Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6227

Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 175-176).

6227. — À M.  LE MARQUIS ALBERGATI CAPACELLI[1].
Ferney, 10 janvier.

Les hivers me sont toujours funestes, monsieur ; qui souffre ne peut guère écrire. Je vous dis bien rarement combien je m’intéresse à vous, à vos plaisirs, à vos goûts, à vos peines, à tous vos sentiments.

Je reçus, ces jours passés, la traduction de la Mort de César et de Mahomet, par M.  Cesarotti. Je ne sais si je tiens ce présent de vos bontés ou des siennes. Je lui écris à Venise, chez son libraire Pasquali. Je m’imagine que, par cette voie, il recevra sûrement ma lettre.

Il y a un philosophe naturaliste[2], que je crois de Toscane, qui m’envoya, il y a quelques mois, un recueil d’observations faites avec le microscope ; il y combat les erreurs insensées d’un Irlandais nommé Needham, avec toute la politesse d’un homme supérieur qui a raison. J’ai malheureusement perdu la lettre dont ce philosophe aimable m’honora. Peut-être son livre sera parvenu jusqu’à vous, monsieur, quoiqu’il me semble que votre goût ne se tourne pas du côté de ces petites recherches. Mais si vous pouvez savoir, par quelqu’un de vos académiciens, le nom de cet ingénieux observateur, je vous supplie de vouloir bien m’en instruire, afin que je n’aie pas à me reprocher d’avoir manqué de politesse envers un homme qui m’a fait tant de plaisir.

Adieu, monsieur ; nous sommes transis de froid, et je suis actuellement en Sibérie.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Spallanzani.