconciliation auprès de sa femme, et qu’il voulait m’empêcher de l’y accompagner ; mais il changeait d’idées à chaque instant ; il ne s’arrêtait à aucun projet : aussi je ne puis trouver aucun mobile sérieux à l’attentat qu’il a commis sur moi : du reste, sa raison était complètement égarée, il était en état d’ivresse, il avait bu dans la matinée, comme il a, du reste, l’habitude de le faire quand il est livré à lui-même.

On m’a extrait, hier, de la main la balle de revolver qui m’a blessé ; le médecin m’a dit que dans trois ou quatre jours ma blessure serait guérie.

Je compte retourner en France, chez ma mère, qui habite Charleville.

Lecture faite, persiste et signe :

Signé : A. Rimbaud ; Th. Serstevens ; C. Ligour.
Pour copie conforme :
(Signature illisible.)


La Cour maintint rigoureusement le premier jugement. Il faut toutefois lui savoir gré de ne pas avoir accueilli l’appel à minima de Monsieur le Procureur du Roi.

Voici le texte de l’arrêt de la Cour de Brabant du 27 août 1873 :


Extrait des minutes du greffe de la cour d’appel, séant à Bruxelles, no 408. — En cause de Paul Verlaine, prévenu appelant et intimé.

Contre le ministère public intimé et appelant.

Vu par la cour l’appel interjeté le 8 août 1873, par Paul Verlaine, âgé de vingt-neuf ans, homme de lettres, né à Metz, sans domicile en Belgique.

Vu également l’appel interjeté le même jour par Monsieur le Procureur du Roi de l’arrondissement de Bruxelles, du jugement rendu le 8 août 1873 par le tribunal de première instance de l’arrondissement de Bruxelles, lequel, jugeant en matière de police correctionnelle, condamne ledit Paul Verlaine à deux années d’emprisonnement et à deux cents francs d’amende, en outre, aux frais taxés à cinquante-huit francs quinze centimes ;

Prononce la confiscation de l’arme saisie ;

Dit qu’à défaut de paiement dans le délai légal l’amende pourra être remplacée par un emprisonnement de deux mois ;

Pour avoir, à Bruxelles, le 10 juillet 1873, volontairement porté des coups et fait des blessures ayant entraîné une incapacité de travail personnel à Arthur Rimbaud ;

Ouï le rapport fait à l’audience publique de ce jour par Monsieur le conseiller Eeckman ;

Entendu Monsieur Crets, substitut du procureur général, en son réquisitoire ;

Entendu le prévenu en ses moyens de défense, présentés par Monsieur Nélis ;

Attendu que le fait déclaré constant par le premier juge est resté établi devant la cour ;

Attendu que la peine prononcée est en rapport avec la gravité du délit ;

Par ces motifs :

Vu les articles visés au jugement dont appel,

La cour met au néant les appels du ministère public et du prévenu ;

Condamne le prévenu aux dépens d’appel, liquidés à trois francs soixante centimes ;

Ainsi jugé et prononcé en l’audience publique du vingt-sept août dix-huit cent septante-trois ; présents Messieurs : Hellveet faisant fonction de président ; Hippolyte Casier, Eeckman de Bavais, Le Court, conseillers ; Crets, substitut du procureur général, de Grevé, greffier, qui tous, sauf le substitut du procureur général, ont signé la minute du présent arrêt.

Pour copie conforme, etc…

Copie délivrée le 19 août 1897. No 118.

Signé [Illisiblement.]

Nous n’avons pas, à trente-trois ans de distance, à discuter la chose jugée. Verlaine a fait sa peine : sa prétendue victime, qui n’avait eu qu’une légère éraflure au poignet, est morte depuis. Le condamné a acquis l’amnistie de la gloire. On remarquera seulement que le texte de l’arrêt, reproduisant le jugement correctionnel, contient expressément la preuve que Verlaine a été condamné pour avoir, à Bruxelles, le 10 juillet 1873, « volontairement porté des coups et fait des blessures ayant entraîné une incapacité personnelle de travail à Arthur Rimbaud ». Rien de plus. Il est bien évident qu’avec l’hostilité que l’accusé avait rencontrée dans les autorités, avec le peu d’indulgence que lui témoignèrent les magistrats du Brabant, s’il y avait eu, dans le débat, la moindre preuve relative à des mœurs infâmes, si, comme la légende s’est perpétuée jusqu’à ce jour, Verlaine avait tiré le coup de revolver sur son ami dans une querelle passionnelle, à la suite d’une surexcitation de jalousie contre nature, les tribunaux belges n’eussent pas manqué de relever cette charge accablante, et d’appliquer à l’infamie de l’accusé toute la rigueur de considérants, ajoutant leur flétrissure à la sévérité de la condamnation.

On voit, par ces pièces authentiques, par tous les faits de la cause, que rien ne peut subsister de la calomnieuse aventure, qui a été colportée dans les milieux littéraires, reproduite dans de nombreux articles consacrés au poète Verlaine, et qui fait encore le fond de bien des appréciations malveillantes dans les conversations, où le nom et la personnalité de l’auteur des Romances sans paroles sont évoqués.

Le procès de Bruxelles établit nettement que Paul Verlaine a été condamné, avec une sévérité exceptionnelle, il est vrai, mais uniquement pour violences, coups et blessures, à la suite d’une querelle à laquelle la morale n’avait rien à reprendre. La qualité d’étranger, les allures bizarres, l’intempérance et l’irrégularité de vie du pauvre poète bohème, et aussi les rapports défavorables venus de France, d’après les renseignements recueillis de la façon signalée plus haut, expliquent l’impitoyable jugement et l’arrêt confirmatif.

Je rappellerai, bien que la publication de ces documents judiciaires mette à néant la légende immorale, que Verlaine, au moment du procès en séparation de corps engagé par sa femme, et pour réfuter l’odieuse imputation énoncée dans la procédure, me consulta, par une lettre qu’on a lue plus haut, sur le point suivant : il demandait si le tribunal de la Seine l’autoriserait, dans la contre-enquête qui lui était réservée, à se soumettre, ainsi que Rimbaud, à une expertise médicale. En termes énergiques, il m’informait qu’il était disposé, ainsi que Rimbaud, à fournir à l’homme de l’art toutes preuves physiques que ses relations incriminées avec son jeune ami n’avaient jamais eu le caractère homosexuel, que leur attribuait l’articulation de faits de la demanderesse. Je le dissuadai de recourir à cette visite médicale, que le jugement n’aurait pas autorisée, qui n’eût probablement pas désarmé la calomnie, et n’eût fait, sans apporter de conclusion probante, définitive et irréfutable, que greffer le ridicule sur le scandale. Cette demande d’expertise, sans importance décisive au point de vue physiologique, prouvait seulement la bonne foi de l’incriminé, et sa sécurité quant à une démonstration anatomique, qu’il supposait, d’ailleurs à tort, être péremptoire.

Bien qu’il ait été fait mention, au procès de séparation de corps, devant le tribunal de la Seine, de cette imputation, appuyée surtout par des commérages littéraires, des cancans de servantes et de fournisseurs du quartier Clignancourt, et quoiqu’il en ait été même question dans les rapports de police, le silence des magistrats belges suffirait à prouver qu’il n’y a pas lieu de la tenir pour sérieuse et démontrée. De cette accusation, la mémoire du poète doit par conséquent être allégée.

L’allégation, sans preuves, d’une femme désireuse d’obtenir un jugement de séparation, et des potins, plus malicieux que malveillants au fond, car dans les milieux de poètes, d’artistes, de journalistes, on propageait cette médisance, sans y attacher plus d’importance qu’à une formule de débinage professionnel et de blague courante, ne doivent pas être retenus comme des faits exacts et vérifiés. Il était bon, pour obéir au cher mort, qui me l’avait expressément recommandé, de détruire cette légende scandaleuse. J’exécute sa constante et suprême volonté, en m’efforçant de faire toute la lumière sur ces obscurités de la vie glorieuse et désespérée de l’auteur de Sagesse.