Cours d’agriculture (Rozier)/ALBUGO (supplément)


ALBUGO, Leucoma, (Art vétérinaire,) maladie des animaux, consistant dans une tache blanche occupant une partie de la cornée transparente. Cette tache est à peu près ronde, et a depuis une ligne (deux millimètres) jusqu’à quatre à cinq lignes (dix millimètres) de diamètre : quelquefois elle couvre entièrement la cornée dans ses commencemens. Elle est assez constamment produite par une pustule qui s’établit dans l’intérieur des lames de la cornée ; lorsqu’elle est mûre, elle s’ouvre dans son centre, suppure légèrement et forme une cavité. La cicatrice s’opère alors, mais la tache blanche, ou albugo, dure plus ou moins long-temps, et quelquefois ne se dissipe jamais. Cette pustule est très-douloureuse dans ses progrès, et pendant toute son existence l’œil est enflammé, larmoyant ; il survient de la tristesse et du dégoût, principalement s’il y a constipation, signe indicateur de la sécheresse et de la souffrance des entrailles. Une température long-temps chaude et sèche, des rayons brûlans du soleil, en offensant particulièrement les yeux, occasionnent cette maladie, qui devient ordinairement épizootique, (voyez ce mot) par la réunion des causes internes et externes que nous venons d’indiquer. Les vaches en sont plus fréquemment affectées que les autres bestiaux. Renfermées, chez un grand nombre de fermiers, dans des étables obscures peu aérées, jusqu’après la récolte des foins, la vive lumière dont elles sont frappées tout à coup au moment où on les conduit dans les champs, les rend très-susceptibles de prendre cette maladie, à laquelle elles sont fort sujettes, lorsqu’on les conduit dans les pâturages, pendant toute l’année. Il en est de même des moutons, qui respirent toujours l’air libre, et font beaucoup d’exercice.

L’albugo produite par des piqûres ou des coups, est simple, et rarement suivie d’accidens graves ; mais quand elle est épizootique, elle produit souvent la cécité, et quelquefois la perte du sujet, parce qu’il s’y joint aussi des maladies plus dangereuses, telles que le charbon, la dyssenterie. (Voyez ces mots.) Le moyen le plus certain de garantir les animaux des atteintes de l’albugo, dans les années sèches et chaudes, est de ne jamais les laisser manquer de bonne eau, de leur fournir du meilleur fourrage possible, et de suppléer à l’herbe verte, par des betteraves, des topinambours, des turneps et du son mouillé. Il faudra aussi procurer aux bestiaux des abris commodes, où ils puissent respirer le frais. Les lavemens mucilagineux, et les breuvages don nés en grande quantité, débarrassent le ventre dans l’invasion et les progrès de cette maladie : la saignée et les sétons conviennent, si elle est opiniâtre, et a une tendance vers la malignité. (Voyez Mucilagineux, Saignée et Charbon.)

La cure de la tache en elle-même est simple ; on doit bassiner l’œil malade, avec une éponge ou un chiffon imbibé d’eau tiède, aiguisée d’un peu d’eau-de-vie ; on peut tenir sur cette partie, des compresses trempées dans cette liqueur, mais elles doivent être très-légères, car si elles étoient pesantes, elles augmenteroient la douleur, loin de la calmer. Ces derniers remèdes suffisent, avec la saignée et les émolliens, dans l’albugo produite par des causes locales. Si la tache n’est que dans les lames externes de la cornée, et que l’albugo ne soit point compliquée d’autres maladies, elle se dissipe plus facilement, et la circonférence de la tache diminue peu à peu. Les moyens préservatifs sont les seuls, ou presque les seuls à employer dans l’albugo épizootique. (Ch. et Fr.)