Portraits de femmes (Selden)/Élizabeth Browning

G. Charpentier (p. 251-274).


ÉLIZABETH BROWNING




I


Ce n’est pas certainement par l’ampleur du souffle poétique que notre époque se distingue, et cela se voit de reste à l’étalage de nos libraires.

Voici pourtant un roman en vers, un long poëme où l’auteur, avec une témérité toute féminine et toute anglaise n’a pas craint de s’avouer poëte et de justifier cette prétention en se montrant tel. Quoi qu’on puisse dire, Elizabeth Browning estime que la race des poëtes n’est point éteinte ; elle croît et prouve que l’on en trouve encore en dehors des « songes-creux, des diseurs de bonne Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/252 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/253 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/254 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/255 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/256 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/257 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/258 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/259 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/260 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/261 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/262 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/263 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/264 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/265 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/266 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/267 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/268 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/269 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/270 Page:Selden Camille - Portraits de femmes.djvu/271 comprimer en elle toute supériorité naissante et, de ce qu’elle est femme et vouée au métier de femme, on ne se croit pas, nécessairement, tenu à la condamner à l’ignorance, à la confiner dans son infériorité native ; on ne lui demande que de ne point négliger pour cela ses devoirs naturels, et on ne la blâme que si, ayant un mari et des enfants, elle cesse d’être épouse et mère. Ainsi vécut et pensa Élizabeth Barret Browning, morte il y a six ans, aussi admirable par sa conduite privée que par son talent public, aussi noble de caractère que d’esprit. Après de grands malheurs, de longues études et une jeunesse irréprochable, elle avait épousé un homme digne d’elle, poëte aussi, et qui l’adorait. On trouvait en elle une helléniste accomplie, versée dans toutes les connaissances, passionnée pour toute science, maîtresse des principales langues et de toutes les grandes littératures anciennes et modernes. Mais on trouvait aussi en elle une femme dévouée, attachée, comme la plus ordinaire des ménagères, au bonheur des siens et aux devoirs de sa maison. Ce qui lui a manqué, c’est la santé, c’est la force physique. Son corps était trop faible pour son âme ; les nerfs détraqués et endoloris, presque poitrinaire, elle a passé sur son lit les plus belles années de sa vie ; l’intensité dévorante de ses idées et de ses sentiments est partout visible dans son livre ; la lame usait le fourreau. Il reste d’elle ce livre ; elle est l’égale de Keats, de Schelley et de Tennyson : c’en est assez.