Les Médailles d’argile/Chrysilla

Les Médailles d’argileSociété du Mercure de France (p. 38).
◄  via
timandre  ►

CHRYSILLA


Lorsque l’heure viendra de la coupe remplie,
Déesse, épargne-moi de voir à mon chevet
Le Temps tardif couper, sans pleurs et sans regret,
Le long fil importun d’une trop longue vie.

Arme plutôt l’Amour ; hélas ! il m’a haïe
Toujours et je sais trop que le cruel voudrait
Déjà que de mon coeur, à son suprême trait,
Coulât mon sang mortel sur la terre rougie.

Mais non ! que vers le soir en riant m’apparaisse,
Silencieuse, nue et belle, ma Jeunesse !
Qu’elle tienne une rose et l’effeuille dans l’eau ;

J'écouterai l’adieu pleuré par la fontaine
Et, sans qu’il soit besoin de flèches ni de faulx,
Je fermerai les yeux pour la nuit souterraine.