Le Parnasse contemporain/1876/Chanson de janvier

Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]III. 1876 (p. 152-153).
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CHANSON DE JANVIER


O le clair matin, la belle gelée !
Un soleil d’argent sur la plaine blanche
Verse une clarté frileuse et voilée :
On sonne la messe à toute volée :
O la bonne bise, ô le beau dimanche !

Sur les arbres morts aux ramures nues
En fins diamants resplendit le givre.

L’azur froid scintille à travers les nues,
Voilà mes gaîtés soudain revenues
Mon sang se réveille et je me sens vivre.

Adieu les couchants tout rayés de pluie,
Et les pleurs brouillés des mornes aurores
Les grands horizons brillent, et j’oublie
Les soirs gris trempés de mélancolie,
Sur le sol durci des routes sonores.

Allons respirer l’air de la prairie.
Sous les glaçons bleus chantent les fontaines ;
C’est de purs cristaux que l’herbe est fleurie ;
Mon cœur allégé vibre et se marie
Aux frais carillons des cloches lointaines.