Revue des Deux Mondes6e période, tome 60 (p. 506-514).


X


Le lendemain, après le déjeuner, Archer put obtenir de May qu’elle vînt avec lui faire une promenade au Central Park. C’était un dimanche et, selon la vieille coutume de New-York, elle devait accompagner ses parents à l’église matin et après-midi ; mais Mrs Welland ferma les yeux sur cette infraction aux usages, car, le matin même, elle avait obtenu de sa fille de se plier aux longues fiançailles qui permettraient de constituer un trousseau brodé à la main, et comptant le nombre de douzaines nécessaires.

Le temps était exquis. Le long du Mail, la voûte des branches dépouillées se dessinait sur un fond de lapis, au-dessus d’une couche de neige étincelante. Les couleurs de May s’avivaient dans le froid, comme celles d’un jeune érable à la première gelée. Archer, fier des regards qu’elle attirait, oubliait ses perplexités secrètes dans la joie de la regarder.

— C’est une sensation délicieuse de s’éveiller le matin en respirant l’odeur des muguets ! dit-elle en souriant.

— Pardonnez-moi, si, hier, votre bouquet est arrivé en retard ; je n’avais pas eu le temps de passer chez la fleuriste le matin, répondit-il.

— C’est la preuve que vous les choisissez vous-même chaque jour. Pour rien au monde je ne voudrais que votre bouquet arrivât toujours à la même heure, comme un professeur de piano, car je saurais alors que vous l’avez commandé d’avance une fois pour toutes. Ainsi avait fait Lawrence Lefferts, lorsqu’il s’est fiancé avec la pauvre Gertrude.

— Ça leur ressemble, dit Archer, enchanté de cette fine remarque.

Et il se sentit assez sûr de lui-même pour ajouter :

— Quand je vous ai envoyé des muguets hier, j’ai vu quelques belles roses jaunes, et je les ai fait porter à la comtesse Olenska. Ai-je bien fait ?

— Comme c’est gentil ! Cela lui fait tant de plaisir quand on pense à elle ! Ce qui m’étonne, c’est qu’elle n’ait pas parlé de vos roses. Elle a déjeuné avec nous ce matin, et nous a dit que Mr Beaufort lui avait envoyé de magnifiques orchidées et que Mr van der Luyden avait fait venir pour elle de Skuytercliff toute une corbeille d’œillets. Il semble que ce soit nouveau pour elle de recevoir des fleurs. N’en envoie-t-on pas en Europe ? Elle trouve que c’est une coutume charmante.

— Mes fleurs auront été éclipsées par celles de Beaufort ! songea Archer, légèrement piqué. Puis il se souvint qu’il n’avait pas joint sa carte à l’envoi des roses, et regretta d’en avoir parlé. Il était sur le point de dire : « J’ai été voir votre cousine hier, » mais il hésita. Si Mme  Olenska avait passé sa visite sous silence, mieux valait faire comme elle. Tout cela prenait un air de mystère qu’Archer n’aimait qu’à moitié. Pour changer de sujet, il se mit à parler de leur mariage, de leur avenir, et de l’obstination de Mrs Welland à prolonger le temps des fiançailles.

— Rappelez-vous qu’Isabelle et Reggie Chivers ont été fiancés deux ans, Grace et Thorley près d’un an et demi ! Et puis, est-ce que nous ne sommes pas très bien comme nous sommes ?

C’était la réponse classique de toute jeune fiancée. Archer s’en voulait de la trouver un peu puérile dans la bouche de May, qui avait près de vingt-deux ans. Et il se demandait à quel âge les femmes « bien élevées » commençaient à penser par elles-mêmes.

— Nous pourrions faire beaucoup mieux que d’attendre : être ensemble tout à fait, voyager.

La figure de la jeune fille s’illumina : elle avoua qu’elle adorait les voyages. Mais sa mère ne comprendrait pas qu’on pût désirer ne pas faire comme tout le monde.

— Mais ne pas faire comme tout le monde, c’est justement ce que je veux ! insista l’amoureux.

— Vous êtes si original ! dit-elle, avec un regard d’admiration.

Une sorte de découragement s’empara du jeune homme. Il sentait qu’il prononçait exactement toutes les paroles que l’on attend d’un fiancé, et qu’elle faisait toutes les réponses qu’une sorte d’instinct traditionnel lui dictait, — jusqu’à lui dire qu’il était original.

— Original ? Nous sommes tous aussi pareils les uns aux autres que ces poupées découpées dans une feuille de papier plié. Ne pourrions-nous pas être un peu nous-mêmes, May ?

Ils s’étaient arrêtés l’un en face de l’autre, excités par la discussion. May le regardait, les yeux brillant d’admiration.

— Mon Dieu ! Vous voulez donc m’enlever ?

— Je ne demande pas mieux !

— Comme vous m’aimez, Newland ! Je suis si heureuse ! Nous ne pouvons pourtant pas agir comme des amoureux de roman, dit-elle en riant.

— Pourquoi pas ? Pourquoi pas ?

Elle parut un peu contrariée de son insistance. Elle sentait très bien que ce qu’il voulait était impossible, mais visiblement elle ne trouvait pas de raison à lui opposer.

— Je ne suis pas assez forte pour discuter avec vous ; mais ne serait-ce pas — comment dire ? — « mauvais genre ? » suggéra-t-elle doucement.

Elle avait conscience d’avoir énoncé l’argument sans réplique.

— Avez-vous si peur de paraître « mauvais genre ? »

— Mais oui, j’en serais fâchée. Et vous aussi, ajouta-t-elle, légèrement piquée.

Il restait silencieux, frappant nerveusement le bout de sa bottine avec sa canne. Il sentait qu’après tout elle avait trouvé le vrai moyen de clore l’incident. Elle reprit, rassurée :

— Vous ai-je dit que j’avais montré ma bague à Ellen ? Elle assure qu’elle n’a jamais vu une aussi jolie monture. Il n’y a rien de pareil rue de la Paix. Vous êtes tellement artiste, Newland !…

Le jour suivant, pendant qu’Archer, avant le dîner, fumait un cigare dans la bibliothèque, Janey vint le trouver. Archer, comme presque tous les jeunes gens de son monde, avait fait son droit, et avait maintenant un emploi dans l’étude d’un avocat distingué[1]. Il était revenu de l’étude ce jour-là d’assez mauvaise humeur, vaguement déprimé, et obsédé par l’idée que jusqu’à la fin de sa vie il ferait vraisemblablement toujours la même chose à la même heure, et dans le même cadre.

« Monotonie !… monotonie !… » soupira-t-il. Ce mot l’obsédait. En rentrant, ce soir-là, il ne s’était pas arrêté au cercle comme d’habitude. À la vue des grandes fenêtres derrière lesquelles les mêmes figures connues, coiffées des mêmes chapeaux haut-de-forme, se montraient toujours à la même heure, le courage lui avait manqué. Il devinait non seulement ce dont on parlait, mais comment chacun en parlait. Le duc de Saint-Austrey était naturellement le thème principal des conversations ; et sans doute on ne manquerait pas d’épiloguer sur l’apparition, dans la Cinquième avenue, d’une demoiselle aux cheveux teints, dans un petit coupé jaune canari attelé de deux cobs noirs — et Beaufort en porterait la responsabilité. En effet, « ces personnes, » comme on les appelait dans le milieu de Mrs Archer, étaient rares à New-York, et aucune d’elles, jusqu’à présent, n’avait osé se montrer dans sa propre voiture. Aussi, la veille, le coupé jaune ayant croisé l’attelage de Mrs Lovell Mingott, celle-ci avait à l’instant même donné l’ordre à son cocher de rentrer. Dire que cela aurait aussi bien pu arriver à Mrs van der Luyden ! se disaient les douairières en frissonnant d’horreur. Archer croyait entendre Lawrence Lefferts prophétisant la débâcle de la société…

Il leva brusquement la tête à l’entrée de sa sœur, puis, sans faire attention à elle, se replongea dans sa lecture. C’était le Chastelard de Swinburne, qu’on venait de lui envoyer de Londres.

Janey s’approcha du bureau chargé de livres, ouvrit un volume des Contes Drolatiques, fit la moue sur le vieux français et soupira :

— Quelles choses sérieuses tu lis !

Elle continuait à rôder autour de lui avec une mine mystérieuse ; énervé par son mutisme, il finit par lui demander :

— Tu as quelque chose à me dire ?

— Oui. Maman est très fâchée.

— Fâchée ? Contre qui ? À propos de quoi ?

— Miss Sophie Jackson sort d’ici. Elle a dit que son frère viendrait après le dîner. Elle n’a pas voulu raconter grand’chose, son frère le lui a défendu ; il veut nous donner tous les détails lui-même. Il est maintenant chez notre cousine van der Luyden.

— Pour l’amour du ciel, ma chère, de quoi s’agit-il ? Il faudrait être le bon Dieu pour comprendre tes énigmes.

— Allons, Newland, ne plaisante pas ; maman a déjà assez de chagrin que tu n’ailles pas à l’église.

Avec un geste agacé il se replongea dans son livre.

— Newland ! Écoute donc. Ton amie Mme  Olenska était à la soirée de Mrs Lemuel Struthers hier soir ; elle y est allée avec le duc et Mr Beaufort.

À ce nom, une colère irraisonnée s’empara du jeune homme. Il affecta de rire :

— Et bien ? Après ? Je savais qu’elle comptait y aller.

Les yeux de Janey sortaient de leurs orbites.

— Comment ? Tu le savais, et tu n’as pas essayé de l’empêcher, de l’avertir ?

— L’empêcher ? L’avertir ? — Il rit de nouveau. — Et de quel droit ? Ce n’est pas avec la comtesse Olenska que je suis fiancé !

Ces paroles lui sonnèrent étrangement aux oreilles.

— Tu te maries dans sa famille.

— Oh ! la famille ! la famille ! railla-t-il.

— Newland ! Est-ce que tu ne te soucies pas de la famille ?

— Pas pour un liard !

— Ni de ce que pensera notre cousine van der Luyden ?

— Pas pour un centime… si elle a des idées saugrenues de vieille fille.

— Mais, maman n’a pas des idées de vieille fille, dit sa sœur d’un air pincé.

Il aurait voulu crier : « Si ! elle en a, et aussi les van der Luyden, et nous tous, dès que la réalité nous effleure. » Mais il vit le long et doux visage de Janey s’assombrir et il regretta la peine inutile qu’il venait de lui infliger.

— Tant pis pour la comtesse Olenska ! Ne fais pas la sotte, ma petite Janey ! Je ne suis pas le tuteur de la belle Ellen !

— Non ; mais tu as demandé aux Welland d’avancer l’annonce de tes fiançailles, afin que nous puissions la soutenir, et c’est seulement pour faire plaisir à maman que la cousine Louisa l’a invitée à dîner.

— Eh bien ! Quel mal y avait-il à l’inviter ? C’était la plus jolie femme du salon ; grâce à elle, le dîner a été un peu moins morne que ne le sont en général les banquets van der Luyden.

— Tu sais que cousin Henry l’a invitée pour te faire plaisir, que c’est lui qui a obtenu de notre cousine de la recevoir ; et maintenant les voilà si bouleversés en apprenant qu’elle est allée chez Mrs Struthers, qu’ils retournent à Skuytercliff dès demain. Je crois, Newland, que tu feras bien de descendre au salon. Tu sembles ne pas comprendre ce que maman éprouve.

Newland trouva sa mère dans le salon, penchée sur son métier. Elle leva sur lui un regard troublé, et demanda :

— Janey t’a dit ?

— Oui. — Il sourit. — Mais je ne trouve pas que ce soit très sérieux.

— Le fait d’avoir froissé nos cousins ?

— Le fait qu’ils puissent se sentir froissés parce que la comtesse Olenska a été chez une femme qu’ils trouvent commune !

— Ils ne sont pas seuls de cet avis.

— Eh bien ! oui, d’accord, elle est commune ; mais on fait chez elle de la bonne musique, et ses réceptions du dimanche apportent une distraction à des gens qui meurent d’ennui.

— De la bonne musique ? Tout ce que je sais, c’est qu’il y avait chez elle, dimanche dernier, une créature qui est montée sur la table, et qui a chanté des choses comme celles qu’on chante dans les endroits où tu vas à Paris. On a fumé, et bu du champagne.

— Eh bien, après ? Tout cela est arrivé, et le monde continue à tourner.

— Je ne suppose pas, mon enfant, que tu défendes sérieusement la manière française de passer le dimanche ?

— Je vous ai souvent entendu, maman, vous plaindre de la tristesse maussade des dimanches à Londres, quand nous y étions !

— New-York n’est ni Paris, ni Londres.

— Ah, fichtre non ! soupira Archer.

— Tu veux dire sans doute que notre société est moins amusante que celle des villes d’Europe ? Peut-être as-tu raison ; mais nous sommes d’ici, et, quand on vient parmi nous, on doit respecter nos habitudes. Ellen Olenska surtout, puisqu’elle est revenue dans son pays pour échapper à la vie dissipée des sociétés plus brillantes.

Newland ne répondant pas, sa mère s’aventura à dire, après un moment de silence :

— Je vais mettre mon chapeau, et te demanderai de m’accompagner chez Louisa. Je veux la voir un instant avant le dîner.

Archer fronça le sourcil, mais elle insista, conciliante :

— J’ai pensé que tu pourrais lui expliquer ce que tu viens de me dire : que la société à l’étranger est différente, qu’on y est moins collet-monté, que la comtesse Olenska n’a peut-être pas cru froisser mes sentiments. Ce serait, tu sais, mon chéri, ajouta-t-elle avec une inconsciente habileté, dans l’intérêt même de Mme  Olenska.

— Chère maman, je ne vois vraiment pas en quoi cette affaire nous regarde. Le duc a mené Mme  Olenska chez Mrs Struthers ? Le fait est qu’il était venu voir Mme  Olenska avec Mrs Struthers. J’étais là. Si les van der Luyden veulent se disputer avec quelqu’un, le véritable coupable est sous leur toit.

— Se disputer ?… Newland ! Quelle expression ! Notre cousin, se disputer ? Et puis, le duc est un étranger, et leur hôte. Les étrangers ne connaissent pas nos habitudes. Comment les connaîtraient-ils ? Tandis que la comtesse Olenska est une New-Yorkaise, et devrait avoir égard aux sentiments de New-York.

— Eh bien, puisqu’il leur faut une victime, je vous permets de leur livrer la comtesse Olenska, s’écria Archer. Je ne me soucie pas du tout de m’offrir en holocauste pour expier les crimes de Mme  Olenska.

— Naturellement tu es tout entier du côté Mingott, répondit la mère d’un ton qui trahissait son irritation intérieure.

Le maître d’hôtel ouvrit les portières du salon et annonça : « Monsieur Henry van der Luyden. »

Mrs Archer piqua son aiguille et repoussa sa chaise d’un geste nerveux.

— Une autre lampe, ordonna-t-elle au domestique, pendant que Janey se penchait sur sa mère pour lui rajuster son bonnet de dentelle.

Mr van der Luyden apparut sur le pas de la porte, et Newland Archer s’avança pour le recevoir.

— Nous parlions justement de vous, mon cousin, dit-il.

Mr van der Luyden sembla déconcerté par ces paroles. Il retira son gant pour serrer la main des dames, et lissa son haut-de-forme avec un peu d’embarras, pendant que Janey avançait un fauteuil.

Archer continua en souriant :

— Et de la comtesse Olenska…

Mrs Archer pâlit.

— Une femme charmante ! Je sors de chez elle, dit Mr van der Luyden, rasséréné.

Il s’assit, déposa ses gants et son chapeau à côté de son fauteuil, selon le vieil usage, et continua :

— Elle a un véritable don pour arranger les fleurs. Je lui avais envoyé quelques œillets de Skuytercliff, et j’ai été émerveillé de la façon dont elle les a groupés. Au lieu de les masser en gros bouquets comme notre jardinier-chef, elle les avait dispersés, je ne saurais pas dire comment. Le duc m’avait prévenu ; il m’avait dit : « Allez voir avec quel goût elle a meublé son salon ! » Et c’est vrai. J’aurais bien voulu lui mener Louisa, si le quartier n’était pas si bohème.

À vrai dire, poursuivit Mr van der Luyden, appuyant sur son pantalon gris sa main décolorée, alourdie par la grande bague du Patroon, à vrai dire, j’étais allé la remercier du mot charmant qu’elle m’avait écrit à propos de mes fleurs, et aussi, — mais ceci entre nous, — pour lui donner un avertissement amical sur l’inconvénient de se faire mener dans le monde par le duc. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler.

Mrs Archer prit un air naïf :

— Le duc l’a-t-il menée dans le monde ?

— Eh, oui ! Vous savez ce que sont ces grands seigneurs anglais ; tous les mêmes. Louisa et moi aimons beaucoup notre cousin, mais on ne peut s’attendre à ce que des gens habitués à la vie des cours tiennent compte de nos petites distinctions républicaines. Le duc va où il s’amuse.

Mr van der Luyden fit une pause, mais personne ne prit la parole. — Il l’a menée, paraît-il, hier soir chez Mrs Lemuel Struthers. Sillerton Jackson est venu tout à l’heure nous raconter cette sotte histoire, et Louisa en a été un peu troublée. J’ai pensé que le plus court serait d’aller tout droit chez Mme  Olenska et de lui expliquer, très amicalement, ce que nous pensons à New-York. Il m’a semblé que je le pouvais sans indiscrétion, car le soir où elle a dîné chez nous, elle m’avait laissé entendre qu’elle accepterait mes conseils avec quelque gratitude. Et c’est ce qu’elle a fait.

Mr van der Luyden regarda autour de lui. À défaut d’un air de satisfaction que ne pouvait revêtir un visage aussi distingué, il eut un sourire de sereine bienveillance, que le visage de Mrs Archer se fit un devoir de refléter.

— Comme vous êtes bons tous les deux, mon cher Henry ! Newland sera particulièrement touché de ce que vous avez fait là pour lui et la chère May.

Elle jeta un regard à son fils, qui dit aussitôt :

— Je vous suis très reconnaissant, mon cousin ; mais j’étais sûr que Mme  Olenska vous plairait.

Mr van der Luyden le regarda avec une extrême affabilité.

— Je n’invite jamais chez moi, mon cher Newland, les gens qui ne me plaisent pas. Je viens de le dire à Sillerton Jackson. — Puis, ayant jeté un coup d’œil à la pendule, il se leva et ajouta : — Mais Louisa m’attend. Nous dînons de bonne heure pour mener le duc à l’Opéra.

Quand les portières se furent refermées sur leur cousin, le silence tomba sur la famille Archer.

— Bonté du ciel ! Que tout cela est romanesque ! finit par s’écrier Janey.

Personne n’avait jamais su ce que voulaient dire ses brusques sorties, et sa famille avait depuis longtemps renoncé à y rien comprendre. Mrs Archer secoua la tête en soupirant.

— Espérons que tout tournera pour le mieux, dit-elle, d’un ton qui signifiait visiblement le contraire. — Newland, il faut que tu restes à la maison pour voir Sillerton Jackson quand il viendra ce soir. Je ne saurais vraiment que lui dire.

— Ma pauvre maman ! Mais il ne viendra pas, dit son fils en riant, et en se penchant pour poser un baiser sur le front inquiet de sa mère.



  1. Aux États-Unis, les avocats s’associent, et cumulent les rôles d’avocats et d’avoués.