Revue Musicale de Lyon 1904-03-16/Nouvelles Diverses

Texte établi par Léon Vallas (p. 11-12).

Nouvelles Diverses

La Société nationale de musique a donné, samedi soir, dans le local de la Schola Cantorum, à Paris, la première audition de trois Sonatines d’Automne, Crépuscule candide, les Trois clefs, Caresses tristes, écrites sur des poésies de Camille Mauclair, par M. Mariotte, le distingué chef d’orchestre de la Symphonie lyonnaise, qui ont valu à l’auteur et à ses deux interprètes, M. Jemain, pour la partie de piano, et Mme Marguerite Mauvernay, professeur de chant à notre Conservatoire, le plus vif et le plus éclatant succès.

Un admirateur passionné des Huguenots fait un procès au directeur d’un grand théâtre de Belgique pour n’avoir pas donné dans son intégralité le chef-d’œuvre de Meyerbeer. Il réclame : 1o Le prix de sa loge ; 2o 100 fr. de dommages-intérêts ; 3o une représentation complète pour lui tout seul.

On ne dit pas si le réclamant est armé d’un pouvoir d’outre-tombe du compositeur : toujours est-il que l’affaire va se plaider à Anvers.

Un de nos confrères de l’Ouest-Artiste obnubilé par la musique d’Ambroise Thomas dont on abuse quelque peu à Nantes ; a occupé une triste soirée de carnaval à écrire la romance parodie que nous reproduisons ci-dessous et qu’il a dédiée à M. Étienne Destranges, notre confrère, dont les travaux de musicographie sont bien connus et très appréciés :

(Air connu)

Connais-tu le Monsieur, qu’a composé Mignon
Hamlet et le Caïd, et beaucoup d’autres choses
Qui fût aimable et doux, malgré son air grognon
Dont le nom seul évoque un frais parfum de roses
Et qu’est mort décoré
Chamarré et plaqué
Tout accablé d’honneurs
Et de bons droits d’auteurs ;
Qui fut chef du Conservatoire
Et dont Monsieur Dubois tiens la place aujourd’hui
C’est lui ! (soupir)
C’est lui que pour notre Gloi-oire
Toujours, toujours on devra-a,
Maintenir au répertoi-oi-oi-re…
Thomas !
Oui, Thomas !  !

Le nouvel opéra de M. Giacomo Puccini, Madame Buterfly « tragédie japonaise » en deux actes, sur lequel on fondait tant d’espérances, a subi à la Scala de Milan une chute complète et irrémédiable, à ce point que les auteurs ont cru devoir le retirer sitôt après la première représentation. À qui attribuer ce fâcheux résultat ? Aux librettistes, MM. Luigi Illica et Giuseppe Giacosa ? Au compositeur ? Sans doute à tous ensemble. En tout cas, on ne saurait s’en prendre à l’interprétation, qui, de l’aveu général, a été excellente.

Voici, à titre de curiosité, l’opinion d’un des doyens de la critique française, M. Arthur Pougin, sur le prélude de Tristan (Le Ménestrel du 6 mars).

« Je ne suis pas, je dois le confesser, de ceux qui se pâment devant le prélude de Tristan et Isolde, bien que je l’aie entendu un certain nombre de fois et que je sois à même de le bien connaître. C’est une page interminable de musique plus ou moins descriptive, sans plan ni conduite, qui se déroule sans pitié pour l’auditeur, et qui n’a aucune raison pour arriver à une conclusion, car elle pourrait durer ainsi, sans plus ni moins d’intérêt, pendant un nombre d’heures incalculable. Rendons grâce encore à Wagner d’avoir bien voulu condescendre à en limiter la durée. »