Pensées d’août/Sonnet à madame la M. de C…

SONNET


À madame la M. de C… (la marquise de castries)[1]

qui est à dieppe.


D’ici je vous voyais en fauteuil sur la plage,
Roulant, assise et Reine, aux flots que vous rasez,
Et la vague, baisant vos pieds tranquillisés,
Venait se plaindre, hélas ! de leur lent esclavage.

Et, si l’une arrivait grosse et d’un air d’orage,
Ce bras, qui parle encor lorsque vous vous taisez,
Plus beau des mouvements à vos pieds refusés,
D’un geste l’abattait en écume volage.

Mais je ne songeais pas au bel enfant Roger,
Qui, comme un page en feu qui protège une Reine,
Va canonner la vague, et, parant le danger,


Triomphe et rit ; — et Vous, heureuse dans la peine,
Une larme eu vos yeux, devant la mer lointaine,
Sur la mer du passé vous êtes à songer !

Paris, août.

  1. Morte depuis duchesse de Castries ; personne aimable, spirituelle, qui se laissa emporter sur la fin de la Restauration à une passion romanesque ; revenue d’Italie malade ou plutôt infirme, à demi paralysée, elle conservait toute sa grâce, son goût vif pour les choses de l’esprit et du cœur.