Œuvres complètes de Theophile (Jannet)/Quand j’aurai ce contentement

STANCES.


Quand j’auray ce contentement
De te voir sans empeschement,
Object unique de ma joye,
Cher maistre de ma volonté,
À quoy voudras-tu que j’employe
Les heures de ma liberté ?

Je ne veux point servir de nombre,
Suyvant après toy comme une ombre :
Dès qu’un maistre que j’aymois bien
M’eut traitté dans ceste coustume,
Les douceurs de son entretien
Me tournerent en amertume.

Il est vray qu’un sort malheureux
Par un astre bien tenebreux
Conduisoit le train de ma vie,
Quand les Dieux, touchez de pitié,
Malgré les hommes et l’envie,
Me donnerent ton amitié.

Depuis, un insensible orgueil
De voir mes malheurs au cercueil
M’a donné tant d’ingratitude,
Que je ne puis sans déplaisir
Permettre que la servitude
Prenne une heure de mon loisir.