Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5670


5670. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 11 juin.

Je me flatte que mes anges voudront bien faire payer à la mémoire de M. le comte Algarotti le petit tribut ci-joint[1].

Est-il vrai qu’on va jouer Cromwell, et que c’est le Cromwell de Crébillon[2], achevé par un M. du Clairon ? Si on fait parler ce héros du fanatisme comme il parlait, ce sera un beau galimatias, mais c’est avec du galimatias qu’il parvint à gouverner l’Angleterre, et c’est ainsi qu’on a quelquefois subjugué le parterre.

Voilà donc l’arrêt des juges de Toulouse cassé ; mais les os du pauvre Calas ne seront pas raccommodés. Qu’obtiendra-t-on en suivant ce procès ? Les juges de Toulouse seront-ils condamnés à payer les frais de leur injustice ?

Je baise le bout des ailes de mes anges en toute humilité.

  1. Voyez tome XXV, page 195.
  2. La tragédie de Cromwell, représentée le 7 juin 1764, n’était pas de Crébillon, mais d’Antoine Maillet du Clairon, mort en 1809.