Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ALBERT-CASIMIR

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* ALBERT-CASIMIR, duc de Saxe-Teschen, prince électoral de Saxe et prince royal de Pologne et de Lithuanie, gouverneur et capitaine général des Pays-Bas sous Joseph II, né aux environs de Dresde, le 11 juillet 1738, mort à Vienne le 10 février 1822. Il était fils d’Auguste III, électeur de Saxe et roi de Pologne. En 1766, il épousa Marie-Christine, archiduchesse d’Autriche, fille de Marie-Thérèse, et reçut la principauté de Teschen, située dans la Silésie autrichienne. Par un diplôme du 12 janvier 1781, l’empereur Joseph II confirma le duc Albert de Saxe-Teschen et l’archiduchesse Marie-Christine dans le gouvernement général des Pays-Bas autrichiens, que Marie-Thérèse leur avait conféré l’année précédente. Le 10 juillet, ces princes firent leur entrée solennelle à Bruxelles. Le 14 décembre 1782, Albert posa, sur le Schoonenberg, à Laeken, la première pierre du château, qui fut achevé en 1784, d’après les plans des architectes Montoyer et Payen. Ils avaient eu pour collaborateur le duc lui-même, car ce prince, dit un contemporain, cultivait les arts au point de pouvoir entrer en concurrence avec ceux qui en faisaient une étude particulière. Cette noble occupation ne le détournait point des soins du gouvernement. Effrayé de la résistance que rencontraient les réformes ordonnées par Joseph II avec trop de précipitation et sans égard pour les vieilles chartes de la nation, le duc Albert s’efforça d’éclairer l’Empereur et de le ramener à une politique plus prudente. Le 18 mai 1787, il lui écrivit : « Convaincue qu’on en veut à ses droits les plus sacrés, à sa liberté même, toute la nation, depuis le premier jusqu’au dernier, est pénétrée d’un enthousiasme de patriotisme qui ferait verser à chacun la dernière goutte de son sang plutôt que de plier sous des lois que l’autorité voudrait imposer et qui paraîtraient contraires à la constitution. » Pour faire renaître la tranquillité, Albert demandait le rappel du comte Belgiojoso, c’est-à-dire du ministre qui s’était rendu impopulaire comme le principal et le plus inflexible auxiliaire du monarque réformateur. Quant à lui, « il était, dit un contemporain, d’une douceur et d’une affabilité qui lui conciliaient l’amour des Belges et tempéraient quelquefois les petites vivacités que la princesse ne savait pas toujours cacher dans ces occasions épineuses, qui sont inséparables des troubles. » Ces troubles ayant pris un caractère très-grave pendant que Joseph II voyageait en Crimée, les gouverneurs généraux suspendirent, vers la fin du mois de mai 1787, les principales réformes décrétées par Joseph II. Le pays se calma, mais le mécontentement de l’Empereur fut porté au comble. Il se hâta de revenir à Vienne, appela près de lui le duc Albert et Marie-Christine, et enjoignit aux états de toutes les provinces belges d’envoyer des députés dans la capitale de l’Empire. Albert servit en quelque sorte de médiateur entre Joseph II et les représentants des Pays-Bas. Le 23 janvier 1788, les gouverneurs généraux rentrèrent à Bruxelles, mais débarrassés, selon les expressions du monarque, du fardeau des affaires, car toute l’autorité avait été remise entre les mains du nouveau ministre, le comte de Trauttmansdorff et du général d’Alton, commandant des troupes. Il serait donc injuste de rendre le duc Albert de Saxe-Teschen responsable des événements qui allaient aboutir à une catastrophe. Après la défaite des Impériaux à Turnhout et l’insurrection des Gantois, Albert et Marie-Christine quittèrent Bruxelles (18 novembre 1789) et allèrent chercher un séjour plus tranquille à Bonn. Ils y attendirent la fin de la révolution brabançonne. Après la restauration de Léopold II, ils se mirent en route, au mois de juin 1791, et vinrent reprendre le gouvernement des Pays-Bas. Mais de plus formidables orages allaient éclater. En 1792, le duc Albert quitta de nouveau sa paisible résidence de Laeken pour commander l’armée de siége devant Lille. Cette entreprise échoua, et bientôt la victoire de Jemmapes ouvrit la Belgique aux Français. Le duc de Saxe-Teschen renonça au commandement et se retira à Vienne, où son palais, grâce à des acquisitions précieuses, devint un véritable musée. Pieusement attaché à la mémoire de l’archiduchesse Marie-Christine, morte sans enfants, le 24 juin 1798, il lui fit élever, en 1805, dans l’église des Augustins, à Vienne, un mausolée qui passe, à bon droit, pour l’une des plus belles œuvres de Canova.

Th. Juste.