Poésies complètesLemerre1 (p. 89-92).


VIRE ET LES VIROIS

Je croy que quelquefois cherchant ses aventures,
Ayant en Thessalie été pâtre Apollon,
Qu’il vint se pourmener jusqu’aux monts de Bellon
Et jusqu’aux Vaux de Vire et jusqu’aux Vaux de Bures.

(VAUQUELIN DE LA FRESNAYESonnets 10).


Qu’il fait bon aller en rimant
Des Vaux de Vire aux Vaux de Bures !
Pour un poète bas-normand,
Qu’il fait bon aller en rimant !
Il y trouve le sentiment
D’Apollon chercheur d’aventures.
Qu’il fait bon aller en rimant
Des Vaux de Vire aux Vaux de Bures !


Connaissez-vous maître Olivier ?
C’était un vieux foulon de Vire.
Il ne foulait que son cuvier.
Connaissez-vous maître Olivier ?
Quant aux finesses du métier,
Il savait chanter, boire et rire.
Connaissez-vous maître Olivier ?
C’était un vieux foulon de Vire.

Connaissez-vous maître Le Houx ?
C’était un avocat de Vire.
Il buvait du sec et du doux ;
Connaissez-vous maître Le Houx ?
Il avait pris son nom du houx
Qu’aux cabarets on voit reluire.
Connaissez-vous maître Le Houx ?
C’était un avocat de Vire.

Connaissez-vous Thomas Sonnet ?
C’était un médecin de Vire.
Il tournait fort bien un sonnet ;
Connaissez-vous Thomas Sonnet ?
Aux malades il ordonnait
De ne jamais boire du pire.

Connaissez-vous Thomas Sonnet ?
C’était un médecin de Vire.

L’Olivier, le Houx, le Sonnet
Sont : Paix, Cabaret, Poésie.
Tout bon rimeur aime et connaît
L’Olivier, le Houx, le Sonnet.
Dame Raison perd son bonnet
Lorsque la rime est bien choisie.
L’Olivier, le Houx, le Sonnet
Sont : Paix, Cabaret, Poésie.

Vire est un lieu délicieux,
Vire est une ville normande ;
Ce n’est pas le séjour des Dieux.
Vire est un lieu délicieux,
Mais, ce que j’aime beaucoup mieux,
La paix que l’on y trouve est grande.
Vire est un lieu délicieux,
Vire est une ville normande.

Les cabarets y sont nombreux,
Et les buveurs y sont solides.
Bien plus qu’autrefois dans Évreux
Les cabarets y sont nombreux.

À Vire point de cerveaux creux,
Mais on y voit des verres vides.
Les cabarets y sont nombreux,
Et les buveurs y sont solides.

C’est le frais berceau des chansons
Et la mère du vaudeville ;
Les foulons percent les poinçons,
C’est le frais berceau des chansons ;
Les plaideurs s’y font échansons,
Les médecins dînent en ville.
C’est le frais berceau des chansons
Et la mère du vaudeville.

Qu’il fait bon aller en rimant
Des Vaux de Vire aux Vaux de Bures !
Pour un poète bas-normand,
Qu’il fait bon aller en rimant !
Il y trouve le sentiment
D’Apollon chercheur d’aventures.
Qu’il fait bon aller en rimant
Des Vaux de Vire aux Vaux de Bures !

(1846).