Contes du Sénégal et du Niger/Chapitre 31

Ernest Leroux (p. 191-192).


LA FEMME AMIE DE LA GENNIA


Une femme des Touareg était dans la brousse quand elle aperçut un foutounkrou[1] elle ramassa une pierre pour la lui jeter, mais la bête lui cria : « Ne me blesse pas, je suis une femme comme toi ». La Targuiat s’approcha et elles causèrent. La bête lui dit : « Je suis la femme d’un djinn[2] et je demeure près d’ici quand je serai sur le point d’accoucher, veux-tu venir m’assister ? ». « Volontiers, répondit la femme, mais il faudra m’envoyer chercher, car je ne sais où est ton campement ». La gennia accepta et, le moment venu, envoya chercher son amie par un djinn qui se transforma en chien et attendit que la femme fut sortie de sa tente. Alors il se changea en enfant et lui fit la commission. La femme lui répondit : « Allons ». Et ils partirent.

À un endroit dans la montagne, ils rencontrent un djinn monté sur un chameau qui dit à la femme : « N’aie pas peur : je suis le mari de ton amie et je suis venu te chercher ». Il la prit en croupe, et ils partirent.

Arrivés à un trou dans la montagne, le djinn dit à la Targuiat : « Ferme les yeux » Ils marchèrent quelque temps, puis il lui dit : « Ouvre les yeux ! » Elle se trouva dans le pays des djinn, où ils étaient nombreux avec leur bétail, qui étaient sans têtes comme eux.

La femme fut trouver son amie et l’aida à mettre au monde sept enfants qui, sitôt nés, coururent se laver eux-mêmes et ceindre une peau de chèvre. Après bien des réjouissances, la femme s’en retourna chez elle ; le mari de son amie lui fit présent de bœufs, de vaches et de chameaux ; il la reconduisit comme à l’aller, et elle arriva chez elle : mais en voyant tout ce bétail sans tête, les Touareg s’enfuirent épouvantés. Elle courut après et les rassura[3].

  1. Hyrax : Koulibali en bambara.
  2. Alzein — djinn ; talzeint — gennia.
  3. Les Touareg ignorent ce qu’est devenu ce bétail sans tête.