Maison Aubanel père, éditeur (p. 166-167).

XV


La communauté des Sœurs de Notre-Dame-de-la-Garde prospéra, grâce au dévouement des nouvelles religieuses, mais aussi à cause des ressources abondantes que leur procurait l’inépuisable trésor de la fondatrice, mis en commun pour le bénéfice de l’œuvre.

Des demandes affluèrent de partout sur la Côte pour la fondation de missions. On dut parer aux plus pressantes sollicitations d’abord, mais dans la suite quatorze maisons furent établies, à mesure que se faisait le recrutement de la communauté.

Des âmes d’élite vinrent de toutes les parties du pays se joindre aux fondatrices et, bientôt, la communauté atteignit son plein développement.

Mère Saint-Vincent-de-Paul faisait une visite bisannuelle à chaque mission, où on la voyait toujours arriver comme la messagère du Seigneur.

Elle n’avait rien perdu de sa remarquable beauté sous l’habit religieux. L’empreinte de la douleur qui se reflétait dans la mélancolie de ses yeux, ajoutait encore au charme qui se dégageait de sa personne. Elle portait son âme sur sa figure, comme le faisaient remarquer tous ceux qui bénéficiaient de sa présence.

Le bon ancien curé de la Rivière-au-Tonnerre, devenu le chapelain de la communauté, disait souvent à ses petites Sœurs :

— Le bon Dieu peut maintenant venir me chercher. J’ai accompli ma mission et n’attends plus que le mot d’ordre de mon Juge : « Viens, bon et fidèle serviteur, viens recevoir la récompense que je t’ai préparée depuis le commencement du monde. » Il s’éteignit doucement à l’âge de quatre-vingt-quatorze ans, entouré des petites Sœurs ; son corps repose maintenant dans la crypte de la modeste église blanche de sa paroisse, où il avait manifesté le désir de dormir son dernier sommeil.