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QUATRIÈME SECTION


des caractères nationaux (1), dans leurs rapports avec les divers sentiments du sublime et du beau.


Les italiens et les Français se distinguent surtout, selon moi, entre tous les autres peuples de l’Europe, par le sentiment du beau ; les_Allemands, les Anglais et les Espagnols, par celui du sublime. Quant à la Hollande, c’est un pays où ces sentiments délicats se font peu remarquer. Le beau lui-même est ravissant et nous touche, ou bien il est riant et nous charme. La première espèce de beau a quelque chose du sublime, et l’esprit dans le sentiment qu’il en a, est pensif et ravi ; dans le

(1) Mon but n’es( nullei_nen ~de peindre enli~rement les ~aractères dê ! l » l1âllons, mais seuWmentd’M4flll&ser qllélques a-ails qui expl’imént l~H ~1sent ! m~nts, è..’~gard d~ ; subl}me et· dp.be.~l-’~ e~f ~s~1tlJ1 voir qu1il ne faut pas exiger d’une esquisse de ce genre une parlaité exaotltude, que Dl » *& ne ehèrcholls : nohnllldàles’quo dans. la foule des indi, vidus qui <>n, t ·des. rrélt ; ut~ons.à_ q~~ seq.Ji~ !’! lls pl’5 délicats·, et qu’il n’y a point de nations oû on ne trouve des individus qui réunissent tes plus.exdUentes qualills dé · cette.itspèce. C’est pourquai une critjque qui tomb_e par hasard sur un peup, le ne doit blesser ·personne, car chacun peut renvoyer la balle à son voisin. Quant à la qÙestion de· satuir si cœ ·dlfféreJ1ces qui sépareat lœ nations sont accideo&elles et dépendeat des circonstances et des différentes sortes de gouvernement ; ou si ·elles so·~t nécessairement auacb霒au : œiaal1, jt.1n’: a1-point ·kJJ : il.’1111, occuper ici,… ·, •. : Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/312 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/313 voyance. Rien ne peut être plus opposé aux arts et aux sciences qu’un goût extravaguant, car celui-ci pervertit la nature qui est le type de tout ce qui est beau et noble : aussi la nation espagnole montre-t-elle peu de goût pour les beaux-arts et les sciences.

Les caractères des nations se reconnaissent surtout dans leurs qualités morales ; c’est pourquoi nous allons examiner, de ce point de vue, leurs divers sentiments relativement au sublime et au beau (1)[1].

L’Espagnol est sérieux, discret et véridique. Il y a dans le monde peu de négociants plus honnêtes que ceux d’Espagne. Il a une âme. fière et préfère les belles actions aux grandes. Comme dans la composition de son caractère on trouve peu de douceur et de bienveillance, il est souvent dur et même cruel. L’auto-da-fé n’est pas tant soutenu par la superstition que par le goût extravagant de la nation, que frappe de respect et de terreur le spectacle des malheureux couverts des figures diaboliques du san benito et livrés aux flammes qu’alluma une piété barbare. On ne peut pas dire que les Espagnols soient plus magnanimes ou plus amoureux. Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/315 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/316 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/317 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/318 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/319 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/320 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/321 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/322 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/323 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/324 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/325 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/326 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/327 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/328 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/329 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/330 Page:Kant - Critique du jugement, trad. Barni, tome second.djvu/331 temps, la religion, ainsi que les sciences et les mœurs, furent souillées par de misérables sottises, car on remarque que le goût ne dégénère pas ordinairement en un point, sans que tout ce qui est du ressort de nos sentiments délicats montre des traces évidentes de cette décadence. Les vœux des cloîtres transformèrent une foule d’hommes utiles en de nombreuses sociétés d’oisifs laborieux, que leur genre de vie rendait propres à inventer ces mille sottises scolastiques qui de là se répandirent dans le monde et s’y accréditèrent. Enfin, maintenant que, par une sorte de palingénésie, le genre humain s’est heureusement relevé d’une ruine presque entière, nous voyons fleurir de nos jours le goût du beau et du noble aussi bien dans les arts que dans les sciences et dans les mœurs, et il n’y a plus rien à souhaiter, sinon que le faux éclat, qui trompe si aisément, ne nous éloigne pas à notre insu de la noble simplicité, et surtout que les vieux préjugés n’étouffent pas toujours le secret encore inconnu de cette éducation qui consisterait à exciter de bonne heure le sentiment moral dans le sein de tout jeune citoyen du monde, afin que toute la délicatesse de son esprit ne se borne pas au plaisir oiseux et fugitif de juger avec plus ou moins de goût ce qui se passe autour de nous.


FIN DU TOME SECOND.




Notes de Kant modifier

  1. (1) Il est à peine nécessaire de renouveler ma précédente justification. La partie distinguée de chaque peuple présente des caractères dignes d’éloges dans tous les genres, et celui sur qui tombe tel ou tel reproche, s’il est assez fin pour bien entendre son intérêt, saura s’excepter lui-même et abandonner les autres à leur sort.

Notes du traducteur modifier