Œuvres politiques de Machiavel (Louandre)/Avertissement

Traduction par Jean Vincent Périès.
Œuvres politiques de Machiavel, Texte établi par Ch. LouandreCharpentier (p. --vi).
AVERTISSEMENT
SUR CETTE ÉDITION


La politique de l’Italie est résumée tout entière par deux hommes, Dante et Machiavel : l’un qui représente le pacte de Charlemagne et tout le moyen âge ; l’autre qui représente la renaissance et les aspirations de l’Italie moderne. Dante fait partie depuis longtemps de cette bibliothèque. En donnant aujourd’hui les œuvres politiques de Machiavel, nous complétons en quelque sorte l’histoire de la tradition italienne ; mais ce n’est pas seulement par l’influence posthume qu’il a exercée sur le mouvement de la péninsule que le publiciste de Florence a droit à l’intérêt des lecteurs français ; c’est aussi parce que, dans le livre du Prince et les Discours sur les Décades de Tite-Live, il a laissé une de ces œuvres qui, marquées jusque dans leurs erreurs au coin du génie, font date dans l’histoire de l’esprit humain.

L’ardeur extrême avec laquelle ces deux ouvrages ont été attaqués ou défendus témoigne de toute leur importance. On peut dire qu’ils n’ont pas vieilli ; car, dans les jours agités comme dans les jours de calme, dans les monarchies comme dans les républiques, on y trouve toujours des vues profondes qui s’appliquent exactement à la situation présente ; et à côté de cette curiosité qui s’attache aux productions justement célèbres, on y rencontre cet enseignement pratique qui ressort de l’observation des faits.

Par ces deux livres, le Prince et les Discours sur Tite-Live, on connaît tout entier le publiciste le plus étonnant qu’ait produit non-seulement l’Italie, mais l’Europe elle-même. Nous avons écarté de ces œuvres politiques les opuscules très-accessoires, tels que le Discours sur la réforme du gouvernement de Florence et d’autres du même genre, parce qu’ils se rattachent à des faits secondaires, et qu’ils n’ajoutent rien aux théories développées dans le Prince et dans les Discours sur Tite-Live. Nous avons également écarté les Légations, parce qu’elles ne présentent, quoi qu’on en ait dit, qu’un fort médiocre intérêt ; qu’elles auraient besoin, pour être comprises, d’un commentaire perpétuel, l’un au point de vue de l’histoire d’Italie, l’autre au point de vue de l’histoire de France, et que, même à l’aide de ce commentaire, on ne relirait pas volontiers, ainsi que l’a dit Ginguené, cette collection un peu diffuse.

Nous avons placé en tête de ce volume une Vie de Machiavel, composée, autant que possible, sur les documents eux-mêmes, et à la suite de cette Vie l’histoire des œuvres politiques et une appréciation de ces œuvres, dans laquelle nous nous sommes efforcé de résumer le plus succinctement possible, et toujours avec impartialité, les jugements qui en ont été portés par la critique ; enfin nous avons reproduit, sauf quelques corrections de langage, la traduction de M. Périès, parce qu’elle est toujours parfaitement exacte, et qu’elle a en Italie une autorité toute classique.