Cinquième rapport sur une mission en Basse-Bretagne/Les trois souhaits


LES TROIS SOUHAITS.


Un jeune garçon avait une marâtre qui le maltraitait et l’envoyait tous les jours garder les moutons sur une grande lande, avec une croûte de pain noir et moisi pour toute nourriture. Un jour que l’enfant chantait gaîment, malgré tout, sur le bord d’une petite rivière qui passait au bas de la lande, deux voyageurs inconnus arrivèrent et le prièrent de leur passer l’eau, en les portant sur son dos. Il leur passa l’eau. Il trouva le plus vieux assez léger ; mais le plus jeune lui parut si lourd, qu’il le menaça de le jeter dans la rivière, s’il ne descendait. Il le mit pourtant sur l’autre bord. « Ne t’étonne pas, mon enfant, lui dit alors le voyageur qu’il venait de passer avec tant de peine, si tu m’as trouvé si lourd, car avec moi tu as porté le monde entier sur ton dos ! » Or ces deux voyageurs étaient saint Pierre et Jésus-Christ, qui voyageaient alors en basse Bretagne. Notre-Seigneur, pour reconnaître le service que leur avait rendu le petit pâtre, dit à celui-ci de former trois souhaits, de lui demander trois choses, et il les lui accorderait. L’enfant demanda d’abord une serviette qui lui procurât à manger et à boire à souhait ; puis, un arc avec lequel il atteindrait tout ce qu’il viserait. Il fut embarrassé pour sa troisième demande. Enfin il demanda un violon qui ferait danser, bon gré malgré, tous ceux qui l’entendraient. Tout cela lui fut accordé, et il put, désormais, faire des festins sur l’herbe à discrétion, et s’amuser avec son arc et son violon, et même se venger des mauvais traitements de sa marâtre et de quelques autres.


Ce conte est très-répandu ; on le trouve dans plusieurs pays. Les épisodes varient, mais le fond en est partout le même. J’en ai recueilli trois versions en basse Bretagne. Il se trouve dans le recueil des frères Grimm sous le titre de : le Juif dans les épines.