Ce doux hiver qui égale ses jours

Ce doux hiver qui égale ses jours
Œuvres complètes de Théodore Agrippa d’AubignéAlphonse Lemerre éd.3 (p. 60).

LXXXIII.

Ce doux hyver qui eſgale ſes jours
A un printemps, tant il eſt amiable,
Bien qu’il ſoit beau, ne m’eſt pas agréable,’
J’en crain’la queuë, & le ſuccez touſjours ;

J’ay bien apprins que les chaudes amours
Qui au premier vous ſervent une table
Pleine de ſuccre & de metz delectable
Gardent au fruict leur amer & leurs tours :

Je voy’deſja les arbres qui boutonnent
En mille neuz, & ces beautez m’eſtonnent :
Eſt une nuict ce printemps eſt glacé ;

Ainſi l’amour qui trop ſerein s’advance
Nous rit, nous ouvre une belle apparence,
Eſt né bien toſt & bien toſt effacé.