Contes d’un buveur de bière/La Chandelle des Rois

Librairie internationale (p. 245-277).

La Chandelle des rois




i



u temps jadis, du côté de Douai, près du village de Lécluse, sur le haut de la colline où se voit l’énorme bloc de grès que les gens du pays appellent la Pierre du Diable, vivait un gros fermier nommé Antoine Wilbaux, qui tenait à cense la moitié des terres d’alentour.

Une année que la moisson avait été magnifique, il advint que, la veille du jour où l’on devait la rentrer, le feu prit dans la grange du censier, la plus belle qu’il y eût à sept lieues à la ronde. Elle fut entièrement brûlée avec les seigles & les foins qu’elle contenait.

La ferme d’Antoine étant isolée, il ne pouvait recourir aux granges de ses voisins. Il se voyait forcé de laisser sa récolte couchée sur les champs, car, en ce temps-là, on n’avait point encore inventé de mettre les épis en moyettes.

Or, le véritable Matthieu Laensberg avait prédit pour cette époque une pleine semaine de pluie.

Dans cette extrémité, Wilbaux eut l’idée d’aller, le soir même, consulter un sien frère qui demeurait à Hendécourt, à environ deux lieues de là.

Arrivé à l’endroit où le chemin coupe la grande route d’Arras, il vit tout à coup devant lui un homme vêtu d’un manteau brun, l’épée au côté & le chapeau orné d’une plume rouge.

« Où vas-tu, compère ? dit l’inconnu.

— Que vous importe ? répondit le censier, qui n’était point en humeur de causer.

— Il t’importe, à toi, que je le sache, car moi seul puis te sauver de la ruine. »

Wilbaux se trouvait fort en retard dans ses payements & il s’agissait, en effet, pour lui d’une ruine complète. Il s’aperçut que l’étranger n’avait point de blanc dans les yeux.

Les deux globes en étaient si complètement noirs, qu’ils semblaient avoir été taillés dans une gaillette de houille. À cette marque il reconnut Belzébuth.

« Et comment me sauverez-vous ? demanda-t-il.

— En rétablissant ta grange.

— Avec tout ce qu’elle contenait ?

— Avec tout son contenu.

— Mais quand ?

— Cette nuit même.

Antoine hésita quelques secondes, puis, prenant son parti :

« J’accepte, dit-il.

— En ce cas, mon compère, signe ceci. »

Et Belzébuth présenta au fermier une plume & un morceau de parchemin vierge, couvert de figures cabaliſtiques.

« Que signifient ces caractères ? demanda Wilbaux.

— Ils signifient que tu seras à moi, corps & âme, dans cinquante ans, si, au chant du coq, j’ai remis ta grange en son premier état. »

Antoine se piqua le doigt & signa d’une goutte de son sang. L’Esprit malin disparut.

De retour chez lui, le fermier ne voulut ni souper, ni se coucher. Il ne dit pas un mot à sa femme, & ne fit que sortir, rentrer & ressortir durant toute la nuit.

Inquiète de ce manége, celle-ci finit par suivre son mari, &, du seuil de la porte, elle vit un spectacle étrange.

Une foule de petites créatures au visage couleur de feu, aux doigts crochus, aux pieds de bouc, travaillaient en silence à rebâtir la grange.

« Qu’eſt-ce que cela ? Seigneur Jésus ! dit en tremblant la censière.

— Cela, ma pauvre Françoise, répondit Antoine, c’eſt notre salut en ce monde & ma perte éternelle dans l’autre ! »

Et il lui avoua tout.

Françoise était une femme sensée & craignant Dieu. Elle rentra sur-le-champ dans sa chambre, se jeta à genoux, & demanda au ciel avec ferveur un moyen de sauver son mari.

Elle se releva la figure rayonnante, saisit la boîte au brûlin, battit le briquet & enflamma le vieux linge à demi consumé.

Elle prit ensuite une de ces longues allumettes de chanvre soufré qu’on appelle chez nous des buhottes, puis la grosse chandelle de cire bariolée que le chandelier lui avait donnée le jour des Rois.

Munie de ces objets, elle traversa la cour & s’en fut au poulailler.

La grange était presque reconſtruite. Les couvreurs atteignaient le faîte.

Tout à coup une vive lumière inonde le poulailler, & Chanteclair, croyant voir paraître le jour, crie à plein gosier : Coquerico !

Aussitôt les diables de décamper en se culbutant, comme une volée d’oisillons surpris par le faucheur. C’eſt en vain que Belzébuth, qui posait les dernières tuiles, voulut retenir ses hommes. De rage, il lança au loin la coupette du pignon & s’enfuit en blasphémant.

Le lendemain, chose étrange ! au lieu d’un simple grès, on trouva dans le champ voisin une énorme pierre, longue d’environ trente pieds, large de six, épaisse de deux, & qui avait pénétré dans le sol à une toise & demie de profondeur.

La ferme de Wilbaux n’exiſte plus depuis longtemps, mais la pierre du diable eſt toujours à la même place, &, sur la face qui regarde le Hamel, on remarque trois petites rigoles qui sont, dit-on, la trace des griffes de Belzébuth.

Antoine rentra sa récolte & essaya d’achever sa grange, mais vainement. Les tuiles tombaient durant la nuit, & le trou reſtait toujours béant.

Cependant, les jours pluvieux qu’avait prédits le Double Liégeois arrivèrent à point nommé.

L’eau du ciel, entrant dans la grange comme l’âne au moulin, pourrit la récolte, & le censier se trouva encore plus réus, je veux dire encore plus embarrassé qu’auparavant.

ii


Une nuit qu’il pleuvait à verse, Wilbaux, sans en rien dire à sa femme, retourna à la place où il avait rencontré Belzébuth ; mais bien qu’il fît un temps de tous les diables, le nôtre ne s’y promenait point.

Antoine résolut alors de l’obliger à paraître, &, pour cela, il eut recours à la toute-puissante cabale de la Noire Glaine, selon qu’elle eſt enseignée dans le Véritable Dragon rouge, ou l’Art de commander aux esprits céleſtes, terreſtres & infernaux.

Il alla, à onze heures du soir, chercher une jeune glaine, — comme qui dirait une poulette, — noire & qui n’avait jamais pondu ; il eut soin de la prendre par le cou, sans la faire crier ; il se rendit ensuite à l’endroit où les deux routes se croisent.

Là, à minuit sonnant, il traça un rond avec une baguette de cyprès, se mit au milieu, & fendit la bête en deux, en répétant par trois fois : « Eloïm ! Essaïm ! »

Une flamme sortit de terre & Belzébuth parut.

« Que me veux-tu ? dit-il.

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— Je veux faire un pacte avec toi.

— Ah ! ah ! mon gaillard. Tu croyais donc que le diable était homme à se laisser berner par un lourdaud de paysan.

— Ce n’eſt point moi, c’eſt ma femme…

— Suffit. Que désires-tu ?

— Que tu me permettes d’achever ton œuvre.

— J’y consens à une condition, c’eſt que tu m’abandonneras l’enfant que ta femme va te donner.

— Non… pas l’âme de mon enfant… la mienne !

— La tienne ! je ne suis mie en peine de l’avoir. C’eſt ta fille qu’il me faut. D’ailleurs elle n’y perdra rien. J’en ferai une princesse. »

Wilbaux résiſta longtemps, mais effrayé par l’idée de se voir, ainsi que sa femme, réduit à mendier son pain, il finit par consentir.

« Va terminer ta grange, lui dit alors Belzébuth, &, dans trois mois, songe à tenir ta parole. »

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III


Trois mois après, par un soir de novembre, Antoine fumait sa pipe à la lueur du feu. Les pommes de terre chantaient sur le gril, & Françoise fredonnait do, do, Ninette, à une ravissante petite fille qui riait aux anges dans son berceau.

Au dehors, la neige tourbillonnait & le vent hurbêlait. Tout à coup une voix plaintive s’éleva derrière la porte.

« Bonnes gens, ouvrez au pauvre pèlerin.

— N’ouvre point ! cria Antoine, qui tressaillit à cette voix.

— Oh ! pourquoi ? Il fait si mauvais dehors ! »

Et Françoise alluma la chandelle des Rois, qui se trouvait sur la cheminée, puis alla ouvrir, en disant :

« Entrez, l’homme de Dieu. »

Alors parut sur le seuil un homme vêtu d’un froc de laine semé de coquillages, coiffé d’un chapeau à larges bords, l’escarcelle au côté, la besace au dos, la gourde à l’épaule & le bourdon à la main.

L’étranger portait le pieux coſtume des pèlerins, mais loin de paraître humble & contrit, il promenait par la chambre un regard dur & insolent. Ses yeux, semblables à deux boules de jais, lançaient des flammes.

« Arrière, Satan ! lui cria Wilbaux, en s’élançant à sa rencontre.

— Ah ! l’honnête homme ! ricana Belzébuth, car c’était lui. Eſt-ce donc ainsi que tu tiens ta promesse ?

— Que voulez-vous ? demanda Françoise qui commençait à trembler.

— Je veux cette enfant qui m’appartient.

— Ma fille !… »

Et la mère s’élança vers le berceau.

« Censier, dit Belzébuth, commande à ta femme de reſter coite, sinon… »

Antoine garda le silence, & Françoise, les yeux étincelants, se tint devant sa fille, comme une lionne protégeant son lionceau.

« Eſt-il vrai, demanda le Maudit, que tu as promis de me donner ta fille si je te laissais achever ta grange ?

— C’eſt vrai, répondit Wilbaux d’une voix étouffée.

— Mais je n’ai rien promis, moi ! dit Françoise, & l’enfant eſt à la mère comme au père.

— L’homme eſt le maître, répliqua Belzébuth. Dépêchons, je suis pressé. »

Et il fit un pas en avant.

Françoise vit que toute résiſtance était inutile.

« Oh ! par pitié ! s’écria-t-elle en joignant les mains, laissez-moi mon enfant !

— Non.

— Rien que jusqu’à demain.

— Non.

— Inspire-moi, Seigneur ! » dit tout bas la pauvre mère.

Puis, avisant la chandelle des Rois, elle reprit, frappée d’une idée subite :

« Donnez-moi, du moins, le temps de l’embrasser une dernière fois… seulement jusqu’à ce que cette chandelle soit entièrement consumée !…

— Soit ! » fit Belzébuth, qui, n’étant pas bien sûr de son droit, jugeait prudent de transiger.

Il prit une chaise, s’assit auprès du feu & se mit à bourrer sa pipe.

Soudain Françoise éteignit la chandelle, l’enferma dans le dressoir & en retira la clef.

De colère, Belzébuth cassa sa pipe & se leva en disant :

« Femme, je t’apprendrai à vouloir ruser avec le diable ! C’eſt ta fille qui, malgré toi, achèvera de brûler cette chandelle.

— Je saurai bien la détruire avant qu’on l’allume, répondit Françoise enhardie.

— Ne t’en avise point, répliqua Belzébuth. Ta fille mourrait sur l’heure !

Et il disparut, ne doutant point qu’après avoir séduit Ève, il n’eût facilement raison d’une de ses arrière-petites-filles.

IV


Le lendemain on baptisa l’enfant & on lui donna le nom de Gillette. Gillette grandit sans qu’on eût, durant plusieurs années, aucune nouvelle de Belzébuth.

Elle était fort jolie, mais capricieuse comme une biquette & aussi étourdie que le premier coup de matines, — un vrai passe-diable, ainsi que l’appelaient les gens de Lécluse.

Vers l’âge de sept ans, il lui arriva une aventure extraordinaire. Comme elle allait toujours courant, sautant & furetant, elle avait quelquefois vu, cachée au fond du dressoir, sous des piles de serviettes, une sorte de boîte oblongue.

Gillette n’avait point manqué de demander ce qu’elle contenait : chaque fois il lui avait été répondu que cela ne regardait point les enfants. Sa curiosité n’en était que plus éveillée.

Un jour qu’on la laissa seule à la maison, elle trouva une petite clef. Elle courut tout de suite au dressoir, ouvrit la boîte, y vit un étui d’érable, & dans l’étui une grosse chandelle des Rois.

Cette chandelle devait être là depuis longtemps, car la cire en était toute jaune. Gillette l’alluma. Soudain parut un personnage vêtu d’un manteau écarlate, avec une plume couleur de feu à son chapeau.

« Maman ! cria l’enfant épouvantée.

— N’aie point peur. Je suis ton ami, lui dit l’étranger en adoucissant sa voix. Que veux-tu que ton bon ami te donne ? Veux-tu des joujoux ?

— Oui, des joujoux ! » fit Gillette un peu rassurée.

Aussitôt l’inconnu tira de dessous son manteau des poupées de Nuremberg, des chalets suisses, des ballons, des cerceaux. Il y en avait tant que la chambre en était toute pleine.

« Oh ! les beaux joujoux ! s’écria Gillette en battant des mains.

— Quand tu en voudras d’autres, reprit l’homme au manteau rouge, tu n’auras qu’à allumer cette chandelle. » Et il disparut.

Gillette se mit à jouer avec ses poupées, & cependant la cire brûlait & se consumait.

Tout à coup sa mère rentra. Elle jeta un cri, courut à la lumière & l’éteignit.

« Malheureuse enfant ! qui t’a conseillé d’allumer cette chandelle ?

— Personne. »

Et Gillette raconta tout à sa mère.

« Celui que tu appelles ton bon ami, lui dit Françoise, eſt l’être qui te veut le plus de mal. Il ne cherche qu’à t’emmener en enfer, pour que tu y brûles éternellement avec lui. »

Elle prit tous les jouets & les jeta au feu, malgré les pleurs de Gillette. Ensuite elle cacha si bien la chandelle que l’enfant eut beau chercher, elle ne put jamais la découvrir.

Dix ans après Wilbaux mourut, &, l’année suivante, sa femme alla le rejoindre au cimetière.

Quand Françoise sentit approcher sa dernière heure, elle pria qu’on la laissât seule avec Gillette, &, d’une voix grave & solennelle, elle lui révéla le fatal secret.

« Désormais, ma pauvre fille, ajouta-t-elle, tu vas être seule maîtresse de ta deſtinée. De quelque désir que tu en sois poussée, jure-moi de ne jamais allumer la chandelle maudite.

Gillette pleura bien fort & jura d’obéir. Sa mère lui remit la petite clef & expira.

Son oncle d’Hendecourt vint demeurer avec elle & gouverna la ferme.

Lorsque sa douleur fut un peu calmée, elle songea à la chandelle des Rois : bientôt ce souvenir l’obséda. Non pas qu’elle voulût l’allumer, elle était seulement curieuse de la revoir.

Elle se rappelait, dans tous ses détails, la scène qui avait eu lieu dix ans auparavant : l’apparition de l’homme à la plume rouge & la chambre pleine de joujoux.

Un soir, en tremblant comme la feuille, elle prit la boîte, en tira l’étui, l’ouvrit & le referma sur-le-champ. Elle avait cru voir le diable en personne.

Le lendemain, elle recommença & s’enhardit : elle osa regarder la vieille cire jaune qui lui parut encore bien longue. Un tiers seulement en était usé :

À partir de ce moment, toutes les fois qu’elle était seule, elle tirait la chandelle de l’étui.

Enfin, n’y pouvant résiſter plus longtemps, elle l’alluma.

Belzébuth parut.

« Que voulez-vous, ma belle enfant ? lui dit-il.

— Rien. Va-t’en ! »

Elle souffla la chandelle & le diable disparut.

La pauvre mère pleura dans le ciel.

La ducasse de Lécluse arriva, & Gillette, son deuil étant fini, alla au bal. Elle était, sans contredit, la plus jolie de toutes les danseuses ; mais la fille du mayeur avait une toilette fort riche, & il ne fut bruit dans tout le village que de la belle robe de la demoiselle du mayeur. Gillette en fut jalouse.

Le dimanche suivant — le dimanche du raccroc — la trouva debout avant l’aurore. Elle n’avait pu fermer l’œil de la nuit. Sa résolution était prise. Elle alluma la chandelle des Rois.

— Que souhaitez-vous, gentille demoiselle ? dit Belzébuth se montrant aussitôt.

— Une robe plus belle que…

— Je comprends. La voici.

— Bien. Va-t’en.

Elle éteignit la lumière & l’Esprit malin obéit.

C’eſt à peine si la cire avait brûlé une seconde, & Gillette calcula qu’elle pourrait ainsi durer longtemps.

Sa robe était magnifique & lui seyait à ravir. Elle fit l’admiration du bal & celle qui la portait fut parfaitement heureuse ; mais, en se déshabillant, elle sentit qu’une goutte d’eau lui avait tombé sur la main. C’était une larme de sa mère !


V


Un jour que Gillette jouait au volant devant la porte de la ferme, le fils du roi des Pays-Bas vint à passer avec sa suite.

Elle le trouva si beau & si bien fait, qu’elle fut prise d’un désir subit & irrésiſtible de l’avoir pour époux. Elle courut à sa chandelle & l’alluma.

Belzébuth parut.

« Je veux le prince des Pays-Bas pour époux, dit Gillette.

— Vous l’aurez, ma belle princesse, fit Belzébuth en se frottant les mains. Mettez-vous à votre rouet. On attrape les merles en pipant & les maris en filant. »

Gillette éteignit la lumière & se mit à son rouet. Tout en filant elle chanta :

Cours, mon fuseau, vers la coudrette,
Va me quérir mon fiancé !

Chose merveilleuse, le fuseau sauta soudain des mains de la fileuse & s’élança hors de la maison. Gillette le suivit des yeux, toute surprise. Il cabriolait à travers champs & laissait derrière lui un long fil d’or.

Lorsque la jeune fille l’eut perdu de vue, elle prit sa navette & commença de tisser en chantant :

Sur son chemin, ô ma navette !
Qu’un beau tapis lui soit tissé !

Aussitôt la navette de s’élancer à son tour & de tisser, à partir du seuil, un superbe tapis aux plus riches couleurs.

Gillette prit alors son aiguille & chanta :

Il vient, il vient, mon aiguillette !
Que tout ici soit tapissé !

L’aiguille s’échappa à son tour & courut par la chambre, habillant les chaises de velours grenat, la table d’un tapis rouge & les murs de tentures de damas.

Le dernier point était à peine piqué, que Gillette vit par la fenêtre les plumes blanches du chapeau du prince. Il passa sur le tapis, entra dans la chambre, alla droit à la jeune fille & lui dit :

« Voulez-vous être ma femme ?

— Je le veux bien, » répondit Gillette en baissant les yeux.

Elle fit un paquet de ses hardes les plus belles, y cacha l’étui qui contenait la chandelle des Rois, dit adieu à son oncle, & monta en croupe sur le cheval du prince qui l’emmena dans son palais.

Le monarque l’accueillit comme sa bru, &, quelques jours après, la noce eut lieu en grande pompe.

Quand la mère de Gillette vit de là-haut que sa fille était devenue princesse, elle fut prise d’une triſtesse profonde. Voici pourquoi :

Le jour de sa mort, en arrivant au ciel, Françoise avait rencontré, à la porte du paradis, la reine des Pays-Bas, qui était, comme elle, une femme selon le cœur de Dieu.

Saint Pierre parut avec ses clefs, &, après avoir regardé par le guichet, il ouvrit la porte, fit entrer la reine & dit à la fermière d’attendre quelques inſtants.

Aussitôt celle-ci ouït un grand bruit de cloches, puis le son des harpes & le chant des séraphins. Elle regarda par le guichet entrouvert & vit un superbe cortège venir au-devant de la reine.

La cérémonie faite, saint Pierre ouvrit à Françoise. Elle se figurait que la musique allait recommencer : il n’en fut rien.

Deux anges seulement se présentèrent & l’accueillirent cordialement, mais sans chanter. Françoise fut si étonnée que, malgré sa modeſtie, elle ne put s’empêcher de dire à saint Pierre :

« Saint Pierre, pourquoi donc la musique ne va-t-elle point pour moi aussi bien que pour la reine ? J’avais toujours ouï dire qu’au paradis on était tous égaux.

— On l’eſt aussi, répliqua saint Pierre, & vous ne serez pas moins bien traitée que la reine ; mais, voyez-vous, mon enfant, des gens comme vous, il en entre ici tous les jours, tandis que des grands de la terre il n’en vient mie un tous les cent ans. »

Voilà pourquoi la pauvre mère était si triſte. Dans sa désolation, elle alla trouver Dieu le Père & lui dit :

« Dieu le Père, alors que ma fille n’était qu’une simple paysanne, la malheureuse enfant n’a que trop cédé, hélas ! aux tentations du Malin : aujourd’hui que la voilà princesse, la lutte devient tout à fait impossible. Par les sept douleurs de la Vierge, mère de ton fils, accorde-moi, Dieu le Père, d’aller à son secours !

— Va, pauvre mère, défendre ton enfant, répondit Dieu le Père. Mais, pour que l’ange des ténèbres ne crie point à l’injuſtice, tu reparaîtras parmi les humains sous une autre forme. Ta fille ne te reconnaîtra point, & jamais, quoi qu’il arrive, tu ne lui révéleras que tu es sa mère. »


VI


Françoise, alors, se trouva tout à coup sur la terre, au bord d’un claire fontaine, en un lieu sauvage & inhabité. Elle se vit dans l’eau de la fontaine & ne se reconnut point.

Elle était admirablement belle & semblait rajeunie de quinze ans ; mais cette métamorphose ne la toucha en rien. Elle ne songeait qu’à sa fille.

Elle voulut se mettre en route sur-le-champ pour la rejoindre ; malheureusement elle ne savait de quel côté diriger ses pas.

La nuit vint. Une brillante figure parut dans le ciel & la regarda avec ses grands yeux curieux. Françoise se souvint de la vieille chanson que, le soir, étant petite, elle chantait à la lune :

Belle, belle, où allez-vous ?

Et elle dit :

« Ô toi qui vois tout, les champs & les bois, le sommet de la montagne & le fond de la vallée, Belle, indique-moi la route des Pays-Bas.

— Je le veux bien, répondit la Belle, mais il faut que tu me chantes les chansons dormoires dont tu as bercé l’enfance de ta fille.

— Je chanterai tout ce que tu voudras, mais ne me retarde point, je t’en conjure.

— Chante ! » dit la lune.

Et la pauvre mère se mit à chanter. Après la troisième chanson :

« Eſt-ce assez ? demanda-t-elle.

— Encore ! répondit l’aſtre.

Et l’infortunée se remit à chanter en pleurant.

Quand elle eut dit trois autres chansons :

« Eſt-ce assez ? demanda-t-elle de nouveau.

— Non ! répondit l’aſtre impitoyable.

Et l’infortunée recommença de chanter en sanglotant & en se tordant les mains.

L’aſtre eut enfin pitié & lui dit :

« Suis-moi ; &, quand tu ne me verras plus, va toujours tout droit. »

Et Françoise marcha nuit & jour.

Elle entra bientôt dans une contrée âpre & désolée où régnait l’hiver. Elle traversa une sombre forêt de sapins & arriva à un carrefour. La pauvre femme ne savait quelle route prendre.

« Oh ! qui m’indiquera la route des Pays-Bas ? dit-elle tout haut avec angoisse.

— Réchauffe-moi sur ton cœur, & je te l’indiquerai, » répondit près d’elle un buisson épineux dont les branches étaient couvertes d’une couche de neige glacée.

Et la mère serra le buisson sur son cœur pour le réchauffer. Les épines perçaient sa chair, & son sang coulait à grosses gouttes.

Alors, ô merveille ! le buisson reverdit, &, à travers les feuilles, apparurent de jolies fleurs blanches. Tant eſt forte la chaleur qui vient du cœur d’une mère !

Et le buisson, pour sa peine, lui indiqua le chemin des Pays-Bas.

Elle parvint au bord de la mer ; & comme il n’y avait ni vaisseaux ni barques, & qu’il fallait qu’elle rejoignît son enfant, elle se coucha sur le rivage, pour épuiser la mer en la buvant.

« Tu n’en viendras jamais à bout, lui dit l’Océan ; mais j’adore les perles, & je n’en connais point de plus précieuses que les larmes d’une mère. Si tu veux me donner tous les pleurs de tes yeux, je te porterai jusqu’au royaume des Pays-Bas. »

La malheureuse femme n’avait que trop envie de pleurer, en songeant qu’elle n’arriverait jamais à temps.

Elle s’assit sur le rivage, & ses larmes coulèrent silencieusement dans les flots, où elles se changèrent en perles du plus grand prix.

Elle pleura tant que ses yeux s’éteignirent & qu’elle devint aveugle. Alors l’Océan la souleva comme si elle eût été dans une barque & la porta au rivage opposé, dans le royaume des Pays-Bas.

La pauvre aveugle s’en fut à tâtons par la campagne, — bien trille, mais non désespérée.

« Où allez-vous ainsi, seule & sans y voir ? lui dit une vieille femme.

— Je vais chez la princesse des Pays-Bas, répondit Françoise.

— Quelle princesse ?

— La princesse Gillette.

— Vous voulez dire la reine. Le roi eſt trépassé depuis trois jours, & son fils lui a succédé sur le trône.

— Seigneur ! Seigneur ! fais que j’arrive bientôt, murmura Françoise, car le danger croît d’heure en heure. »

Puis s’adressant à la vieille :

« Conduisez-moi chez la reine, je vous en prie.

— Et que me donnerez-vous pour la peine ?

— Hélas ! il ne me reſte rien à donner ; mais, si vous le désirez, j’irai pour vous, pieds nus, en pèlerinage à Notre-Dame de Bon-Secours.

— Non. Donnez-moi plutôt votre longue chevelure noire. Je vous céderai à la place la mienne, qui eſt blanche.

— N’eſt-ce que cela ? Prenez, prenez ! » dit la mère.

Elle changea ses beaux cheveux contre ceux de la vieille, & celle-ci la conduisit à la porte du palais.

Les deux femmes étaient à peine arrivées, qu’elles entendirent le roulement d’un carrosse.

« Voici la reine ! dit Françoise à sa compagne.

— Comment le savez-vous, si vous n’y voyez point ?

— Je le sens là ! » répondit-elle en mettant la main sur son cœur. Puis elle murmura : « Vierge Marie, mère de Dieu, fais que je la voie ! »

Et sa prière était si ardente, que ses prunelles éteintes brillèrent tout à coup d’un éclat extraordinaire.

Elle avait recouvré la vue.

Elle faillit s’élancer vers la reine en criant :

« Ma fille ! » Mais elle se contint.

Cependant Gillette descendit de carrosse avec le roi. Elle était bien changée, &, à la voir si maigre & si pâle, sa mère ne put retenir ses larmes.

En apercevant ces deux femmes, dont l’une était vieille & avait le front orné de magnifiques cheveux noirs, & l’autre, jeune & belle, avait les cheveux tout blancs, la reine demanda ce qu’elles voulaient.

La vieille, alors, raconta ce qui venait de se passer.

Pendant son récit, de grosses larmes coulaient le long des joues de Françoise.

« Puisque vous aimez tant à me voir, vous plaît-il d’entrer à mon service, ma bonne femme ? lui dit Gillette.

— Oh ! oui, madame, répondit Françoise.

— Eh bien ! revenez demain, on trouvera à vous occuper. »

Françoise revint le lendemain ; & comme ses habits, usés par le voyage, n’étaient plus que des haillons, on l’engagea en qualité de laveuse de vaisselle.

VII


Gillette était reine, & elle n’était point heureuse. Son époux lui avait d’abord témoigné beaucoup d’amour, mais il s’était marié sous l’impression d’un charme, &, par l’influence de Belzébuth, le charme perdait chaque jour de sa vertu.

La chandelle aussi se raccourcissait petit à petit.

Quand la reine souffrait trop de la froideur de son époux, elle appelait Belzébuth à son aide. Il avait soin maintenant de se faire attendre, afin que la cire se consumât plus vite.

Un jour que la chandelle brûlait en vain depuis plus d’une minute, le roi survint tout à coup.

Gillette la souffla, mais le prince, qui soupçonnait quelque myſtère, la pressa tellement de queſtions, qu’elle laissa échapper le fatal secret.

Il voulut naturellement s’en servir à son profit. L’ambition s’alluma dans son cœur, & il désira d’être le plus puissant monarque de l’univers.

Il entreprit contre ses voisins des guerres injuſtes, & contraignit sa femme de demander la victoire à Belzébuth.

La chandelle maudite était aux trois quarts usée quand Gillette, minée par le chagrin, tomba gravement malade.

Dans les cuisines du palais, Françoise n’ignorait rien de ce qui se passait. La malheureuse mère était folle de douleur.

« Oh ! si on me permettait de soigner la reine, répétait-elle sans cesse, je jure que je la sauverais ! »

Cependant la malade eut une crise si violente, qu’on crut qu’elle n’en reviendrait point. Tout le monde pleurait, car la reine était aimée, & durant une heure, le palais fut dans le plus grand désordre.

Françoise en profita pour se glisser dans la chambre de Gillette. Elle se pencha sur elle & lui dit doucement à l’oreille :

« Oh ! reviens, reviens, pauvre enfant ! »

À ces mots, Gillette se ranima. Une légère rougeur colora son visage ; elle ouvrit les paupières & sourit à cette jeune femme en cheveux blancs dont la voix lui rappelait celle de sa mère.

Gillette était sauvée. Dès lors Françoise ne quitta plus la reine, qui l’aima bientôt au point de lui révéler le terrible secret de la chandelle des Rois.

« Confiez-la moi, lui dit-elle. Je vous promets que, moi vivante, personne ne l’allumera. »

Mais le prince l’avait mise sous clef.

Il ne parlait plus, du reſte, d’y avoir recours, & c’eſt pourquoi Gillette se rétablissait à vue d’œil.

VIII


Par malheur, il arriva que tous les souverains de l’Europe se liguèrent contre lui, vainquirent ses troupes en plusieurs rencontres, & s’avancèrent à marches forcées pour mettre le siège devant la ville capitale du royaume.

Dans un péril aussi pressant, le prince s’enferma avec sa femme, &, malgré ses supplications, la força d’allumer la chandelle maudite.

Françoise était aux aguets. Elle cherchait un moyen de pénétrer dans la chambre. L’idée lui vint de mettre le feu aux rideaux de la pièce voisine ; elle sortit ensuite en criant : « Au feu ! au feu ! »

Le roi accourut. Françoise se précipita dans la chambre, saisit la chandelle, l’éteignit, s’enfuit hors du palais & gagna la forêt.

On s’aperçut bientôt de la ruse, & le prince, furieux, envoya ses gens d’armes qui battirent le bois & traquèrent la fugitive comme une bête fauve. On la découvrit dans une caverne où elle s’était blottie. Elle se laissa prendre sans résiſtance ; mais, quand on lui demanda ce qu’était devenue la chandelle des Rois, elle refusa de répondre. On la fouilla inutilement, & c’eſt en vain qu’on chercha par toute la forêt.

On lui fit son procès, & elle fut condamnée comme sorcière à être brûlée vive. Gillette essaya d’intercéder pour son amie. Loin de se rendre à ses prières, son mari voulut qu’elle assiſtât en personne à l’exécution.

Cependant, le bruit s’était répandu qu’on allait brûler une sorcière. Le peuple se porta en foule hors de la ville, à l’endroit où était dressé le bûcher, & la malheureuse y monta au milieu des cris de rage & des imprécations.

On y mit le feu.

Quelques-uns assurent qu’on vit alors une blanche figure quitter le bûcher & s’élever dans les airs en semant des fleurs sur les bourreaux ; mais la vérité eſt que soudain le ciel, où le soleil brillait sans nuage, se fondit en eau, comme s’il pleurait sur l’innocente victime.

L’eau éteignit le bûcher, & il fut impossible de le rallumer.

« Il faut la lapider ! cria le peuple.

— Faites ! » dit le roi.

Et, lui-même, il jeta la première pierre.

Il exigea que la reine suivît son exemple. Gillette s’y refusa. Le roi, outré de colère, lui saisit le poignet, &, de son gant de fer, le lui serra avec violence.

La présence de sa fille fortifiait l’âme de Françoise. Debout sur le bûcher, le visage rayonnant, elle la regardait avec une tendresse ineffable.

Tout à coup elle vit qu’on lui mettait une pierre dans la main. La pauvre mère sentit son cœur se briser.

« Oh ! non ! Pas cela ! Seigneur ! » s’écria-t-elle avec un geſte de douleur suprême.

Gillette aperçut ce mouvement, &, bien que le prince lui broyât la main de son gantelet, elle laissa tomber la pierre.

Une heure après, le corps de Françoise avait disparu sous un énorme monceau de pierres, & la foule s’écoulait silencieuse.

Rentré au palais, le roi fit apporter les vêtements de paysanne sous lesquels Gillette était venue à la cour, & lui dit :

« Remettez ces habits, & retournez dans votre village, je vous répudie. »

Gillette partit le soir même. Elle avait tant souffert sur le trône qu’elle en descendait sans regrets.

Avant de prendre la route de Lécluse, elle voulut faire une pieuse visite au monceau de pierres. Arrivée là, elle désira revoir son amie, & elle enleva les pierres une à une.

Quand apparut le pauvre corps tout meurtri, elle se pencha dessus en pleurant, le serra dans ses bras & le couvrit de baisers.

Tout à coup, ô bonheur ! le cadavre sembla se ranimer. La mère revenait à la vie sous les caresses de son enfant.

Françoise ouvrit les yeux. Elle se trouvait guérie comme par enchantement.

« Fuyons vite ! dit Gillette.

— Suis-moi d’abord ! » répondit Françoise.

Et elle la conduisit dans la forêt. Elle creusa au pied d’un arbre & déterra la chandelle des Rois.

« Maintenant que tu n’es plus reine, sauras-tu la garder intacte ? dit Françoise.

— Oh ! oui. Je le jure ! »

La mère alors pressa sa fille une dernière fois sur son cœur & disparut.


IX


Gillette retourna au village de Lécluse. C’eſt en vain que Belzébuth essaya encore de la tenter ; elle reſta insensible à toutes les séductions, & n’alluma plus jamais la chandelle des Rois.

Elle vécut ainsi dix ans, après quoi Dieu la rappela à lui.

Elle fut atteinte d’une singulière maladie. Elle s’éteignait lentement, comme une lampe.

Son oncle appela les premiers médecins du pays. Ils ne purent rien comprendre à son mal.

Cependant on apprit qu’il venait d’arriver à Lille un docteur étranger qui opérait des miracles. L’oncle de Gillette courut le chercher & le ramena le soir même.

Le docteur avait, comme tous ses confrères, une longue robe & une vaſte perruque, mais on remarquait sous ses lunettes d’or que ses yeux étaient aussi noirs que le noir mantelet des corneilles. Il s’approcha de la malade.

« Elle eſt bien bas ! dit-il. Je ne saurais la guérir si on ne me laisse seul avec elle. »

On s’empressa de le satisfaire.

Il prit une petite clef pendue au cou de Gillette, ouvrit une armoire, y trouva une cassette, en tira un étui, & de l’étui un bout de chandelle, la chandelle des Rois.

Il mit ensuite une buhotte allumée dans la main de la malade & lui ordonna de l’approcher de la chandelle. Gillette obéit les yeux fermés & sans avoir conscience de ce qu’elle faisait.

Une dernière pensée vacillait dans sa tête comme une faible lueur : le désir de vivre.

Par la vertu de la chandelle ce désir se réalisa.

Elle ouvrit les yeux, vit à son chevet la figure haineuse de Belzébuth & les referma sur-le-champ. Elle les rouvrit & les promena avec terreur de Belzébuth à la chandelle.

Belzébuth ricanait & la chandelle se consumait.

Gillette voulut parler, sa langue était glacée ; & pourtant elle sentait ses forces lui revenir. Enfin, ce cri sortit du fond de ses entrailles :

« Ma mère !

— Tais-toi ! » fit Belzébuth.

Et de sa main il lui ferma la bouche.

Mais Gillette se dressa sur son séant, écarta la main du démon, & s’écria une seconde fois :

« Ma mère !

— Te tairas-tu, misérable ! hurla l’Esprit malin.

— À moi, ma mère ! » cria Gillette, & cette fois si fort, que tout le monde accourut.

La chandelle, près de s’éteindre, jetait de plus vives clartés.

Soudain on entendit trois coups violents frappés à la porte du rez-de-chaussée.

« N’ouvrez point ! » cria le médecin.

Mais la porte s’ouvrit.

Quelqu’un monta rapidement l’escalier, puis trois nouveaux coups furent frappés à la porte de la chambre.

« Par la mort ! n’ouvrez point ! » cria encore le docteur.

Mais la porte s’ouvrit.

Alors entra, pâle & vêtue de blanc, une femme jeune & merveilleusement belle sous sa chevelure argentée.

Elle se dirigea droit vers le lit de Gillette & lui dit :

« Veux-tu venir au ciel auprès de ta mère ?

— Oh ! oui ! » dit Gillette.

Et elle expira.

Comme la chandelle brûlait encore & que Gillette était en état de grâce, le dernier vœu de la morte s’accomplit.

La femme pâle se pencha sur elle, la prit dans ses bras & ouvrit la fenêtre, sans que Belzébuth cherchât à s’y opposer.

« Oh ! la femme ! dit-il en se tordant les mains, la femme maudite, qui m’a vaincu encore une fois ! »

Françoise se retourna :

« Non point la femme !… répondit-elle, la mère ! »

La chandelle des Rois s’éteignit, entièrement consumée, & la mère & la fille montèrent radieuses vers les étoiles.