La Verdure dorée/Que m’importe l’amour et les roses, si tu

CXXIII


Que m’importe l’amour et les roses, si tu
Reposes loin de moi, si mon rêve abattu,
Rameaux rouges et verts, fleurs des branches ailées,
Ce n’est plus que bois mort sous les feuilles brûlées ?
Solitude, jardin des vipères, ciel gris
Et pluvieux où glisse avec de tristes cris,
Un triangle d’oiseaux sauvages. Mes pensées,
N’ont-elles pas souvent loin des rives glacées
Où l’esprit se lamente et mire dans les eaux
Un visage de nuit, n’ont-elles pas, oiseaux,
Fui naguère battant les airs d’une aile forte
Vers l’azur. Mais ce soir que l’espérance est morte,
Qu’un lourd nuage emplit ma vie et ma maison,
Et que nul autre ciel derrière l’horizon
N’appelle plus mon cœur aux grandes aventures,
Je songe tristement à de vieilles verdures,
Feuillages dont l’orage arrache les lambeaux,
À des printemps meurtris sous les fleurs des tombeaux,
À des toits écroulés, à des sources taries,
À tes faucheurs, Destin, riant dans mes prairies.
À des lampes de jade éteintes à jamais,
À mon bonheur pareil à de beaux yeux fermés.