Barzaz Breiz/1846/La Fête de Juin/Bilingue

Barzaz Breiz, édition de 1846
La Fête de Juin



VI


CHANT DE LA FÊTE DE JUIN.


( Dialecte de Cornouaille. )



L’ANCIEN PATRON.


Bonjour à vous, ma belle commère, bonjour à vous ; c’est un amour sincère qui m’amène ici.


L’ANCIENNE PATRONNE.


Ne pensez pas, jeune homme, que je sois votre fiancée, pour une bague d’argent que j’ai reçue de vous.

Reprenez votre bague d’argent et emportez-la ; je n’ai plus d’amour ni pour vous ni pour elle.

Il a été un temps, mais ce temps est passé pour moi, où, pour un sourire, je donnais mon cœur.

Mais voilà que le temps me vient chercher querelle, me sourira qui voudra, je ne rirai plus.


L’ANCIEN PATRON.


Autrefois, quand j’étais jeune homme, je portais trois rubans, un vert, un bleu, et un troisième, qui était blanc.

Le vert, je le portais en l’honneur de ma commère ; car je l’aimais dans mon cœur, et bien sincèrement.

Le blanc, je le portais à la face du soleil et de l’aurore, en signe de l’amour pur qui était entre elle et moi.

Le bleu, je le portais, car je voulais toujours vivre en paix avec elle ; et, quand je le regarde, je pousse des soupirs.

Hélas ! hélas ! je suis abandonné maintenant par elle, comme le vieux colombier par la petite colombe volage.


LE NOUVEAU PATRON A LA NOUVELLE PATRONNE.


Voici le temps nouveau de retour avec le mois de juin, le temps où les jeunes garçons et les jeunes filles s’en vont partout se promener ensemble.

Les fleurs se sont ouvertes aujourd’hui dans les prés, et les cœurs des jeunes gens aussi, en tous les coins du monde.

Voici que les aubépines fleurissent et répandent une agréable odeur, et que les petits oiseaux s’accouplent.

Venez avez moi, douce belle, vous promener dans les bois ; nous entendrons le vent frémir dans les feuilles.

Et l’eau du ruisseau murmurer entre les petits cailloux et les oiseaux chanter gaiement à la cime des arbres :

Chanter chacun sa chansonnette, chacun à sa manière ; ils charmeront notre esprit et réjouiront notre cœur.


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