Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres/9/Xénophane

J. H. Schneider, Libraire (Tome IIp. 280-282).
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Livre IX


XENOPHANE.



Xenophane, fils de Dexius, ou d’Orthomene au rapport d’Apollodore, nâquit à Colophon. Timon parle de lui avec éloge.

Xenophane moins vain, & le fleau d’Homere par ses critiques. Chassé de sa patrie, il se réfugia à Zancle en Sicile, & de là à Catane. Selon les uns, il n’eut point de Maître ; selon les autres, il fut disciple de Boton d’Athenes, ou d’Archelaus selon quelques-uns. Sotion le croit contemporain d’Anaximandre.

Il composa des poésies élégiaques & des vers Iambes contre Hesiode & Homere, qu’il critique sur les choses qu’ils ont dites des Dieux. Il déclamoit lui-même ses vers. Au reste il mourut fort âgé ; temoignage qu’il rend lui-même dans ces vers :

Il y a déjà soixante-sept ans que la Grece vante mes lumieres, & dès avant ce tems-là j’en comptois vingt-cinq depuis ma naissance, si tant est que je puisse supputer mon âge avec certitude.

Il supposoit quatre élemens, dont toutes choses sont composées, & admettoit des mondes infinie, qu’il disoit n’être sujets à aucun chagement. Il croyoit que les nuées sont formées de vapeurs que le soleil éleve & soutient dans l’air ; que le substance divine est sphérique & ne ressemble point à l’homme ; qu’elle voit & entend tout, mais ne respire point ; qu’elle réunit tout en elle-même, l’entendement, la sagesse & l’éternité. Il est le premier, qui ait dit que tout être crée est corruptible. Il définissoit l’ame un Esprit, & mettoit les biens au-dessous de l’entendement. Il étoit dans l’opinion qu’on ne doit approcher des Tyrans, ou en aucune façon, ou avec beaucoup de douceur. Empedocle lui ayant dit qu’il étoit difficile de rencontrer un homme sage, Vous avez raison, répondit-il ; car pour en trouver un, il faut être sage soi-même. Sotion prétend qu’avant lui personne n’avança que toutes choses sont incompréhensibles ; mais il se trompe. Xénophane a écrit deux milles vers sur la fondation de Colophon & sur une colonie Italienne, envoyée à Elée. Il étoit en réputation vers la LX. Olympiade.

Demetrius de Phalere, dans son livre de la Vieillesse, & Panœtius le Stoïcien, dans son ouvrage de la Tranquillité, racontent qu’il enterrra ses fils de ses propres mains, comme Anaxagore. Il pa^roït, suivant ce que dit Phavorin, livre premier de ses Commentaires, que les Philosophes Pythagoriciens Parmenuscus & Orestade pratiquement la même chose à l’égard de leurs enfans.

Il y a eu un autre Xénophane de Lesbos, Poëte en vers Iambes. Voilà ceux qu’on appelle Philosophes divers.