Association de Demi-Vierges Vol.I/XII

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XII


Balbyne ne manqua pas de parole à Simone. Outre qu’elle était une de ses bonnes amies, elle brûlait d’apprendre les circonstances qui l’avaient conduite à entrer dans l’association des demi-vierges.

Elle fut pleinement satisfaite. Les deux jeunes filles enfermées dans la chambre de Simone, celle-ci commença son récit.

« — Ah, ma mignonne, quelle vie que la mienne ! Te rappelles-tu notre couvent des Bleuets, où on nous élevait d’une façon si large et si indulgente, avec tous les égards dus aux grandes familles que représente la clientèle choisie de ce couvent. Déjà on nous traitait en petites femmes, on nous accoutumait aux usages du monde, on tolérait nos petits défauts et on applaudissait à nos amitiés naissantes. Ces amitiés ne tardaient pas à se transformer en passions pour certaines d’entre nous, et il me semble bien me souvenir que si tu quittas le couvent si tôt (tu avais près de quinze ans, n’est-ce pas), tu le fis par dépit de ce que Claire Harling, ma camarade de classe, t’avait délaissée pour te remplacer par Noémie Rinsbach, ta petite abhorrée.

— Oh, cette Noémie, une juive convertie.

— Une bien jolie fille, toujours au couvent, et qui inspire toujours des passions. Ta colère subsiste donc à son égard ?

— Oui, j’aimais sérieusement Claire, et Claire s’est moquée de moi à cause d’elle.

— Tu étais une enfant. Claire ne méritait pas ton amour. Elle se confiait à moi. Elle s’est toujours amusée avec les unes et les autres, sans affection réelle dans le cœur. Du reste, depuis sa sortie du couvent, elle brille parmi ses compatriotes de la colonie américaine et dédaigne la fréquentation de ses anciennes camarades. En voilà une qui n’entrerait pas dans les priekeuses !

— Crois-tu ?

— N’en doute pas. Qu’y ferait-elle ! Elle préfère les amours défendues entre filles, et chez nous, on va au naturel, on partage ses sensations avec l’homme.

— Pas d’histoires entre jupes ?

— Quelle saveur auraient-elles ? Je t’assure que lorsqu’on est venue à l’homme, le reste pâlit joliment. Mais, revenons à mon récit, la parenthèse ouverte à ton sujet n’est pas pour me disculper des très intimes relations que j’entretenais avec Reine de Grandpellier. Au contraire. Reine était pour moi ce que tu étais pour Claire, avec cette différence que j’adorais Reine et que dans votre duo Claire n’adorait qu’elle-même. Reine ne vivait de son côté que de mon adoration. Ces passionnettes, qui se satisfaisaient sensuellement, remplissaient notre âme et notre cœur de bonheur et nous faisaient trouver très agréable notre temps d’instruction aux Bleuets, quand tout à coup le bruit se répandit parmi nous, que le nouvel aumônier, l’abbé Tisse, avec lequel nous ne négligions pas de coqueter, après s’être emparé de là confiance de quelques-unes des plus hardies de nos compagnes, connaissait tout ce qui se passait entre nous et devait toutes nous interroger successivement au confessionnal. Il y eut de la peur d’abord, puis une curiosité très vive de savoir ce qu’il en résulterait. Deux amies avaient rompu leur attachement à la suite de leur confession, Berthe Harvincourt et Émilienne de Vercoulomb : un nuage d’hypocrisie pèse sur nous toutes. On dissimula ses entraînements, on attendit. Que se passait-il ? Successivement les amours entre élèves se dénouaient : les non initiées s’irritaient de ne pas en connaître la raison : l’abbé agissait lentement, avec prudence, avançant dans les cœurs, à mesure qu’il conquérait les esprits. Et mon tour arriva. À te dire vrai, déjà plusieurs fois en confession, j’avais essayé d’attaquer. À mon grand dépit, dès que j’entamais le chapitre intimité, l’aumônier intervenait par une phrase correcte qui coupait court à la confidence, interrogeait au lieu d’écouter et me renvoyait frustrée de mon espoir d’apprendre la sublime vertu qu’il possédait, et qui le rendait le maître de beaucoup d’entre nous. On s’étonnait beaucoup de ce que celles, redevenues chastes et honnêtes, de temps en temps étaient appelées dans le salon réservé à monsieur l’aumônier, pour y recevoir quelques bons conseils, ou retenues quelquefois dans la sacristie, et qu’elles en revenaient le teint très animé, les yeux très brillants, l’esprit tout heureux. Mon tour donc arriva. Ah, je compris vite ce qu’il en était, et je puis te répéter presque mot à mot cette confession, tant elle m’est demeurée gravée dans la mémoire et tant elle me produisit de l’effet. Mon acte de contrition murmuré, l’aumônier, qui me considérait à travers la lucarne, me dit :

— Mon enfant, parlons aujourd’hui de vous, de votre chère personne, et de là nous remonterons à vos pensées, à vos habitudes, afin de bien nous convaincre si le charme et le mérite, qui se trahissent en vous, peuvent vous ouvrir les lumineux horizons que le Seigneur réserve à ses élus. Vous me répondrez franchement et sans fausse honte.

— Oui, mon père, je ne vous cacherai rien, et depuis longtemps je désirais vous confesser mes plus secrètes rêveries.

— Bien, bien. Quel âge avez-vous ? À peu près dix-sept ans ?

— Je les ai depuis deux mois.

— Une petite femme, une vraie petite femme et j’en suis certain, en éprouvant déjà toutes les fièvres. Vous êtes grande, vous êtes développée, vous avez des yeux qui expriment bien des choses, enlevons les voiles qui vous couvrent, je vais traduire vos péchés, sans que vous me les révéliez, vous verrez, vous verrez. Votre chair est blanche, très blanche, n’est-ce pas ?

— Oui, mon père, très blanche et très soignée. Je me confesserai d’aimer beaucoup mon corps et de le trouver souvent très beau.

— Vous vous regardez donc ?

— Toutes les fois que je le puis.

— Et que regardez-vous de préférence ?

— Oh, j’ai beaucoup de préférences.

— Vraiment ! Dans ce cas, je vous aiderai. Vous regardez vos seins, qui poussent, mignonnets et fripons, doux fruits d’amour et de féminité, et votre cœur palpite, appelant l’aimé, l’élu qui les caressera, les baisera et jettera dans votre vie les frissons de la volupté.

— C’est vrai, c’est vrai, mon père.

— Vous touchez vos petits nénés vous les baisotez, et puis, vous cherchez autour de vous une amie complaisante qui comprenne les élans de votre chair et les satisfasse. Nous reviendrons sur ce sujet. Parlez maintenant de vos autres préférences ; je vous ai facilitée, mon enfant.

Tout en parlant, ses yeux me fouillaient à travers la lucarne, je les sentais courir sur mon corps, l’inondant de torrents de feu, et me faisant petite, sous cet examen de l’homme, je murmurai :

— Après les seins, mon père, j’abaisse mes regards vers le ventre, sur le nombril, et il me semble que j’ai là comme une étoile qui resplendit, prête à répondre à l’éclat des astres qui brillent au firmament, lesquels me représentent les nombrils d’amants qui cherchent à me connaître. Je me vois nue au milieu de la nuit, errant par le jardin, implorant les légions stellaires, et elles me répondent. De toutes parts, descendent des chérubins dont le nombril attire le mien, je m’extasie, et j’aperçois alors les petits cheveux qui frisottent au bas-ventre.

— Petits cheveux de fine soie, duvet brun ?

— Châtain brun, mon père.

— Assez épais, si on en juge par votre chevelure.

— Épais n’est pas le mot ; fourni, oui, très fourni.

— Petit persil d’amour, que les chérubins rêvés, gloutonnement, happent avec les lèvres, n’est-ce pas, et qu’ils ne lâchent que pour…

— Regarder au dessous. Là, mon père, je m’énerve, les yeux me brûlent, je fixe la fente que la Nature m’a donnée, je sens qu’elle cache un mystère, et ce mystère, en vain, je l’étudie, je ne puis le résoudre. Ma main se pose en travers.

— Sur le bouton de volupté ?

— Je ne sais pas si cela s’appelle ainsi, mais c’est exact, et j’agite, à moins que…

— À moins que ?

— À moins que d’autres yeux ne soient là pour me regarder, et qu’on ne me prête des lèvres pour remplacer ma main.

— Oui, oui, l’amie fatale ! Votre contemplation s’égare-t-elle ailleurs ?

— Elle franchit par dessus mes épaules, pour s’élancer à travers le dos et les reins, jusqu’à…

— Jusqu’à vos fesses, votre cul ; vous pouvez le dire à votre confesseur, à qui vous ne devez rien céler. Dites-le.

— Oui, mon père, jusqu’à mes fesses, jusqu’à… mon cul, et je trouve que la nature nous a dotées encore là de quelque chose de très beau, de très fin, malgré son utilité un peu sale.

— Pourquoi, dites-vous la nature, ma fille ? C’est Dieu qui vous a créée, comme Il a créé la nature, et ce n’est pas la nature qui vous a faite.

— Je m’exprimais mal. Me voyant dans toute ma personne, j’ai des envies folles de m’adorer, et… je cherche à ce qu’on m’adore.

— Votre chair parle donc ! Le Seigneur a édifié son temple dans le corps de la femme, pour que ses enfants se reconnaissent et s’aiment en l’aimant,

— Vous n’êtes pas sévère pour ces péchés confessés.

— Je suis le serviteur du Seigneur pour entendre la confession, juger de la sérénité des âmes, et pardonner, aimer en son nom.

— Aimer, mon père !

— Continuons, mon enfant. Nous n’avons pas fini avec votre personne ! Nous nous sommes arrêtés sur vos seins, sur votre nombril, nous avons effleuré votre fente, autel de l’épouse : vos reins sont souples ; votre cul est-il rebondi, avec des fesses rondes et bien plantées, ou bien est-il ample avec des fesses expirant en poires sur le gras de vos cuisses ! Je suppose qu’il n’est point maigre et peu charnu.

— Oh non, il est dodu et rond, comme deux pommes qu’on voudrait mordre toutes les deux en même temps ; il est satiné et coquet, il est si attrayant que mon amie…

— Ne parlons pas encore de cette amie ! Et votre raie s’évase-t-elle bien, ou se resserre-t-elle à ne se montrer que sous l’apparence d’un mince fil, démasquant les deux côtés de votre personne.

— Elle s’évase, elle s’évase, ne révélant point pour cela ses profondeurs, où tout un gros doigt du milieu peut errer et disparaître.

— Mazette, ma fille, vous avez un rude cul !

— Mon père.

— Voilà votre personne bien nue sous mes yeux, et je distingue tout ce dont nous n’avons pas parlé. Arrivons à vos pensées : devant un tel poème de grâces, que germe-t-il dans votre esprit ?

— Ceci est tout un monde, ou les idées sont mobiles comme les impressions, et à vouloir les saisir toutes, on risque de ne se souvenir d’aucune.

— Résumez : Je ne vous demande pas un journal. Là naît le mal ?

— Dam, je me trouve belle et je rêve qu’on me voit, qu’on me le dit, qu’on me le prouve.

— Qu’on vous le prouve !

— Sans doute. On me voit nue et des mains me galopent partout sur tout le corps ; puis on s’agenouille, on m’adore, on m’embrasse, on m’aspire.

— On vous aspire ?

— Oui, on colle les lèvres sur mes seins, dans mes cuisses, sur mon derrière.

— Dites, sur mon cul.

— Sur mon cul ! la langue de mon adorateur sort des lèvres, me mouille.

— Vous pensez à un adorateur !

— J’entrevois un homme à la place de mon amie.

— Confessez-vous de votre amie à présent.

— Dois-je la nommer ?

— Je comprends votre question ! Si je vous le demandais, vous le devriez ; mais, comme ces pratiques exigent de la discrétion, et qu’il faut la respecter, je ne vous le demanderai pas. Je vous dirai que je la connais, que je sais ce qu’il en est, et je vous la nommerai pour vous mettre à l’aise. Elle s’appelle Reine de Grandpellier, suis-je bien informé ?

— Oui, mon père, elle s’est confessée.

— Elle n’a pas dit votre nom, mon enfant, et si elle l’avait dit, je me serais tu, parce qu’elle l’aurait avoué au confesseur. Je le sais d’ailleurs. Vous avez donc avec Reine des relations… inavouables.

— Inavouables ! En effet, puisqu’elles sont défendues.

— Comment cela est-il venu ?

— Oh, il y a déjà longtemps. Je l’avais remarquée quand, toute gamine, elle jouait avec ses petites amies.

— Vous n’avez pas un bien grand écart d’âge.

— Six mois, mon père ; mais elle était plus petite et en retard dans ses classes. À sa première communion, elle était tout plein jolie ; mais je n’y pensais pas encore. C’est l’année dernière, au retour des vacances, que l’idée est née. Elle ne jouait plus, elle se promenait sérieusement avec d’autres, je l’ai regardée souvent et je lui ai fait de l’œil.

— De l’œil !

— Je cherchais sans cesse à la fixer dans les yeux et elle a répondu à mes regards. Nous éprouvions de l’émotion en passant ainsi à côté l’une de l’autre, sans nous rien dire, et nous comprenions bien ce que nous voulions. Nous devinions l’affection qui nous entraînait et que nous n’avions plus qu’à nous mettre d’accord. Un jour je lui écrivis ma déclaration et lui donnai un rendez-vous.

— Et vos maîtresses ?

— Oh, mes maîtresses, elles surveillent pour la forme ! Pourvu que nous observions les règles de convenances et de silence, que nous ne troublions pas nos classes et nos études, elles nous laissent bien tranquilles. Puis, il y a aussi des histoires sur elles.

— Mon enfant, n’accusez jamais.

— Non, mon père.

— Vous fîtes donc votre déclaration, que disiez-vous ?

— Pas beaucoup de chose, ceci : « Ma jolie Reine, ne trouves-tu pas que nous nous regardons depuis assez longtemps et que nous nous comprenons ? Je t’ai devinée et je suis sûre que de même tu m’as devinée. Quand on s’aime d’amour, on désire se caresser. Ce soir, après le coucher, je ferai la malade et je coucherai à l’infirmerie. Fais comme moi, nous nous y réunirons, et… nous serons bien heureuses.

— Et ce plan a réussi ?

— Sans difficulté. La chance voulut que nous fûmes les seules malades ; que la sœur infirmière, peu inquiète, se coucha et dormit de bonne heure. Reine était encore plus échauffée que moi, je pensais la rejoindre dans son lit, ce fut elle qui rentra dans le mien comme je m’apprêtais à le quitter.

— À ce moment, vous n’avez pas envisagé le péché ?

— Je ne songeais qu’à la sensation. Reine, sans un mot, avait glissé la tête sous ma chemise et me couvrait de baisers qui me secouaient tout le corps.

— Où embrassa-t-elle d’abord ?

— Mes petits cheveux, mon nombril, puis le bouton et la fente ; et là, sa langue se durcissant, on aurait dit qu’elle allait l’enfoncer dans mon ventre.

— Elle savait plus que vous ?

— Je l’ignore, mon père, nous n’avons jamais causé de ce que nous faisions.

— Comment, jamais causé ?

— Dès que nous étions ensemble, les baisers et les caresses ne s’arrêtaient plus.

— Après votre fente, elle vous a embrassé le cul ?

— Elle l’a léché à me l’avaler.

— Et vous, vous lui avez rendu ses caresses ?

— Pas la première fois, je n’en pouvais plus, j’étais morte d’ivresse.

— Vraiment, vous avez joui à ce point ?

— Oh, joui, joui et joui, que j’avais peur que le drap ne restât tout mouillé.

— Elle risquait de vous tuer, Et depuis ?

— Depuis, je lui ai rendu ses caresses ; mais elle préfère me les donner à les recevoir, et moi je préfère aussi les recevoir, ce qui nous a tout à fait unies.

— Vos pensées, à partir de ce jour, ont été absorbées par ces plaisirs coupables ?

— À peu près, oui, mon père, sauf les rêveries que je vous ai confessées.

— Passons à vos habitudes ! Vous comprenez ce que je veux dire ?

— Pas trop ! Des habitudes dans ce genre, en dehors de ma liaison avec Reine, je n’en ai pas.

— par habitudes, je vous demande, si, vous en tenant à votre amie, vous ne nourrissez pas des tentations qui vous poussent à vous satisfaire, soit personnellement, soit avec d’autres amies, par la parole, la vue ou le toucher. Vous avez l’habitude de vous regarder, puisque vous vous admirez ! N’avez-vous pas celle de regarder les autres, n’aimez-vous pas à faire étalage de polissonneries, ne vous faites-vous pas toucher et ne touchez-vous pas sous les jupes de vos amies.

— Si, si, mon père, je saisis : il est vrai que Reine et moi nous sommes deux bonnes et tendres amies, mais avec des caractères différents. Reine ne voit rien au dessus de moi, et moi, j’aime à parler des plaisirs de la chair, et en parlant de ces plaisirs, j’aime à faire voir et à voir, à me faire toucher et à toucher.

— Vous voyez que je devinais ! Je vais vous questionner et vous me répondrez.

— Oui, mon père.

— En quel lieu parlez-vous de ces plaisirs de la chair ? À l’étude, ou en récréation ?

— À l’étude, c’est difficile, on me remarquerait et on me punirait : en récréation, je craindrais de causer de la peine à Reine, quoique elle connaisse bien de mes manies. C’est au cabinet, au dortoir et à la chapelle.

— Au cabinet, voilà un local bien mal choisi.

— Dam, mon père, on est obligé de se contenter de ce qu’on a, et les cabinets du couvent sont de véritables petits salons.

— Vous n’y allez pas deux ensemble ? — De la même étude, non. On s’y rencontre avec d’autres, des élèves de la classe au-dessus ou de la classe au-dessous.

— Alors ?

— Ou l’on s’y donne rendez-vous. Et dès qu’on arrive, on va droit à celui qui a la porte entrebâillée, on sait qu’on y est attendue.

— Là, vous agissez, mais vous ne parlez pas.

— On a causé avant et on cause encore là. Ainsi hier, je m’y suis trouvée avec Stéphanie de Marinois, j’étais arrivée la première, elle a vu la porte à demi poussée, elle est entrée et elle m’a dit : « On est bien un peu à l’étroit par ici, mais on est bien tout de même pour des cochonneries ; dis, tu les aimes, les cochonneries, moi aussi, en dire et en faire. Dire et faire, voilà ma devise lorsque je serai hors des Bleuets. Qu’est-ce qu’on fabrique ensemble ? — Des patouillages et des lipettes. — Tu as du cul, toi, montre-le. — Et toi, tu n’en as pas ? — Un fessinier, il ne veut pas grossir. — Tu te calomnies, montre. — Après toi. — Tiens, vois, il est beau, eh ! — Oh oui, je comprends que Reine s’en toque. — Qu’est-ce que tu me fais ? — Je fourre mon doigt dans le trou pour sentir s’il y a quelque chose. — Cochonne. — Oh, tu peux m’en faire autant, avec Claire, nous y passons notre temps. — Eh bien y a-t-il quelque chose ? — Non, ton cul est un temple de Vestale. — Bête, montre le tien. — T’auras de la désillusion, il ne vaut pas celui de Reine. — Je ne le regarde jamais. — Tu as tort, il est, digne du tien. Tu vois le mien. — Oui, il est drôlichon, mais il n’est pas si vilain que tu dis. — Vrai, tu le penses. — Je te l’embrasse et te le suce pour te le prouver. — Enfonce ton doigt dedans. — Oh non, je n’aimerais pas qu’il y ait des traces. — Avec ça que je te demanderais la chose, si j’y sentais un embarras quelconque. »

L’aumônier m’interrompit et me dit :

— Ici, mon enfant, nous entrons dans le domaine de la corruption ! Vous avez grandement péché.

— Plus qu’avec Reine ?

— Oh tout autant. Vous entretenir de l’amour et croire à l’amour entre femmes, est criminel ! Vous allez contre les lois de Dieu qui a créé la femme pour l’homme, et non pour la femme.

— Ah, mon père, pourquoi n’y a-t-il pas d’homme au couvent ?

— Je vous répondrai là-dessus une autre fois. Achevez votre scène avec Stéphanie.

— Stéphanie est une comique qui rit de tout et qui amuse tout le monde. Elle tirait de tels effets de ses jupes et de son pantalon, que je m’enrageai à la caresser, moi qui suis plus portée sur le contraire. Je ne me lassais pas de lui tripoter les fesses, de lui gratter le bouton, elle me dit tout d’un coup : « Je crois que je vais jouir, mets-toi à genoux entre mes cuisses que je coule sur ta figure, ça me rendra folle de bonheur. » Je lui obéis et elle me serra la tête entre ses cuisses, en me disant de lui tenir le cul avec les deux mains, pendant qu’elle se grattait, et elle jouit. Nous nous sauvâmes après nous être arrangées, nous avions légèrement dépassé le temps dont nous disposions.

— Mon enfant, tout ce que vous me confessez là est très grave, et je pressens dans votre esprit des obscurités que je ne puis éclairer aujourd’hui. Je vous redemanderai demain au tribunal de la pénitence et nous reprendrons la suite de cette confession. Vous allez me promettre de vous observer et de demeurer insensible, sans quoi je vous refuserai l’absolution et vous interdirai l’entrée de la chapelle, ce qui vous occasionnerait de graves ennuis avec vos maîtresses. Vous m’entendez !

— Ah, mon père, je ne pourrai jamais.

— Attendez demain pour vous prononcer et soyez sage jusque là, me le promettez-vous ?

— Je tâcherai.

— Il faut me le promettre.

— Je le promets, mon père.

Il me donna une lourde pénitence de prières et je sortis du confessionnal, pour entendre dire par une de nos maîtresses :

— Ah, quel bonheur pour la maison d’avoir un tel aumônier ! Il fera des saintes de toutes nos chères enfants. Il les retient au confessionnal, jusqu’à ce qu’il ait bien pénétré leur âme, et ensuite il les instruit et les dote de toutes les divines vertus.



FIN DU PREMIER VOLUME