Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8482

Correspondance : année 1772GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 31-32).
8482. — DU CARDINAL DE BERNIS.
À Rome, le 25 février.

J’aurais fort désiré, mon cher confrère, de rendre service à M. de Florian, qui est allié de mon beau-frère, et votre parent ; mais l’affaire ne peut réussir, elle ne peut pas même être proposée ici.

J’aime beaucoup mieux en effet le séjour de Rome, où l’on n’ose pas m’inquiéter, que celui de Versailles, où je ne serais pas tranquille. Mon étoile (si étoile il y a) est singulière, mais elle n’est pas malheureuse. Vous vous souvenez que je dis au cardinal de Fleury : J’attendrai. Ce mot explique la conduite de toute ma vie. C’est parce que j’ai eu de la patience [1] et de la modération que j’ai souvent réussi, et que je vis heureux et tranquille. Quoique votre santé soit délicate et que vous en ayez quelquefois abusé, j’espère que vous vivrez autant que Fontenelle, et cela est bien juste. Vous jouissez de votre réputation et de vous-même ; vous rendez heureux ceux qui vous environnent, après avoir illustré votre siècle. Vivez donc cent ans sans radoter, et aimez toujours le plus fidèle de vos serviteurs et le plus sincère de vos admirateurs.

  1. Vers 109 de la satire intitulée le Père Nicodème et Jeannot, tome X.