Correspondance 1812-1876, 6/1873/CMVII


Texte établi par Calmann-Lévy,  (Correspondance Tome 6 : 1870-1876p. 304-305).


CMVII

À SON ALTESSE LE PRINCE NAPOLÉON (JÉRÔME),
À PARIS


Nohant, 30 décembre 1873.


Cher grand ami,

Je veux être des premiers à vous souhaiter la classique bonne année, d’un cœur classique aussi dans la fidélité de ses affections. Je ne sais pas où vous êtes pour le moment. Quand on s’éternise comme nous à la campagne, on écrit de moins en moins et on ne reçoit presque plus de lettres.

Les journaux ne disent plus un mot de vrai. J’ai pourtant su par nos amis que vous étiez à Paris dernièrement. Y passerez-vous l’hiver ? Aurai-je la bonne chance de vous y trouver, quand je pourrai y aller, c’est-à-dire quand le temps des grandes gelées sera passé ? Je ne peux plus guère les supporter hors de mon nid ; car voilà mon soixante-dixième printemps qui s’approche.

Dans cette sotte et vilaine politique, je n’ai eu à me réjouir que d’un fait. La liberté qui vous a été laissée de vivre où bon vous semble. Donc, nous n’attendrons pas des siècles pour vous revoir soit à Paris, soit à Nohant, qui est toujours plein de votre souvenir et où vous avez une grande filleule de huit ans, bonne, charmante de caractère et très intelligente, qui n’a rien oublié de vous.

Maurice, ma belle-fille, me chargent de les rappeler à vous et de joindre leurs vœux aux miens.

À vous toujours, cher ami.

G. SAND.