Tintin-Lutin/Le Paysagiste

, Fred Isly
Félix Juven (p. 7-9).

Le Paysagiste
Rodrigue


Un bon peintre est un homme fort utile
Qui reproduit à l’eau ou bien à l’huile,
Paysages, scènes ou animaux
Dont il compose de jolis tableaux.
Il se lève dès l’aube et court aux champs
Pour admirer un beau soleil levant
Qui jette ses rayons d’or dans les branches,
Puis il s’installe, retrousse ses manches
Et se met au travail avec ardeur
Sous le charme de la nature en fleur.
Mais un travail acharné vous fatigue
Et notre artiste (il se nomme Rodrigue)



Voyez comme il se tire d’embarras


Sur le gazon se repose un moment.
Avouez que vous en feriez autant.
Tintin, que fait-il dans tout ceci,
Dites-vous ? — Patience, le voici,
Qui, l’œil brillant, pétillant de malice,
Prêt à faire quelque niche, se glisse
Près de Rodrigue étendu sur le sol,
Assoupi et ronflant en clé de sol.
Il lui chipe un pinceau et sa palette,
Car tout d’un coup il s’est mis dans la tête
Que lui aussi saurait faire un tableau. —
Il est certain que peindre c’est très beau,
Lorsque l’on sait, mais Tintin ne sait pas
Et, ce qui lui cause un peu de tracas,



Je vous laisse à penser l’étonnement du fermier


C’est qu’il lui manque, chose indispensable,
Une toile. — Ah ! le petit misérable !
Voyez comme il se tire d’embarras
En se servant du gros ventre à poil ras
De Blanchette, une bonne et douce vache
Au museau large, à la robe sans tache
Qui, tout près, ruminait paisiblement.
.......................
Je vous laisse à penser l’étonnement
Du fermier quand, devant l’habitation,
La pauvrette fit son apparition
Avec le beau chef-d’œuvre de Tintin.
Il fallut travailler jusqu’au matin
Pour délivrer la malheureuse bête
De la couleur de l’affreuse vignette.