Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1696

Louis Conard (Volume 8p. 63-64).

1696. À SA NIÈCE CAROLINE.
Saint-Gratien, mercredi [29 août 1877].
Mon loulou,

Tu es une femme héroïque. Ton départ de Croisset, malgré la migraine, peut faire partie des « Beautés de l’histoire de France ! » Je crois du reste t’avoir exprimé mon admiration dans ma dernière lettre de Croisset, en réponse à ton télégramme dont je te remercie derechef.

Ici, chez la bonne Princesse, je me repose profondément, car je ne fais rien, absolument rien ! Je me couche tôt pour me lever tard, et dans l’après-midi je pique de forts chiens sur mon divan. Je lis çà et là un livre pour me distraire, ce qui me fait oublier momentanément Bouvard et Pécuchet. Puis, à 4 heures, on fait un tour de promenade, en voiture ou en bateau. Mes compagnons sont les mêmes que d’habitude.

J’ai déjeuné samedi avec le Moscove. Nous nous reverrons vendredi. Le jeune Guy, mon disciple, est en Suisse. Pourquoi ? Je l’ignore.

Je ne vois absolument rien à te dire, ma pauvre fille, car je me sens stupide. Après ton départ je me suis ennuyé à crever, tant je regrettais ta gentille compagnie, et il me tardait d’être parti, n’ayant plus rien à faire […]

Ici il a fait depuis deux jours des chaleurs excessives et des clairs de lune admirables, bien qu’ils ne valent pas ceux qui brillent sur la rivière au vieux Croisset. Croirais-tu qu’il me tarde d’y être revenu et de revoir et d’embrasser ma chère Caro ?

Ton vieux vieillard de Cro-Magnon.

Qu’Ernest se surbaigne ! Et qu’il n’escamote pas de saison. Je désapprouve les 21 bains. — 30 est le chiffre.