Annales de pomologie belge et étrangère/Prune Impériale violette



Prune impériale violette.


(Spécimens récoltés sur pyramide.)

Les variétés du genre prunier sont très-nombreuses dans les nomenclatures françaises ; Merlet, la Quintinie et Duhamel mentionnent une foule de Damas, de Perdrigons, de Diaprées, d’Impériales, et autres prunes, dont la plupart sont peu cultivées en Belgique. Nous ne devons pas le regretter au point de vue des fruits de table ; nos jardins sont assez riches en variétés de premier ordre, et nous n’avons, sous ce rapport, que l’embarras du choix, depuis surtout que l’Amérique, où cette culture se fait sur une très-grande échelle, nous a envoyé beaucoup de variétés précieuses. Mais il n’en est pas de même de la culture des vergers, qui fournit au commerce les fruits secs, d’une si grande importance dans l’économie domestique. Cette industrie est florissante dans les vallées de nos provinces méridionales, où l’on a toujours cultivé pour cet usage le Quëtsch ou Koëtsche ordinaire, connu dans ces contrées sous le nom inexact d’Altesse ; cette variété est très-productive sans doute, mais laisse beaucoup à désirer sous le rapport de la qualité et du poids. Il en résulte la nécessité de recourir à la France pour les fruits de choix : on les importe de Bordeaux spécialement, en assez grande quantité et à des prix fort élevés.

Dans l’intérêt du progrès de nos cultures, il serait donc important de rechercher les variétés fertiles de qualité supérieure, et analogues au Quëtsch sous le rapport du goût, de la couleur et de la forme.

Ces conditions paraissent réunies dans les prunes Diaprées violettes et Impériales violettes, qui se ressemblent beaucoup, mais qu’il ne faut pas confondre. La première mûrit au commencement d’août ; la seconde, dont nous nous occupons ici, est une variété du mois de septembre.

Cette prune est grosse, ovale allongée, suspendue à une queue longue de 25 à 27 millims, vert grisâtre, placée dans une cavité assez profonde, étroite et arrondie. Le sillon est bien prononcé, quoique peu creusé. Le point pistillaire est roux, assez large, très-apparent, concave. La peau, violette et fleurie, est épaisse et se détache avec quelque difficulté de la chair. Celle-ci est ferme, succulente, vert jaunâtre, remplie d’un jus abondant, sucré et d’un goût relevé. Le noyau est ovale, pointu à son sommet et obtus à sa base ; il mesure 30 millimètres en hauteur, 17 en largeur et 11 en épaisseur ; les arêtes du ventre sont obtuses, crénelées, divisées par un sillon étroit et profond, celles du dos sont obtuses ; les joues sont convexes et rugueuses ; il se détache bien de la chair, à laquelle il n’est adhérent que par ses extrémités.

La Quintinie estimait tellement ce beau fruit, que dans la liste des premiers pruniers à planter dans un jardin de peu d’étendue, il place l’Impériale violette en troisième ligne, immédiatement après la reine-Claude[1]. Cet auteur affirme qu’elle est également bonne à manger crue ou en pruneaux. Merlet cite aussi les Impériales comme propres à ce dernier usage.

Dans le courant de cet automne (1853), nous avons vérifié ces allégations par quelques essais comparatifs. L’Impériale violette séchée, soumise au jugement de la commission royale de pomologie, s’est trouvée au moins égale en qualité à la Quëtsch ordinaire.

En poids, nous avons constaté les résultats suivants, sur trente-cinq fruits de chaque variété :

Quëtsch
130 grammes.
Prune de Bordeaux ou d’Agen
250 grammes.»
Impériale violette
300 grammes.»

Il serait donc intéressant de chercher à faire sortir la variété qui nous occupe, du cadre des fruits de jardin pour l’introduire dans la grande culture, et d’essayer sa fertilité dans les vergers. Nous en possédons quelques arbres en espalier au nord-est ; à cette exposition, elle n’a jamais été sujette à l’alternat des récoltes ; depuis vingt ans, celles-ci sont aussi abondantes que régulières.

L’arbre de l’Impériale violette n’est pas de première grandeur, mais il est vigoureux et d’une grande fertilité ; il manque rarement de donner.

Les rameaux sont assez longs, rouge brun du côté du soleil, verts, un peu violacés du côté opposé, surtout vers la cime ; le vieux bois est brun, tiqueté de très-petits points gris.

Le bouton est pointu, écarté de la branche par un support peu élevé.

Les feuilles sont ovales lancéolées, pointues par les deux extrémités, dentelées régulièrement et finement.

Les fleurs sont assez grandes et leurs pétales arrondis.

A. Royer.

  1. Instruction pour les jardins, etc., édition de 1740, deuxième volume, page 405.