Traduction par Jules Barni.
Librairie philosophique de Ladrange (IIp. 56-58).


§. LXX.


Préparation à la solution de la précédente antinomie.


Nous ne pouvons démontrer l’impossibilité de la production des êtres organisés par un simple mécanisme de la nature, car nous ne pouvons apercevoir dans leur premier principe interne l’infinie variété des lois particulières de la nature, et, par conséquent, nous sommes absolument incapables d’atteindre le principe interne, et suffisant à tout, de la possibilité d’une nature (lequel réside dans le supra-sensible). qu’on né demande donc pas si la puissance productrice de la nature ne suffit pas aux choses dont nous jugeons la forme ou la liaison d’après l’idée de fins, tout aussi bien qu’à celles pour lesquelles nous croyons pouvoir nous contenter d’un simple mécanisme, et si, en réalité, les choses que nous considérons comme de véritables fins de la nature (que nous devons nécessairement juger ainsi) ont pour principe une espèce toute particulière de causalité originelle, qui ne peut être contenue dans la nature matérielle ou dans son substratum intelligible, à savoir un entendement architectonique ; car ce sont là des questions sur lesquelles nous ne pouvons trouver aucun éclaircissement dans notre raison, que nous trouvons très bornée à l'endroit du concept de la causalité, quand il s’agit de le spécifier a priori. - Mais ce qu’il y a d’indubitablement certain, c’est que, au regard de notre faculté de connaître, le simple mécanisme de la nature ne peut suffire à expliquer la production d’êtres organisés. C’est donc un véritable principe pour le Jugement réfléchissant de concevoir, pour s’expliquer cette liaison de causes finales, qui est si manifeste en certaines choses, une causalité différente du mécanisme, à savoir celle d’une cause du monde agissant d’après des fins (intelligente), si téméraire et si indémontrable que soit ce principe pour le Jugement déterminant. Ce principe n’est donc qu’une maxime du Jugement, dans laquelle le concept de cette causalité est une pure idée à laquelle on ne prétend nullement attribuer de la réalité, mais dont on se sert comme d’un fil conducteur pour la réflexion, qui reste toujours ouverte à toute explication mécanique et ne sort pas du monde sensible ; dans le second cas, ce serait un principe objectif, que la raison prescrirait et au quel se soumettrait le Jugement déterminant, et, dans ce cas, celui-ci passerait du monde sensible dans le transcendant, peut-être pour s’y perdre.

L’apparence d’une antinomie entre les maximes de l’explication proprement physique (mécanique) et de l’explication téléologique (technique) repose donc tout entière sur la confusion d’un principe du Jugement réfléchissant avec un principe du Jugement déterminant, et de l’autonomie du premier (qui n’a qu’une valeur subjective, ou qui n’a de valeur que pour l’usage de notre raison relativement aux lois particulières de l’expérience) avec l’hétéronomie du second, qui doit se régler sur les lois (générales ou particulières) données par l’entendement.


§. LXXI.


Des divers systèmes sur la finalité de la nature.


Personne n’a jamais mis en doute la vérité de ce principe qu’il faudrait juger certaines choses de la nature (les êtres organisés) et leur possibilité d’après le concept des causes finales, alors même que nous ne voudrions qu’un fil conducteur pour apprendre à connaître leur manière d’être par l’observation, sans nous élever jusqu’à la recherche de leur première origine. Toute la question


Notes de Kant modifier


Notes du traducteur modifier