Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8560

8560. — DU CARDINAL DE BERNIS[1]
Rome, le …

Je ne suis pas trop excusable, mon cher confrère, de n’avoir pas répondu sur-le-champ à votre lettre du mois de mai dernier. La Bégueule est fort jolie. Le jeune abbé qui l’a faite a bien profité des leçons de son maître. C’est le seul de vos imitateurs qui ait bien saisi les grâces de votre style. Faites beaucoup d’élèves comme celui-là. Si on retranchait du petit conte quelques expressions un peu trop vives pour un abbé, je n’aurais guère lu de vers plus agréables ni plus philosophiques. Ma nièce, qui avait de la disposition à s’ennuyer aisément, a lu votre conte chevaleresque ; elle a été sur-le-champ convertie. Continuez, mon confrère, à faire honneur aux lettres et à votre patrie. Éclairez les hommes en leur apprenant à respecter un frein nécessaire à toute société. Triomphez encore longtemps de la mort et de l’envie, et aimez toujours le plus sincère de vos admirateurs.

  1. Réponse à la lettre du 2 mai, No 8533.