Joseph Joubert, Pensées 1850




PENSÉES
ESSAIS ET MAXIMES
DE J. JOUBERT.


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TITRE PRÉLIMINAIRE[1].

L’AUTEUR PEINT PAR LUI-MÊME.




J’ai donné mes fleurs et mon fruit : je ne suis plus qu’un tronc retentissant ; mais quiconque s’assied à mon ombre et m’entend, devient plus sage.


Je ressemble en beaucoup de choses au papillon : comme lui j’aime la lumière ; comme lui j’y brûle ma vie ; comme lui j’ai besoin, pour déployer mes ailes, que dans la société il fasse beau autour de moi, et que mon esprit s’y sente environné et comme pénétré d’une douce température, celle de l’indulgence ; j’ai l’esprit et le caractère frileux.

J’ai besoin que les regards de la faveur luisent sur moi. C’est de moi qu’il est vrai de dire : « Qui plaît est roi, qui ne plaît plus n’est rien. » Je vais où l’on me désire pour le moins aussi volontiers qu’où je me plais.

J’ai de la peine à quitter Paris, parce qu’il faut me séparer de mes amis, et de la peine à quitter la campagne, parce qu’il faut me séparer de moi.

J’ai la tête fort aimante et le cœur têtu. Tout ce que j’admire m’est cher, et tout ce qui m’est cher ne peut me devenir indifférent.

Philanthropie et repentir est ma devise.

J’aime peu la prudence si elle n’est morale. J’ai mauvaise opinion du lion depuis que je sais que son pas est oblique.

  1. La plupart des Pensées avaient été, pour une nouvelle édition, disposées dans un meilleur ordre et sous un nombre de titres moins considérable par les soins du premier éditeur. Nous suivons religieusement son travail. Les Pensées inédites sont indiquées par un astérisque.