Chronique de la quinzaine - 31 octobre 1836

Chronique no 109
31 octobre 1836


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.
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31 octobre 1836.



Le midi de l’Europe est en ce moment le théâtre politique qui appelle le plus l’attention. Le régime constitutionnel y est nouveau et s’enfante péniblement lui-même. Cette situation déjà laborieuse se complique encore des menées et des intérêts de l’Angleterre et de la France. L’Angleterre désirerait une contre-révolution en Portugal, c’est-à-dire le renversement de la constitution de 1820 ; mais elle y met beaucoup de prudence : elle attend et consulte les dispositions nationales qui ne se sont pas encore clairement exprimées. À Lisbonne, les affaires sont très confuses. La résurrection de la constitution de 1820 n’est qu’une imitation du mouvement qui, en Espagne, a proclamé la constitution de 1812. La dernière révolution portugaise a été faite, tant par un vieux parti qui voulait reparaître sur la scène politique, que par d’autres opposans qui se proposaient simplement un changement de ministère, et se sont trouvés, malgré eux, les auteurs d’une révolution qu’ils n’avaient ni prévue ni désirée. La constitution de don Pedro était plus nationale à Lisbonne que le statut royal à Madrid. Maintenant un mouvement contre la constitution de 1820, pour rendre au Portugal et à Dona Maria le régime fondé par son père, réussira-t-il ? Personne ne le sait ni à Lisbonne ni à Londres. L’Angleterre peut le désirer, mais les instructions qu’elle donne à son amiral sont pleines de prudence. L’amiral Paget ne doit seconder le mouvement contre-révolutionnaire que s’il paraît partir de la population entière. Le ministère anglais est surveillé de trop près par le parti radical et par O’Connell pour se livrer ouvertement à ses désirs de contre-révolution. Ce n’est pas au moment où les tories épient une occasion favorable pour le renverser et se saisir des affaires que le cabinet whig peut découvrir inconsidérément ses secrètes pensées. On attendra donc, et peut-être pas long-temps, des évènemens nouveaux et décisifs. Don Miguel a quitté Rome, et ses projets fixent l’attention des puissances et de la diplomatie : déjà, dans les Algarves, les bandes miguellistes sont réunies sous la conduite d’un chef entreprenant, de Remechido. Si la cause de Miguel remportait quelque grand avantage, si lui-même débarquait en Portugal, alors le casus foederis ferait à l’Angleterre une loi d’intervenir, et elle se hâterait de profiter d’une occasion qui lui permettrait de rétablir facilement la constitution de don Pedro.

Au surplus, l’Angleterre est certaine que le Portugal, quel que soit le régime qui l’attende, n’échappera pas à sa domination commerciale ; et, pour elle, c’est l’essentiel. Les formes constitutionnelles n’ont, dans sa pensée, qu’une importance secondaire ; seulement il y a une opinion publique, tant chez elle que sur le continent, qu’elle doit satisfaire, même pour ne pas donner l’éveil sur son égoïsme inaltérable. Il y aurait de la folie à méconnaître la grandeur morale du peuple anglais ; mais il est dans ses instincts de voir et de chercher, avant tout, son intérêt de commerce et d’argent. Que peut lui rapporter tel mouvement révolutionnaire ou constitutionnel chez un peuple ? Voilà pour lui la première question politique.

Nous le retrouvons encore en Espagne avec ses intrigues et ses manœuvres, pour faire la propagande de son commerce ; l’Andalousie est inondée de marchandises anglaises. Les troubles civils de la Péninsule servent de laissez-passer aux produits britanniques.

L’Espagne, qui attire sur elle les yeux de l’Europe, est soumise à une difficile épreuve. Il faudra voir si les cortès nouvelles auront dans leur sein des hommes dignes de porter une situation et une responsabilité aussi grandes. Depuis vingt-quatre ans, l’Espagne rejette successivement hors de son sein les hommes politiques qu’elle produit ; elle est privée aujourd’hui des lumières et de l’influence de ses plus grands talens parlementaires. Est-elle tellement féconde qu’elle ait encore à nous montrer une nouvelle génération de patriotes capables et purs ? Là sera le jugement de la dernière révolution espagnole qui a arboré le drapeau de la constitution de 1812. Toute révolution nécessaire produit des hommes qui ont la puissance de la servir et d’assurer son légitime triomphe. Si les nouvelles cortès étaient composées d’hommes plus exaltés qu’habiles ; si des exagérations déclamatoires et violentes prenaient la place d’un patriotisme clairvoyant et modéré dans son énergie, il y aurait à redouter pour l’Espagne une longue série de convulsions stériles et sanglantes. Au premier aspect, les cortès paraissent divisées en trois partis : les exaltés, qui ne veulent pas se contenter même de la constitution de 1812, ne la trouvant pas assez démocratique ; les hommes qui portent au contraire à la constitution de 1812 un culte assez fanatique pour la vouloir sans modification, et sans la régence de la reine (la régence, aux termes de la constitution de 1812, devant être composée de trois ou cinq personnes) ; les constitutionnels modérés, qui veulent la constitution de 1812 modifiée, avec deux chambres et la régence de la reine. Le nouveau président des cortès, Becerra, était ministre de la justice dans la première administration de M. Mendizabal ; à cette époque, il avait d’intimes liaisons avec Calatrava, qui figurait alors dans les rangs de l’opposition, et qui dut à cette amitié une grande influence et la connaissance du véritable terrain politique. Le ministère doit s’estimer heureux d’avoir porté à la présidence Becerra, qui pourra offrir à Calatrava et au cabinet dont celui-ci est le chef un appui éclairé, et en recevoir à son tour la même force qu’il lui prêta jadis.

Les choses ne marchent pas en Espagne aussi vite que le désirerait l’impatience publique. Les absolutistes de l’Europe voudraient voir l’entrée de don Carlos à Madrid, les pays constitutionnels sa défaite définitive ; mais dans la Péninsule, les situations sont trop confuses, les forces respectives des partis trop balancées pour aboutir à un dénouement rapide et simple, comme dans une tragédie classique. D’ailleurs la France, en abandonnant l’Espagne à elle-même, n’a pas peu contribué à compliquer encore l’imbroglio. On a eu deux motifs pour cesser toute participation aux affaires espagnoles : le désir de plaire aux puissances du Nord, notamment à la Russie ; puis la crainte de se trouver engagé plus avant qu’on ne voudrait, et d’entrer dans une situation qu’on ne pourrait plus ni limiter, ni maîtriser à son gré. L’avenir, et peut-être un avenir prochain, nous dira jusqu’à quel point les monarchies absolues seront reconnaissantes envers le gouvernement français pour son exacte neutralité, jusqu’à quel point cette conduite si débonnaire aura désarmé les mauvais vouloirs. Quant aux difficultés fort sérieuses que rencontrerait en Espagne une coopération ouverte de notre part, nous n’avons jamais songé à les nier ; peut-être même peut-il se rencontrer telles circonstances qui la rendraient, dans un moment donné, inutile pour l’Espagne, ruineuse pour la France ; mais nous disons que, dans le passé, on a manqué des occasions favorables, et que dans l’avenir, on se retrouvera face à face avec des nécessités qui contraindront la France d’agir.

On peut remarquer d’ailleurs dans la conduite du président du conseil, vis-à-vis l’Espagne, un désir sincère de manifester à la cause constitutionnelle toutes les dispositions bienveillantes que peut lui permettre le système de neutralité dont ses convictions l’ont décidé à accepter la responsabilité. Loin de favoriser les intrigues des carlistes, il les surveille et les poursuit avec une grande activité. Averti qu’un banquier fameux, qui déjà avait mis son nom et ses spéculations dans l’histoire et les affaires d’Espagne, était parti de Paris avec un million qu’il portait à don Carlos, M. Molé a envoyé par le télégraphe l’ordre de l’arrêter. C’est grace à sa fermeté et contre les intentions de M. Guizot, qu’ont été payés à la légion étrangère les 250,000 fr. qui avaient été destinés au corps de troupes rassemblées à Pau, et licenciées par suite de l’évènement de la Granja, et de l’arrivée du ministère du 6 septembre. M. Molé réclame aussi en ce moment auprès du ministère espagnol sur le non-paiement du semestre échu, et sur la différence peu loyale qu’on veut établir entre les créanciers extérieurs et les créanciers intérieurs. Trop d’intérêts français sont mêlés aux affaires espagnoles pour n’opposer à ce qui se passe de l’autre côté des Pyrénées qu’une impassible indifférence. La réunion des porteurs de bons espagnols, qui réclament l’exécution de la quadruple alliance, est un symptôme de l’obligation où se trouve la France de ne jamais perdre de vue l’Espagne. Rien n’est plus étrange que cette prétention d’une partie du cabinet de fermer les yeux sur des nécessités qui l’assiègent. L’Espagne n’existe plus pour nous, dit-on doctoralement rue de Grenelle. M. Molé est trop éclairé pour tomber dans un pareil contresens ; il semble, au contraire, touché de plus en plus de l’importance de la question espagnole, et peut-être lui-même est-il destiné à rencontrer, dans le cours de son ministère, des circonstances où l’apathie érigée en système lui paraîtrait n’être plus possible.

Au surplus M. Molé a rencontré sur son chemin un diplomate dont jusqu’alors il n’avait pas soupçonné l’existence ; ce n’est pas assez d’être entravé par M. Guizot, voici M. Nouguier, rédacteur en chef de la Paix, qui vient se jeter à la traverse des affaires suisses, tranchant du plénipotentiaire auprès des cantons, et promettant de tout arranger moyennant une reconnaissance mutuelle de torts réciproques. M. Molé ne s’est pas fait faute de désavouer en termes fort vifs le diplomate officieux qui déjà demandait des entrevues à M. Tschann, pour traiter avec lui de puissance à puissance ; le président du conseil a exprimé très haut un mécontentement qui ne s’arrêtait peut-être pas à la personne de M. Nouguier. Cependant M. Guizot désavoua tout le premier le rédacteur de la Paix ; la rue de Grenelle n’a qu’un cri aujourd’hui contre M. Nouguier. Le rédacteur de la Paix a manqué sa carrière, et malgré ses courses en Espagne, il ne sera jamais ambassadeur.

Et cependant tous ces ridicules commérages ont un effet fâcheux auprès de la diète. À l’étranger, on prend plus au sérieux ces petites intrigues dont nous rions ici. La majorité de la commission pourrait bien n’être pas favorable à la France, et quoique son organe, M. Monnard, ait un esprit aussi conciliateur qu’éclairé, néanmoins il ne pourra guère refuser une expression accentuée aux susceptibilités du patriotisme helvétique. On parle d’un contre-projet émanant de la minorité, qu’on aurait l’espérance de faire prévaloir. On dit aussi que l’Autriche et le roi de Sardaigne auraient offert leur médiation. C’est alors que les rapports naturels seraient étrangement troublés et pervertis. Se figure-t-on Vienne et Turin venant s’entremettre entre la France et les cantons, et prêchant hypocritement la paix à ces états, dont ils désirent et fomenteraient au besoin la mésintelligence ? Au reste, M. Molé aurait refusé nettement la médiation offerte ; déjà à ses yeux la médiation de l’Angleterre, dans l’affaire des créances américaines, fut chose fâcheuse : il ne veut mettre dans nos difficultés avec la Suisse, ni Londres, ni Vienne, ni Turin ; la France en effet n’a besoin de personne pour terminer ses démêlés d’une façon convenable ; elle s’entendra mieux avec son ancien allié sans intermédiaire. Puisse-t-on mettre, de part et d’autre, dans cette affaire de la franchise et de la rapidité, afin que d’autres peuples n’aient pas le temps de profiter de ces dissensions et de ces malentendus ! Déjà on parle des intrigues et des menées des Anglais, qui veulent, comme en Andalousie, exploiter, au profit de leur commerce, les troubles intérieurs.

Les bruits diplomatiques sur les mariages et les alliances projetées se sont un peu ralentis : la Gazette de Mecklenbourg annonçait, il y a quelques jours, qu’il n’y avait rien de fondé dans ce qu’on avait publié sur le mariage du duc d’Orléans avec la princesse Hélène de Mecklenbourg-Schwerin. On ne sait trop ce que signifie ce démenti. Quoi qu’il en soit, la princesse a vingt-deux ans et une beauté remarquable. Le vieux duc, son grand-père, est comme un représentant de l’antique et féodale Allemagne que le temps semble avoir oublié ; il règne depuis 1785, et compte quatre-vingts ans. Jaloux de son indépendance, il rejette fièrement le patronage et les inspirations de la Prusse et de la Russie. Il porte dans sa vie la simplicité excentrique d’un vieux gentilhomme ; il passe toute la saison d’été dans la petite ville de bains de Dobberan, située dans une vallée agreste sur la Baltique ; on le voit manger à table d’hôte avec les baigneurs, sans autre suite qu’une excellente troupe de musiciens, qui, chaque soir, donne un concert tant au prince qu’à la société des bains. Le vieux duc a beaucoup d’enfans, surtout des enfans naturels ; on dit qu’il en a peuplé ses états, et qu’il ne renonce pas encore, malgré son âge, à ce moyen d’augmenter le nombre de ses sujets. Il a perdu son fils aîné ; le père de la princesse Hélène, et c’est son petit-fils qui doit être son successeur. Le roi de Prusse, lui ayant fait visite il y a quelques années, fut presque scandalisé tant de sa politesse un peu altière que de la magnificence qu’il déploya ; une armée de chambellans remplissait les salons de la cour grand-ducale ; la suite du prince était plus nombreuse et plus riche que celle du roi même ; c’est un vieux fou, dit en partant Frédéric-Guillaume. Si la princesse Hélène est aussi accomplie qu’on le dit, peu importe qu’elle ne soit pas née sur les degrés d’un trône impérial. La France n’a pas besoin d’une alliance de mariage soit avec l’Autriche, soit avec la Russie ; au contraire, une pareille combinaison la gênerait plutôt dans son indépendance et son avenir.

On parle aussi du mariage de la princesse Marie avec le fils du duc de Saxe-Cobourg régnant ; le duc est un des princes les plus riches de l’Europe ; il possède en toute propriété la plus grande partie de ses états. C’est le frère du feld-maréchal autrichien, et du roi des Belges, dont le récent voyage à Paris n’est peut-être pas étranger à tous ces projets d’alliance.

Le roi de Naples devait aussi épouser la princesse Clémentine, qui paraît avoir été l’objet, durant son séjour parmi nous, de ses préférences marquées ; néanmoins il ne se serait pas encore déterminé à faire des ouvertures et des propositions positives, et c’est à ce silence qu’il faudrait attribuer le peu d’empressement que les ducs d’Orléans et de Nemours ont mis à faire à leur royal parent les honneurs de Paris. Mais le roi de Naples ne manque pas, en ce moment, d’inquiétudes et d’affaires. Ce qui se passe en Espagne a toujours son retentissement dans le royaume des Deux-Siciles. La grandesse d’Espagne, si mêlée à toutes les vicissitudes de la révolution, qui est, à vrai dire, son ouvrage, a de nombreuses propriétés tant en Sicile que dans le royaume de Naples. Il y a là une connexité d’intérêts qui peut être féconde en évènemens.

Sur d’autres points, il y a peu de mouvement dans nos relations extérieures. On parle de la nomination de M. Serrurier à Bruxelles, à la place de M. de Latour-Maubourg. On sait que M. Serrurier n’a pas occupé de poste depuis son retour des États-Unis. M. Bois-le-Comte va remplacer à Lisbonne M. de Saint-Priest, qu’on trouve un peu brouillon, et qu’on met en disponibilité. M. le baron Rouen est chargé de représenter la France à Rio-Janeiro.

Dans l’Allemagne méridionale, à Heidelberg et à Stuttgard, on s’indigne d’un jugement que vient de rendre la faculté de droit de Tubingen contre des malheureux jeunes gens qu’elle a condamnés aux galères à perpétuité. Et ce sont des professeurs, des interprètes de la justice et du droit, qui, sans entrailles et sans équité, flétrissent la vie entière de jeunes gens à peine sortis de l’enfance, et coupables d’une étourderie qui méritait uniquement une censure académique !

À l’intérieur tout est fort tranquille. C’est à tort que dans quelques départemens on a cru à une brusque dissolution de la chambre ; ni le président du conseil, ni une volonté plus haute encore, ne songent à prendre ce parti. Le ministre de l’instruction publique désire seul la dissolution, et l’ordre est donné au ministère de l’intérieur de s’y préparer à tout évènement. En attendant, on dispose tout pour bien recevoir l’ennemi parlementaire.

En l’absence des chambres, une partie du ministère a cherché à se concilier la littérature ; c’est dans cette intention qu’ont été créées les deux commissions chargées d’élucubrer deux projets de lois, tant sur la contrefaçon que sur la propriété littéraire. Il y a plus de faste que de portée dans ces mesures ministérielles. La question de la contrefaçon est toute diplomatique, et le ministre des affaires étrangères peut seul la mener à bien ; elle reviendra nécessairement à M. Molé, malgré l’ambitieux empressement de M. Guizot. Quant à la propriété littéraire, la commission est-elle résolue d’aller au fond de la question ? le peut-elle ? le veut-elle ? A-t-on songé qu’on ne pouvait résoudre les difficultés de la matière sans aborder le problème entier de la propriété même. Où sont dans la commission les jurisconsultes et les publicistes capables de se mesurer avec les difficultés du sujet ? Si la commission accouche d’un projet de loi, ce qui est douteux, comment ce projet subira-t-il l’épreuve de la tribune, l’examen parlementaire des jurisconsultes de la chambre, de MM. Dufaure, Vivien, Odilon Barrot, Comte, Dupin ? Au fond, M. Guizot se soucie peu du résultat ; mais il aura séduit quelques amours-propres, et caressé la cupidité de quelques hommes qui demandent à leur plume, non plus l’honneur et l’indépendance, mais la fortune des anciens fermiers-généraux. On dit que M. de Rémusat est tellement dégoûté des intrigues et des convoitises dont il a le spectacle, qu’il a pris la résolution de ne plus se mêler des affaires secrètes de la presse ; nous le lui avons prédit, il ne fera jamais complètement la besogne dont il s’est imprudemment chargé ; il a pour cela trop d’honneur et de paresse.

Nous avons entendu des hommes politiques, tout en admirant la dernière harangue de M. Odilon Barrot, regretter que cet honorable orateur se soit borné à de brillantes généralités sans prendre position au sein même de la question du moment. Mais il ne faut pas oublier la différence qui sépare une harangue aux électeurs en dehors de la chambre, et un discours qui s’adresse à l’assemblée même. M. Odilon Barrot a reçu de son talent et de son caractère la mission de travailler à l’éducation constitutionnelle de la France ; il est, avec des formes un peu plus vives, ce qu’était M. Royer-Collard sous la restauration, professeur de liberté et de pratique constitutionnelles. À la chambre, M. Barrot ne se refusera à aucune habileté parlementaire, sa conduite précédente en fait foi, et ce n’est pas lui qui suscitera des obstacles à des alliances nécessaires. L’effet moral du discours de M. Barrot a pour témoignage les nombreuses attaques dont il a été l’objet, et les adhésions sympathiques que lui ont envoyées toutes les nuances de l’opposition.


M. de La Mennais publie aujourd’hui sous ce titre : Affaire de Rome, l’histoire de ses démêlés avec le saint-siége. Cette importante publication fixe nettement la position de l’illustre auteur des Paroles d’un croyant vis-à-vis du Vatican et du Vatican vis-à-vis de l’Europe. Elle renferme, entre autres documens précieux, une lettre du cardinal Pacca qu’on peut regarder comme le catéchisme politique de la cour de Rome. M. de Lamennais a mêlé au récit des faits les impressions de son voyage en Italie et en Bavière, et il conclut par des considérations de la plus haute portée sur les destinées futures de la papauté. La prenant corps à corps et la plaçant face à face avec l’avenir, il cherche quel peut y être son rôle ; et impérieusement entraîné par sa logique puissante, invincible, il n’en trouve aucun à lui assigner. C’est maintenant une querelle vidée entre Rome et lui ; il n’aura plus à y revenir.